Sur Victor Serge (et donc sur moi)

J’ai une dette immense, que je ne paierai jamais. Mais que cela ne m’empêche pas d’au moins faire semblant. Je vais vous parler de Victor Serge, chez qui j’ai découvert, la première fois, la magnifique expression Planète sans visa. Ce qui suit n’a rien à voir – quoique – avec la crise écologique, et si je vous en préviens, c’est parce que je souhaite que nul se se sente piégé. Charles Jacquier, des éditions Agone, vient de m’envoyer un livre, Retour à l’Ouest (Agone, 23 euros). Il s’agit d’un recueil de chroniques de Serge, parues dans le journal de Liège La Wallonie, entre juin 1936 et mai 1940. Pendant que le monde s’écroule sous les flammes de l’enfer, Serge continue d’écrire sous la mitraille. Il est un écrivain, mais un écrivain combattant.

Je résume, à traits infiniment grossiers. Viktor Lvovitch Kibaltchiche, dit Serge, naît en Belgique en 1890. Ses parents sont Russes, émigrés, émigrés politiques au temps du tsarisme. Je ne me souviens pas de tout, et j’écris sans vérifier, espérant ne pas commettre trop d’erreurs. Très jeune, vers 15 ans, il est déjà un activiste politique. Avant l’âge de 20 ans, il est à Paris, fréquentant de près le milieu anarchiste. Il écrit dans la presse de la Cause, vit dans des communautés qui ressemblent comme deux gouttes d’eau à celles de l’après-68 – jeunes, désolé, je parle d’une époque engloutie -, fréquente une poignée d’illégalistes. Les illégalistes sont comme dirait monsieur Hortefeux des terroristes. Et ils vont déchirer le ciel français de l’avant-guerre, celle de 14, sous le nom de bande à Bonnot.

Victor les connaît et combat comme il peut leur dérive vers la violence déchaînée. Mais au nom de quoi irait-il les dénoncer ? Il ne les dénonce pas, et bien que n’ayant pas joué le moindre rôle dans l’équipée sanglante de Raymond-la-Science, Jules Bonnot et tous autres, il est embastillé. Il faut bien calmer l’opinion, pas ? Victor passe, je crois, cinq ans en prison, au moins en partie à la centrale de Melun. Il en sort, broyé par la meule des jours et des ans, en 1917, avant de gagner Barcelone. Barcelone ! La ville est en éruption sociale permanente. Victor renoue avec le meilleur de ses espérances, au milieu d’une ville qui semble prête, la première de toutes, à l’anarchie. La vraie.

La suite est moins drôle, car il devient bolchevique, gagne la Russie révolutionnaire, entre dans l’appareil international du communisme naissant. La révolution d’octobre, après avoir incarné l’espoir fou d’un monde neuf, est rattrapé par l’ancien. Et par le pire de l’ancien.  Staline s’impose, et dès 1926, Victor se situe dans une opposition, confiante dans un premier temps, au régime qu’il sert depuis déjà huit ans. Il n’a pas oublié son anarchisme. Il n’a pas réellement abjuré. Il comprend, parmi les premiers, que le pouvoir corrompt et que celui qui vient sera absolu, et qu’il corrompra donc absolument. Les années deviennent éprouvantes, épouvantables même. La police politique, cette Tchéka devenue GPU puis OGPU, envoie les adversaires du régime par milliers dans ce qu’on n’appelle pas encore le Goulag.

Victor est persécuté, puis déporté je ne sais plus où. Tout le condamne à une mort certaine. Tout. Il sera pourtant l’un des rarissimes antistaliniens à sortir vivant de l’enfer qu’est devenue l’Union soviétique. Parce qu’il est un écrivain, parce qu’il a conservé des liens en France, où s’organise, vers 1933-1934 une campagne de solidarité. Staline entrouvre la mâchoire, et Victor débarque à Bruxelles, épuisé, démoli, accompagné par une femme devenue folle. La presque totalité de la gauche européenne, manipulée, dominée par les staliniens, lui tourne le dos. Pas question de dire du mal du « pays des travailleurs ». Ceux qui osent s’en prendre à Staline sont considérés comme des hitlériens. Ou stalinien ou hitlérien. Mais Victor est un homme, et comme il ne sait pas mentir, il lui faut bien raconter la vérité.

Gloire à lui ! un journal de Liège – La Wallonie – lui offre une chronique, qu’il tiendra, je le répète, entre juin 1936 et mai 1940. Je ne vais pas paraphraser, ce serait aussi absurde que dérisoire. Qui s’intéresse à cette époque, qui s’intéresse au mouvement  des idées, qui s’intéresse à l’humanité trouvera dans cette centaine de chroniques une admirable réflexion sur le sort commun. Victor, je l’ai dit, était écrivain – moi, je place très haut ses Mémoires d’un révolutionnaire, et certains de ses romans -, et son style de journaliste s’en ressent. Nous ne sommes pas face à l’écume des jours, mais directement engloutis par la marée du temps. La guerre vient, l’Espagne flambe, les staliniens assassinent, Hitler fourbit les armes du grand massacre. S’il est minuit dans le siècle est l’un des livres les plus forts du romancier, et c’est que la nuit est noire, en effet, sans l’apparence d’une étoile au ciel.

Dans ses chroniques, Victor se trompe plus d’une fois. 70 ans après, il est aisé de le constater. Il se trompe, mais le plus frappant est qu’il a surtout raison. Sur les tendances lourdes. Sur la liberté. Sur la dictature. Sur la guerre. S’il se trompe, quand il se trompe, c’est lorsqu’il convoque des espoirs chimériques dans une révolution qui ne viendra pas. Mais peut-il faire autrement ? Mais peut-il survivre à pareil désastre de l’homme sans espérer, sans miser sur un au-delà de la barbarie ? Moi, je sais bien que non. Je sens, par-delà les décennies, combien cet homme m’est fraternel. Combien je me sens proche. Combien je lui dois, que je ne pourrai jamais rendre. Ami !

57 réflexions sur « Sur Victor Serge (et donc sur moi) »

  1. Oh, il y en a un aussi qu’il ne faut pas oublier.
    Un gars qui le er Mai 1938 distribuait des tracts dénonçant les purges du Stalinisme sur la Place Rouge !!
    Et qui n’a pas été inquiété !!
    C’était le physicien Lev Landau… Un monument de la Science ambulante connu du monde entier.
    Et le Communisme était Science.. Alors Staline n’a pas pu l’envoyer au Goulag…
    Maintenant en Russie on dit plutôt que si le Communisme avait été une science on aurait commencé à le tester sur les souris..

