Au-delà de la condition humaine

Connaissez-vous le transhumanisme ? Ah, quelle histoire ! Je lisais la semaine passée dans Le Canard enchaîné un article de Jean-Luc Porquet sur le sujet, bien intéressant. Et si vous me pardonnez de me vanter, je souhaite vous offrir le bout d’un article que j’ai écrit sur la question à l’extrême fin de 2001. Voyez, le sujet m’intéresse depuis quelque temps déjà.

Voici l’extrait : « Avec les transhumanistes, vous ne risquez pas de vous ennuyer, soyez-en sûr. Qui sont-ils ? Une poignée pour l’heure, mais dont tout permet de penser qu’ils forment l’avant-garde d’une armée immense. Le transhumanisme est une sorte de théorie, née chez certains scientifiques et concepteurs de nouvelles technologies. Selon eux, la nature humaine, loin d’être inaltérable, ne cesse d’être modifiée en profondeur par les découvertes, le changement, le neuf. Elle est malléable, à volonté ou presque.
Or de glorieux horizons se découvrent, grâce notamment aux nanotechnologies moléculaires, aux machines intelligentes, aux « médicaments de la personnalité », à la vie artificielle, à l’extension devenue possible du corps par la machine, etc. Qu’allons-nous faire de ces miraculeuses vendanges ? Mais en profiter, bien entendu, pour sortir de nous-mêmes. C’est là l’occasion d’aller au-delà –
trans – de notre misérable enveloppe. De l’audace, de l’audace ».

Le décor est planté, mais il faut revenir à l’actualité, telle que décrite par Porquet. Que nous apprend-il ? Au cours d’une conférence transhumaniste auquel il a assisté, de notables personnages ont promis de belles avancées, dont l’ouverture prochaine, à Grenoble, d’une clinique appelée Clinatec. Attention, prodiges garantis : grâce aux techniciens et scientifiques du Commissariat à l’énergie atomique (CEA), le professeur Alim-Louis Benabib interviendra sur de graves maladies du cerveau, dont l’horrible Parkinson, appuyé une armada de nanotechnologies, lesquelles agissent à l’échelle moléculaire, ce qui est, quoi qu’on en pense, une complète révolution.

Qui diable accueille ainsi en plein Paris un tel événement ? Fondapol, mes aïeux, qui signifie bizarrement Fondation pour l’innovation politique. Pour le cas où cela vous intéresserait, sachez que Fondapol est un joujou de notre vieux Chirac. Mais oui, l’immense écologiste que la planète nous envie. Et que raconte Fondapol sur son site internet (http://www.fondapol.org) pour présenter cette inoubliable conférence ? Ceci, que je vous conseille de savourer : « L’humanité est à l’aube d’un changement radical. La capacité de manipuler la matière au niveau de l’atome, y compris à l’intérieur du corps humain, crée une médecine nouvelle, qui n’a plus seulement la vocation de réparer le corps et d’en soulager les souffrances, mais d’augmenter les performances “naturelles” de l’homme.
Va-t-on réellement vers un nouvel être “supérieur”, peut-être même immortel ? Comment la science et la fiction se nourrissent-elles mutuellement ?
Une éthique nouvelle doit répondre à cette situation inédite ».

J’aimerais bien me contenter de rire, mais je sais trop que ces transhommes-là ne sont que des estafettes. Derrière eux piaffent des armées encore invisibles de clones décidés à tout pour échapper à l’étau. Ceux-là, et je crains qu’ils ne soient légion, ne peuvent accepter la réalité terrible de la crise écologique mondiale. Tout leur sera préférable au face-à-face désormais inévitable avec les limites de l’aventure humaine. Soyez assurés qu’ils trouveront quantité de trucs pour croire et faire croire que l’homme peut sortir de sa condition. Je peux me tromper, mais je redoute déjà les effets de tels discours sur des esprits tourneboulés par les tragédies à venir.

Dans l’histoire, ceux qui ont imaginé l’avenir le plus scintillant sont également ceux qui ont organisé le présent le plus insupportable. Voici ce que j’écrivais en conclusion de mon papier d’il y a six ans, et je n’ai pas changé d’avis : « La technoscience pourrait bien devenir le dernier refuge de ceux qui, incapables de changer la réalité, et n’y songeant d’ailleurs pas, entendent en changer la perception. Adieu effet de serre et bidonvilles, adieu misère et déforestation. Et place à l’homme nouveau. Supérieur ? On aimerait se tromper, mais on croit retrouver des effluves transhumanistes chez des auteurs comme Maurice G.Dantec, récemment encensé jusqu’au grotesque, ou Michel Houellebecq. Annoncent-ils une nouvelle poussée de régression ? Ce serait une mauvaise nouvelle, mais elle n’étonnerait guère ».

