Les villes fantômes de Sibérie (une vraie réalité)

Frédérique – des bises à toi – m’envoie un lien exceptionnel dont je vous fais aussitôt profiter (regarder ici). Ces photos démentielles ont été prises en Sibérie, cette région de Russie grande comme 24 fois la France. Ce pourrait être l’une des parties les plus belles du monde, cela devrait l’être, et sans le moindre doute, ce l’a été pendant un temps qui n’est pas le nôtre. Voyez où nous en sommes. Des villes-fantômes, mais qui sont habitées. Des villes détruites à la racine par la folie humaine, qui n’annoncent aucun printemps. Des villes d’après le grand désastre, d’avant le grand désastre, des villes totalement désastreuses.

Il vous sera facile de lire les légendes en anglais, et de toute façon, les images parlent. La Sibérie n’est pas un pays pauvre. C’est un pays dévasté par l’incurie, la corruption, la cupidité et la folie. Imaginez plutôt ce qui se passe ailleurs, là où l’on survit avec un euro par jour. Évidemment, ce n’est pas drôle. Je me dis une nouvelle fois que nous profitons comme de grossiers imbéciles que nous sommes tous des derniers jours de Pompéi. Mais ceux de Pompéi ignoraient l’éruption qui allait les engloutir. Nous savons. Nous avons en tout cas les moyens de savoir. Où l’on voit que savoir n’a pas le moindre sens chez les humains. Nous ne voulons rien lâcher sur rien, et nous allons tout perdre.

Désolé d’écrire des mots de cette sorte à l’entrée d’un week-end que je vous souhaite heureux. Le plus incroyable est là : on peut être heureux et rire en « sachant » tout cela. Cela m’arrive, oui.

20 réflexions sur « Les villes fantômes de Sibérie (une vraie réalité) »

  1. Tout à fait d’accord avec la deuxième partie de ton post Fabrice, mais les photos des villes sibériennes sont une grosse farce. Nombre des commentaires sont faux ou stupides, ou le type qui les as pondus n’a pas les yeux ouverts et n’a pas dû discuter beaucoup avec les gens qui habitent là-bas. Pas besoin de photomontages à l’autre bout de la planète pour voir que la vie va mal.

  2. Bonsoir,

    Images tristes. Mais que faire ?

    La machine est en route et « écrasera » qui tentera de s’y opposer !

    Quitte a être écrabouillée, autant résiter le plus longtemps possible , la tête haute , avec respect et les mains généreuses !

    Quand a être heureux en sachant tout cela ? Difficile de se détacher et d’occulter toute la misère de notre Monde ! Chacun a sa façon de gérer toute cette souffrance !

    Que nous soyons tristes ne changera rien ! Il est plus efficace d’avoir des pensées positives , ces même pensées qui nous aident a avancer et a réaliser des gestes pour le bien de tous !

    Bon samedi-dimanche , Léa .

  3. Bon, en tout cas, le week-end, on n’ira pas le passer là-bas, c’est sûr !
    Quant à rire, oui, malgré tout (bien au-delà de la Sibérie), même si c’est de plus en plus jaune – jusqu’aux ruines de Pompéi qui s’écroulent peu à peu sous l’effet de la politique cul-turelle du Silvio – mieux vaut financer les clubs de foot et les chaînes de télé à la con, non ?

  4. Bonjour Fabrice,

    Merci pour le partage de ces images, aussi terribles soient-elles.

    En 1993, je l’ai traversée en train, cette Sibérie.Je me souviens de paysages d’une beauté magique.
    Les vagues gelées du Lac Baïkal sont gravées dans mon âme, les villages d’Isbas rescapées donnaient envie de s’y arrêter, d’aller à la rencontre des Natasha, Olga et autres Cergeï et les forêts lançaient un appel: celui de la forêt.

    Mais je me souviens aussi de brutalités policières envers une population aux poches bien vides…

    Je ne sais pas ce qu’il reste du Baïkal en 2010 et de son écosystème.

    ps: le lien a des pubs lamentables!!!

