Pièces et main-d’œuvre (sur le nucléaire)

Ce qui suit est un texte du collectif grenoblois Pièce et main-d’œuvre (PMO). Les gens qui s’en occupent sont des critiques véritables du monde, et cela se sent et se ressent. J’aime beaucoup leur prose. Non seulement ils écrivent bien, mais également juste. Allez donc faire un tour sur leur site : http://www.piecesetmaindoeuvre.com

On vous l’avait bien dit

« L’apocalypse » en cours au Japon est tout sauf inattendue et imprévue. On peut en dire comme de bien d’autres malheurs : vous en savez déjà suffisamment, nous aussi. Ce ne sont pas les informations qui nous font défaut, ce qui nous manque, c’est le courage d’admettre ce qui nous arrive et d’en tirer enfin les conséquences. Voici cinquante ans que nous vous mettons en garde, nous, prophètes de malheur, oiseaux de mauvais augure, cassandres, obscurantistes, rabat-joie, écolos rétrogrades, punitifs, intégristes, ayatollah verts, anarchistes irresponsables, baba cool…

Cinquante ans que vous nous invitez à retourner vivre dans une caverne d’Ardèche, vêtus de peaux de bêtes, éclairés à la bougie et nourris de lait de chèvre. Vous n’avez jamais eu le temps ni l’envie de vous opposer au nucléaire. Vous n’avez jamais manifesté, pas même contre SuperPhénix à Malville en 1977. À Grenoble, vous vous êtes accommodés des années durant de la présence de trois réacteurs nucléaires en zone urbaine (Siloë, Siloette, Institut Laue Langevin). Votre mode de vie n’est pas négociable. Vous vous éclairez au nucléaire, à en tuer l’obscurité nocturne dans les villes ; vous  vous chauffez au nucléaire ; vous produisez et consommez au nucléaire ; vous vous connectez au nucléaire ; vous vous déplacez au nucléaire (TGV, voitures électriques) ; vous travaillez pour le nucléaire et vos emplois valent plus que vos vies. Vous votez pour le nucléaire, vous élisez maire de Grenoble Hubert Dubedout, Michel Destot, ingénieurs du Commissariat à l’énergie atomique, et bien d’autres de leurs semblables dans la cuvette.

Vous vivez par le nucléaire, il n’est que trop normal que vous mourriez par le nucléaire ; lentement à coup de cancers disséminés dans l’environnement ; brutalement quand « l’accident qu’on ne pouvait pas prévoir » fait enfin sauter Bugey, Cruas, le Tricastin ou l’une des 58 centrales qui vérolent le pays le plus nucléarisé du monde. Jamais vous ne vous y êtes opposés. Le nucléaire paie la taxe professionnelle, vos piscines municipales, vos salles polyvalentes, vos cours de tennis. Vous l’avez choisi. Vous l’avez mérité. Pas de jérémiades le jour où vous devrez bondir avec toute votre famille dans votre voiture pour fuir une zone irradiée et bouclée par l’armée. Ne nous parlez pas de vos enfants, des générations futures, de leur avenir, de « développement durable » et « d’énergies alternatives ». Toute votre existence prouve assez que vous vous moquez de ces mots creux.

Que si ces lignes vous scandalisent, joignez le geste à la parole et prouvez enfin par vos actes que vous n’êtes pas complices du sort qu’on vous fait. Mais comment le croire. Vous en savez suffisamment, nous aussi. Mais qu’à cela ne tienne, on va faire semblant encore une fois. On va encore une fois faire comme s’il vous manquait les informations et les idées pour vous faire une opinion et agir en conséquence. Et vous pourrez toujours nous renvoyer dans nos cavernes d’Ardèche.

Tandis que fondent les réacteurs nucléaires à Fukushima, experts et décideurs s’empoignent sur les avantages  comparatifs entre désastre nucléaire, climatique (pétrole, charbon, gaz de schiste) et alternatif (photovoltaïque,  éolien). Et chacun de nier l’évidence : il n’y a pas de survie à long terme pour les goinfres. La course à la croissance nous condamne, et ceux qui placent l’économie, l’emploi et l’argent avant la vie sont coupables. Les victimes de Tchernobyl, de Fukushima et des prochaines catastrophes sont victimes de la voracité, que les technocrates dissimulent sous l’impératif de l’innovation. C’est un ingénieur nucléaire qui le dit : « A travers elle (NDR : l’innovation) apparaît le développement des activités économiques qui génère lui-même des emplois pour l’ensemble de nos concitoyens. Il y a là une véritable mine d’or, prenons-en conscience. » Ainsi parle Michel Destot, maire CEA-PS de Grenoble, toujours prompt à louer la dernière « révolution technologique majeure porteuse de nombreuses promesses pour notre santé, notre qualité de vie, l’avenir environnemental de la planète », et qui n’a pas trouvé le temps, cinq jours après le début de la catastrophe nucléaire japonaise, de commenter cette expérience scientifique à ciel ouvert. Mercredi 16 mars 2011, son blog titre en une sur la « 9e édition des Trophées des sports ».

En janvier 2007, Pièces et main d’œuvre publiait « Minatec survolté, énergie engouffrée », texte qui soulignait l’un des innombrables mensonges des nécrotechnologies. L’industrie high-tech n’est pas plus propre ou « économe » que la métallurgie ou la pétrochimie. L’ouverture de Minatec fait bondir la consommation électrique de Grenoble de 17,6 %. Pour répondre aux besoins énergétiques des labos de nanotechnologies (vous savez, ces technologies qui nous sauveront de la catastrophe écologique), Gaz et Electricité de Grenoble a crée un nouveau poste d’alimentation délivrant « une puissance exceptionnelle de 70 mégawatts » (GEG Infos, 2006).

Du côté de la « Silicon Valley grenobloise », à Crolles, l’Alliance STMicroelectronics/IBM et son usine à puces  électroniques engloutissaient 370 millions de kWh en 2008, contre 320 en 2004, soit une augmentation de 16 %  en quatre ans. François Brottes, député-maire de Crolles, à propos de la rénovation d’un poste de transformation  électrique 225 000 volts dans le Grésivaudan : « C’est vital sur notre territoire, où beaucoup d’emplois dépendent d’un approvisionnement en énergie sûr et continu. Si le fabricant de semi-conducteurs STMicroelectronics a choisi de s’implanter à Crolles, c’est parce que nous avons pu lui apporter des garanties sur la fourniture d’électricité. » Comme pour l’eau, faut-il le rappeler.