PS : Ce rajout est écrit dans l’après-midi du 8 novembre. J’ai oublié ce matin de vous signaler un entretien avec l’écrivain Ray Bradbury, paru dans Le Monde daté 4-5 novembre 2007. Bradbury est un vieux cinglé de 87 ans, et j’en suis d’autant plus marri que je fus un lecteur enthousiaste de Farenheit 451 et de Chroniques martiennes. Mais la vieillesse est un naufrage, comme on sait. Dans l’entretien, Bradbury apparaît comme un furieux transhumaniste. Il clame son amour du nucléaire et assure que « les voyages dans l’espace nous rendront immortels ». En somme, il ne regrette qu’une chose : mourir au moment où la technologie promet à l’humanité de devenir une autre qu’elle même. Misère !

11 réflexions sur « Au-delà de la condition humaine »

  1. Tt çà n’est que la suite de la neurobiologie ( pas tous les neurobio qd ^m) qui imagine que c’est le phosphore en nous qui pense. Faute de bien savoir faire la différence entre le singe et nous, ils s’imaginent donc tt permis, sans limite; et on retrouve ta Q de la morale et de la liberté en conclusion de « La faim, la bagnole, le fric et nous »

  2. oui, ça ne m’étonne pas , c’est la continuité de l’histoire d’une certaine « humanité » . Je réitère que l’homme est dans l’incapacité de créer quoique ce soit. Fabriquer , mélanger, assembler, desosser,ect, et c’est tout, et prouvez moi le contraire !On voit déjà suffisamment les dégats causés par les molécules multicomplexes longues durées,notamment sur les baisses des capacités cérébrales et reproductives de l’homme et j’en passe, le sur-homme est d’ores et déjà un être bien diminué, et malgré cela,il demeure des fous furieux et pas mal de névroses . Soupirs et re-soupirs .

  3. oui il y a des différences entre le singe et nous, mais le singe aussi est respectable, comme les plantes et les minéraux, puisqu’ils sont les fruits d’une longue évolution génétique, puisqu’ils sont vivants, de ces mouvements d’énergie incroyables qui attirent ou repoussent chacun de leurs électrons entre eux . L’homme dénature en croyant créer, nos athlètes, dieux du stade et cobayes ,en savent quelques chose, puisque dopés aux hormones, à l’oxygène et plus récemment aux modifications génétiques, ils éffectuent des prouesses mais au prix de terribles effets secondaires (féminisation, ect) et de vies racourcies . Il ne s’agit pas de réfuter la science en bloc, dont la médecine .soigner un cancer à l’If qui est un poison, ça permet tout de même de rallonger la durée de vie de manière non négligeable . il s’agit d’avoir enfin conscience de ce que nous sommes en réalité et ainsi que de tous les êtres qui nous entourent , et de nos limittes .

  4. Les préfixes « trans » ou « sur » devant homme/humanité sont à comprendre dans le cas de ces substantifs une déclinaison du préfixe « dés ».

  5. Lu dans « Sciences et Avenir » de novembre, p.98: « Faut-il avoir peur des nanotechnologies ? »
    – OUI, selon la philosophe Bernadette Bensaude-Vincent, qui tout en prétendant qu’ « il faut se garder de tomber dans le piège du catastrophisme (…) comme le risque de voir apparaître une nouvelle espèce de surhomme… », n’en admet pas moins un peu plus loin que certaines applications « visent à augmenter les performances humaines » et que « demain, des gens sains les utiliseront. Quels seront alors les rapports entre ces êtres « augmentés » et les autres ? »
    – NON, selon le physicien Eric Dexler, et là inutile d’insister sur sa vision grandiose de l’apport des nanomachines dans le corps humain…
    Bref, ce qui était de la science fiction il y a quelques années, fait aujourd’hui l’objet d’une large vulgarisation, afin de mieux faire accepter par le public l’idée que les nanotechnologies, ben, c’est le progrès, c’est la croissance, c’est l’avenir, quoi !
    Et omettre de l’informer que :
    1) les nanotechnologies représentent un danger pour les libertés et pour la santé
    2) l’argent public est avant tout destiné à des recherches dans le domaine militaire; les premiers « surhommes » seront probablement des soldats…

