La révolte des chapeaux de paille

Je continue à penser à Haïti. J’y pensais avant le tremblement de terre qui a tué 250 000 personnes et chassé de chez eux 1,3 million de personnes au moins ( lire ici). J’y pense encore, tentant de superposer ce que j’ai vu par là-bas il y a trente ans, et ce qui peut bien rester en place. Dans un temps lointain, j’ai vécu dans une ville ravagée par un séisme comparable, sept ans avant que je ne m’y installe. Rien n’avait été rebâti sérieusement. Je marchais dans des ruines entassées proprement au ras des trottoirs. Oui, il y avait des trottoirs, traversant cette ville fantôme surchargée de gravats et de plantes tropicales. Mon Dieu ! c’était étrange.

Un jour, passant non loin d’un des rarissimes bâtiments anciens encore sur pied, j’ai entendu des cris d’enfants et des rires puissants qui m’ont transpercé. On eût dit une nouvelle fantastique de Gabriel José de la Concordia García Márquez, avant que sa sénilité ne le transforme en valet au petit pied du dictateur cubain. Des cris d’enfants, au milieu des ruines et de la fin du monde. Il y avait là une façade intacte, dont les ouvertures ouvraient sur le ciel et sur le vide. Rien qu’une façade de pierre,  roide, impeccable, sans la moindre profondeur de champ. J’ai passé ce qui avait été la porte, et je n’en ai pas cru mes yeux. Dedans, au dedans de cette maison jadis opulente, demeurait une piscine de belle taille, où les riches du pays, probablement des fils de pute amis du caudillo local, devaient jadis s’ébrouer, un drink à la main.

Mais les riches étaient depuis longtemps réfugiés à Miami, et la piscine puait l’eau croupie des tropiques. Elle était pleine d’eau, d’une eau verte et fétide, d’une eau morte et gluante, d’une eau d’émeraude maladive. Mais pleine de gosses, également, qui n’avaient jamais entendu parler de tétanos, de poliomyélite, de bactéries tueuses. Ils étaient une quarantaine, nageant, sautant depuis des plongeoirs rouillés, s’aspergeant, se hurlant dessus, riant jusqu’à tomber à la renverse. J’ai aimé ce pays et ses habitants, Dieu m’en est le témoin. Et si Lui ne s’en souvient pas, moi si.

Haïti est un autre pays, car dans celui que j’évoquais, on parlait une langue castillane que je trouvais étouffée, retenue, aspirée. Je me souviens qu’un chauffeur de taxi – mais a-t-on le droit de parler de chauffeur, et de taxi pour désigner ce qu’était ce transport-là à ce moment-là ? – m’avait demandé, un de mes premiers jours sur place après certains événements majeurs, si je n’étais pas Chilien. Et je n’étais pas Chilien, non, bien que j’eusse alors aimé en être un. Haïti. J’ai pensé, je pense à une manifestation inouïe du Mouvman Peyizan Papay (MPP), qui s’est déroulée ces derniers jours dans la petite ville de Hinche.

Ces hommes et femmes parmi les plus pauvres de la planète ont envoyé au diable un « don » de 475 tonnes de semences hybrides « offertes » par Monsanto. Ils disent qu’il s’agit de semences OGM, destinées en fait à conquérir le marché haïtien, car il n’y a pas de petit profit pour un immense salopard comme Monsanto. Lequel salopard nie, et parle de calomnie. Je vous le dis, je vous assure que je m’en fous royalement. Car je pense à cette foule de milliers de paysans à chapeau de paille et chemise rouge qui ont osé dire merde à l’Empire et à tous ses séides. Voulez-vous savoir ? Je les admire du plus profond de mon âme.

17 réflexions sur « La révolte des chapeaux de paille »

  1. Coucou,

    Bonne nouvelle,:))

    Deux nouveaux oursons dans les Pyrénées
    le 01 juillet 2010

    Deux jeunes oursons ont été repérés en Ariège, a annoncé l’Association pour le développement durable des Pyrénées, l’organisme qui défend la présence d’une vingtaine d’ours dans la région. C’est l’équipe de suivi des plantigrades qui a relevé mardi dernier les traces de ces deux oursons accompagnées de traces d’ours adultes, sur la commune de Couflens, située à environ une quinzaine de kilomètres de la frontière espagnole.

