Marx et le Sommet de la Terre de Rio (eine lumpige Farce)

J’ai été familier avec certains textes de Marx, jadis. J’avoue n’avoir jamais lu Le Capital. Mais d’autres écrits m’ont énormément frappé, au point que je m’en souviens encore, trente-cinq ans après les faits. Parmi ces textes, Der achtzehnte Brumaire des Louis Napoleon, en français Le 18 Brumaire de Louis Bonaparte. Rappelons aux oublieux qu’une révolution fabuleuse a eu lieu dans les rues de Paris entre le 22 et le 25 février 1848, suivie d’une autre, en juin. Pour dire le vrai, je suis encore au côté des barricadiers.

La note sera payée dans la nuit du 1er au 2 décembre 1851, quand cette petite ganache de Louis Napoléon Bonaparte s’empare du pouvoir après un coup d’État. L’un des morts, du haut des dérisoires barricades de cette nuit-là – en fait, le 3 décembre -, s’appelle Jean-Baptiste Baudin. Il est médecin, député du peuple, et ramasse une balle perdue. J’ai habité un temps dans la rue Baudin d’une ville de banlieue, et j’ai toujours eu une pensée pour cet imbécile qui ne supportait pas la dictature.

Bref. Je voulais, malgré les apparences, vous parler du Sommet de la Terre, qui s’achève en ce moment à Rio (Brésil), vingt ans après le premier. J’ai dit, j’ai écrit, ici ou ailleurs, que ce Sommet manipulé par les transnationales ne mènerait qu’au désastre. Pour des raisons si évidentes que j’ai scrupule à les rappeler. L’ONU est infiltré – voir le cas Maurice Strong, voir le cas Schmidheiny, plusieurs fois évoqués sur Planète sans visa – par des personnages qui se cachent à peine. Leur objectif, atteint comme jamais, est de sauver la machine de destruction de la vie.

Je reconnais que c’est singulier. Je reconnais même que ces crétins associés ne savent pas ce qu’ils font. Il faudrait en effet être d’une rare sottise pour donner la main à un programme qui nous prive tous, peu à peu, des possibilités d’habiter cette terre. Non, croyez-moi, ils se racontent une autre chanson. Celle, mutatis mutandis, de ceux qui, bons bourgeois de chez nous, « préféraient Hitler au Front Populaire ». Ou encore celle des pacifistes à tout crin qui, à la même époque – Accords de Munich compris – prêtaient au chancelier national-socialiste de nobles et calmes intentions.

Où veux-je en venir ? À ce point-clé : nous sommes en guerre, et la plupart ne veulent pas le savoir, occupés qu’ils sont à vivre les derniers jours de Pompéi. Et j’en reviens à ce vieux Marx qui, dans  Le 18 Brumaire de Louis Bonaparte, utilise une formule qui a été abondamment assaisonnée depuis. La voici : «Hegel bemerkt irgendwo, daß alle großen weltgeschichtlichen Thatsachen und Personen sich so zu sagen zweimal ereignen. Er hat vergessen hinzuzufügen: das eine Mal als große Tragödie, das andre Mal als lumpige Farce ». Ce qui veut dire à peu près – mon allemand est exécrable – que Hegel a noté quelque part que les grands événements et personnages de l’histoire se répètent deux fois. Mais qu’il a oublié de préciser que, la première fois, c’est sous la forme d’une grande tragédie, et la seconde à la manière d’une farce dérisoire.

Tel est bien le bilan à tirer de cette pantomime de Rio 2012. En 1992, alors que tout était déjà connu, nous avions eu droit à la tragédie. Le vieux George Bush – mais c’eût pu être le vieux François Mitterrand – avait déclaré sans hésiter : « The American way of life is not negotiable ». On sacrifierait donc la forêt, l’océan, le sol, l’air et l’eau aux besoins sans limite des pelouses devant les pavillons middle class. Tout en faisant semblant de discuter. Tout en signant des chiffons de papier qui finiraient dans la cheminée. Oui, cette année 1992 avait été une grande tragédie.

2012 est une farce sans égale. Le Sommet de la Terre s’achève avant d’avoir commencé. Rien n’aura été obtenu, car rien ne pouvait l’être. Mais le WWF a déployé une montgolfière près du raout des présidents qui s’en foutent. Mais Jean-Marc Jancovici – il annonçait voici trois ans, dans un livre, qu’il nous restait trois ans pour sauver la planète – signe dans Le Monde une tribune avec le grand responsable onusien du Sommet de la Terre, Brice Lalonde (ici). Ces hommes ridicules affirment qu’il faut « décarboner » l’économie, et blablabla.