    Mais la physique de Landau en 12 tomes, si on l’a sur ses rayons, on la conserve précieusement.
    Une certaine poésie dans le Science..
    @+

  2. Victor Serge « le rétif »…Je ne sais plus où j’ai lu ça…Quand on est franc on est pas « politiquemment correct »!

    Quelque part il n’a pas tord; cette guerre et ces évènemments ont façonnés notre manière de penser; encore début de ce siècle…Les gens qui ne savent pas; ne veulent pas voir; et bcp qui savent n’ont plus l’espoir d’autre chose…La déception de ce qu’est devenue cette « révolution-barbarie » a marqué notre inconcsient collectif; il faut être « raisonnable »; louvoyer avec le « mal » pour « survivre »…Il n’y a que les « gentils » et les « méchants »…Plus de place pour le gris; l’entre deux et l’imaginaire qu’il entraine…
    Nous sommes privé de notre imaginaire; qui nous aide tand à espérer…Parfois je désespère aussi!

    Surtout quand je m’occupe de « gamins dis difficile » qui sont simplement sans immaginaire; privé de culture; ils ne voient pas de bout du tunnel…On devrait peut-être simplemment faire une marche pour montrer à tous ces gosses sans espoir que quelque chose d’autre peu exister??? Leur restituer ce que leur ainés ont fait ou pas fait pour eux! Est-ce si chimérique d’espérer???
    Ils ont dénaturé notre idée de liberté; ils nous ont bridés; ils nous disent que ce qu’on vit c’est le meillieur moyen d’être libre sinnon on referrait les même erreurs que par le passé…Plus j’avence; et plus je pense que le « devoir de mémoire » est perverti; il faut partir sur autre chose…C’est ça qu’ils nous ont offert nos ainés; la liberté d’imaginer autre chose!

  3. réenchanter le monde , il faudrait

    mettre du poétique dans le politique (cf Edouard Glissant)
    c’est peut-être ça la révolution?

  4. Au sujet de Bonnot, c’était déjà un criminel au moment où il a rejoint le mouvement anarchiste de Victor Serge dont il a détourné quelques membres . Quand Victor héberge deux de ses complices, ceux-ci ont tiré sur une ou deux personnes La suite est connue : meurtres en série, sièges des habitations des principaux acteurs de cette tragi-comédie et morts .
    Et oui, au nom de quoi les aurait-il stopper ?
    L’idée d’anarchie justifiait-elle tout ceci ? Le sans dieu ni maitre aurait la légitimité de s’imposer par les armes en maitre et dieu ? Je ne pense pas . Sur ce coup là, Victor s’est à mon sens largement fourvoyé .

  5. @ Fabrice, dans ce que j’ai écrit précedement ne remettait pas en cause le courage politique , au sens noble du terme, de Victor Serge . Sa pensée et ses écrits restent remarquables . C’était un homme sans compromission , courageux et je crois, profondément bon .
    par ailleurs, je sais fort bien qu’il se défiait de l’illégalisme .
    Mais au sujet de la bande à Bonnot, quand tu dis « au nom de quoi les aurait-il dénoncés » ou stoppés , et bien, au nom de ses convictions, non ? ce n’est certe pas très reluisant, mais c’est une forme de courage également . Bon, Victor avait environ 20 ans …
    Les deux personnages en question (dont je ne sais plus le nom) ont tué par la suite des innocents sans somation , effrayant même leur « chef » Bonnot .
    De ce fait ils ont connu une fin plus triste encore que s’ils n’avaient tué .

  6. Bénédicte,

    Je crois qu’il faut perpétuellement se garder du risque d’anachronisme. Cela vaut pour toi, pour moi bien sûr, pour tous. En l’occurrence, je crains que tu n’y sois en plein. Plaquer un principe abstrait sur une réalité concrète et déjà ancienne, cela pose de légers problèmes.

    Pour ce qui me concerne. Un, la révolte est la révolte. Serge n’a jamais participé à « la bande à Bonnot », mais il en connaissait les membres. Aurait-il dû les donner à la Préfecture de police, dont les agents tiraient sur les grévistes et les manifestants du Premier mai. Moi, je sais bien que je ne l’aurais pas fait. Deux, bien que ne ressentant aucune sympathie posthume pour Jules Bonnot, je me sens bien proche du petit gars appelé André Soudy, guillotiné le 21 avril 1913, à l’âge de 21 ans. Il n’avait tiré sur personne. Il refusait ce monde. Ses dernières paroles : « Il fait froid, au revoir ! ». Un autre anachronisme, il est vrai.

    Fabrice Nicolino

  7. @ Fabrice, je ne parlais pas de Soudy et tu le sais bien . Oui, bon, raccourci, anachronisme … Serge ne connaissait pas seulement les membres, il a hébergé les plus violents . Aurais-je secouru des assassins en 1911 sachant ce qu’ils encouraient ? Je ne suis évidement pas pour la peine de mort . A ce sujet, aucun bouquin d’histoire ne parle du sort des familles des hommes assassinés par la bande . Le montant des allocs en 1900 ?

  8. Victor Serge tient une place de choix dans le très beau roman de Michel Ragon « La mémoire des vaincus », dont je peux que recommander vivement la lecture.
    Hormis ce que j’en ai appris par Ragon, je ne connais presque pas Victor Serge et, pour le découvrir, j’envisage de lire prochainement « Les mémoires d’un révolutionnaire ».

  9. Victor Serge nous éloigne sans doute du thème de ce blog et Bonnot peut-être encore un peu plus – mais qui sait ?

    Pourquoi ne pas prendre, sur la question, l’avis d’un contemporain, en outre écrivain catholique ? Léon Bloy (1846-1917) en parle dans son « Journal », à la date du 29 avril 1912. On entrevoit que lui et Bénédicte ne sont pas tout à fait de la même paroisse – et quant à moi, ça me ravit. Voici :

    « L’événement qui remplit toutes les feuilles et toutes les cervelles, c’est la capture et la mort de l’anarchiste Bonnot, chef d’une bande qui terrifiait Paris et la province depuis des semaines : vols, cambriolages, assassinats. En remontant jusqu’à Ravachol, je peux dire que je n’ai rien vu de plus ignoble, de plus totalement immonde en fait de panique et d’effervescence bourgeoise.

    Le misérable s’était réfugié dans une bicoque, à Choisy-le-Roi. Une multitude armée a fait le siège de cette forteresse défendue par un seul homme qui s’est battu jusqu’à la fin, quoique blessé, et qu’on n’a pu réduire qu’avec une bombe de dynamite posée par un héros (!) qui a opéré en se couvrant d’une charrette à foin et cuirassé de matelas.
Les journaux ne parlent que d’héroïsme. Tout le monde a été héroïque, excepté Bonnot. La population entière, au mépris des lois ou règlements de police, avait pris les armes et tiraillait en s’abritant. Quand on a pu arriver jusqu’à lui, Bonnot agonisant se défendait encore et il a fallu l’achever.