La « révolution industrielle » des nanotechnologies exige toujours plus d’énergie, pour faire tourner les « fab » de nanomatériaux et de puces électroniques. Pire, elle crée un monde encore plus vorace en électricité. Comment  croyez-vous que fonctionnent les gadgets que vous accumulez sur injonction publicitaire, par peur de rater la dernière vague du progrès ? Votre portable, votre ordinateur, votre lecteur DVD, votre écran plat, votre box Internet, votre lecteur MP3, votre tablette numérique, votre machin à lire des « livres électroniques », à quoi tournent-ils ? Cette quincaillerie moderne et tellement pratique nous précipite dans l’abîme – carbonique ou nucléaire. Écoutez cet expert de la Direction régionale de l’Industrie, de la Recherche et de l’Environnement (DRIRE Rhône-Alpes) : « On ne pourra jamais répondre aux besoins actuels avec ces énergies alternatives ».

La vie numérique et connectée que nous vendent Minatec, Minalogic et les boîtes pour lesquelles travaillent les ingénieurs grenoblois contient, parmi ses multiples promesses, celle des futures catastrophes nucléaires. Voyez plutôt :

> chaque recherche sur Google brûle autant qu’une ampoule basse consommation pendant une heure.

> les technologies de l’information et de la communication (TIC) gaspillent 13,5 % de la consommation électrique française (soit 58,5 TWh) ; les téléviseurs à écran plat et leurs périphériques (décodeurs, équipement TNT) constituent le coût le plus important. Avec un taux de croissance moyen de 10 %, les TIC pèseront pour 20 % de la consommation d’électricité française dès 2012 – soient 9 centrales nucléaires.

> la consommation d’électricité dans le secteur résidentiel de l’Union européenne a crû ces dernières années à un rythme comparable à celui du PIB global (10,8 %). Cette demande croissante est due à l’usage généralisé d’appareils comme le lave-vaisselle, le sèche-linge, le climatiseur, l’ordinateur personnel, et à l’essor de l’électronique grand public et des équipements informatiques et de communication – décodeurs, lecteurs de DVD, équipements à haut débit et téléphones sans fil (source : Reuters).

> en 2006 les « datacenters » (qui hébergent des serveurs informatiques et équipements de télécommunications) aux Etats-Unis ont consommé 61 milliards de kWh – l’équivalent de la consommation du Royaume-Uni en deux mois – soit deux fois plus que cinq ans plus tôt.

> selon un chercheur de l’université de Dresde, Internet consommera dans 25 ans autant d’électricité que l’humanité en 2008 (source : www.dotgreen.fr). Les technologies numériques tuent ces jours-ci au Japon. Ceux qui vous disent qu’on peut à l’infini augmenter la production et la consommation, le pillage des ressources naturelles, la pollution du milieu naturel, sont des criminels qui vous mentent et nient la réalité. Les limites de la Terre s’imposent à nous et nous imposent des choix. Ce n’est pas grave. Nous n’avons pas besoin d’objets « intelligents ». Nous avons besoin d’être intelligents, de déchirer le voile de la propagande techno-scientiste, de refuser la consommation meurtrière et abrutissante, de jouir de notre existence de Terriens.

La vie est tout ce que nous avons. Ce n’est pas parce qu’EDF, Areva et le CEA nous détruisent que nous devons être leurs complices. Débranchons-nous.

Pièces et main d’œuvre
Grenoble, le 16 mars 2011

38 réflexions sur « Pièces et main-d’œuvre (sur le nucléaire) »

  1. Oui. Débranchons-nous.
    La question n’est plus de savoir si un autre monde est possible, mais de constater que celui-là n’est plus possible.
    Mais alors, il faut aussi tirer un trait sur tout ce qui rend possible l’impossible : non seulement nos modes de vie, mais également toutes les interfaces socio-politiques qu’un citoyennisme impuissant persiste à vouloir sans cesse reconduire, pour sauver tout de même ce qui ne peut plus l’être.
    Tirer un trait sur toutes les formes de représentation politique, et en appeler à une désertion généralisée. Cesser de parler de « nos » élus, de promouvoir l’utopie meurtrière d’un Etat bon-papa qui veillerait sur nous, de penser pouvoir encore sauver une institution quelconque.
    Cesser de penser le retour à un « bon » capitalisme de proximité, à une « juste » répartition des richesses, et à toutes les fadaises dont le citoyennisme nous abreuve et nous intoxique depuis vingt ans. A ce stade, l’espoir est meurtrier. Le capitalisme est au-delà de toute espèce de réformisme. Aucun dialogue n’est plus possible.
    Il est meurtrier de penser le capitalisme simplement comme « néo-libéralisme », comme une chose extérieure à la société, simplement comme économie, alors qu’il est essentiellement composé de rapports sociaux : le travail, la politique, la démocratie, etc… Vouloir reconduire un quelconque de ces rapports, c’est reconduire le capital tout entier.
    Il n’y a plus rien à sauver, juste un monde à détruire. Et cela sera peut-être aussi une catastrophe.
    Il ne sera pas simple de se « débrancher ». Cela ne pourra se faire que dans la violence. Le capitalisme ne nous laissera mener aucune transition. Cinquante années de progrès, en France comme ailleurs, nous ont privé du simple fait de pouvoir, là où nous sommes, assurer matériellement notre subsistance. Ceci ne sera pas corrigé en six mois.
    Ceci aussi est l’aliénation : « débranchés », coupés des flux du capital, nous mourons. Il faudra se réapproprier la terre, c’est-à-dire, simplement, celle que nous avons sous les pieds. Ca sera tout sauf facile.
    Je suis comme vous tous, très en colère. Mon propos n’est pas de vendre un quelconque projet politique. Aujourd’hui, nous avons l’occasion de nous battre contre les gaz de schiste, et quant à moi je le ferai dans un esprit d’autodéfense collective, en respectant les positions de chacun. Je pense tout de même que nous ne ferons pas l’économie de la remise en cause d’un certain discours « citoyen » ronronnant, qui ne mène qu’à l’impuissance des urnes. Le plus vite sera le mieux.
    Alain C.

  2. Ce qui est difficile de comprendre dans les grands nombres, ce sont les points de non-retour.
    L’industrialisation forcenée des 150 dernières années s’apparente à une explosion en cours.
    Prétendre que l’on pourrait changer les choses est au mieux un idéal, au pire une utopie. C’est comme une bactérie qui prendrait conscience de la pourriture du fruit sur lequel elle se nourrit… inéluctablement ses descendants finiraient par manquer de support…
    La comparaison n’est pas terrible (correspondance de durée mal ciblée), mais le principe du raisonnement est juste.