    Pyros, géniteur de presque tous les oursons nés depuis 1997 dans la région, serait également le père de ces deux là. Quant à la mère, il s’agirait de Caramelles ou de sa fille, toutes deux récemment aperçues dans la région. Ces naissances sont donc une bonne nouvelle pour les défenseurs des ours qui continuent de demander de nouveaux lâchers afin de préserver l’espèce de plus en plus rare.

    Bien a vous,Léa.

  2. Hello,

    OGM : Monsanto gagne en justice contre des agriculteurs américains bio

    La Cour suprême des Etats-Unis a autorisé la mise sur le marché de semence de luzerne génétiquement modifiée.

    La Cour suprême des Etats-Unis donne raison au groupe agrochimique Monsanto et annule la suspension de ventes de semence de luzerne génétiquement modifiée, décidée en 2007. Il s’agit d’un revers pour le secteur de l’agriculture bio américaine qui redoute la contamination de ses cultures par des plantes OGM.

    C’est la première fois que la Cour suprême américaine se prononce sur la question des organismes génétiquement modifiés. Le différent opposait le groupe Monsanto, l’un des principaux producteurs mondiaux de semences OGM, à des fermiers spécialisés dans l’agriculture biologique et soutenus par des organisations écologistes.

    En 2007, les tribunaux de Californie avaient décidé d’interdire la commercialisation par Monsanto de semences de luzerne génétiquement modifiées afin de résister aux herbicides. La justice avait en cela donné raison aux agriculteurs bio qui craignaient de voir leurs cultures contaminées par ces nouvelles semences, et qui demandaient qu’une étude d’impact approfondie soit menée par le département de l’Agriculture. Cette décision avait été confirmée en appel par un tribunal fédéral l’année dernière, interdisant donc de facto la vente de ces semences sur tout le territoire des Etats-Unis.

    Les juges de la Cour suprême, par sept voix contre une, ont donc tranché en faveur de Monsanto, estimant que les tribunaux étaient allés au-delà de leurs prérogatives. Une décision qui devrait donc ouvrir la voie à l’autorisation de la commercialisation des semences.

    21 juin 2010

    🙁

  3. Oui, quelle bonne nouvelle!
    je me demande comment s’articule l’agriculture en Haïti. Peut-être n’ont-ils pas (encore, les veinards) de coopératives agricoles sur le dos?
    Parce que pour nous ici, ce sont les Coop qui nous tiennent par les c******, avec des engagements et des contrats d’exclusivité d’approvisionnements qui nous ficellent comme des saucissons.
    Et c’est via ces Coops que tout en tas de saloperies sont refourguées aux pécores.
    Difficile après de rester maître de quoi que ce soit et encore plus de se révolter. Je ne cherche pas d’excuses, je sais bien :celui qui veut peut, mais je vous le dis, le système est monstrueusement bien mis en place par l’agro alimentaire et l’agro industrie…
    Et pour en sortir ou ne pas y entrer, c’est pas facile(pas impossible, mais pas facile).

    Toujours est-il que la lucidité et la détermination de ces paysans haïtiens est superbe et encourageante!

  4. J’ai « découvert » Haïti en 1983 du temps de Baby Doc. Ce pays, ses habitants m’avait alors littéralement vaudouisés. De retour en 1995 dans le cadre d’une mission humanitaire, je me suis très vite aperçu qu’en ce petit pays se tenait un concentré de tous les problèmes qui n’allait pas tardé à déferler partout sur la planète: désastre écologique, paupérisation de 95% de la population, casse des services publics, corruption affichés des politiques. Jusqu’en 2005 j’y suis retourné deux à trois fois par an, jusqu’à ce que je m’aperçoive que les ONG, essentiellement occidentales, bien que martelant leur indépendance, n’étaient pour la plupart que les courroies de transmission du capitalisme et des organismes qui le promeuvent (FMI, Banque mondiale), et ne se comportaient souvent que comme des conquérants. Quant à la bourgeoisie haïtienne composés de quelques milliers de personnes éduqués dans les grandes universités occidentales, détenant 99% des richesses et vivant dans des maisons bunkers avec gardiens armés et se déplaçant en 4×4 blindés son inconscience n’a d’égal que le mépris dans lequel elle tient le peuple . Certes mon statut de Français m’a permis de les côtoyer mais c’est sans démagogie que je prétend avoir eu plus de plaisir et plus reçu au contact des « petites gens » qu’avec ces nababs. Alors quand je lis que des paysans ont eu le courage de s’opposer à cette entreprise prédatrice qu’est Monsanto je ne peux que me réjouir et me dit qu’ils n’ont rien perdu de leur capacité de révolté qui leur ont permis de faire d’Haïti la première république noire.