    Glorieuse victoire de dix mille contre un. Le pays est dans l’allégresse et plusieurs salauds seront décorés.

    Heureusement Dieu ne juge pas comme les hommes. Les bourgeois infâmes et tremblant pour leurs tripes qui ont pris part à la chasse, en amateurs, étaient pour la plupart, j’aime à le croire, de ces honorables propriétaires qui vivent et s’engraissent de l’abstinence ou de la famine des pauvres, chacun d’eux ayant à rendre compte, quand il crèvera, du désespoir ou de la mort d’un grand nombre d’indigents. Protégés par toutes les lois, leur infamie est sans aucun risque. Sans Dieu, comme Bonnot, ils ont l’hypocrisie et l’argent qui manquèrent à ce malheureux. J’avoue que toute ma sympathie est acquise au désespéré donnant sa vie pour leur faire peur et je pense que Dieu les jugera plus durement.

    Cette brillante affaire avait nécessairement excité la curiosité la plus généreuse. Ayant duré plusieurs heures, des autos sans nombre avaient eu le temps d’arriver de Paris, amenant de nobles spectateurs impatients de voir et de savourer l’extermination d’un pauvre diable. Le comble de l’infamie a été la présence, dans les autos, d’une autre armée de photographes accourus, comme il convient, pour donner aux journaux tous les aspects désirables de la bataille »

  10. Jean-Luc,

    Bloy ! Il n’est pas nécessairement ma tasse de thé favorite, mais quel élan ! Quel ton ! Quelle furie ! Quand je pense à l’eau tiède qu’on nous sert chaque matin… Pendant que j’y suis, hommage à Marius Jacob l’anarchiste, le cambrioleur frénétique, héroïque, magnifique, qui servit d’inspiration pour le pâle Arsène Lupin. Et chapeau bas devant Darien, ce grand romancier oublié, auteur, entre autres, de Biribi et Le Voleur.

    Fabrice Nicolino

  11. @ Jean-Luc, mais bien évidement,d’après vous j’aurai fait partie de la foule de bourgeois qui assista en transe au massacre de Garnier et Callemin puis qui voulu réduire en bouillie leurs corps que la flicaille défendit avec grand peine .
    D’après vous il y a les poètes et les autres !
    Si vous pouviez arrêter deux secondes d’être en plein manichéïsme , c’est agaçant à la fin ces réductions !

    Je soulignais le fait que le grand Victor Serge, aurait peut-être pu agir autrement pour tenter d’éviter une si terrible fin et que la limite entre la justice et le non-droit n’est pas toujours si poétique, si évidente .

  12. C’est à Nogent sur marne que Garnier s’est fait massacré par un régiment de dragons. Callemmin s’était déjà fait arrêter

  13. tiré du site rebellyon info :

    « …Il reste deux membres de la bande à Bonnot en liberté. Garnier et Valet sont toujours en cavale. Ils logent dans un pavillon de banlieue à Nogent-sur-Marne. Le 14 Mai la sûreté les a repéré. Pour éviter la mascarade de Choisy tout a été fixé et préparé dans le plus grand secret. Ce sera pire. Le pavillon est cerné et les inspecteurs de la sûreté entrent dans le jardin ou ils sont accueillis à coups de pistolets. Le siège le plus fou de toutes les annales de la criminalité va commencer. Pour tuer Garnier et Valet, il faudra neuf heures de fusillades nourries, des centaines de policiers, un bataillon de zouaves sur le pied de guerre. Sans parler de plusieurs mitrailleuses lourdes mises en batteries. Durant la fusillade plusieurs inspecteurs de police sont touchés. Un nouveau bataillon de zouaves, soit trois cents hommes, arrive au pas de gymnastique. Ils sont salués par les ovations de la foule de plus en plus dense. Deux cents gendarmes, munis de leurs carabines, se placent en embuscade tandis que des zouaves postés sur un viaduc projettent d’énormes pierres sur la toiture. Puis le pavillon est dynamité, la toiture s’est envolée mais les deux hommes sont toujours là. La nuit est tombée maintenant.

    A minuit quarante mille personnes au moins se massent aux abords du pavillon. Deux compagnies de zouaves supplémentaires sont dépêchées. On tente de dynamiter le pavillon une nouvelle fois sans succès. Valet et Garnier se déchaînent et un inspecteur est de nouveau tué. La troupe arrête le feu faute de munitions. Le ministre de l’intérieur arrive sur les lieux. Après avoir éventré le pavillon à la dynamite, les policiers tentent une approche. Tout à coup, c’est la débandade. Garnier et Valet les mitraillent à bout portant. La fusillade a fait deux blessés. Enfin, sonne le « cessez-le-feu ». Ce sera le dernier.. Soldats, policiers, pêle-mêle, se lancent à l’assaut. La bousculade est générale. Ils arrivent enfin dans la pièce où sont retranchés les deux hors-la-loi. Le spectacle est hideux. Du sang, partout. Sur le plancher, sur les murs. Des douilles de balles par centaines. Il est deux heures du matin. Les deux assiégés tirent toujours, blessant plusieurs agents. Ils tiendront ainsi en respect plus de 500 militaires, ainsi qu’une foule hystérique. Trois heures, tout est accompli. Octave Garnier et René Valet tentent une dernière fois de tirer puis sont abattus. On découvrit alors les corps de ces deux jeunes de 22 ans et 21 ans, criblés de balles. Le siège a duré plus de neuf heures.

    Ce 15 mai 1912, cent mille personnes se précipiteront sur les lieux du drame. Le lendemain, les corps sont jetés dans la fosse commune du cimetière de Bagneux. Dans la poche d’Octave Garnier, on trouvera ces mots : « Réfléchissons. Nos femmes et nos enfants s’entassent dans des galetas, tandis que des milliers de villas restent vides. Nous bâtissons les palais et nous vivons dans des chaumières. Ouvrier, développe ta vie, ton intelligence et ta force. Tu es un mouton : les sergots sont des chiens et les bourgeois sont des bergers. Notre sang paie le luxe des riches. Notre ennemi, c’est notre maître. Vive l’anarchie. »

    Bonnot et ceux de sa bande tués ou assassinés par la police, restaient leurs complices toujours incarcérés. Le procès débute à Paris le 3 février 1913. Le 27 février, après 25 jours de débat, s’achève le procès des survivants de la « Bande à Bonnot ». La vindicte publique, par l’entremise de ses juges, peut éclater : Raymond Callemin, André Soudy, Antoine Monier, et Eugène Dieudonné sont condamnés à mort ; Paul Metge et Edouard Carouy sont condamnés aux travaux forcés à perpétuité (ce dernier se suicidera par empoisonnement le lendemain dans sa cellule). Pour les autres complices ou supposés tels : Jean De Boé : dix ans de travaux forcés ; Raymond Gauzy : 18 mois de prison ; Victor Kilbatchiche : 5 ans de prison. Seule Rirette Maitrejean est acquittée.