  5. Images intéressantes, mais c’est un peu toute la Russie qui est comme cela. Norilsk plus spécialement du fait de l’exploitation minière du nickel et du palladium indispensable pour faire nos « pots catalytiques » bien propres..
    Il faut savoir que la construction de ces immeubles en pleine campagne, alors qu’il y a du terrain à ne plus savoir qu’en faire est une méthode qui est née suite à la construction de la ville de Sarcelles en France.
    C’est la méthode optimisée pour faire des habitations pas chères.
    Sarcelles a été le « modèle » de référence dans toute l’Europe de l’Est.
    Le « Danube de la pensée » voulait appliquer cette méthode, démolir les villages roumains pour gagner de la terre cultivable. Cela a été un des motifs de sa chute, car inacceptable par la population.
    Une petite anecdote sur la Sibérie.
    Un ami scientifique à Tomsk, et originaire du coin me raconte :
    – Il a fallu que j’attende l’âge de 12 ans pour voir ma première pierre. Dans mon coin de Sibérie il n’y avait pas de pierre. Ma Mère disait :
    Autrefois dans l’ancien régime il y avait des colporteurs qui vendaient des pierres en Sibérie. les pierres c’est très bien pour comprimer le chou dans la saumure. Avec le régime communiste les vendeurs de pierres ont disparu, et à la place il a fallu mettre des morceaux de fonte ou d’acier. mais la fonte dans la saumure ça donne un mauvais goût à la conserve de chou. Le Communisme c’est très mauvais!
    @+

  6. Karl,

    Si tu as des infos sur la question, n’hésite pas à les fournir. J’ai pour ma part regardé le tout avant de mettre en ligne, et bien sûr, il ne s’agit pas d’un site à mon goût. Mais les photos, sauf grave erreur, toujours possibles, sont vraies, et nombre de commentaires décrivent correctement ces images. Pas de problème pour publier ici une critique, même féroce, de cet envoi. Bien à toi,

    Fabrice Nicolino

  7. @La Petite Bergère.

    Pour une évocation récente du Baïkal, tu peux écouter et lire Sylvain Tesson, qui a par ailleurs aperçu les empreintes de mon cousin himalayen il y a quelques années.

    Un court récit et une vidéo sur le site du Figaro : http://www.lefigaro.fr/voyages/2010/09/25/03007-20100925ARTFIG00002-j-ai-vecu-six-mois-en-ermite-au-bord-du-lac-baikal.php

    Pour mieux connaître le bonhomme, longue interview dans l’émission Il ne faut jurer de rien : http://www.dailymotion.com/video/x92f05_il-ne-faut-jurer-de-riensylvain-tes_news

  8. Ces photos de Sibérie font froid dans le dos. Elles semblent sortir tout droit d’une BD de Bilal.
    Sans aller si loin, des petits coins de paradis existent bel et bien. Tout près de chez vous…

    Nolwenn Weiler en fait l’inventaire dans cet article paru jeudi dernier dans Bastamag :

    http://www.bastamag.net/article1211.html

  9. désolée, mais pas terrible non plus!

    http://www.ladepeche.fr/article/2010/11/20/952673-Castelnaudary-Les-gendarmes-lancent-un-appel-a-temoin-apres-la-pollution-aux-pneus.html

    … »après la découverte de pneus sauvagement jetés dans la Ganguise. Une colère légitime quand on voit le lieu, magnifique, souillé de dizaines et de dizaines de pneumatiques. Le commandant du groupement de gendarmerie de l’Aude a envoyé sur place, dès jeudi matin (lire notre édition d’hier) la brigade spécialisée subaquatique de Leucate. Les plongeurs ont retiré pas moins de 150 pneus de l’eau… »

  10. Je n’aurais pas imaginé que les Bigfoots s’intéressent de si près à la vie des petits hommes!
    Ou alors… peut-être seulement à celle des bardes observateurs d’empreintes?