  5. Bonjour,

    PROJET WINNER…8 OCTOBRE 2009.???

    Le tremblement de terre à Haïti, le 12 janvier 2010, a fait le bonheur de certains affairistes. La multinationale étatsunienne Monsanto est en train d’offrir aux agriculteurs du pays un cadeau mortel, à savoir 475 tonnes de semences [de céréales et légumes, dont 60 sont déjà livrées] génétiquement modifiées (OGM), en plus des engrais et pesticides qui leur sont associés.

    Tout cela sera distribué gratuitement par le PROJET WINNER, avec le soutien de l’ambassade étasunienne en Haïti. Les Haïtiens savent-ils que c’est Monsanto qui fabriquait le défoliant dit «agent orange» [herbicide dispersé massivement de 1961 à 1971 pour liquider la forêt qui «servait de sanctuaire aux combattants vietnamiens engagés contre l’armée impérialiste des Etats-Unis] que les bombardiers américains ont utilisé pendant la guerre du Vietnam, empoisonnant ainsi les soldats américains autant que les civils vietnamiens ?

    Le PROJET WINNER a été lancé le 8 octobre 2009.

    Avant le tremblement de terre, mais après les tempêtes tropicales – par l’Agence américaine pour le développement international (USAID). Ce projet qui vise, entre autres «l’intensification agricole». Il est financé par l’USAID à plus de 126 millions de dollars. Une délégation de Monsanto a visité Haïti le 6 mai 2010. Un débat existe sur le caractère des semences (maïs hybride) et des pesticides et le ministère haïtien affirme qu’il ne s’agit pas de semences Round UP Ready.

    L’action de Monsanto est soutenue par l’USAID, UPS et la Kuehne+Nage qui au sein du PROJET WINNER (tout un programme) sont entrain de vassaliser entièrement l’agriculture haïtienne à leurs produits.

    ———————-

    Admirable peuple de Haiti.Mais combien de temps tiendrons les Haitiens contre les tentatives de « forcing d’intrusions alimentaires »?Un ventre vide accepte le pire.

    Bien a vous,

  6. C’est d’une guerre dont nous avons besoin, – fût-elle symbolique -, contre cette organisation de mort. Préparer la contre-attaque : envoyer des dons massifs à des associations telles que Kokopelli pour qu’elles affrètent des cargos remplis de marchandise. Un vrai débarquement. Préparer des escouades de formateurs « bio » capable d’enseigner des techniques agricoles pérennes et respectueuses du vivant. Dénoncer, sans relâche, l’infâme projet des colonnes fascistes de Monsanto & consorts. Organiser un contre-lobbying de feu soutenu par le peuple.
    Pour paraphraser une sentence célèbre, l’avenir de l’humanité et du vivant se fera sans Monsanto ou ne se fera pas. Il faut détruire l’ennemi. Le poursuivre, pour le coup, jusque dans les « chiottes » de semence transgénique. Nous n’avons pas d’autre solution. Il faut que ce cauchemar prenne fin.

  7. Dans un livre de Francis Hallé j’ai découvert la technique du manioc Mukibat,non transgénique, c’est un greffage, mis au point par les « chapeaux de paille », qui permet de bien meilleurs rendements : facile, gratuit, efficace, sans risque,ça va pas plaire aux marchands du Temple… Mais moi
    je suis POUR ce genre d’armes contre Monsanto.

  8. On m’a parlé de jardin trou-de-serrure (keyhole garden) que certains Africains utilisent pour avoir des légumes toute l’année indépendamment du climat.

    Le principe m’a l’air génial (avec très peu d’arrosage, auto-fertilsation) et s’adapte à toutes les terres.

    J’aimerais l’expérimenter un jour mais pour l’instant au jardin collectif, on se contente d’un jardinage classique par planche sans chimie et peu de déserbage.

    Il faut au début de vielles cannettes en fer, un peu de fumier, de la paille, de la sciure, des pierres quelques bâtons.
    La colonne centrale contient l’eau usagée et les déchets organiques végétaux et libère les nutriments au fil du temps.