    Les condamnés à mort Raymond-la-science, Soudy et Monier sont exécutés par la guillotine le 21 avril 1913 devant la prison de la Santé. Monier laisse comme testament : »Je lègue à la Société mon ardent désir qu’un jour, peu lointain, règne dans les institutions sociales un maximum de bien-être et d’indépendance, afin que l’individu, dans ses loisirs, puisse mieux se consacrer à ce qui fait la beauté de la vie, à l’instruction et à tout ce qui est science. »

    Voilà . Maintenant, Marius Jacob volait les riches avec une virtuosité incroyable pour rendre aux pauvres le fruit de leur travail en mettant un point d’honneur à ne pas tuer .

    Bonnot et sa bande furent des victimes de leur société , mais également pour certains d’entre eux, des assassins , de flics, de receveurs, de porteurs, de boulanger bref également de figurants malchanceux . Des hommes libres, au moins de leurs choix,que rien ne stoppa avant la tragédie finale , et non des icônes . je ne dis rien d’autre et encore moins qu’ils méritèrent cette fin barbare .

  14. @ Fabrice : « Bloy ! Il n’est pas nécessairement ma tasse de thé favorite. » C’est un peu dommage. Tu rigolerais plus que tu ne crois. Rien que le titre de sa petite revue, « Le Pal », ça te console du « Nouvel Observateur » 😉

  15. @ Bénédicte : manichéenne vous même. J’ai seulement dit que vous et Bloy, vous ne sentez manifestement pas les choses de la même façon. C’est tout. Et puis c’était un autre temps. Vous êtes du vôtre. La preuve : vous n’êtes « évidemment pas » pour la peine de mort. Comme c’est admirable !

  16. Mais quoi le meq c’est un assassin??? Et les délégués français qui visitèrent l’ukraine alors que Staline l’affamait; et qui n’y voyait rien et trouvaient les camps de travail sympa aussi??? L’allemand qui à voter pour Hitler??? Les types qui pontifie la chine? Celui qui veut dévloper du « pauvre » à coup de « bonnes intentions »? Celui qui prone Chavez? Celui qui a deux trois actions de BP sans le savoir? Le gamin qui a un pote daeler? L’israélien qui construit un mur sans en avoir envie? Tous ces gens sont des assassins; ils n’ont pas droit à un « procès »???
    Qui est manichéiste ici en répondant à une gentille provoc? Le monde n’est ni blanc ni noir; et l’humain encore moins; on fait tous des erreurs…Quand on attrape une pensée bipolaire on ne sait plus qui décide du bien et du mal pour nous; et ça porte bien son nom « stratégie du choc »…Ou alors on ne fait plus confiance en personne; on ne fait plus d’erreur et on n’a plus rien d’humain…Et c’est là qu’on dérrape grave!
    La provoc ouvre l’esprit; la morale à tendance à le réduire; ou alors je vieilli vraimment mal!

  17. Enfin, si et je pars au charbon ! Bonnot demeure à mes yeux également victime de son propre jugement et bourreau . Jamais je ne confondrai l’idée de liberté avec celle de la violence omnipotente . Il y a un monde entre l’anarchie et la barbarie .

    « Oeil pour oeil et le monde finira aveugle  » . je n’ose à peine entrevoir ce qu’il serait advenu de l’Inde voisine de la Chine et de la Russie si elle n’avait connu l’originalité de sa révolution non-violente .

  18. Jean-Luc, Bénédicte, Fabrice et à tous et toutes. Si je comprends bien ses insinuations, Jean-Luc sous-entend que Bénédicte n’aurait pas été contre la peine de mort à l’époque de la bande à Bonnot, et qu’elle n’a aujourd’hui aucun mérite à l’être puisque l’abolition de la peine de mort est entrée dans la loi et devenue la pensée majoritaire. Sous-entendu, Bénédicte est simplement conformiste.

    L’un de mes repères, celui que je convoquerais bien à ce stade du débat, c’est un autre Victor, à savoir : Hugo qui a lutté toute sa vie contre la peine de mort qui est : « le signe spécial et éternel de la barbarie. » (Discours à l’Assemblée constituante le 15 septembre 1848.) Contre ce « meurtre judiciaire », il avait écrit à 27 ans un roman manifeste : « Le dernier jour d’un condamné ». Ainsi, l’argumentation avait été solidement établie par ce géant qu’était Victor Hugo et il n’était pas anachronique d’être contre la peine de mort à la fin du 19ème siècle et au début du 20ème.

    Autre chose, s’il était un ardent pourfendeur des injustices, Hugo était profondément humaniste. Et il y cela : l’humanisme, dans les fondements de la démocratie que l’on semble ici vouloir jeter un peu vite, et selon moi imprudemment, par-dessus bord. Si elle passe par les élections, la démocratie est constituée de valeurs et ne se résume pas aux élections (qu’elles soient respectées ou, comme nous savons, bafouées, perverties ou instrumentalisées par le système).

    Léon Bloy était un écorché vif, un enragé (catholique ou chrétien, je ne sais plus) et une sacrée plume. Mais ensuite quoi ? Flinguer le premier patron venu ? Se pendre ? Entrer dans les Ordres ?

    Il me semble qu’il faudrait aussi convoquer Lanza del Vasto qui jeûna pour le Larzac et fut aussi présent à la manif antinucléaire de Malville en 1976. On le voit en photo avec sa barbe blanche passant un rang de CRS. Il faudrait relire (dans « Les facettes du cristal » Ed. Le centurion) ce qu’il dit sur la réussite de la lutte pour le Larzac et l’échec de la lutte contre la bombe atomique et l’industrie nucléaire. Pour lui, « quand un mouvement est vraiment soutenu par les gens du pays, il a des chances de gagner. » Mais surtout, pour lui, « la révolution… commence par soi-même et… s’appelle conversion. Et, à partir de là, oui, changement des institutions, mais non pas sans cela. »

    Je commente. Selon lui, la révolution, il emploie le mot, commence par soi-même, commence par l’intérieur, ce qui signifie cesser de se fuir et se connaître (en profondeur). Et là, ce n’est pas une mince affaire. Qui en a l’énergie ? Affronter les diables intérieurs avant d’affronter les diables extérieurs ? Ou affronter les diables extérieurs pour ne pas affronter les diables intérieurs ?