Croyez-moi, ou non d’ailleurs, la première mesure de salubrité écologique consisterait à nommer sans détour l’adversaire, devenu au fil du temps l’ennemi. Et cet ennemi, c’est l’industrie transnationale et les systèmes politiques qui l’aident à se maintenir au pouvoir du monde. Lesquels incluent tous les Brice Lalonde de la planète, tous les Jean-Marc Jancovici, tous les WWF, tous les jobards et jocrisse, ce qui fait un monde fou. Ils nous disent que les écologistes de mon espèce ne proposent rien, qu’ils n’ont aucune solution ? Franchement, et eux ? Eux, qui ne servent qu’à masquer l’échec historique et définitif du compromis. Eux, que je maudis aujourd’hui comme jamais.

34 réflexions sur « Marx et le Sommet de la Terre de Rio (eine lumpige Farce) »

  1. Bien vu, bravo !!! Fabrice sait mettre un nom sur les symptômes qui me frappent, comme d’autres peut-être (des accès de nausée de plus en plus fréquents). Partisan d’une ligne claire, son travail d’information remplit une mission salutaire qui se suffit à elle-même : démasquer sans relâche les imposteurs de l’écologie qui nous retournent l’estomac. Mais où est la relève ?

  2. « Et cet ennemi, c’est l’industrie transnationale et les systèmes politiques qui l’aident à se maintenir au pouvoir du monde. »
    voilà pourquoi, sans être monarchique, je pense perso que rien n’est possible par la République et ses institutions. l’Etat-nation a été crée par la modernité, pour la modernité. Elle est donc né pour organiser et structurer la nouvelle religion d’alors: « l’économie ». Comme le disait Giddens, « tout Etat moderne (capitaliste comme socialiste) dépend de la croissance, de la production industrielle et de la consommation.
    Oui, ce ne sont pas tel ou tel parti, tel ou tel homme politique, le problème… c’est tout le système politique!

    Les alternatives? Elles existent: pour l’occident, la société conviviale d’Ivan Illich, ou encore, Ernst Friedrich Schumacher et son « économie bouddhiste » sont des exemples… les amérindiens sont déjà en lutte pour protéger l’alternative qu’ils ont déjà en tête… les Africains et les asiatiques ont à décoloniser leur esprit, et opérer un retour aux sources de leurs civilisations… quand aux Indiens, rompre avec la trahison de Nerhu et croire au Swadeshi de Gandhi…
    ces alternatives ne sont que des échantillons dans l’infini océan des possibilités et des idées!

  3. J’étais trop jeune en 1981 pour savoir ce que valait Brice Lalonde en tant que personne (et peu importe). Ce dont je me souviens c’est du message qu’il a porté au cours de cette campagne, message contenu dans le petit (encore que pas si petit…) livre, collectif, « Le pouvoir de vivre ». Je n’ai jamais rien lu d’équivalent depuis en terme de projet politique de la part des écologistes.
    Ce qui est révélateur et qui va dans le sens de votre conclusion, c’est l’évolution, après cette élection, de Brice Lalonde qui n’a cessé de voguer au gré des vents. Est-ce dû à l’homme en question ou au pouvoir de retournement de l’ennemi que vous désignez ? Car depuis les années 80, le système a bien absorbé et détourné à son meilleur profit (à tous les sens du terme) l’écologie, ce que vous avez montré dans votre livre sur l’écologie politique.
    Le cas Lalonde est à mon sens plus symptomatique que causal.
    Tant qu’à faire des analogies, l’historien américain Arno Mayer disait que la première guerre mondiale était la dernière guerre menée par l’Ancien régime (loin d’être mort avec la Révolution française) avant sa disparition définitive, un dernier sursaut, un chant du cygne.
    La guerre « écologique » n’est-elle pas la dernière du monde des révolutions industrielles, né au cours du XIXè siècle, refusant de laisser naitre la civilisation dite post-industrielle et dans laquelle l’Homme aurait pu, aurait dû être libéré du travail (au sens de l’époque industrielle, donc au sens de Marx) et de nombreuses autres aliénations ? Sauf que cette fois si cette guerre devait être gagnée par le système, la planète ne serait plus habitable par l’Homme…

  4. Bonsoir à tous,

    Il est temps de vous confier cette affreuse vérité : je ne passe pas ma vie derrière le clavier. Je vis. Tant bien que mal. Et ces jours-ci, j’étais ailleurs. Je me suis branché quelquefois, mais comme je modère moi-même vos commentaires, il arrive que j’aie du retard. Ou que la technique se paie ma fiole. ¡Así es mi vida!

