Comme ils sont détestables ! Parmi les (nombreuses) raisons qui expliquent pourquoi je ne vote pas, il y a bien entendu cette terrible pollution de l’air contre laquelle aucun de nos responsables n’entend bouger. D’un côté, on sait que tantôt les particules fines, tantôt l’ozone troposphérique – au ras des poumons -, tantôt les deux, les trois, les cent tuent massivement. Par milliers chaque année en France. Et même 42 000 personnes en 2 000, selon une étude contestée mais sérieuse (ici). Je ne parle pas des vastes massacres qui adviennent en Chine et en Inde par exemple, car aujourd’hui, c’est de la France que je souhaite parler.
Donc des milliers, des dizaines de milliers de morts par an chez nous. Nos Excellences sautent dans un avion dès qu’un fait divers quelconque attire les caméras, comme autant de mouches. Trois vitrines cassées à Nantes permettent à un Valls de rouler des mécaniques dans l’espoir de toucher Matignon en prime. Mais quand il s’agit de sauver d’une mort prématurée des vieux, des faibles, des gosses, des asthmatiques, plus personne. Honte à eux !
Franck Laval, que je tiens pour un ami – Dieu sait qu’il est éloigné de moi sur divers plans – et Nadir Saïfi, de l’association Écologie sans frontière viennent de déposer plainte contre X pour mise en danger de la vie d’autrui. C’est une plainte pénale – une première – qui pourrait (très) éventuellement déboucher sur la mise en cause d’individus, tenus pour responsables. Je fais grande confiance à l’avocat François Lafforgue, qui défend victimes de l’amiante et des pesticides, pour tirer de ce dossier tout ce qui peut l’être.
En attendant, le spectacle politique est simplement lamentable. Vous lirez tout au-dessous un article de Stéphanie Senet, du Journal de l’Environnement. Il est excellent et montre comme nos ministres se défilent. Philippe Martin, en charge de l’Écologie, tenait les moyens d’imposer la circulation alternée, seul moyen disponible – hélas ! – pour faire baisser d’un coup les teneurs en particules fines de l’air. Il ne l’a pas fait. Pourquoi ? On peut espérer qu’il l’a envisagé. Mais bien entendu, dans le contexte pourri des municipales – mon Dieu, allons-nous perdre 100 villes ? – et du pacte de responsabilité – la seule bouée de secours imaginée par Hollande et son clan -, il ne pouvait en être question.
Il ne faut à aucun prix embêter l’industrie, l’automobile, risquer une baisse de la confiance et de la sacro-sainte consommation. Il faut continuer, accélérer encore, et tant pis pour les vaincus et les cadavres. Cela porte un nom : l’ignominie. Je rêve du temps, qui viendra peut-être, où ces gens qui nous gouvernent pourront être jugés pour ce que je considère comme des crimes. On n’est pas obligé d’être d’accord.
À ce compte, que dire des écologistes d’Europe Écologie-Les Verts ? Les salons et strapontins doivent décidément être confortables. Le 26 mars 2012, il y a donc deux ans, quand Sarkozy était aux manettes, madame Eva Joly, alors candidate à la présidentielle, tonnait (ici). Je la cite : « Alors que l’Ile-de-France et de nombreuses autres agglomérations traversent un nouvel épisode de pollution de l’air, il est temps de dénoncer l’inaction du gouvernement devant ce drame sanitaire ». N’est-ce pas mignon tout plein ? Hier matin, sur RTL (ici), la cheftaine du parti « écologiste », Emmanuelle Cosse, a déclaré sans rire : « Ça fait quand même une semaine qu’on sait que ça va venir. Je regrette qu’on ne soit pas capable d’anticiper. » Ces gens ne sont pas des criminels, certes non. Mais des complices, assurément.
Le pompon provisoire pour ceusses de France Nature Environnement (FNE). Je rappelle ce que j’ai tant développé dans mon livre Qui a tué l’écologie ? (LLL). FNE est un conglomérat de 3 000 – chiffre officiel – associations locales, régionales, thématiques de protection de la nature. C’est le mouvement institutionnel, historique, qui dépend très largement des subsides publics pour survivre. Une petite bureaucratie, insupportable à mes yeux, gère la boutique, et assure représenter ce mouvement associatif. Moi qui appartiens à Bretagne vivante – fédérée à FNE – depuis 1987, je peux vous assurer qu’ils ne me représentent en aucune manière. Bref.