    Les techniques de la non-violence qu’il a mise en œuvre à la suite de Gandhi sont rigoureuses et demandent un grand savoir-faire. (Au passage, qui a jeté un cocktail Molotov contre l’agence bancaire en Grèce. Des gauchistes ou des provocateurs, tuant dans l’œuf la protestation et l’occasion d’un changement ?) Lanza del Vasto était très au fait des enjeux. Il a réuni des entretiens qu’il a tenus sous le titre « Pour éviter la fin du monde. » (Les éditions La Presse.) Cependant, il ne croyait pas à la fatalité. Il était très inquiet mais pas en colère contre les gens. Il ne haïssait pas les responsables ni les acteurs innombrables des catastrophes qui se profilent. Je n’ai pas sa grandeur d’âme. Mais Bloy et Lanza del Vasto étaient portés par leur foi…

    Le Larzac a été libéré du projet d’extension du camp militaire mais les nucléocrates et le système de la marchandisation du monde l’ont emporté. Alors, selon Lanza del Vasto : « Le châtiment, c’est le pêcheur qui se l’applique. Avec un zèle merveilleux. Voyez-les avec leur Bombe ! ». Traduction en langage profane : « La sanction, le système va se l’appliquer lui-même… » Entre autres choses, nous voyons ce qui se passe dans le Golfe du Mexique.

    Dans un entretien au journal Fakir, Maurice Kriegel-Valrimont, ancien résistant qui signa après la seconde guerre mondiale le texte créant la Sécurité Sociale, rappelle qu’il n’aurait pas imaginé en 1934, vu le climat existant alors en France, que le Front populaire aurait lieu deux ans après, ni imaginé en 1942 avec ses camarades résistants (ils étaient en prison) que Paris serait libéré en 1944.

    Pour des raisons environnementales, nous savons que allons dans le mur à terme si nous continuons sur la lancée actuelle mais, sur le plan social, la résignation que nous déplorons ne nous dit rien sur la suite.

    Au moins, la question pour chacun serait : quelle conduite tenir ? Que penser qui ne soit pas faux ? Comment ne pas contribuer à la catastrophe ? Car si ça continue nous allons finir par la désirer, ne serait-ce que pour avoir raison. Et ça, selon moi, s’appelle la complaisance, complaisance morbide. Ainsi, il faut que nous soyons armés d’une pensée qui vaille la peine. Sinon nous ne serons pas suivis. Or, l’adversaire a déployé tous ses charmes (la société de consommation) et détient en plus toutes les armes. Salut à tous et toutes.

  19. @janot lapin, merci pour ce commentaire constructif qui dépasse le stade de l’invective . J’ai découvert Victor Hugo avec « le dernier jour d’un condamné » . J’avais quinze ans . Quelle émotion ! Et puis merci pour ces très beaux rappels .
    Oui , comment ne pas contribuer à la catastrophe ? Quelle conduite tenir ?
    S’armer d’une pensée qui vaille la peine et s’y tenir … défend-t-on la vie en brandissant la mort ? Je ne pense pas . je suis même certaine, en pensant à l’histoire humaine que cela à toujours conduit aux pires catastrophes . cela fait de moi une conformiste ? J’assume à 100% . Si une révolution doit changer le cours de l’histoire elle ne se fera que dans le changement des comportements, elle prendra l’adversaire par surprise .

    @ Sylvianne vous mélangez absolument tout mais nous sommes d’accord : le monde n’est pas blanc et noir .

    @ jean-luc, ne serions nous pas de la même époque ?

  20. @Jean-Luc. « Et puis c’était un autre temps. Vous êtes du vôtre. La preuve : vous n’êtes “évidemment pas” pour la peine de mort. Comme c’est admirable ! » Laissons de côté le ton condescendant. Vous croyez donc qu’en France la majorité des gens est contre la peine de mort ? Sérieusement ?! 42 % des personnes ayant répondu à un sondage de 2006 se sont déclarés pour la peine de mort. Or on sait très bien qu’avec ce genre de question, il y a toujours un biais important dû au sentiment qu’ont les sondés qu’il est mieux vu de répondre comme ci plutôt que comme ça. Et par ailleurs, une part de ceux qui se croient réellement contre la peine de mort, quand on les titillent un peu, avouent qu’en effet, quand même, dans certains cas, elle serait méritée. Bref, ils sont pour. De mon côté, je ne doute guère qu’un référendum sur le sujet donnerait un résultat allant dans le sens d’un rétablissement. Peut-être suis-je un peu pessimiste, mais je crains qu’en moyenne plus d’une personne sur deux croisées dans la rue soit pour que certains criminels soient coupés en deux.

  21. @ parpalhol , oui ! Chomsky…la créativité de l’être humain , le pouvoir des multinationales, l’étude du langage …. A lire ou relire !

  22. D’ailleurs, si la peine de mort avait l’objet d’un référendum en 1981, elle n’aurait sûrement pas été abolie. La France a été le dernier pays d’Europe occidentale a avoir aboli la peine de mort.

  23. @ Bénédicte;

    Oui je mélange toujours tous; c’est une spécialité d’un cerveau gauche dislexique…Sa me donne du recul que j’assume! 😉

  24. il y a quelque chose que je ne comprends pas avec cette peine de mort; ..et je ne sais ce que c’est, exactement…anachronisme et Victor Hugo…auteur des « misérables » ; Hugo décrit une société dont les règles établies font que la méchanceté peut s’exercer sans frein et avec une injustice terrible sur les faibles et les pauvres, on envoie des gens au bagne pour avoir VOLE DU PAIN! bêtes comprises d’ailleurs..on comprend dans ce contexte que cet esprit soit contre la peine de mort;..mais de nos jours..la barbarie prend de droles de visages monstrueux, souvent creés par la drogue dure (cocaine et heroine)(Affaire Allègre et compagnie): « Faites entrer l’accusé » dont on peut dire ce qu’on voudra, mais qui décrit bien certains faits divers criminels via famille des auteurs, des victimes, policiers, juges journalistes etc..l’autre jour une histoire qui m’a vraiment écoeurée.. Frédéric audibert (plus trop sure du nom)…voilà un monsieur costaud de bonne famille, pas mal adonnée à la drogue, à l’alcool, qui dans son parcours de vie roue de coups un certain nombre de ses compagnes..un jour tombe sur une plus fragile adonnée elle aussi un peu à l’alcool; vont s’installer dans un fond de vallée dans les alpes maritimes..élève une dizaine de chiens, un peu la zone..ont un bébé: Antoine 3 mois , quelle pitié de voir ce petit visage! et puis un jour femme et bébé disparaissent…photos ou on voit une femme morte ou à l’agonie: aveu après avoir raconté un tas de sornettes: oui je l’ai tuée (à coups!) puis : »le bébé est vivant pas de problème »..oui.. ok en attendant ce petit être n’est evidemment jamais retrouvé! il fait des menaces à la famille de sa victime pendant son procès..et voilà ce gros salopard en prison! mais enfin dans le fond il est encore vivant, lui, après avoir massacré des créatures plus faibles que lui, avoir fait peur, avoir menti sur le sort de ce petit que d’aucuns dans le village disent avoir été donné en pature aux chiens, ou bien mort de faim! Face à des gens de cette sorte, quel est le top de la civilisation: le laisser vivre a perpétuité, en prison enfermé sans aucun espoir de sortie? ou lui oter la vie pour avoir enfreint un trop grand interdit social oter la vie de cette façon à plus faibles! Franchement la question peut se poser. même type de dilemne avec le film de Chabrol, tiré d’une hitoire vraie : « La cérémonie ».