    Fabrice Nicolino

  5. 20 ans après Rio et son signal d’alerte a notre civilisation globalisee….et puis quoi? Et puis rien. Nous ne sommes meme pas parvenus a ralentir l’acceleration du train fou de notre vie collective. Tous les indicateurs sont dans le rouge, les cadrans de verre se fissurent sous la pression, le paysage defile maintenant si vite par les fenetres des wagons que nous ne parvenons meme plus a en saisir les details…
    On pourra toujours crier derriere la porte du poste de pilotage, rien n’y ferra . Il est vide. Il n’y a plus personne capable d’appuyer sur les freins. La rumeur s’est bien repandue dans les compartiments de tete, mais il semble preferable de conserver le secret. De faire comme si on allait bien trouver une solution. Et puis sinon a quoi bon les prevenir…..que c’est foutu….que le train va se fracasser .
    Nous sommes nombreux, isoles certes, mais nombreux, a savoir que ce train n’est pas le destin de l’homme. Nous savons qu’il n’est qu’un moyen de transport qui a fait son temps. Certains ont déjà sauté, d’autres se preparent a le faire. D’autres encore attendent ne sachant pas quoi faire…..
    On peuit les traiter , de defaitiste, de laches , d’egoistes, de traitres….de deserteurs tous ces humains qui veulent abandonner le navire. On peut legitimement vilipender leur cynisme capable de les laisser contempler ce train qui court a sa perte charge de tant de vies innocentes.On peut aussi les voir comme des eclaireurs,comme ceux qui montrent la voie d’un autre possible. Ils prouvent a ceux qui hesitent encore que la vie peut etre belle en dehors de la machine infernale. Ils ont le merite de redonner le choix.
    Le choix de dire Non;
    En tant qu’individu social de dire Non a une societe qui a perdu ses raisons d’etre. Assurer la securite alimentaire (pollution endemique de la terre et des corps), sanitaire ( l’esperance de vie diminue), sociale ( est ce la peine de preciser?). De dire Non a une societe qui n’offre plus de futur. De dire non a une societe qui a renonce au principe universel de l’autosuffisance. De dire Non a une organisation collective qui pour le “confort inassouvi” d’une infime partie, pille l’espoir du reste du monde et tape sans vergogne dans la poche de nos enfants. Une telle societe a perdu toute legitimite. Elle est la cause meme de son propre chaos. Et il nous serait demande de nous sacrifier pour elle? Elle nous force déjà a vivre en complice du plus grand genocide jamais commis contre la vie et il faudrait attendre la fin en faisant croire qu’il n’existe d’autres choix.
    Mais le choix existe. A ce stade du declin de l’Empire, la desertion est la seule voie de la dignite. Mais cette recherché de la dignite nous impose de penser aux autres a ceux qui sont encore dans le train…a ceux qui chercent la porte de secours. Cette obligation nous force a nous organiser entre deserteurs et a reflechir non plus a des evasions individuelles, mais a des evasions collectives…la grande evasion!
    On ne peut forcer personne a sauter du train. Cette decision appartient a chacun, on doit trouver en soi les raisons du courage de deserter. Mais il nous revient de preparer leurs receptions . Plus nombreux seront les rescapes volontaires plus nos chances d’organiser des communautes autosuffisantes suffisement “resistantes” grandiront. De nombreux passagers du train fou ne sont pas encore des barbares, mais ils le deviendront a “cout” sur, s’ils survivent au crash ….quand la nourriture viendra a manquer.
    Nous ne savons pas , a la minute pres, quand se produira la grande collision, et meme si on peut souhaiter , au nom de la biodiversite, qu’elle se produise au plus vite. On doit egalement tout faire pour utiliser le peu de temps qu’il reste a nous renforcer. A nous preparer dans l’optimisme que nous pouvons encore reussir a poursuivre l’aventure de la vie sur les vestiges de cette folie.
    Un deserteur optimiste.

  6. @pylm
    votre commentaire touche à l´essentiel, je le partage sans restriction.
    Je mets rarement un bulletin dans les urnes mais je vote au quotidien, pour dire NON. Moi aussi, je déserte, avec force et conviction. Même si la désertion implique bien souvent un fort sentiment de solitude.