    Jean Dorst (ex? directeur du muséum) écrivait dans la préface d’un ouvrage consacré au quaternaire que la couverture naturelle de la France se situait aux alentours de 110m en moyenne (le dernier arbre de la forêt primaire française a été abattu en 1923 à une altitude de 900m et il mesurait 80m). N’est-ce pas dans ce génocide végétal qu’il faut faire remonter la crise en cours ? : les plaines tout d’abord pour l’agriculture, puis la valorisation des pentes au profit de l’élevage.

    Notre planète est accablée par l’humanité depuis si longtemps, que la notion même de nature est devenue un mythe.

    J’ai eu la folie d’étudier l’anthropisation du monde et je suis ressorti de ce voyage naturaliste comme un paléontologue du présent… le dernier témoin d’une quantité incroyable d’espèces qui ont définitivement disparues depuis.

    L’occident est dirigé par ce consensus de l’économie reine et nul urbain ne peut vivre naturellement : money-théistes par force forcée.

    Nous avons souillé notre nid de toutes les façons possible, l’air, l’eau, la terre…

    Qui dira que la construction d’une voiture coute plus cher à la planète que son utilisation…

    Qui dira que depuis les années 50, la production planétaire d’oxygène ne croît plus comme ce fut le cas au cours des milliards d’années précédents…, mais que sa consommation effrénée se démultiplie tout les 10 ans… moins d’oxygène dans l’air que dans celui de nos aïeux…

    Qui dira que l’explosion en cours n’est plus arrêtable depuis longtemps…

    Tous les signes sont là, la planète va se débarrasser des derniers arrivés, des espèces les plus jeunes qui naquirent dans un environnement arrivé à un certain stade de maturation qui n’est plus qu’un souvenir dans la tête de vieux érudits qui rêvent encore d’un monde tel qu’il aurait dû être… tel qu’il fut à l’âge d’or de l’humanité, le néolithique.

    Imaginez un monde où l’animal pullule, ou une plante sur cinq est comestible (en Europe), un monde où certes la chirurgie réparatrice n’existe pas, mais où les maladies ne sont pas chroniques, un monde où l’on ne travaille pas pour vivre, un monde où l’on vit vieux… (cas des guanches des Canaries où les nécropoles ont révélé une espérance de vie de plus de 80ans avec une taille moyenne de 1,80m pour les hommes)…

    Nous sommes en train de changer d’ère. Les paléontologues du futur verront clairement inscrit dans une minuscule couche géologique tous les poisons que les 150 dernières années de folies industrielles ont disséminés. Ils concluront comme dans le cas des dinosaures, qu’un évènement catastrophique majeur s’est déroulé à notre époque…

    Ce sera le privilège de notre soit disant humanité que d’être inscrite pour un long toujours dans l’écorce terrestre…

    Cette petite couche montrera des taux hallucinant de métaux lourds, de molécules chimiques qui n’existent nul part ailleurs et elle sera anormalement radioactive (par rapport aux autres couches). Ils se gratterons la tête et devraient conclurent à une catastrophe exogène ayant entrainé la fin d’un monde… tout comme dans le cas des dinosaures !

    Cela fait tant de décennies que je suis confronté à l’égoïsme aberrant de l’ignorance triomphante qu’il ne me reste plus que la dignité de refuser tout ce à quoi je ne puis adhérer.
    Et à espérer que nous finirons par cesser d’aggraver sans cesse le problème…

    Car en quelques années la patience végétale peut régénérer le monde, en quelques années les écosystèmes peuvent se régénérer…
    Il aurait suffi de le vouloir…
    Plus ça va, plus c’est malheureusement trop tard…

    Gazdarem lou moral !

  3. Grosha, nous ne sommes pas génétiquement programmés pour consommer quelque chose comme une bactérie.
    S’émerveiller , questionner et comprendre n’est-ce pas ça l’humain ?
    Voir la métaphore de la vache d’Albert Einstein.

    Croire qu’il est trop tard c’est laisser le champ libre aux « goinfres » de l’article.
    Tendons leur un miroir moi je crois encore à l’éducabilité de l’Homme et à la mienne par conséquence.
    J’y crois encore viscéralement , de tout mon être alors comme disait M.Bernard
    « je suis en colère donc j’agis »

  4. Cette lecture me rappelle ce texte posé sur la toile que récitent sans forcément le savoir tant d’humains chaque matin…