  25. @Marie, la peine de mort n’était pas abolie lorsque j’étais enfant, et les débats m’ont marquée . je ne vais pas épiloguée , j’ai toujours été contre . ce n’est une solution pour personne, pas même pour les victimes pour moultes raisons .
    C’est sûr que la tôle en France ne fait pas grandir et ne guérit personne .

  26. sans doute hacène,le probleme est noueux,et soit meme,si un membre de notre famille,sa petite ami(e)était massacré par un cinglé comme on en voit dans les fusillades en ce moment ;voudrions nous pas que le bourreau soit massacré?

  27. @ marie, j’ai découvert la guillotine avec des yeux d’enfant . On l’appelait « la bascule à Charlot » . Etant une grande fan de Charlot, je pensai qu’il s’agissait d’un engin rigolo . Le méchant glissait sur une sorte de tobogan, un millième de seconde avant, il respirait , celui d’après, il avait disparu . Couic, plus de méchant .
    La série des vieux fantomas passait alors sur le petit écran . A la fin, Fantomas s’en tirait toujours en maquillant un cadavre ou bien en envoyant à sa place un innocent à l’échafaud . J’ai alors compris toute l’horreur de « la bascule à Charlot » . Je me souviens également d’un instituteur :  » mes enfants, sous la terreur , le sang coulait jusqu’à la seine tellement il y avait d’exécution à la Guillotine , mais sans le grand Robespierre, pas de république ! « .

  28. de toute façon nous sommes ici confrontés au registre tragique de l’humanité, alors soit la société laisse enfermé, soit elle supprime; il y a quelques années de çà des détenus avaient manifesté pour le retour de la peine de mort trouvant inhumain de rester le reste de ses jours en prison.

  29. Benedicte bien avant Robespierre les manants, les vilains étaient soumis à un tas de très mauvais traitements ; tortures, vols, injustice, taxes etc..etc..il a fallu de longues années pour que cette dure et méprisante noblesse relâche son emprise sur ces gueux et serfs; il a fallu emblématiquement couper la tête du roi, et prendre la Bastille; nous qui sommes repus de tout, nous ne pouvons plus comprendre je crois bien..et c’est pourquoi j’ai peur que un de ces quatre l’humanité assoupie et seulement virtuellement indignée ne se retrouve mise en captivité par un système implacable.

  30. @ bénédicte; j’avais pas vu;
    Je ne suis pas claire; parce que j’ai un cerveau de dislexique gauchère…Je n’ai aucune finesse d’expression; je ne devrais même pas débattre!

  31. oh, Sylviane, écoute çà le règne de la connerie en bouteille: un entrepreneur écossais, ex fonctionnaire de l’ONU se propose de vendre de l’eau de mer en bouteille, purifié, 6 euros la bouteille pour cuisiner, aini même ceux qui n’habitent pas au bord de mer pourront en profiter!

  32. @Slider. C’est un fait qu’à chaud, si l’on nous enlève un être cher, on ait des envies de faire couler le sang. C’en est un autre, à froid, de penser que ce serait bien. Il est très probable que j’aurais envie de trucider le salaud qui tuerait ma chère et tendre ; il n’empêche que je considère comme un bien que la société ne le permette pas, pas plus qu’elle ne le fasse à ma place après jugement.

  33. Pardonner Gérard Bessiére

    Ceux qui pardonnent sont
    les guérisseurs de l’humanité.

    Plutôt que de ressasser l’offense
    ou le dommage, plutôt que de rêver
    de revanche ou de vengeance,
    ils arrêtent le mal à eux mêmes…

    Pardonner, c’est l’acte le plus puissant
    qu’il soit donné aux hommes d’accomplir.

    L’événement qui aurait pu faire grandir
    la brutalité dans le monde
    sert à la croissance de l’amour.

    Les êtres blessés qui pardonnent
    transforment leur propre blessure.

    Ils guérissent, là où ils sont, la plaie
    qui défigure le visage de l’humanité
    depuis ses origines : la violence.

  34. Aie,

    J’ai omis la fin.Suis je impardonnable?

    L’homme qui pardonne ressemble
    à Jésus, et rend Dieu présent.

    🙂

  35. Vous n’êtes pas si loin que cela du sujet du blog. La pensée de Victor Serge était ‘planétaire’ (expression qu’il prend à Gorky) et il comprenait profondément les liens entre les hommes et la nature, comme on voit dans ses romans. Il a inventé l’expression ‘pandestruction’ pendant la 2e Guerre pour décrire l’ère où on entrait.

    (NB J’aime beaucoup Serge. C’est moi qui ai donné la préface à cette collection.)

  36. @ Marie, à la fac j’étais en histoire … « L’humanité assoupie  » , tu la crois d’une si grande taille ?

  37. béné (tu permets ce petit nom? )je crois que je n’ai que vaguement compris ta phrase, je crois; mais j’en sais rien, sauf que quand (admires l’harmonie des mots : que quand!) on « réféchit » 2 secondes tout semble « conspirer » pour nous mener vers le pire! Marée noire : eh bien les gars: çà va couler jusqu’en aout! Adieu hérons blancs!va-t-on se réveiller de ce cauchemar de dimension jusqu’ici inconnu dans l’histoire qd même (sauf quelques dates..)

  38. @ marie , je veux dire qu’il n’y a pas tant de nantis que cela . 800 millions de pauvres sur plus d’un milliards de chinois, 12 millions d’enfants souffrant de la fin aux états-unis, etc . tous masqués par les écrans de notre grand monde industrialisé et civilisé .L’humanité se débat et survie en majorité .

    Tout conspire à nous mener vers le pire, oui . Je rêve d’un élan, d’un miracle, d’un je ne sais quoi . Nous avons le devoir d’espérer , de croire , de nous lever .