    PS Fabrice, votre allemand tient la route. La traduction contient l´essentiel 🙂

  7. Je suis d’accord bien sûr pour ce qui est du Sommet de la terre. Mais j’ai envie d’apporter une nuance sur Jancovici.
    Il se trouve que Jancovici explique assez bien la « double contrainte carbone » et dans quelle mesure elle va jouer (et joue déjà) un rôle majeur à l’échelle du monde. Il explique également plutôt bien pour quelles raisons la croissance (du PIB) est une aberration et pourquoi elle risque fort de s’arrêter bientôt. Je vais peut-être m’attirer des ennuis ici mais, tout en ayant bien conscience des limites de son discours (en particulier pour ce qui concerne le nucléaire) j’ai tendance à penser qu’il a un pouvoir de conviction et une crédibilité que les écologistes militants n’arrivent pas à avoir…
    JM Jancovici est un produit du système technicien, il en incarne même l’élite : pourtant il dit des choses assez subversives au vu de son statut ! L’avantage c’est qu’on ne peut lui reprocher de faire de l’idéologie, de faire de l’anti-science ou de prôner le « retour à l’âge de pierre » (je suis navré mais ce sont des choses que l’on entend très souvent quand on essaye d’avoir des discussions sur ces sujets-là).
    Dans une optique où il s’agirait de faire passer ce type d’information au plus grand nombre (et dans cette optique seulement) Jancovici m’apparait plutôt comme un atout.
    J’ai conscience qu’il ne va pas « assez loin », qu’il a sans doute une vision de la nature assez datée et qu’il y a derrière tout ça l’ombre funeste du nucléaire mais si l’on accepte de ne retenir que certains aspects de son discours et de ses arguments (ce qui est heureusement notre droit) je le trouve plus à même de convaincre et de faire passer le message.

  8. Jancovici est loin d’être un imbécile, et donc, il lui arrive de dire aussi des choses intelligentes. Mais a-t-on besoin de lui pour être intelligent nous aussi ? Heureusement non.

    Surtout, dans la perspective politique qui est celle de l’écologie qui nous concerne sur ce blog (corrigez-moi si je me trompe), c’est une crapule de première (et je suis poli).

    Lisez donc la fin du post que je signalais au début de ces commentaires:

    https://sniadecki.wordpress.com/2012/06/14/jancovici-nucleariste/

    Extrait:

    D’ailleurs, Jancovici n’est pas opposé à un certain autoritarisme pour faire appliquer ses conseils. Au journaliste de L’Expansion du 29 juin 2011 qui lui demande « Si on lit bien votre livre, on a l’impression que vous annoncez qu’il faudra bientôt euthanasier les vieilles personnes qui coûtent trop cher à la société ? », le loup aux dents longues répond sans se démonter :

    « Jusqu’où la société acceptera-t-elle que les jeunes se privent pour que des gens de 90 ans puissent vivre en mauvais état jusqu’à 95 ans ? Mourir “moins malade” n’est pas un drame, du moins pas un des plus gros auxquels il faut s’attendre. L’oppression politique généralisée, les dictatures, les guerres, les épidémies et autres plaisanteries sont à prévoir si nous ne transformons pas rapidement notre économie. Toutefois, pour que les gens acceptent un univers plus contraint, il faudra focaliser l’attention des citoyens électeurs non sur la contrainte, mais sur des projets concrets qui permettent de se sentir impliqué, et il est possible d’en trouver un paquet ! »

    « Jancovici la menace » nous propose donc plutôt l’oppression écolocratique généralisée sous la houlette bienveillante des grandes entreprises; l’atome pour la paix et la radioactivité pour tout le monde avec son cortège de plaisanteries telles que l’euthanasie et l’eugénisme ; le tout en conservant l’économie capitaliste et industrielle pour le plus grand confort des élites technocratiques. Voilà – traduit en bon français –, l’avenir qu’il nous réserve!

    Quant à la démocratie, cela se réduit manifestement pour lui à «impliquer le citoyen» dans l’élaboration de sa propre aliénation.

    Fin de l’extrait.

    Il faut rappeler aussi que sa boite de consulting The Shift Project a pour « membres bienfaiteurs »… Bouygues et Vinci Autoroutes…

    « je le trouve plus à même de convaincre et de faire passer le message » dites-vous.

    Convaincre de quoi et faire passer quel message, sinon se soumettre aux avis des experts tels que lui et repeindre le capitalisme en vert kaki.

    A la bonne vôtre…

  9. Bonjour,

    Cela fait plusieurs mois maintenant que je m’exile régulièrement sur votre Planète sans Visa, sans jamais commenter, mais aujourd’hui mon dépit (le mot est faible) est tel que je franchis le pas!