    « Peu importe nos croyances ou nos idées politiques, le système mis en place dans notre monde libre repose sur l’accord tacite d’une sorte de contrat passé avec chacun d’entre nous, dont voici dans les grandes lignes le contenu :
    1) J’accepte la compétition comme base de notre système, même si j’ai conscience que ce fonctionnement engendre frustration et colère pour l’immense majorité des perdants,
    2) J’accepte d’être humilié ou exploité à condition qu’on me permette à mon tour d’humilier ou d’exploiter quelqu’un occupant une place inférieure dans la pyramide sociale,
    3) J’accepte l’exclusion sociale des marginaux, des inadaptés et des faibles car je considère que la prise en charge de la société a ses limites,
    4) J’accepte de rémunérer les banques pour qu’elles investissent mes salaires à leur convenance, et qu’elles ne me reversent aucun dividende de leurs gigantesques profits (qui serviront a dévaliser les pays pauvres, ce que j’accepte implicitement). J’accepte aussi qu’elle prélèvent une forte commission pour me prêter de l’argent qui n’est autre que celui des autres clients,
    5) J’accepte que l’on congèle et que l’on jette des tonnes de nourriture pour ne pas que les cours s’écroulent, plutôt que de les offrir aux nécessiteux et de permettre à quelques centaines de milliers de personnes de ne pas mourir de faim chaque année,
    6) J’accepte qu’il soit interdit de mettre fin à ses jours rapidement, en revanche je tolère qu’on le fasse lentement en inhalant ou ingérant des substances toxiques autorisées par les états,
    7) J’accepte que l’on fasse la guerre pour faire régner la paix. J’accepte qu’au nom de la paix, la première dépense des états soit le budget de la défense. J’accepte donc que des conflits soient créés artificiellement pour écouler les stocks d’armes et faire tourner l’économie mondiale,
    8) J’accepte l’hégémonie du pétrole dans notre économie, bien qu’il s’agisse d’une énergie coûteuse et polluante, et je suis d’accord pour empêcher toute tentative de substitution, s’il s’avérait que l’on découvre un moyen gratuit et illimité de produire de l’énergie, ce qui serait notre perte,
    9) J’accepte que l’on condamne le meurtre de son prochain, sauf si les états décrètent qu’il s’agit d’un ennemi et nous encouragent à le tuer,
    10) J’accepte que l’on divise l’opinion publique en créant des partis de droite et de gauche qui passeront leur temps à se combattre en me donnant l’impression de faire avancer le système. j’accepte d’ailleurs toutes sortes de divisions possibles, pourvu qu’elles me permettent de focaliser ma colère vers les ennemis désignés dont on agitera le portrait devant mes yeux,
    11) J’accepte que le pouvoir de façonner l’opinion publique, jadis détenu par les religions, soit aujourd’hui aux mains d’affairistes non élus démocratiquement et totalement libres de contrôler les états, car je suis convaincu du bon usage qu’ils en feront,
    12) J’accepte l’idée que le bonheur se résume au confort, l’amour au sexe, et la liberté à l’assouvissement de tous les désirs, car c’est ce que la publicité me rabâche toute la journée. Plus je serai malheureux et plus je consommerai : je remplirai mon rôle en contribuant au bon fonctionnement de notre économie,
    13) J’accepte que la valeur d’une personne se mesure à la taille de son compte bancaire, qu’on apprécie son utilité en fonction de sa productivité plutôt que de sa qualité, et qu’on l’exclue du système si elle n’est plus assez productive,
    14) J’accepte que l’on paie grassement les joueurs de football ou des acteurs, et beaucoup moins les professeurs et les médecins chargés de l’éducation et de la santé des générations futures,
    15) J’accepte que l’on mette au banc de la société les personnes âgées dont l’expérience pourrait nous être utile, car étant la civilisation la plus évoluée de la planète (et sans doute de l’univers) nous savons que l’expérience ne se partage ni ne se transmet,
    16) J’accepte que l’on me présente des nouvelles négatives et terrifiantes du monde tous les jours, pour que je puisse apprécier à quel point notre situation est normale et combien j’ai de la chance de vivre en Occident. Je sais qu’entretenir la peur dans nos esprits ne peut être que bénéfique pour nous,
    17) J’accepte que les industriels, militaires et politiciens se réunissent régulièrement pour prendre sans nous concerter des décisions qui engagent l’avenir de la vie et de la planète,
    18) J’accepte de consommer de la viande bovine traitée aux hormones sans qu’on me le signale explicitement. J’accepte que la culture des OGM se répande dans le monde entier, permettant ainsi aux trusts de l’agro-alimentaire de breveter le vivant, d’engranger des dividendes conséquents et de tenir sous leur joug l’agriculture mondiale,
    19) J’accepte que les banques internationales prêtent de l’argent aux pays souhaitant s’armer et se battre, et de choisir ainsi ceux qui feront la guerre et ceux qui ne la feront pas. Je suis conscient qu’il vaut mieux financer les deux bords afin d’être sûr de gagner de l’argent, et faire durer les conflits le plus longtemps possible afin de pouvoir totalement piller leurs ressources s’ils ne peuvent pas rembourser les emprunts,
    20) J’accepte que les multinationales s’abstiennent d’appliquer les progrès sociaux de l’Occident dans les pays défavorisés. Considérant que c’est déjà une embellie de les faire travailler, je préfère qu’on utilise les lois en vigueur dans ces pays permettant de faire travailler des enfants dans des conditions inhumaines et précaires. Au nom des droits de l’homme et du citoyen, nous n’avons pas le droit de faire de l’ingérence,
    21) J’accepte que les hommes politiques puissent être d’une honnêteté douteuse et parfois même corrompus. Je pense d’ailleurs que c’est normal au vu des fortes pressions qu’ils subissent. Pour la majorité par contre, la tolérance zéro doit être de mise,
    22) J’accepte que les laboratoires pharmaceutiques et les industriels de l’agro-alimentaire vendent dans les pays défavorisés des produits périmés ou utilisent des substances cancérigènes interdites en Occident,
    23) J’accepte que le reste de la planète, c’est-à-dire quatre milliards d’individus, puisse penser différemment à condition qu’il ne vienne pas exprimer ses croyances chez nous, et encore moins de tenter d’expliquer notre Histoire avec ses notions philosophiques primitives.
    24) J’accepte l’idée qu’il n’existe que deux possibilités dans la nature, à savoir chasser ou être chassé. Et si nous sommes doués d’une conscience et d’un langage, ce n’est certainement pas pour échapper à cette dualité, mais pour justifier pourquoi nous agissons de la sorte,
    25) J’accepte de considérer notre passé comme une suite ininterrompue de conflits, de conspirations politiques et de volontés hégémoniques, mais je sais qu’aujourd’hui tout ceci n’existe plus car nous sommes au summum de notre évolution, et que les seules règles régissant notre monde sont la recherche du bonheur et de la liberté de tous les peuples, comme nous l’entendons sans cesse dans nos discours politiques,
    26) J’accepte sans discuter et je considère comme vérités toutes les théories proposées pour l’explication du mystère de nos origines. Et j’accepte que la nature ait pu mettre des millions d’années pour créer un être humain dont le seul passe-temps soit la destruction de sa propre espèce en quelques instants,
    27) J’accepte la recherche du profit comme but suprême de l’Humanité, et l’accumulation des richesses comme l’accomplissement de la vie humaine,
    28) J’accepte la destruction des forêts, la quasi-disparition des poissons de rivières et de nos océans. J’accepte l’augmentation de la pollution industrielle et la dispersion de poisons chimiques et d’éléments radioactifs dans la nature. J’accepte l’utilisation de toutes sortes d’additifs chimiques dans mon alimentation, car je suis convaincu que si on les y met, c’est qu’ils sont utiles et sans danger,
    29) J’accepte la guerre économique sévissant sur la planète, même si je sens qu’elle nous mène vers une catastrophe sans précédent,
    30) J’accepte cette situation, et j’admets que je ne peux rien faire pour la changer ou l’améliorer,
    31) J’accepte d’être traité comme du bétail, car tout compte fait, je pense que je ne vaux pas mieux,
    32) J’accepte de ne poser aucune question, de fermer les yeux sur tout ceci, et de ne formuler aucune véritable opposition car je suis bien trop occupé par ma vie et mes soucis. J’accepte même de défendre à la mort ce contrat si vous me le demandez,
    33) J’accepte donc, en mon âme et conscience et définitivement, cette triste matrice que vous placez devant mes yeux pour m’empêcher de voir la réalité des choses. Je sais que vous agissez pour mon bien et pour celui de tous et je vous en remercie.  »