    Voici un lien avec des explications en français et deux vidéos en anglais pour voir le résultat :

    http://jardinpotagerurbain.wordpress.com/2009/02/27/keyhole-gardens/

  9. Très intéressant. Le top pour moi ça reste « Le jardin naturel » de Jean-Marie Lespinasse (eds. Rouergue). C’est une technique simple mais révolutionnaire. En deux mots :
    1) Constituer des ados de terre, ou buttes (plates-bandes) surélevées, circonscrits par des planches en bois
    2) Recouvrir ces ados d’un paillis végétal ou d’une litière naturelle (constituée de jeunes rameaux broyés par ex. Facile à faire en se procurant un broyeur)
    3) Recouvrir ces ados d’un voile de forçage non étanche (ça augmente la température, protège du froid et de la mouche de la carotte par ex.)
    4) Réaliser des semis dans de la terre enrichie grâce à un compost maison

    Bref, c’est une technique révolutionnaire dans le sens qu’on ne laboure plus la terre (on remplace la fourche par une fourchette !). En maîtrisant quelques techniques un peu pointues (savoir quelles cultures on peu mélanger), on aboutit à des résultats spectaculaires.
    (PS : il convient évidemment de se procurer des semences non hybrides et trafiquées – au diable Monsanto et toute cette clique ou mafia – mais des semences bio. Comme ça on ne passe plus tous les ans au tiroire-caisse).

  10. Les multinationales de l’agro-alimentaire sont toujours prêtes à proposer leurs « bons offices » après
    les catastrophes naturelles.

    Dans le cas d’Haïti, l’administration américaine a monté un projet nommé « Winner » pour faciliter le travail à son champion de l’Humanitaire, la merveilleuse Monsanto qu’on ne présente plus…

    Le refus des « chapeaux de paille » est une admirable réponse à cette offre charitable. Espérons qu’elle sera générale et que des semences « population », issues de sélection paysannes, viendront rapidement aider ces « campesinos » à nourrir leur pays. Quelle leçon de résistance nous donne le peuple haïtien !

    Il me revient en mémoire un excellent film réalisé par Robert Redford dans les années 80 : the Milagro beanfield war (en français : Milagro). Où l’on voit les habitants d’un petit village mexicain se rebeller contre le projet immobilier d’un promoteur sans foi ni loi.

    Si vous avez l’occasion de le voir, c’est une petite merveille…

  11. Hello,

    OGM : Bruxelles veut des experts indépendants pour l’évaluation des risques
    BRUXELLES – La Commission européenne a annoncé lundi sa décision de revoir la sélection des experts impliqués dans le processus d’évaluation des risques présentés par les OGM afin de s’assurer de leur complète indépendance.

    « Nous allons développer avec l’EFSA, l’agence pour la sécurité alimentaire, un système de candidatures de scientifiques pour les panels sur les OGM », a expliqué John Dalli, le commissaire à la Santé chargé du dossier des OGM, à l’issue d’une réunion des ministres de la santé de l’UE à Bruxelles.

    « Nous voulons une évaluation de leur indépendance et un audit sera réalisé a posteriori sur toutes les personnes qui ont participé aux panels pour vérifier leur indépendance », a-t-il ajouté. « Nous voulons responsabiliser tous les experts », a insisté M. Dalli.

    « Je ne vois pas de cas de conflits d’interêts au sein de l’EFSA, et je ferai tout pour qu’il n’y en ait pas », a-t-il assuré.

    M. Dalli entend ainsi répondre aux détracteurs de l’EFSA qui accusent les experts chargés d’analyser les risques présentés par les semences OGM d’être liés aux multinationales du secteur.

    « L’EFSA est compétente en matière de sécurité alimentaire, pas pour les questions d’environnement. Ses expertises sont limitées et elles reprennent une bonne part des argumentaires fournis par les entreprises. Or nous voulons une expertise crédible, qui rassure l’opinion publique », explique-t-on de source française.

    Les avis de l’EFSA sont déterminant pour les autorisation de commercialisation et de culture des OGM. Faute de majorité en faveur ou contre, la décision revient en dernier ressort à la Commission et elle est toujours contestée.

    « Je dois prendre des décisions fondées sur des évaluations objectives », a expliqué M. Dalli.

    Deux OGM sont cultivés dans l’UE : le maïs MON 810 de l’américain Monsanto, en attente du renouvellement de son autorisation, et la pomme de terre Amflora du groupe allemand BASF. Plusieurs autres attendent une autorisation et des décisions seront prises à la rentrée, a-t-on appris de source communautaire.

    La Commission européenne va proposer le 13 juillet de rendre aux Etats la liberté d’interdire les cultures d’OGM sur leur territoire pour débloquer le processus d’autorisation.

    La France refuse toutefois ce troc et exige un renforcement des analyses des risques posés par ces semences avant toute autorisation.

    Ciao,

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