  39. Bénédicte. Encore un mot. J’aurais peut-être dû le préciser car il subsiste peut-être un petit doute dans ton esprit malgré ma démonstration. Je ne reprenais évidemment pas à mon compte le sous-entendu de conformisme à ton encontre. Vu ta sensibilité et ton engagement, cette qualification m’apparaissait réductrice et injuste. C’est pour cela que j’ai réagi. Ta réponse me conforte dans mon ressenti. De fait, on est pas conformiste quand on lit à 15 ans « Le dernier jour d’un condamné » de Victor Hugo, que ce livre compte et oriente à vie une pensée.

    Ceci précisé, je ne connais pas Jean-Luc et j’apprécie qu’il ait convoqué Léon Bloy. Il est bon de ré ouvrir ces fenêtres-là, surtout quand règnent les ingénieurs, les commerciaux et les communicants infiltrés jusqu’à la tête de l’Etat. Léon Bloy dirait probablement et à raison qu’ils prostituent la République.

    Je n’ai pas un avis définitif sur la question du changement. Sous-jacente actuellement au débat : celle de la violence révolutionnaire. Nous ne la résoudrons pas. C’est probablement impossible. La violence ne peut pas être exclue absolument mais ne pourrait être justifiée, après coup, qu’au cas par cas. On peut toutefois se demander pourquoi cette question surgit actuellement. C’est probablement dû au manque d’efficacité des démarches politiques et citoyennes classiques pour remédier à l’injustice et aux dangers environnementaux et autres qui nous menacent, et aussi à l’aggravation considérable de la violence institutionnelle.

    Pour la France et ses habitants non privilégiés, on peut parler de maltraitance, y compris de maltraitance morale et psychologique, par Sarkozy et son clan de prédateurs. Concernant les conséquences dommageables du capitalisme sur la planète, Jean Ziegler considère qu’il y a crime contre l’humanité, à ce jour impuni ni même encore qualifié. C’est pour tout cela, si j’ai bien compris, que Fabrice parle des « salauds ». C’est le mot que j’utilise pour la droite depuis la nomination par Chirac de Raffarin au poste de premier ministre. Pourquoi salauds ? Parce qu’ils ne peuvent pas ne pas savoir.

    Mais qui peut dire qu’il n’est pas, à sa propre mesure, un salaud, à certains égards ? Le fait même de l’individualité est constitutif de la saloperie – laquelle sépare l’un de l’autre. Je suis persuadé que nous ne pouvons y échapper que par la transcendance, que nous pouvons y échapper par la transcendance, ce qui ne veut pas dire quitter la réalité mais au contraire la connaître, savoir vraiment ce qu’il en est de soi, d’autrui et du monde. Gandhi et Lanza del Vasto étaient sur ce chemin.

  40. @ Janot , merci encore pour ton ouverture et ta gentillesse .
    Au sujet de la violence, lorsque je citai celle de la terreur, c’est parce qu’à mes yeux, ce n’est pas celle-ci qui a forgé la république et elle ne lui était pas nécessaire .
    J’ai cité Gandhi dans mon dernier commentaire :

    J’espère que Fabrice ne m’en voudra pas de le remettre ici .

    je crois en la différence, au courage , Si l’homme a conscience qu’il est un être vivant, qu’il est né et qu’il mourra, ce qu’ignorent les étoiles , il doit s’en montrer digne .

    Discours de Gandhi 30 Décembre 1931 à Genève

    “Comment les travailleurs pourront-ils obtenir leur justice sans violence ? Si les capitalistes emploient la force pour supprimer leur mouvement, pourquoi ne s’efforceraient-ils pas de détruire leurs oppresseurs ? Réponse : Cela, c’est la vieille loi, la loi de la jungle : oeil pour oeil, dent pour dent. Comme je vous l’ai déjà expliqué, tout mon effort tend précisément à nous débarrasser de cette loi de la jungle qui ne convient pas aux hommes.

    Vous ne savez peut-être pas que je suis conseiller d’un syndicat ouvrier d’une ville appelée Ahmedabad, syndicat qui a obtenu des témoignages favorables d’experts en ces matières. Nous nous sommes efforcés de toujours employer la méthode de la non-violence pour régler les conflits qui ont pu s’élever entre le capital et le travail, au cours de ces quinze dernières années. Ce que je vais vous dire est donc basé sur une expérience qui est dans la ligne même du sujet auquel se rapporte cette question.

    À mon humble avis, le mouvement ouvrier peut toujours être victorieux s’il est parfaitement uni et décidé à tous les sacrifices, quelle que soit la force des oppresseurs. Mais ceux qui guident le mouvement ouvrier ne se rendent pas compte de la valeur du moyen qui est à leur disposition et que le capitalisme ne possédera jamais. Si les travailleurs arrivent à faire la démonstration facile à comprendre que le capital est absolument impuissant sans leur collaboration, ils ont déjà gagné la partie. Mais nous sommes tellement sous l’hypnotisme du capitalisme, que nous finissons par croire qu’il représente toutes choses en ce monde.

    Les travailleurs disposent d’un capital que le capitalisme lui-même n’aura jamais. Déjà à son époque, Ruskin a déclaré que le mouvement ouvrier a des chances inouïes ; il a malheureusement parlé par-dessus nos têtes. À l’heure actuelle, un Anglais qui est à la fois un économiste et un capitaliste, est arrivé par son expérience économique aux conclusions formulées intuitivement par Ruskin. Il a apporté au travail un message vital. Il est faux, dit-il, de croire qu’un morceau de métal constitue du capital ; il est également faux de croire que même telle quantité de produits représente un capital. Si nous allons à la vraie source, nous verrons que c’est le travail qui est le seul capital, un capital vivant qui ne peut être réduit à des termes de métal.

    C’est sur cette loi que nous avons travaillé dans notre syndicat. C’est en nous basant sur elle que nous avons lutté contre le gouvernement et libéré 1.070.000 personnes d’une tyrannie séculaire. Je ne puis entrer dans les détails et vous expliquer en quoi consistait cette tyrannie, mais ceux qui veulent étudier le problème à fond pourront facilement le faire.

    Je veux cependant vous dire simplement comment nous avons obtenu la victoire. Il existe en anglais, comme d’ailleurs en français et dans toutes les langues, un mot très important, quoique très bref. En anglais il n’a que deux lettres, c’est le mot “no”, en français “non”. Le secret de toute l’affaire est simplement le suivant : lorsque le capital demande au travail de dire oui, le travail, comme un seul homme, répond non.