    « Nul n’est plus esclave que celui qui se croit libre sans l’être », Goethe

  5. alain merci . »Tirer un trait sur toutes les formes de représentation politique, et en appeler à une désertion généralisée. Cesser de parler de « nos » élus, de promouvoir l’utopie meurtrière d’un Etat bon-papa qui veillerait sur nous, de penser pouvoir encore sauver une institution quelconque.
    Cesser de penser le retour à un « bon » capitalisme de proximité, à une « juste » répartition des richesses, et à toutes les fadaises dont le citoyennisme nous abreuve et nous intoxique depuis vingt ans. A ce stade, l’espoir est meurtrier. Le capitalisme est au-delà de toute espèce de réformisme. Aucun dialogue n’est plus possible. »
    et aussi :

    Nous avons souillé notre nid de toutes les façons possible, l’air, l’eau, la terre…

  6. @Alain C,
    Je suis d’accord avec bien de passages de votre commentaire.

    Passages qui me rappellent avec plaisir la radicalité de la trop rare critique marxienne de la valeur quant à la forme de socialisation historique qu’est le capitalisme et son principe de synthèse sociale qu’est le travail (abstrait) contenu dans les marchandises.

    Avec des auteurs comme Anselm Jappe, Moishe Postone, Robert Kurz, vraiment pertinents pour décrire les critiquer dans ses catégories de base (*) –le travail abstrait, la valeur, la marchandise, l’argent– la crise de la modernité et la décomposition du capitalisme.

    (*) qui n’appartiennent nullement à tout mode de production, toute forme de socialisation, mais au seul capitalisme et qui engendrent son dynamisme aveugle.

    Voir notamment le blog de palim-psao : http://palim-psao.over-blog.fr/

  7. Tout ce qui est dit d’intelligent dans « pièces et main-d’oeuvre », on le sait depuis longtemps.

    M.K.Gandhi fustigeait déjà la « Révolution industrielle » qui a été  » une des pires erreurs de l’humanité » écrivait-il. Depuis, on est passé à la Révolution nanotechnologique, la pire de toute en termes de pollution.

    La peur du chômage, l’emploi (à prononcer en faisant exploser les bajoues à la manière de M.Aubry) la croissance pour la droite, la course aux terres rares que pratiquent les Chinois et autres maniaques du « tout numérique » sont autant de facteurs qui ont fait passer le productivisme avant le respect des dernières ressources terrestres.

    Mêmes les écologistes actuels ne savent toujours pas ce que le concept économique et scientifique de « coût environnemental » veut dire ! Pour éclairer certains lecteurs, entre choisir un rare scarabée dans son habitat naturel et une autoroute qui va détruire définitement l’espèce, l’Homme « moderne » choisit l’autoroute, c’est pareil pour le nucléaire.

    Quant on aura compris que non seulement le « progrès » est un leurre, en ce sens qu’il nous oblige à réagir plus vite, à produire plus vite, à répondre plus vite tout en détruisant nos rares ressources, sans même laisser le temps à l’eau et à la terre de se régénérer, on pourra alors se féliciter de cet accident nucléaire qui va obliger l’humanité à ralentir de gré ou de force sa course folle pour l’énergie.

    Yaqua, fauquon…, oui mais allez expliquer à des jeunes écervelés sortis du ventre de leur mère déjà équipés d’oreillettes pour la musique, un mobile dans la main pour ne rien dire, un I Pad dans l’utre, qu’il faut urgemment revenir aux années 50, époque où les mots consumérisme et obsolescence n’existaient pas, ils vous prendront pour un fou 🙂

  8. @ Hélène:

    Ravage de Barjavel? Relis le encore une fois avec des lunettes même pas de féministe mais de femme, tout simplement. Depuis l’héroïne du début, faible, vénale et conne (mais le héros l’aime quand même, c’est comme ça qu’on nous aime, nous les femmes), jusqu’au méga-patriarche de la fin…

  9. @ Marie, sur la FNE:

    Justement, c’est l’effet des subventions dont on ne peut se passer: si on fait un faux pas, on risque gros (l’existence même de l’association) et alors soit elle crève, soit d’autres plus accommodants prennent les affaires en main, soit ceux qui ont les affaires en main deviennent plus accommodants.

    Une association naissante peut vivre très chichement avec les moyens du bord et beaucoup d’énergie militante. Une association qui a pris de l’ampleur, embauché des salariés, créé des super-structures et pris des habitudes d’aisance retourne difficilement à l’austérité.

    Je crois que c’est une des clés de la dégénérescence de tous les outils mis en place depuis des siècles pour lutter contre l’emprise capitaliste et qui se font doucettement absorber (ou méchamment massacrer s »ils ne sont pas absorbables).

  10. @ Diksha:

    « des jeunes écervelés sortis du ventre de leur mère »:

    Je crois savoir qu’ils ne sont pas si vieux que ça, à PMO. Tantôt on attaque les vieux, tantôt on attaque les jeunes, moi je suis du parti de Brassens, le temps ne fait rien à l’affaire.

    Par contre, opposer jeunes et vieux embrouille considérablement la question. De la part de certains, c’est même délibéré.

  11. « Pour éclairer certains lecteurs, entre choisir un rare scarabée dans son habitat naturel et une autoroute qui va détruire définitement l’espèce, l’Homme “moderne” choisit l’autoroute, c’est pareil pour le nucléaire. »
    hé oui; alors l’écologie! on verra bien ce que çà donnera à part des places à ceux qui joueront les jeux politiques en manipulant, quand il ne le bernera pas, l’idiot de base.
    quant aux femmes, regardez autour de vous; comment çà se passe, personnellement, je ne vois pas agir cette solidarité-là! .

  12. Oui, c’est vrai, « Ravage » est très très misogyne, et c’est d’ailleurs en cela que l’œuvre de Barjavel a mal vieilli. Il faut essayer de faire abstraction de cette dimension machiste pour retenir l’essentiel de l’histoire, qui est très forte.

  13. Vu que ce billet est consacré à Pièces et Main d’Oeuvre, je tenais à dire, pour avoir lu tous leurs livres que j’ai toujours appris, (comme sur ce blog), énormément en les lisant.