    Vous résumez je crois parfaitement ce sommet, c’est une vaste farce. A la lecture de certains articles de presse et des déclarations des fanfarons, je me demande sincèrement : se rendent-ils compte de leur ridicule? Qui croient-ils berner? Qui peut attendre, aujourd’hui, des mesures à la hauteur de la situation réelle?
    Cela fait donc 20 ans que les grands de ce monde se réunissent pour constater la bouche en coeur que la situation est grave. A quand l’arrêt du constat?

    Je suis jeune (j’avais un an lors du premier Rio), désabusée par ce qui se joue en ce moment. Et je vous remercie pour votre travail, ici ou dans vos ouvrages, je vous remercie de mettre en lumière des tragédies, des impostures, mais aussi et heureusement, des initiatives porteuses d’espoir. Merci pour vos articles sans complaisance ou pincettes inutiles, merci de me mettre, quelquefois, face à mes propres contradictions, génération Y oblige. Merci car ces vérités m’aident à sortir du constat.

    Une fidèle lectrice discrète

  10. ce serait quand meme sympa de donner des infos sur les gaz de schistes, ou en est la « lutte », ou sont passé les acteurs? bref d’assurer un tout petit suivi; merci

  11. A Pylm
    Belle métaphore que celle du train fou sans pilote, de la désertion. Belle et juste, je trouve. Déserteur de la guerre moderne, cette guerre engagée contre la vie, déserteur de l’armée techno-scientifique, productiviste et consumériste… Je me retrouve bien dans cette image.
    Du train, il y a aussi tous ceux qui tombent, ceux qu’on pousse, ceux qui voudraient dire : « Moins vite, j’ai mal au cœur » et qui s’accrochent parce qu’ils ne voient pas d’autre issue et un jour, trop c’est trop, ils ne peuvent plus, un jour ils tombent.
    Sauter du train sans se fracasser, c’est possible et c’est porteur de joie, de bien-être. De cela, il faut témoigner aussi, pour éloigner la peur de faire le grand saut dans le vide, cette peur qui retient des gens qui hésitent, qui se ravisent. Partout si l’on sait voir, il y a des bras pour accueillir, il y a des mains qui se tendent.
    Faire ce que l’on a à faire parce que ça nous semble juste, parce que ça correspond à un élan, à une cohérence personnelle. Agir parce que c’est la conscience qui nous inspire. C’est ça, je crois, qui importe, écouter cette voix.
    Frédéric

  12. A Pylm,

    En postant à nouveau le commentaire sur le train fou que vous aviez publié le 18 juin, vous avez bien fait d’insister, car, cette fois-ci, il n’est pas passé inaperçu.

  13. Bonsoir,

    Merci pour les beaux commentaires.

    Ceux qui participent au sommet de la terre, Rio ou avant, et qui sortent de leur chapeau, issu de avec leur grand savoir, des « propositions » sans tête, et surtout pas de queue, vu les résultats, depuis le temps que les alarmes clignotent … peuvent être considérés comme étant, tous de grands professeurs en STRONZOLOGIE.

    Ils préfèrent sauver les banques, favoriser la croissance idiote … l’argent ne se mange pas.

    Bises,

  14. Et le ministère de l’écologie (dont tout le monde se fout royalement puisqu’avec NKM, il est même resté vacant plusieurs mois) se remet à virevolter passant de l’une à l’autre aujourd’hui même… Las de tous ces minables. Las !

  15. Pourquoi faudrait-il toujours proposer quelque chose quand on dénonce ce qui ne va pas ? J’avoue que ce reproche récurrent me gène.
    Je suis presque heureux de voir que je ne suis pas seul.
    Merci pour cette « chronique » que je lis, sans plaisir (ce n’est pas drôle) mais qui me redonne régulièrement espoir en l’humanité.

    Alors merci encore et continuez à rédiger tout haut ce que nous marmonnons tout bas !

    PS: Mes enfants ont adoré les aventures de Tata Thérèse.

  16. Le départ de Bricq de l’Ecologie, une surprise pour tout le monde

    PARIS – Le départ de Nicole Bricq du ministère de l’Ecologie constitue une surprise pour tout le monde, y compris sans doute pour son cabinet, a estimé jeudi France Nature Environnement (FNE), se félicitant toutefois que Delphine Batho, qui lui succède, conserve la main sur l’énergie.

    On peut se poser la question de savoir si l’arbitrage défavorable à Mme Bricq sur le permis pétrolier de Shell en Guyane n’a pas pu jouer en sa défaveur, a indiqué à l’AFP Benoît Hartmann, porte-parole de FNE.

    Un peu plus tôt dans la journée, avant l’annonce du remaniement gouvernemental, un large collectif d’ONG environnementales (FNE, WWF, Greenpeace, Fondation Nicolas Hulot, etc.) avait estimé que Mme Bricq avait perdu son premier arbitrage après l’annonce de la reprise probable lundi des forages pétroliers exploratoires au large des côtes de Guyane.