    A la minute même où les travailleurs comprennent que le choix leur est offert de dire oui quand ils pensent oui, et non quand ils pensent non, le travail devient le maître et le capital l’esclave. Et il n’importe absolument pas que le capital ait à sa disposition des fusils, des mitrailleuses et,des gaz empoisonnés, car il restera parfaitement impuissant si le travailleur affirme sa dignité d’homme en restant absolument fidèle à son non. Le travail n’a pas besoin de se venger, il n’a qu’à rester ferme et à présenter la poitrine aux balles et aux gaz empoissonnés, s’il reste fidèle à son “non”, celui-ci finira par triompher.

    Mais je vais vous dire pourquoi le mouvement ouvrier, si souvent capitule. Au lieu de stériliser le capital, comme je l’ai suggéré en tant qu’ouvrier moi-même, il cherche à prendre possession du capital pour devenir capitaliste à son tour. Par conséquent, le capitalisme, soigneusement retranché dans ses positions et bien organisé, n’a pas besoin de s’inquiéter : il trouve dans le mouvement ouvrier les éléments qui soutiendront sa cause et seront prêts à le remplacer.

    Si nous n’étions fascinés par le capital, chaque homme et chaque femme comprendrait cette vérité essentielle. Ayant moi-même participé à l’organisation ou organisé des expériences de ce genre dans toutes sortes de cas, et pendant longtemps, je puis dire que j’ai le droit de parler de cette question, et que je possède quelque autorité en la matière. Il ne s’agit pas là de quelque chose de surhumain, mais au contraire de quelque chose qui est possible à chaque travailleur, homme ou femme. En effet, ce qu’on demande à l’ouvrier ne diffère pas de ce qu’accomplit en certain sens le soldat qui est chargé de détruire l’ennemi, mais porte sa propre destruction dans sa poche.

    Je désire que le mouvement ouvrier imite le courage du soldat mais sans copier cette forme brutale de sa tâche qui consiste à apporter la mort et les souffrances à son adversaire, je me permets de vous affirmer d’ailleurs que celui qui est prêt à donner sa vie sans hésitation et en même temps ne prend aucune espèce d’arme pour faire du mal à son adversaire, montre un courage d’une valeur infiniment supérieure à l’autre. »

  41. Bénédicte. En conclusion de son billet sur « L’éternel principe de la marée noire », Fabrice écrit : « La seule priorité est de ne plus détourner le regard. La seule priorité, c’est la vérité. » Je suis 100% d’accord – sans négliger, sans exclure, sans oublier tout ce qui peut être fait par ailleurs, concrètement, individuellement et collectivement.

    Avec un V majuscule, la quête de la Vérité était le credo, l’affaire principale de la vie de Gandhi. Il le rappelle expressément dans la préface de son (excellente) autobiographie. Il le dit, c’est dans cette perspective qu’il inscrivait son engagement et son action politique. C’était aussi la quête de Lanza del Vasto. Et c’est à « voir ce qui est » que Krishnamurti invitait ses auditeurs et visiteurs. Un autre a dit que voir, simplement voir ce qui est, est un grand art. Aussi, essentielle, l’écoute…

  42. Une petite précision à propos des « salauds » que nous sommes tous plus ou moins, chacun à sa mesure. J’ai écrit un peu plus haut : « Le fait même de l’individualité est constitutif de la saloperie – laquelle sépare l’un de l’autre. » Il faut bien sûr comprendre que le fait même de l’individualité – qui sépare l’un de l’autre – est constitutif de la saloperie.

  43. @ jannot lapin, Krishnamurti !Il était dans ma besace d’étudiante (ça date ! )

    je ne connaissais pas Lanza del Vasto . Vis-tu dans une communauté ?

  44. non mais je ne suis pas d’accord: je ne suis pas ce que tu dis janot lapin.; eh bé non! et on est pas TOUS comme çà, eh bé non!
    que fais-tu donc des anges? moi ce sont mes maitres, je les adore.

  45. Marie,

    « que fais-tu donc des anges? moi ce sont mes maitres, je les adore. »

    Marie,tu n’as nul maître que toi même.Et le grand architecte,mais cela est personnel.

    Bien a toi,Léa.

  46. Bénédicte. Cinq lignes de Krishnamurti, dans l’un de ses livres ouvert au hasard, me collent à chaque fois au mur. Du coup, je devrais arrêter ma lecture, je poursuis néanmoins, sans pouvoir maintenir la fraîcheur du début… J’adore surtout ses « Carnets » (Ed. du Rocher), son « Journal » et les trois volumes de ses « Commentaires sur la vie » (Buchet Chastel). Je ne l’ai jamais rencontré. J’ai connu et suivi pendant des années un autre auteur (francophone) de cette dimension. A ce jour, j’en reste coi. Je ne vis pas dans une communauté mais dans un village et, ma foi, c’est une communauté.

    Lanza del Vasto a beaucoup compté dans les années 70. Noble et impressionnante figure. A deux clics d’ici, j’ai trouvé une vidéo de l’Ina du 7 mai 2009. Il me semble qu’elle vaut vraiment le coup d’être vue en écho à nos préoccupations actuelles. http://www.ina.fr/video/CAF88044221/lanza-del-vasto.fr.html Indépendamment de ce qu’il dit sur « pourquoi la guerre, pourquoi la révolte, » je suis touché par son regard, ses rides comme un paysage, sa gravité, ses gestes, le ton de sa voix.

    Marie. Bon, j’avais précisé « chacun à sa mesure » mais tu as peut-être raison. « On est pas TOUS comme ça ». Disons, qu’on est presque tous comme ça. En tout cas, je sais que j’en suis. Je ne dis rien sur les anges, ne les connaissant pas.

  47. Essentiellement, Krishnamurti et d’autres dynamitent les idées que nous avons en commun sur nous-mêmes et le monde, prenant même à contrepied l’évidence de notre vécu de séparation. Renversant… Notre société marchande, corrompue jusqu’à la moelle, ignore ou veut ignorer cela. Pourtant, nous sommes nombreux en son sein à avoir goûté à cette eau. J’inscris la démarche et la pensée écologiste dans cette voie, dans cette perspective.

    Une femme, Mary Lutyens, proche de Krishnamurti, a écrit à sa suggestion sa biographie (en trois volumes, Ed. Arista). Biographie étonnante, mystérieuse.

  48. @ Janot lapin , c’est bon . Je me souviens que je trouvais krishnamurti interessant mais que j’étais en désaccord avec certains points . Néanmoins tu m’a donné envie de replonger, je vais donc le relire .

  49. « le grand architecte: mais cela est personnel »,
    Ah Léa, ne serait-ce pas encore un effet de cet individualisme arrogant et empoisonné?
    le jour ou nous accepterons de n’être rien, que poussière..peut-être alors nous rapprocherons-nous les uns des autres, comme des enfants. et peu-être qu’alors le monde commencera.

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