    ==>Publications :

    Nanotechnologies/Maxiservitudes
    Le téléphone portable, gadget de destruction massive
    Terreur et possession : Enquête sur la police des populations à l’ère technologique
    RFID : la police totale
    A la recherche du nouvel ennemi; 2001-2025 : rudiments d’histoire contemporaine
    Aujourd’hui le nanomonde : Nanotechnologies : un projet de société totalitaire
    Techno. Le son de la technopole (2011)

    aux Ed. l’échappée sauf Nanotechnologies/Maxiservitude aux Ed. L’esprit frappeur.

    ==>Contributions dans deux ouvrages aux Ed. l’échappée :
    La tyrannie technologique
    LES LUDDITES EN FRANCE ;Résistances à l’industrialisation et à l’informatisation

    ==> Contributions aussi à la très bonne revue O.L.S (Offensive Libertaire et Sociale, trimestrielle).

    Et j’en profite pour mettre le lien audio de la conférence qu’ils ont donnée au salon Primevère l’an dernier :
    « Des nanotechnologies à la société de contrainte »

    http://vimeo.com/10213654

  14. « Tous les êtres humains trébuchent un jour sur la vérité. La plupart se relèvent rapidement, secouent leurs vêtements et retournent à leurs préoccupations, comme si de rien n’était. »

    Winston Churchill Premier Ministre de la Grande-Bretagne de 1940 à 1945 et de 1951 à 1955

  15.  » un ami de face book a le bourdon et c’est poignant
    « Y’a longtemps que j’en fais, vois tu…(de la résistance) Et bon, le résultat c’est quoi hein ? J’ai fait mumuse avec mon hochet pendant que les industriels empoisonnaient tout… J’ai pris le nuage de Tchernobyl sur la gueule, j’étais sous la flotte quand i…l est passé..; j’ai pris quelques retombées d’essais atomique aussi si je ne m’abuse, et aussi des tonnes de vapeurs toxiques de pesticides et autres..; je vais ramasser à nouveau un nuage sans danger sur le coin de la bouille demain matin. Tu t’imagine que je vais me bourrer d’iode ? Pour quoi faire ? Sauver ma petite guegueule ? mais j’en ai rien a branler de ma petite gueugueule mon vieux. c’est l’avenir de la Terre que je défendais en écologie, et celui de nos enfants, de mon fils, peut-être le tien je sais pas… Je ne luttais pas pour survivre et prendre mon pied sur une planète grabataire. Tu comprends ça ? Alors j’attends gentiment la fin, pour de vrai. Ca me fera des vacances. Oh jusqu’à la fin je resterai dans le combat, mais c’est pour l’honneur, rien que pour l’honneur. Comme tu dis : j’suis un papy, mon gamin est en âge d’avoir plusieurs mômes… et j’espère qu’il restera à ses résolutions : ce monde ne le mérite pas. On ne génère pas la souffrance volontairement. La terre est blessée pour de bon. On ne construira pas un monde propre demain, ni après demain… J’suis trop vieux pour espèrer vivre dans un monde humain. »

  16. Quel plaisir ! Oser s’attaquer aux artistes et aux scientifiques , repaires d’imbéciles d’autant plus dangereux qu’on se s’attend pas à en trouver dans ces domaines ( quand on ne les connaît pas … ) !

    Morceaux choisis :

     » Autre initiative locale, le couplage en 2002 du CEA Grenoble, « l’un des dix plus importants centres
    mondiaux de recherche en micro et nanosciences et technologies » et de l’Hexagone de Meylan, « Scène
    nationale » et centre culturel situé dans la banlieue cossue et riche en ingénieurs, cadres, techniciens, de
    Grenoble. L’Hexagone et le CEA-Minatec créent ensemble « Les Rencontres-I, festival des imaginaires »,
    événement publicitaire ayant pour but l’hybridation des artistes, des scientifiques et des entreprises. C’est-àdire
    d’emballer et d’embellir les activités scientifico-industrielles d’un voile d’onirisme esthétisant : de la
    boue dans un bas de soie. « Quatre festivals et de nombreuses collaborations plus tard », les deux partenaires
    essaiment avec la création en 2007 de « l’Atelier Arts-Sciences, lieu commun de recherche et
    d’expérimentation pour artistes et scientifiques ». Combine madrée qui permet à Jean Therme, le directeur du
    CEA-Grenoble, et à Antoine Conjard, son sous-ordre de l’Hexagone, servis d’une suite de parasites à
    prétention culturalo-scientifique, de ratisser en vue de « résidences » et de financements, des ramassis de
    pimbêches chorégraphes, de cuistres scénographes, d’« artistes électroniques », de phraseurs et « performers »
    sociologues, bref toute l’épaisse et foisonnante raclure des « artistes » et chercheurs, aptes à dissimuler la
    vacuité de leurs « propositions » derrière un nuage de verbosité en yaourt artistico-contemporain. C’est se
    faire, à bon marché, une nuée de prôneurs dans une ville où la pose artistico-culturelle jouit d’une sorte
    d’immunité, et s’en servir pour étendre cette immunité aux nécrotechnologies elles-mêmes. Les individus et
    les groupes piégés, embrigadés, n’osent plus se désavouer et, bon gré mal gré, doivent défendre la mauvaise
    cause qu’ils ont sottement embrassée. »

     » Ce qui éclate dans ce texte comme dans les déclarations de Jean Therme, le patron du CEAGrenoble,
    c’est l’absence de pensée morale. C’est un lieu commun qu’il faille, pour réussir une
    carrière, étouffer tout scrupule et ne pas rechigner à la bassesse quand celle-ci ouvre des portes. Mais
    il y a chez les chercheurs, qui se donnent beaucoup de mal pour leur autodéfense, une imperméabilité
    flagrante à la notion de responsabilité individuelle, d’autant plus catastrophique que ceux-ci
    prétendent « révolutionner » nos vies. Un pouvoir sans égal, qui refuse d’être nommé : voilà la
    technoscience. Au fond, ce refus de toute responsabilité révèle son corollaire : le refus de la liberté
    chez des individus accoutumés depuis leurs années de formation à obéir, à respecter la hiérarchie de
    l’institution et les règles en usage pour obtenir de la promotion. Aussi bien les scientifiques capables
    d’esprit critique semblent-ils des incongruités et un Roger Godement, mathématicien, paraît bien
    isolé quand il interpelle ses collègues : « sommes-nous des scientifiques ou des représentants de
    commerce ? »