Comme ces bureaucrates sont perpétuellement à la recherche de breloques et de sous, ils s’acoquinent régulièrement avec des industriels dans le cadre de partenariats qu’ils jugent nécessaires. J’apprends à l’instant que FNE a signé un pacte inouï (ici) avec « Keolis, opérateur de transport de voyageurs, MOBIVIA Groupe, leader européen de l’entretien et de l’équipement de véhicules, et la fondation PSA Peugeot Citroën ». Les gens de FNE sont tellement sûrs qu’on ne les attendra pas au coin de la rue, qu’ils ont publié leur communiqué scélérat le jeudi 13 mars, hier même, quand étouffaient les mioches, les vieux, les asthmatiques. La conclusion de leur texte – au fait, vous avez touché combien, les gars ? – est fantastique : « Comme d’autres modes de transport, la voiture a toute sa place dans la mobilité. Il revient aux élus de fournir les conditions pour une mobilité désormais choisie et non plus subie, adaptée aux besoins et aux environnements. »
J’ajoute, car tout de même ! que Peugeot et son ancien patron Jacques Calvet sont les responsables majeurs de ce qu’on nomme la « diésélisation » du parc automobile français. Pendant des années, les équipes de Peugeot ont fait le siège de tous les décideurs publics et ils ont GAGNÉ ! Le diesel, source majeure d’émission de particules fines, est PARTOUT. Et FNE donne quitus à Peugeot, redore son blason, efface les dettes morales si grandes du constructeur pour trois picaillons. Shame on you ! Vous êtes vraiment aux dimensions de vos pires caricatures.
Voilà comment ça marche. L’impunité d’hier efface les morts d’aujourd’hui et prépare les crimes de demain. Et voilà pourquoi j’enverrai proprement chier les bureaux de vote les 23 et 30 mars. Vous n’êtes pas obligé de me croire, mais je ne demande sûrement pas qu’on me suive. C’est seulement que j’avais grand besoin de me soulager. C’est fait.
Dessous, l’article d’actualité dont je vous parlais plus haut.
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L’air pollué a encore de beaux jours devant lui
Le 13 mars 2014 par Stéphanie Senet
Un nouveau pic de pollution aux particules fines est attendu le 14 mars
Le seuil du niveau d’alerte (1) pour les particules fines PM10 a de nouveau été dépassé, ce 13 mars, sur la partie Nord de la France ainsi que dans la vallée du Rhône. La pollution atmosphérique voit rouge dans plus de trente départements. Face à cette situation, le ministère de l’écologie annonce la gratuité des transports en commun franciliens mais rejette la circulation alternée.
Pourquoi la circulation alternée n’est-elle pas décrétée dans les régions frappées par des pics de pollution à répétition? Le ministre de l’écologie Philippe Martin n’a pas voulu répondre à cette question lors de la conférence de presse, qu’il a organisée à la hâte, ce 13 mars à l’hôtel de Roquelaure, sept jours après le premier dépassement du seuil d’alerte aux particules fines en France.
Réclamée par les écologistes, cette mesure avait pourtant eu droit de cité, le 18 décembre dernier, au ministère. Philippe Martin avait alors annoncé vouloir la réactiver lors des pics de pollution aux particules fines et aux oxydes d’azote (NOx).
Un décret inutile
Le dossier de presse publié à l’issue du Comité interministériel de la qualité de l’air (Ciqa) précisait qu’il fallait d’abord changer la réglementation. «La circulation alternée fait partie des mesures d’urgence pouvant être prises dans les situations de dépassement du seuil d’alerte, pour limiter l’ampleur des pointes de pollution. Mais ce dispositif ne peut être déclenché à l’heure actuelle que pour les pics de pollution à l’ozone».