    La ministre avait pourtant annoncé le 13 juin une remise à plat de ce permis de recherche en raison du manque de garanties environnementales.

    Son départ constitue une surprise pour tout le monde, y compris sans doute pour son cabinet, a estimé M. Hartmann.

    De Rio, où se tient la conférence de l’ONU sur le développement durable, le directeur général du WWF Serge Orru a confirmé avoir discuté ces jours-ci avec Nicole Bricq (qui s’est rendue à Rio) et on ne pressentait pas ce changement.

    Des sources internes au ministère ont indiqué n’avoir appris le changement de titulaire du ministère que dans l’après-midi de jeudi.

    Mme Bricq, jointe par l’AFP, s’est pour sa part refusée à tout commentaire.

    Quant à Delphine Batho, elle n’a pas vraiment fait ses preuves sur l’environnement, reconnaît Benoît Hartmann pour FNE, mais on peut lui laisser le bénéfice du doute.

    Si ce changement n’est pas un très un bon signal alors qu’une conférence environnementale est en préparation, le point positif, selon lui, est que la nouvelle ministre conserve le même périmètre, avec l’énergie.

    La conférence environnementale, promise par François Hollande pendant la campagne présidentielle, aura probablement lieu en septembre.

  17. Cher Bertrand,

    Je connais et comprends votre point de vue, j’entends vos arguments et je les respecte. Mes propos étaient nuancés me semble-t-il et j’ai bien précisé que le discours de Jancovici avait des limites…je sais bien qu’il y a un revers à cette médaille et que tout n’est pas bon à garder.
    Nous ne nous comprenons pas, voilà tout…Vous êtes peut-être comme moi à essayer de parler quotidiennement de la crise écologique et de ses multiples facettes à des gens qui parfois sont franchement éloignés de ces préoccupations, pour des raisons diverses qu’il ne m’appartient pas de juger. Dans ce cadre-là, face à des gens qui ignorent à ce point les enjeux, c’est très facile de taper à côté et de passer pour un ennemi du progrès, de la science et même de l’humanité. Vous savez sans doute comme moi que les clichés sont vivaces et qu’ils sont entretenus à grand frais par les médias de masse…
    Dans ce cadre-là disais-je, quelqu’un comme Jancovici peut mettre en confiance et rassurer. Parce que, sauf à creuser davantage encore le fossé qui nous sépare, vous ne pouvez pas parler de l’avènement d’un monde post-industriel d’entrée de jeu au premier venu. Rendez-vous compte que certaines personnes que nous côtoyons tous les jours n’ont jamais entendu parler du peak Oil et en sont encore à confondre météo et climat, quand ils ne nient pas tout bonnement les changements climatiques !

    C’est usant à force de passer pour un adepte du retour à la bougie et c’est désespérant de voir que s’aggrave la rupture de communication avec ceux qui pensent que notre mode de vie ne pose pas de problème significatif, que demain a toutes les chances d’être meilleur qu’aujourd’hui et que la science nous tirera d’affaire quoi qu’il arrive. C’est désespérant de constater la nullité du débat sur ces questions, le refoulement collectif dont les enjeux écologiques sont l’objet et de voir nos chances de devenir des sujets positifs de notre propre histoire s’amenuiser avec le temps.
    Alors dans ce cadre-là, quelqu’un qui dit des choses aussi graves et qui remet en question la croissance avec talent en se tenant à distance de l’idéologie a de bonnes chances de sensibiliser certains publics. Moyennant quelques réserves préalables, je ne refuse plus d’utiliser le discours de Jancovici si le but est de créer du débat, de montrer à quel point notre mode de vie est de l’ordre de l’exception et à quel point il est insoutenable. C’est ce message-là dont je parle et c’est déjà beaucoup au vu de l’ignorance généralisée.

    Je crois que nous aurons besoin de tout le monde pour faire face à ce qui nous attend. Même si je perçois clairement les enjeux de la récupération de la catastrophe par le capitalisme vert, nous n’avons aucune chance de construire un autre monde en divisant…

  18. Il faut quand même se souvenir que l’écologie et sa réprésentation initiale , au moins en France , s’est contruite sur des clichés soixantehuitards , à la marge de la société . Clichés de l’original qui circulait à vélo , le look hippie , le retour à la nature et l’élevage des chèvres .
    Sur le problème de l’ours des Pyrénées , deux conceptions s’affrontent entre le mythe originel de l’écolo éleveur de moutons et de chèvres qui opère le retour la nature en la protégeant , contre une conception relativement moderne qui se représente dans la conservation du sauvage qui est elle minoritaire dans l’opinion et l’expression politique . On voit donc rien que par cet exemple que 2 conceptions de l’écologie sont déjà opposées et presque non conciliables .