     » S’il est une activité qui n’est jamais soumise à la délibération collective,
    c’est celle des chercheurs. Non seulement ceux-ci prétendent révolutionner nos vies, à l’instar des
    nanocrates, mais ils estiment légitime d’assumer seuls ces prétentions, sans jamais les soumettre à
    leurs cobayes.
    Quant à distinguer entre recherche « fondamentale » et appliquée, c’est ignorer – grave lacune ou
    mauvaise foi – que la frontière entre les deux a été abolie depuis longtemps, sous l’effet de la synergie
    recherche-industrie notamment, dont Michel Soutif est l’un des « pionniers ». Comme si les
    laboratoires n’effectuaient pas leurs recherches sous l’impulsion de contrats, souvent avec l’industrie,
    et dans l’objectif quasi-systématique de trouver des « débouchés ». Comme si les chercheurs euxmêmes
    ne vantaient pas, à longueur de réclamations budgétaires, leur contribution à la croissance
    économique. « Il faut souligner avec force son rôle incontournable pour l’économie et le
    développement de notre pays : sans recherche fondamentale aujourd’hui, pas d’innovation
    demain ! », peut-on lire sur le site de Sauvons la Recherche.
     »

    http://www.piecesetmaindoeuvre.com/IMG/pdf/Les_rats_de_l_art.pdf

    http://www.piecesetmaindoeuvre.com/IMG/pdf/Reponse_M-_Soutif.pdf

  17. Ce texte, d’une magnifique radicalité, est aussi beau que totalement inutile !
    Le combat de l’écologie, enfin de la propagation de ses idées, ne se gagnera pas sans Internet, et le fait que nous n’aurions pas eu connaissance de ce texte, ni été capable de le diffuser au plus grand nombre sans le net, le prouve.
    Je ne discute pas les arguments qui me semblent justes, je pense que nous ne nous en sortirons pas sans une décroissance, mais voilà exactement le type de texte qui va faire la joie de nos adversaires qui nous raillent et nous renvoient nous éclairer à la bougie au fond des grottes de l’Ardèche…depuis 50 ans…
    Et puis combien de lecteurs de ce site (pourtant sans doute sensibles à l’écologie) ont résilié leur abonnement au net depuis la lecture de l’article ?
    S’unir, manifester, en nombre, dans la rue et sur le net ! pour imposer enfin un débat et une sortie du nucléaire me semble un objectif (déjà ambitieux) plus réaliste.

  18. J’ai lu le texte « les rats de l’art » de « Pièce et main d’œuvre » et en effet, ce texte n’apporte rien d’autre que les haine des « bons » artistes contre les « mauvais » : ceux qui ont eu le mauvais goût de ne pas crever de faim en travaillant pour l’establisment.
    Une aigreur inutile…

  19. @lionel : Merci pour le lien, conférence très intéressante. Ca m’a donné envie de lire leurs bouqins d’ailleurs ; sont-ils relativement accessibles ? Y-en a-t-il un en particulier par lequel vous conseillerez de commencer ? J’ai également comme vous beaucoup appris sur le blog de Fabrice.

    @ux autres : L’avenir s’annonce sous de biens sombres augures et ce n’est certes pas ce blog qui témoignera du contraire, à raison bien entendu. Mais il est réconfortant d’une certaine façon de lire ce qui se dit ici car l’on se sent tout de même moins seul. C’est une bien maigre consolation, je sais… Car comment changer les choses à si peu contre toute cette masse grouillante de beaufs lobotomisés par la télé, la pub et les supermarchés ? Quelques marginaux contre un système entier ? A un stade déjà si critique, de quasi non-retour ? Comment lutter face à un monstre aussi disproportionné que tout ce putain de système industriel ?

    J’ai bien peu d’espoir mais au moins, il y a Fabrice, il y a vous, il y a nous tous. C’est bien là l’avantage d’Internet, qui permet de réunir des pensées par trop divisées géographiquement. Et ça redonne – parfois – envie d’y croire.

    Merci en particulier à Alain C. et eva.

  20. Toute cette intelligence que l’on peut lire sur ce site, c’est un bonheur à côté de la soupe que l’on peut servir à la « masse » sur nombre de chaînes TV, radios, … Mais dans l’ensemble c’est déprimant. Je ne parle pas des drames, mais du fait que l’ON NE SE FAIT PAS ENTENDRE !

    Humblement, je ne sais pas ce qui pourrait aider à porter ces idées, et à élever la conscience du « citoyen moyen ». Un projet, et un as de la com’ pour le faire passer ? Des preuves par le porte-monnaie puisqu’il n’y a que ça qui compte ? Elus, publicistes, grandes entreprises, ont malheureusement réussi à lobotomiser beaucoup de monde, faisant gober que leur petite vie, ils ne peuvent la mener qu’en possédant des tas de choses, et bien sûr que tout ce luxe est à la portée de chacun. Dans ces conditions, on ferme les yeux sur le fait que tout devient jetable. De l’objet à celui qui l’a fabriqué, sans parler de celui qui le consomme.

    Et en parlant de travail, face au temps de transport qui ne fait que s’allonge pour aller travailler, que fait-on ? Des cautères sur des jambes de bois : on multiplie les routes ou les bus, trams, trains, etc… Jamais on ne se pose pour se dire qu’avant tout, on aimerait travailler près de chez soi. Ne peut-on du coup imaginer des solutions pour cela ?

    Je suis certaine que l’on peut construire autre chose, de plus sain pour tous, et pour notre planète. Bon sang, quelqu’un aurait-il une idée de génie pour que l’on suscite l’adhésion ?

  21. je connais un kiné que je vais d’ailleurs larguer pour cette raison qui fait tous les jours 150 kms aller retour entre son cabinet et sa maison! est-ce bien normal? meme si chacun sa librté je trouve abusif. aucune notion de son impact

  22. @Florent,
    Leurs livres sont accessibles, car bien écrits, bien que le sujet ne soit pas toujours évident, ce qui est une qualité.

    Je te conseillerais de commencer par La tyrannie technologique, L’échappée 2007 une très bonne immersion dans l’histoire des sciences et de la critique de la technique.

    ou bienRFID – La police totale L’échappée 2008, relativement court.

  23. @ Hélène

    Vous écrivez  » en effet  » , ce qui est le signe de l’approbation d’une opinion exprimée précédemment . Comme il n’y a pas d’autre commentaire que celui de Didier entre le mien sur  » les rats et l’art  » et le vôtre , vous faites référence à  » Ce texte, d’une magnifique radicalité, est aussi beau que totalement inutile !  » de Didier .
    Or , Didier fait référence à l’article de Fabrice , pas à  » les rats et l’art  » .