Le ministère remettait ainsi à 2014, «l’élaboration d’un décret en Conseil d’Etat permettant d’instaurer la circulation alternée lors de pics de pollution réglementés comme les particules PM 10 ou les oxydes d’azote».
Trois mois plus tard, la circulation alternée semble avoir disparu des écrans gouvernementaux. Mais contrairement aux arguments ministériels, il est tout à fait possible de l’instaurer immédiatement sans prendre un nouveau décret, et cela dans tous les départements de l’Hexagone. «La loi LAURE (2) votée en 1996 permet de prendre un certain nombre de mesures de restriction de la circulation, quel que soit le type de pollution atmosphérique», confirme Corinne Lepage, qui est à l’origine de cette loi. «J’ai d’ailleurs pris soin que le texte ne renvoie à aucun décret d’application afin d’éviter des retards accidentels dans les bureaux des ministères», ajoute-t-elle.
Gratuité des transports en commun franciliens
Ce 13 mars, le ministère de l’écologie s’est donc contenté d’annoncer, aux côtés du président de la région francilienne Jean-Paul Huchon, la gratuité des transports en commun d’Ile-de-France, du 14 au 16 mars compris. Un bilan sera dressé le 15 mars au soir pour décider une éventuelle prolongation. Tous les habitants sont invités à laisser leur voiture au parking.
Pour d’autres mesures, il faudra attendre le projet de loi sur la transition énergétique, «qui comprendra un volet sur la qualité de l’air», a précisé Philippe Martin.
La pollution de l’air a été classée, le 17octobre 2013, comme cancérigène avéré (classe 1) par le Centre international de recherche sur le cancer (Circ).
L’air pollué, meilleur à vélo?
Hier, la ville de Paris avait ouvert la voie en annonçant la gratuité de la première heure d’Autolib’ et des locations de courte durée en Velib’. Mais qui veut rouler à vélo lorsque l’air est pollué? Les Parisiens ont en tout cas répondu à l’appel. Selon la municipalité, le service Autolib a enregistré, ce 13 mars, une hausse de 46% des parcours, et les locations de Velib’ ont progressé de 72% par rapport à jeudi dernier.
Dans l’attente de mesures adaptées
Le candidat écologiste à la mairie de Paris, Christophe Najdovski a dénoncé «l’inaction irresponsable des pouvoirs publics qui ont attendu les 8ème jour de pollution pour que cette mesure soit prise». Il réclame aussi de compléter le dispositif au plus vite, par la mise en place de la circulation alternée des automobilistes et par le contournement routier de Paris par les poids lourds. Un contournement que la préfecture de police aurait pu instaurer depuis 5 ans, comme le permet le plan de protection de l’atmosphère francilien, selon Claude Bascompte, président des Amis de la Terre Paris.
Plus largement, le responsable associatif réclame trois mesures importantes: «sensibiliser les citoyens sur les enjeux de la lutte contre la pollution atmosphérique par un dispositif d’information et d’alerte cohérent, renforcer les transports en commun et restreindre fortement la circulation automobile». De façon régulière, et pas seulement en cas de pic de pollution.
(1)Le seuil du niveau d’alerte s’élève à 80 µg/m3 d’air sur 24 heures pour les PM10. Le plafond du niveau d’information est égal à 50 80 µg/m3.
(2)Loi sur l’air et l’utilisation rationnelle de l’énergie (LAURE) du 30 décembre 1996 instaure notamment les plans de protection de l’atmosphère et les plans de déplacements urbains
La circulation alternée testée pendant une seule journée
La circulation alternée n’a été mise en place qu’une seule journée dans l’histoire française. Le 1er octobre 1997, alors que Dominique Voynet est ministre de l’aménagement du territoire et de l’environnement, elle est appliquée à Paris et dans 21 communes d’Ile-de-France, en raison d’un dépassement du seuil d’alerte du dioxyde d’azote. Résultat: le trafic a été réduit de 15% dans la zone de circulation alternée, de 20% à Paris et sur le boulevard périphérique et de 8% dans le reste de l’Ile-de-France. Les émissions de dioxyde d’azote ont aussi été réduites de 15% par rapport à la veille.