  19. 100 % d’accord. Il est largement temps de changer de posture et d’attaquer l’ennemi.

    Et voilà que CLAUDE-MARIE VADROT depuis Rio devient lucide et en appelle à une transformation des ONG.

    Extraits :
    (…)
    Les ONG sont quasiment considérées comme des agences des Nations unies à statut particulier. Il leur est donc difficile de remettre en cause cette « intégration » dans la grande tuyauterie internationale officielle. Définitivement « embedded » dans la machine onusienne, ces grands mouvements veulent sauvegarder leurs petits pouvoirs naissants, sans se rendre compte qu’ils se font eux aussi l’instrument du consensus mou qui gouverne les Nations unies et leurs réunions.
    (…)
    En regardant jeudi ces grands fonctionnaires associatifs, dont la sincérité est sans doute grande, s’agiter dans la toile qui les emprisonne, il était possible de comprendre que, comme les Nations unies, ce type de démarche est
    obsolète.
    (…)

    On dirait presque du Nicolino !

    http://www.mediapart.fr/journal/international/220612/rio20-les-associations-se-fachent-mais-ratent-leur-sortie

  20. Fabrice,
    Mon commentaire est un peu décalé avec le sommet de la terre, il aborde un sujet d’actualité qui se niche plutôt sous la terre… Je l’envoie quand même, je n’ai pas pu m’empêcher de réagir, c’est épidermique ! A toi de voir si tu souhaites le publier ici. Bien à toi.

    Une grande nouvelle pour ceux qui ne supportent plus d’attendre le métro sans pouvoir surfer sur la toile : une dizaine de stations vont être équipées du wifi !
    Il faut admettre que la chose devenait invivable. Le voyageur parisien n’en pouvait plus de rester ainsi à se languir sans pouvoir se connecter. Trois secondes, passe encore, mais trois minutes, vous imaginez le calvaire ? La fièvre montait, les tremblements s’emparaient des passagers, le syndrome du délirium tremens s’étendait dans les sous-sols parisiens.
    Heureusement, le service public veille. A partir du 26 juin, wifi gratuit pour tout le monde, enfin dans les stations, pas dans les tunnels.
    Rassurez-vous, la technologie viendra à bout de cette anomalie intolérable, ce n’est là qu’une question de temps.
    Pour tous ceux qui sont sous hypnose quand le portable les sonne, pour les Parkinsonien trépidants aux moindres vibrations de leur Ipad dernier modèle, pour ceux qui ne supportent pas d’être injoignables plus de quatre secondes en tous points du globe, plus un endroit sur la terre ne sera bientôt couvert par les ondes.
    Vous verrez qu’un jour, les vendeurs de gadget high-tech équiperont les caveaux de connexions wifi et de smartphones, parce qu’il n’y a aucune raison que l’âme des morts soit exclue du progrès technique. Vous pourrez communiquer avec vos macchabés préférés, parce que c’est bon pour la croissance économique.
    Voilà où nous conduisent l’idéologie du progrès et de la croissance, la tyrannie techniciste et consumériste. Tant que nous ne remettrons pas en question ce socle prométhéen, tant que nous ferons de l’écologie d’accompagnement, de cogestion du désastre, nous irons droit vers la destruction de la vie.
    Car c’est de cela qu’il s’agit, à travers les nécro-technologies des ondes. Les études se comptent par centaines pour prouver leur nocivité, les électro-sensibles se comptent par millions.
    Il aura fallu des dizaines d’années pour venir à bout du lobby de l’amiante. Combien de temps encore pour celui des ondes ? Du nucléaire ? Des pesticides ? Combien de morts ?
    J’arrête la liste, vous la connaissez.
    Juste deux mots sur la pseudo gratuité du net ou du wifi dans le métro, pour finir. Nous la payons bel et bien dans nos achats, dont le prix intègre le budget publicitaire. Cet impôt caché représenterait plus de 500 euros par personne et par an. Je ne parle pas de la dévastation du monde vivant à laquelle participe la pub.
    J’imagine ça, des fois, un mouvement de boycott des produits vendus à grands renforts de pub. Des gens qui ramèneraient leur portable pour incompatibilité avec leur santé, avec leur éthique. Des salariés qui demanderaient leur droit de retrait pour danger grave et imminent lié au wi-fi. Des usagers des transports qui manifesteraient pour demander à voyager sans ondes…
    Quelle solitude.
    Frédéric