    Maintenant , si vous cautionnez ceux qui travaillent pour l’establisment pour ne pas  » crever de faim  » ( en toute rigueur dans le cas présent : pour ne pas gagner leur argent autrement qu’en étant un enc… de mouche qui fayotte auprès du membre de l’équipe municipale qui a le contrôle du robinet à argent ), vous devez inclure dans votre indulgence les traders , les publicistes , les ingénieurs et les ouvriers qui construisent les armes que les dictateurs emploient , et la liste est longue !

    Je ne sais plus qui a dit :  » Le Monde ne sera sauvé , s’il peut l’être , que par des insoumis  » ( Gide , je crois ), mais ces  » artistes  » ( fréquentez les vernissages , expos et cie et constatez le grotesque abus de langage ) ne sont que des nigauds dont la conscience ne dépasse pas la critique du  » politiquement correct  » , du  » sacro-saint argent  » et de la  » pensée unique  » , et ne sont que les faire-valoir de l’adjoint au affaires culturelles qui , grâce à ces ( ses ) esclaves , passe pour pour un ardent défenseur de l’art et de la liberté d’expression , plus sûrs remparts contre l’abrutissement délivré par la télé . Ce qui est une très bonne chose pour conserver son poste de  » monsieur culture  » , qui n’est pas , lui , un abruti , puisqu’il déclare ( je l’ai entendu en chair et en os ) :  » Ici , nous avons des artistes libres  » .
    Car contrairement à ailleurs , les artistes d’ici sont libres (sic) !
    Mais seulement de critiquer l’opposition ou les dictatures lointaines , sinon , fini les subventions …
    Quand j’entends ces artistes et que je constate leur culture , ce n’est pas un revolver que j’ai envie de sortir , mais une bassine pour vomir , aigreur dont je leur fait part quand :
    – alors , t’en penses quoi ?
    – que c’est aussi laid que creux … J’espère que ça rapporte , au moins ?

  24. @lionel : Ok, c’est noté ! Je vais donc me procurer « La tyrannie technologique », l’un des titres qui m’avait d’ailleurs le plus interpellé. Merci pour tes conseils 😉

    @marie : Je partage ce sentiment d’impuissance, l’adversaire est tellement fort… Le plus frustrant est de se dire que c’est finalement quelque chose d’aussi vain et immatériel que l’argent qui est cause de tout ce merdier. Le profit avant le bon sens, avant l’empathie, avant la beauté, avant la vie.
    Je crois que les gens ne se réveilleront que quand ils seront directement menacés, quand leur vie propre sera réellement en danger (et il faudrait que ce soit à très grande échelle). Un peu comme pour la question de la viande (et bien d’autres) en fait il me semble : dans l’ensemble, les gens n’en ont strictement rien à secouer de la souffrance hallucinante qu’ils engendrent, ils n’ont pas vraiment envie de savoir ; par contre, si le fait de manger de la viande peut nuire à leur petite santé, peut-être qu’ils vont se mettre à réfléchir. Enfin, ça fait toujours des arguments en plus à nous autres bouffeurs de salades pour tenter vainement de « convertir » la populace (qui pourtant en gobe un paquet, de salades)
    Bref, il n’y a que quand les catastrophes arrivent qu’on se dit connement : « Bah ouais, merde. » Sauf qu’il est trop tard.

  25. A voir les photos de l’intérieur de la centrale, les nucléocrates drapés dans leur arrogance ont réussi ce qu’ils nous reprochaient : ils ont à Fukushima, le nucléaire ET la bougie ET le retour aux CAVERNES (la salle des machines endommagée et en pleine obscurité). Avec les radiations pour la planète entière en prime !
    Les photos sont là :
    http://sciences.blogs.liberation.fr/home/2011/03/premi%C3%A8res-photos-de-lint%C3%A9rieur-de-la-centrale-de-fukushima.html
    Enfin, si le nuage radio-actif semble peu dangereux ici, nos officiels continuent à garder secrètes les données (que nous payons en plus !), la CRIIRAD s’en indigne (communiqué du 23/03 sur la partie « accident au Japon » du site http://www.criirad.org).

  26. @Azer, oui en effet, j’étais hors-sujet par rapport au texte évoqué par Fabrice. Et oui, je fréquente les vernissages, et je connais assez le monde de l’art pour savoir qu’aigreur et jalousie font très bon ménage.
    Les « nigauds » et les « rats » sont des personnes qui tentent de vivre de leur passion et pas grassement, croyez-moi ! J’en connais aussi qui vivent dans leur soupente et se nourrissent de nouilles… pour le coup, la décroissance ils connaissent !!!
    Bon, on est hors-sujet, c’était juste un p’tit coup de gueule…

  27. Je signale qu’on peut s’abonner à Enercoop pour la fourniture de son électricité, et que cette électricité est renouvelable (éolien, solaire, hydroélectrique).

    Bon, vous n’êtes pas sûr que VOTRE électricité est renouvelable mais ça revient au même car Enercoop finance et injecte dans les « tuyaux » autant d’électricité renouvelable que ce que vous consommez…

    http://www.enercoop.fr/

    (je suis cliente)

  28. je viens de terminer votre livre « qui a tué l’écologie », il faut du courage pour lancer ce pavé dans la mare. Je l’ai apprécié parce qu’il vise juste et fustige ceux que les deep écologistes américains nomment les enviroresourcistes qui prennent de plus en plus la tête des ONG alors que seuls les naturalistes voient encore la nature et sont prêts à la défendre de façon radicale. Je suis loin de Paris et j’ignore les dessous que vous avez révélés dans votre livre passionnant mais j’ai ressenti un profond malaise depuis le grenelle avec FNE qui a osé signer ce slogan schizophrène du produire plus tout en préservant mieux la biodiversité, comment peut-on être aussi stupide, je l’ai dit aux gens de FNE mais ils ne veulent rien entendre trop lié au ministère de l’agriculture.

    Pour que vous sachiez qui je suis: écologue et spécialiste de l’intégration de l’écologie en gestion forestière travaillant dans un parc naturel régional, également membre des JNE j’ai commencé une chronique dans Politis et je suis en train de rédiger une biographie de François Terrasson.

    Encore bravo pour ce livre salutaire

    bien cordialement

    Jean-Claude Génot

  29. Salut,

    Y a pas de cafés-discussions à votre programme ? (De surcroît, sans caméra ! :-))

    Ça éviterait de se tartiner des trucs trop longs, au clavier…

    Sinon, félicitations pour ce que j’ai entendu ce matin.

    LN.

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *