On va me traiter de feignant, ça ne saurait tarder. C’est le second texte que je publie ici pour la deuxième fois, à la suite. Celui-ci concerne Dominique Strauss-Kahn, DSK pour ses nombreux intimes. Je crois qu’il faut savoir dire les choses. Moi, ma voie est nette. Je ne vote pratiquement pas, pour des raisons de fond dont j’ai déjà souvent parlé. Mais DSK est un cas. Et moi qui déteste tant Sarkozy, je vous le dis dès maintenant : si le choix des élections de 2012 devait se limiter à voter DSK ou Sarkozy, je les enverrais tous deux se faire rhabiller chez plumeau. Je sais que la haine ne se porte plus. Je sais qu’il faut désormais se montrer présentable en toute circonstance. Mais moi, que voulez-vous ? je hais pour de bon DSK, l’homme du Fonds Monétaire International (FMI). Pas tant lui, du reste, que l’institution criminelle qu’il dirige, et qui saigne les peuples et les pauvres.
Je souhaite, de toute mon âme, qu’un tel homme, s’il osait se présenter, soit aplati comme il le mérite. DSK, mais c’est Millerand ! Mais c’est Noske ! Mais c’est l’ennemi de toujours ! Je viens de lire (ici) ce que cet imbécile pense de la question des retraites dans Le Figaro. Dieu du ciel ! Il a notamment déclaré : «On vit 100 ans, on ne va pas continuer à avoir la retraite à 60 ans». Voilà ce qu’un homme de sa taille fait d’une question aussi essentielle que celle du droit historique à la retraite. On vit 100 ans ? Bien sûr, c’est faux. Puis, dans quel état réel sont ceux qui passent les 80 ans ? Combien d’Alzheimer ? Combien de Parkinson ? Combien de maladies neurodégénératives, de cancers, de hanches pourries, de dos pliés ? Combien, monsieur le richissime ?
Je n’ai ni le temps ni l’envie de détailler son parcours scolaire, qui me semble plus ridicule que bien d’autres. Pour aller vite, et comme des milliers de son genre, il aura obtenu un doctorat en économie, qui le fera aussi aveugle sur la marche des événements que n’importe lequel de ses clones. Il faut croire qu’il aura déployé d’autres talents pour devenir ce qu’il est. Avez-vous entendu dire une seule fois que DSK se serait montré plus futé, plus conscient, plus prescient ? Vous souvenez-vous avec quelle morgue il traitait ceux de la taxe Tobin, qui entendaient il y dix ans et plus imposer le capital ?
En attendant, voici ce texte qui date des tout débuts de Planète sans visa. Il a paru le 29 septembre 2007. Toutes ses dents.
On ne descendra pas beaucoup plus bas. Et c’est déjà cela. La nomination de Dominique Strauss-Kahn à la tête du Fonds Monétaire International (FMI) restera, quoi qu’il advienne, le sommet inversé de la fin d’une époque, celle de la gauche. Ce mot ancien, ce mot de cimetière, ce mort-vivant éclaire comme le font les étoiles disparues.
L’affaire est certes entendue depuis des lustres, mais je dois avouer qu’une telle clarté de cristal éblouit les yeux. D’abord, quelques mots sur ce monsieur DSK. Il est avant tout l’ami de l’industrie, nationale ou transnationale. Avocat d’affaires, il a conduit un grand nombre de deals – ces gens aiment l’anglais – pour de très puissantes entreprises. J’oublie, car ne n’est que détail, sa mise en examen mouvementée dans l’affaire de la mutuelle des étudiants, la MNEF.
Sachez, ou rappelez-vous, que DSK a présidé entre 1993 et 1997 un lobby appelé le Cercle de l’Industrie, regroupant une sorte de gotha des (grandes) affaires. Dans le but exclusif de favoriser ses clients auprès de la Commission européenne, à Bruxelles. Mais quel beau métier, vraiment ! En 1994, car l’appétit vient en mangeant, DSK devient un lobbyiste appointé du nucléaire. Il signe un contrat avec EDF, et puis s’en va faire son travail occulte chez ses amis du SPD allemand, qu’il travaille au corps. Sa mission consiste à convaincre Siemens de rejoindre Framatome et EDF dans le vaste chantier de l’EPR, le nouveau réacteur nucléaire français. C’est beau, la gauche.
Après avoir ainsi copiné, DSK n’hésite pas une seconde quand le devoir l’appelle au gouvernement de la France, en 1997. Taper sur le ventre de Vivendi, Renault et Areva durant tant d’années, puis devenir ministre de l’Économie et retrouver les mêmes en face de soi, avec pouvoir d’État en sus, cela s’appelle la classe. La classe internationale.
DSK a-t-il la moindre idée réelle de ce qu’est la pauvreté ? Non, bien sûr. Quand il était le maire de Sarcelles, sa voiture avec chauffeur le ramenait chaque soir dans son bel appartement parisien. Connaît-il la misère ? Bien sûr que non. Du Sud, il ne connaît que son riad de Marrakech. Une superbe maison traditionnelle, dans un quartier de superbes maisons traditionnelles où il peut recevoir dignement ses superbes clients traditionnels.
Non, DSK ne sait rien du monde réel, et je crains qu’il ne veuille guère en entendre parler. Il vient en tout cas d’être nommé patron du FMI, institution majeure de la destruction du monde et de la dévastation écologique. Tout va bien. Ses amis socialistes, de Pierre Moscovici à Jean-Christophe Cambadelis – défense de rire – applaudissent. Le FMI. Les plans d’ajustement structurel. Les pressions sur les grouvernements mafieux, pour qu’ils serrent davantage la gorge de leurs peuples. La faillite organisée de l’Argentine, en décembre 2001. La fin programmée des forêts, des agricultures, des paysans. Le FMI.
Je me rassure comme je peux. Je n’ai rien, RIEN à voir avec ces gens-là, ces socialistes en peau de lapin. Les mêmes qui beuglaient Nach Berlin en septembre 1914, après avoir promis d’empêcher la guerre. Les mêmes qui lâchèrent la République espagnole aux abois, en 1936. Les mêmes qui menèrent l’ignoble guerre algérienne, au son du canon et de la gégène. Je me rassure. RIEN. RIEN.