  21. Bonjour tout le monde

    De retour des profondeurs de l’invective, où j’étais descendue 🙂

    Frédéric, je ne peux que partager votre accablement – c’est-à-dire : je ne ne peux pas faire autrement, et : je ne peux rien faire de plus.
    Est-ce qu’éprouver à distance le même sentiment de solitude nous rend moins seuls ?
    Un peu, oui, quand même. Il y a quelques jours vous sembliez dire vous-même que venir ici, sur Planète sans Visa, vous faisait du bien. A moi aussi. Sauf quand des individus pervers – j’ai bien réfléchi, il n’y a pas d’autre mot pour qualifier la propension virtuosement maladive d’Olivier-tutti-quanti à déformer les propos et projeter sur les autres sa propre incapacité à débattre – se mettent à occuper les lieux et à rendre tout le monde aussi dingue qu’eux.

    Il est parti (?), ouf. Quel plaisir de lire à nouveau les contributions éclairées des un-e-s et des autres.

  22. Valérie,
    Oui, un peu de solitude se dissipe à lire des contributions qui font écho, qui élargissent l’horizon des pensées. Je découvre ici des personnes, des auteurs, des idées qui m’aident à penser plus loin, à être plus lucide. C’est le premier et le seul site auquel je participe ainsi, je ne pensais d’ailleurs pas y prendre goût de cette façon.
    Un merci immense à Fabrice, pour son propos toujours stimulant, pour le temps qu’il consacre à nous mettre en lien les uns les autres, merci à tous.
    Les chemins du net et de la vie sont parfois pavés de rencontres qui blessent. De ces discussions orageuses, de ces colères qui montent face au discours ambiant, j’essaie de me préserver de temps en temps. Le jardin m’est d’un grand réconfort.
    D’ailleurs, j’y retourne !

  23. Rio+20, le sommet du désastre. Rien, il n’en sort rien. « Pantomime », c’est exactement le terme qui convient. Une forme de comédie dans laquelle on peut ressentir les pensées et la vie intérieure des acteurs hors de l’articulation du langage. Ce langage devenu tant et tant galvaudé qu’il brouille parfois l’entendement et que le corps en dit plus long que les mots.
    – Pendant ce temps là, en Europe, on se concocte des pactes de croissance économique pour continuer à piller, à saccager ce qui reste de vivable sur la terre, merci le président français pour sa contribution.
    – En Inde, à Jaitapur, on exproprie pour implanter un réacteur EPR sur une zone sismique, merci Areva.
    – Au Japon, on redémarre deux réacteurs.
    – Aux Etats-Unis, on décrète le changement climatique illégal, (un projet de loi interdit aux agences gouvernementales de prendre en compte les prédictions scientifiques qui annoncent une montée des eaux d’environ un mètre à l’horizon 2100 !)
    – En France, on vire une ministre parce qu’elle a osé contrarier, si peu, les lobbys pétroliers et leur soif de forage.
    A mes heures d’accablement, je me demande parfois comment les survivants (s’il y en a) à la sixième extinction des espèces jugeront notre civilisation. Traduiront-ils, devant un Tribunal, ceux qui portent la responsabilité du cataclysme, pour crime contre l’humanité ?
    Frédéric

  24. Une fois de plus, Frédéric, vous m’ôtez les paroles de la bouche, jardin compris (il est l’heure en effet).

  25. Fabrice, Gourcho Max, Bertrand, et les autres
    vos propos sont toujours très intéressants et vous en remercie. J’aimerai ici apporter mon soutient au travail de Jancovici. Certes, il est pour le nucléaire, et j’ai du mal à comprendre son obsession, ou plutôt si, car il l’explique lui-même maladroitement : « on ne fait pas marcher des TGV à l’éolien ou au solaire ». Il a parfaitement raison, sauf qu’il faut aller plus loin, et se demander si nous avons besoin de TGV. Mais vous connaissez le proverbe anglais « time is monney » (lisez la lettre ouverte de Jean Gadrey à David Cameron http://alternatives-economiques.fr/blogs/gadrey/2012/06/22/lettre-a-david-cameron/#more-373)Les propos de Brice Lalonde et Jancovici méritent d’être lu, disons dans leur version originale (http://www.manicore.com/documentation/articles/climat_energie_europe.html), car ils tentent malgré tout de convaincre les politiques de changer d’horizons, on ne va pas les blâmer. Être catastrophique ne veut pas dire que l’on souhaite la catastrophe.

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