    A voir aussi le site de J.A.ME.H. (Jamais Avec la Manipulation Electronique de l’Humain) qui a recueilli une somme considérable d’infos à ce sujet :
    http://www.jameh.org/

  6. Bon, Fabrice, tu sais que j’apprécie tes bouquins au sens ou ils nous font sortir de nos aveuglements et de nos ignorances crasses de ne pas savoir tjs relier les fils (fil au pluriel, ou enfantS) de la manipulation. OK, Mais nous avons tjs un train de retard sur les manipulateurs , et de mon point de vue, le bon plan serait d’être offensif à leur égard. Comment faire?

    C’est exactement ce que soulève Bénédicte
    (@Benedicte) « pas réfuter la science en bloc (…) avoir conscience de ce que ns sommes ». C’est çà le pb à résoudre, soit ma Q du § antérieur: repérer le niveau de scientificité auquel se référe le pb et l’argumentation utilisée par celui qui y répond en théorie ou en pratique, sans rien dire de ses intentions cachées:
    – Une question physico-chimique ne donne des reponses scientifiques que ds le cadre de sa(ses) théorie(s) et ne permet absolument pas d’en déduire quoi que ce soit qt à l’homme.
    – idem pour ce qui relève des sciences de la vie.
    – idem au niveau des sc humaines.

    Chaque niveau possède ses théories et ses modes de vérification-falsification. (pour ceux qui ne sont pas au courant, et en sciences humaines, les seuls modèles verifiables falsifiables sont ceux de la théorie de la médiation ou anthropologie cliniques*, les autres pseudo-sciences humaines ne sont que des copiages des modèles des sciences dites exactes qui ne peuvent donc que réduire ou écraser l’objet ou le sujet qu’elles se donnent! ou encore de pseudo sciences appliquées type histoire, « sciences juridiques », économie, qui n’ont même pas encore défini les sciences humaines fondamentales sur lesquelles s’appuyer)

    Bon, si vous avez suivi l’argumentation et fait preuve d’un peu de curiosité en cherchant sur quelques mots clés que j’ai utilisé, vous verez qu’il n’y a rien de dogmatique ds ma positio;, car, si l’essentiel des modèles est posé, reste encore à les vérifier, ou montrer que çà ne tient pas la route. En tous les cas , ce sera sortir du règne des opinions ou des politiques au doigt mouillé (pour mieux nous e…) alors qu’elles sont objectivement pilotées par des intérêts aveugles, sauf à leur croissance cancéreuse.

    * plus simple: tapez « LIRL »

  7. Einstein, ou Marie-Curie les mains rongées par la radioactivité, ont-ils vu en rêve un champignon mortel flotter sur Hiroshima ? J’en doute fort. Chaque découverte est encore et toujours, de la part de l’homme, pour le meilleur et pour le pire .Les solutions que je vois sont simples : l’éveil des consciences, l’éducation à la sagesse (voir « amour » de la sagesse = philosophie), éducation à la différence (etnologie,sociologie), à l’écoute et l’observation de la nature bien-sûr . De là découleraient des cadres juridiques locaux et internationnaux concernant l’experimentation scientifique, l’exploitation des ressources, des brevets …bien-sûr c’est très banal et pratiqué sans résultat depuis la nuit des temps humains et je rêve, mais le péril même de la continuité de son espèce permettra-il enfin à l’homme de dépasser mentalement l’âge de pierre ? ce qui est plus certain (mais dame nature est pleine de surprises et je suis bien petite pour prédire l’avenir)c’est que de l’âge des techniques on atteindra l’âge de la raison ou rien du tout .