    Merci pour ces liens aux images de vagues gelées!

  11. Un reportage photo sur Detroit et ses environs (ou nombre d’autres villes des grands lacs US) donnerait peut-être un effet analogue?
    Nous devons une reconnaissance éternelle à ces cicatrices de la grande industrie. Non seulement elles ont été érigées par un peuples d’ouvriers (et d’esclaves Leks, Zeks, ou que sais-je encore, dans le cas de l’URSS, dont les ossements sont sans doute mêlés aux terrassements des constructions), mais entre 1941 et 1945 la liberté du monde a été forgée dans les Detroit et Severostal. Sans ces horreurs, bâties sur des terres peu accueillantes, Hitler, Heydrich, Himmler, and co. n’auraient pas vu leurs projets se briser sur des forces infiniment supérieures en nombre.
    Les Russes vont être obligés de restituer du terrain à la nature. Quand même, quel triste pays.

  12. @La Petite Bergère.

    Le Sasquatch regarde autant les hommes que les hommes tentent de l’apercevoir. Nous aussi avons des sociétés de cryptozoologie. L’idée sous-jacente est qu’il reste encore des traces d’humanité sur cette Terre. Nous cherchons, en espérant.

    N.B. : Big Foot, c’est aussi Spotted Elk.

  13. Bonjour Fabrice,
    Je ne suis pas allé dans ces villes précisément, mais dans d’autres autour de la région de Iakutsk. Ces paysages, je les ai vus aussi. Ce qui me dérange dans cette caricature, c’est que ce n’est qu’un tableau à charge. Des photos prises lorsque le ciel est bas et bien gris, avec aussi peu de gens que possible. Je peux me balader une journée à Lille et faire des images aussi terrifiantes. Surtout en hiver. Ce qui montrerait que l’industrie produit les mêmes cauchemars partout, mais jamais je n’oserai présenter ça comme un portrait de Lille.
    S’il neige je laisserai ouverts les vitres de ma voiture et ca ressemblera aussi à un navet hollywoodien. Si l’auteur des photos allait le long de la Lena à la fin du printemps, il pourrait aussi faire des photos d’inondations impressionnantes, récurentes, parce que les rivières coulent du sud au nord, et qu’au moment du dégel, ça bouchonne en aval. Il y a les moustiques aussi. Enfin mouches qui piquent la journée et moustiques le soir. C’est peut-être ce qui l’a énervé. Je ne connais pas la question, mais dans tous les coins sauvages que j’ai vus, il y avait des moustiques en légions. Chez nous, non.
    Là-bas, j’ai vu des gens joyeux, très joyeux, qui ne font pas une montagne du froid qui revient tous les ans, mais plutôt qui profitent des beaux jours, qui se serrent les uns aux autres sur les terrasses des cafés improvisés pendant les quelques semaines où c’est possible. Ils y a bien des flaques et de la boue partout, c’est le climat qui veut ça. Et les enfants sautent à pieds joints dedans. C’est pas « propre » comme une zone industrielle française où l’on arrive et d’où on repart par l’autoroute. Il y a également toutes ces maisons en troncs d’arbres coupés. Ca ferait de merveilleuses cartes postales qui embelliraient un catalogue vacances en Laponie. Sauf que pour les Russes et Iakoutes, y vivre n’est pas un cadeau, même si ça fait mignon. Les immeubles montrés sur les photos comme une sorte d’enfer en train de s’écrouler sont en fait très bien chauffés et isolés. Le système collectif de chauffage par tuyaux d’eau chaude est efficace, et si les fuites sont spectaculaires, c’est parce que tout est en extérieur à cause du permafrost. Ca fait bricolage, mais tout le monde est au chaud. Tout ça est dans la ville, sans cache-sexe. Et entouré par des forêts presques infinies à faire passer la France entière pour un caillou infertile. L’hiver, les voitures particulières, déjà peu nombreuses comparés à ce qu’on voit ici, disparaissent presque au profit des transports collectifs, parce que seuls ces bus et mini-bus peuvent fonctionner correctement quand la température baisse trop. Alors oui, c’est bondé, non il ne neige pas à l’intérieur, et les gens n’y font pas plus la gueule que dans le métro. La très grosse différence avec la vie par ici, c’est que nous sommes passés maîtres dans l’art du camouflage. Ca ne se voit pas donc ça n’existe pas. La laideur d’un périphérique, d’une grande surface, d’un sol pollué en profondeur par l’agriculture industrielle, d’une rivière sans poissons et du travail qui n’a pas de sens est moins facile à prendre en photo qu’un bon gros nuage d’on ne sait pas quoi.
    Bon mais je veux pas rester sur cette note. Merci mille pour ton site et surtout tes livres (en tout cas les deux que j’ai lus). Continue à nous poser des questions.