  8. Ami(e)s du blog, bonjour !

    Vue de l’espace que la Terre est belle toute de bleu,de blanc et de vert vêtue…
    Elle est,nous le savons maintenant,structurée en un
    assemblage de plusieurs  » états « .
    La lithosphère,la biosphère(dont nous faisons partie),l’atmosphère,la noosphère et…la nécrosphère !
    Qu’est-ce donc la nécrosphère ?
    Tout simplement l’ensemble des techno-sciences associé à la politique transhumaniste qui ne favorise et détermine actuellement qu’une petite fraction de l’humanité.
    ( Quid de la grande majorité ? )
    De l’ échelle cellulaire nous arrivons progressivement à l’échelle atomique et serons
    quasiment en mesure de créer une forme de vie artificielle qui se nourrit d’ores et déjà de la vitalité biosphérique .
    Encore quelques degrés Celsius de plus et l’équilibre biosphérique sera complètement différent,et l' »état » de nécrosphère irrémédiablement constitué !
    Selon le point de vue Epicurien notre planète n’est qu’une parmi une infinité d’autres planètes.
    En d’autres termes notre  » Espèce  » est unique et son originalité réside dans sa capacité à s’adapter à l’environnement biosphérique malgré que son évolution soit régulièremnt ponctuée par des impacts,cataclysmes ou erreurs dans la gestion
    des structures sociétales,en l’occurence les
     » nomos  » .
    Notre futur dépend,dans le temps décroissant qu’il
    nous reste,de nos actions à mener pour reprendre en main les fondements mêmes de notre condition
    humaine !

    Bien à vous,

    Yvan

  9. A propos de la  » condition humaine  » et non-plus
     » Au-delà  » je vous propose une autre réflexion…
    Elle pourrait s’intituler, aujourd’hui :

    « L’Habit du Pauvre  » ou  » La Fripe c’est Chic  » !

    Dans l’économie contemporaine être sans travail et
    S.D.F.(Sans Domicile Fixe) révèle le triste
    « développement durable » de l’exclusion progréssive
    au travail et au logement .
    Quand la misère,croissante… chasse la pauvreté !

    De fait,lundi dernier 5 novembre 2007 à 19H30 sur la radio publique France Inter, le débat tournait
    autour de la pauvreté et plus particulièrement autour du « comment devenir travailleur pauvre » en
    réintégrant le monde du travail .
    L’argumentation développée à pris pour base la
    présentation du nouveau R.S.A.(Revenu de Solidarité Active)et de sa prochaine mise en expérimentation sur certaines Régions.
    En résumé,cet électro-choc inciterait au travail
    en complémentant le Revenu…du Revenu(minimum)
    du travail.
    Pourquoi pas.
    Mais alors,si l’on ne veut pas que le pays
    devienne la  » France A-fripe  » il faut absolument
    préciser et garantir les mesures suivantes:

    1/ La mise en place du R.S.A. ne pourrait être
    valable qu’à la seule et unique condition que son
    financement soit intégralement assuré par la taxation des gains spéculatifs.
    La balance économique serait ainsi juste et équitable !
    2/ Le système ne devrait pas être seulement localisé à certaines Régions mais étendu à l’ensemble du territoire.
    Ainsi,on éviterait la « Migration Concentrationnaire Régionale »,donc il n’y aurait
    pas de délocalisation de la pauvreté et l’ unité
    familiale serait préservée !
    3/ Il faudrait définir et exercer une « Veille
    Economique », dédiée, afin de garantir un pouvoir
    d’achât décent et donc une vie honorable à la population relevant du R.S.A.
    Ainsi l’on ne dirait plus « pauvre » ou « modeste »
    mais RESPECTABLE !

    En tout état de cause, que sont devenues la
    fraternité,la compassion et l’espérance commune
    face à la pauvreté et son cortège de souffrances grandissantes ?
    Notre civilisation recule, et ce recul dévoile la
    défaite de l’Être social,de l’humain.
    Il ne semble effectivement pas y avoir de solutions au sein des sanctuaires économiques nationaux barricadés individuellement et
    collectivement.
    A priori, que des pis-aller !
    De surcroît,plus la pauvreté augmente,plus le
    risque de guerre est potentiel .

    [Quand les riches se font la guerre,se sont les
    pauvres qui meurent] (Jean-Paul Sartre)

    C’est un fait… avéré !
    Alors, en ces temps incertains où l’affrontement
    pour les énergies de « stock » et ressources
    naturelles est imminent,nous DEVONS renouer avec
    le respect,l’équité,le partage,la tendresse,la gentillesse
    tout en acceptant notre fragile Condition
    Humaine face au risque biosphérique.
    Plutôt que la fripe,il peut encore y avoir des habits dignes et honorables pour toutes et tous .

    Nous préserverons la paix sociale et planétaire
    si l’on parvient dans un futur proche à reformuler
    l' »ekos »,le « logos » et les « nomos » .
    En généralisant et partageant la Pensée Planétaire
    nous pourrons alors reconnaitre et universaliser
    la place de l’ humain sur la Terre.

    Bien à vous,

    Yvan

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