  14. karl merci pour ces quelques phrases qui sonnent très juste.
    Tout ça est dans la ville, sans cache-sexe. Et entouré par des forêts presques infinies à faire passer la France entière pour un caillou infertile. L’hiver, les voitures particulières, déjà peu nombreuses comparés à ce qu’on voit ici, disparaissent presque au profit des transports collectifs, parce que seuls ces bus et mini-bus peuvent fonctionner correctement quand la température baisse trop. Alors oui, c’est bondé, non il ne neige pas à l’intérieur, et les gens n’y font pas plus la gueule que dans le métro. La très grosse différence avec la vie par ici, c’est que nous sommes passés maîtres dans l’art du camouflage. Ca ne se voit pas donc ça n’existe pas. La laideur d’un périphérique, d’une grande surface, d’un sol pollué en profondeur par l’agriculture industrielle, d’une rivière sans poissons et du travail qui n’a pas de sens.. »

  15. Merci aussi à Karl pour cet éclairage fort intéressant.

    C’est un peu comme si le photographe n’avait photographié que le cuticule, la carapace, l’exosquelette après la mue d’une société capitaliste (1) en une société post-capitaliste, dans lesquels les individus retrouvent entraide, le sens du collectif, produisent et partagent le nécessaire, tout en cultivant l’incertitude (2) ce qui est source d’une très grande liberté.

    Avec son objectif bien subjectif dans ce cas, puisque occidentalo-centré (et donc capitaliste) il a voulu faire peur, et c’est à la mode vu le nombre de films qui sortent sur ce sujet, c’est vendeur, avec une vision post-apocalyptique d’une société industrielle sans industrie et il n’y a rien de pire si on n’a pas envoyé le ballast de l’industrie comme source d’abondance par dessus bord et accroché ses conditions de vie à autre chose qu’à un compte bancaire, de l’argent…

    (1) aux rapports sociaux capitalistes, de femmes et hommes mutilés, aliénés et barbares puisque qui ne travaille pas ne mange pas ou dort dehors en hiver, dominés par la logique folle de la valeur, du capital sujet-automate (Marx) ne visant que son auto-accroissement et faisant danser ses piou-pious tous les matins la danse du travail abstrait devant leurs fétiches-marchandises dans lesquelles ils projettent des rapports sociaux et des rapports de production et desquels ils croient dépendre.

    (2) : voir à ce sujet l’article d’Offensive n°27 : Se défaire de la précarité, cultiver l’incertitude

  16. Salut Fabrice,

    Je me suis jeté sur ce lien pour le partager mais si tu regardes les commentaires au bas de la page, on y lit qu’en prenant des photos ciblées dans un autre pays et en les commentant de la même manière, on peut arriver à cette impression… (Karl a bien condensé tout cela)

    Exemple cité dans les commentaire avec des photos de Detroit (comme le dit Géry), aux USA:
    http://goroda-prizraki.narod.ru/detroyt.html

    sincères salutations

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