Sur Bové (à nouveau), sur le loup (encore)

Attention, un deuxième message accompagne le premier. Vous lirez – ou non – deux explications. L’une concerne José Bové, l’autre le loup, auquel j’ai consacré l’une de mes premières interventions ici, le 30 août dernier (http://fabrice-nicolino.com). L’ensemble est long, et rien ne vous oblige, cela va de soi.

Si je reviens ce mardi sur José Bové, c’est que mon papier d’hier m’a valu de sérieuses critiques, directement sur ma boîte à lettres électronique, parfois aussi sur ce blog. J’ai peiné des lecteurs, j’en ai indigné d’autres, qui ne comprennent pas pourquoi je m’en prends à José.

Eh bien, j’assume. Mais d’abord, je rappellerai que j’ai pris soin de (re)dire mon estime pour l’homme. Je ne tente ni ne veux m’attaquer à cet être-là, mais je crois avec force qu’il est comptable des espoirs qu’il a fait naître. Et nul doute, selon moi du moins, qu’il fait fausse route, et que nous perdons pied tous ensemble.

La controverse fait peur. La polémique semble aujourd’hui de la seule colère, une survivance imbécile de temps anciens, donc barbares. J’estime, tout au contraire, qu’elle est plus indispensable qu’elle n’a jamais été. C’est en frottant les points de vue, écorchures comprises, qu’on peut espérer y voir un peu plus clair. C’est en secouant la boîte crânienne qui nous sert d’esprit que nous avancerons peu à peu, au risque de l’erreur.

Car bien entendu, je ne prétends aucunement avoir raison. Cette dimension de l’affaire m’indiffère. Je pense quelque chose, quelque chose d’assez sincère et argumenté pour être proposé ensuite. Le reste s’appelle la liberté. Et puis, j’ajouterai que la crise écologique planétaire pose des questions d’une gravité et d’une complexité telles qu’elle implique de changer jusqu’à notre regard le plus anodin. Quel que puisse être l’avenir, il aura bouleversé le paysage, tant physique que mental, au point que nul ne reconnaîtra les lieux.

Il ne suffit pas, je le crains, d’admettre que tout devra changer. Il faut s’y préparer. Il faut accepter l’évidence que nous devrons batailler, souvent contre nous-mêmes. Qu’y puis-je ? Un dernier point tout à fait provisoire : je ne suis pas un gourou. Je ne mènerai aucune armée à la bataille. Je ne suis qu’un parmi nous tous. Je ne vénère pas Sartre, il s’en faut de beaucoup, mais j’ai toujours eu une tendresse pour Les Mots. Ce livre contient une phrase qui est mienne à jamais : « Si je range l’impossible Salut au magasin des accessoires, que reste-t-il ? Tout un homme, fait de tous les hommes et qui les vaut tous et que vaut n’importe qui ».

Un deuxième papier, avec votre patience. Le 30 août donc, j’ai écrit ici une critique du livre de Jean-Marc Moriceau consacré au loup en France, et à ses facéties. Un naturaliste que je respecte de longue date, Roger Mathieu, en a pris ombrage, et m’a répliqué avec beaucoup d’intelligence et de savoir. Pour comble, le 11 septembre, j’ai donné une chronique au quotidien La Croix, dans laquelle je revenais sur le livre de Moriceau, en aggravant mon cas. Cette chronique commençait ainsi : « Je me suis trompé, j’ai eu tort. C’est loin d’être tragique, mais je crois que cela vaut la peine d’être rapporté. Pendant quelques années, j’ai collaboré bénévolement à une revue naturaliste appelée La voie du loup. Créé après le retour du loup en France – daté de 1992 -, ce bulletin défend sans détour la présence du grand prédateur dans nos montagnes.

Au cours de multiples discussions avec des « amis » du loup, j’ai toujours entendu dire que l’animal n’attaquait pas l’homme. Jamais. Ou bien dans des circonstances extrêmes, par exemple au cours de terribles conflits ou d’épidémies. Ou encore pour cause de rage. J’avoue avoir cru pleinement cela et l’avoir abondamment propagé, partout où je le pouvais ».

Une amie de longue date, Florence Englebert, rédactrice-en-chef de La Voie du loup, m’a envoyé une lettre violente, estimant que je faisais un amalgame insupportable entre ce bulletin et les « amis » du loup évoqués, fourvoyés selon moi dans l’aveuglement.

La vérité, ma vérité du moins, c’est que je mets pas dans le même sac le bulletin et les aveugles. Mais je dois aussi reconnaître que j’ai été très maladroit, et que j’aurais dû mieux distinguer ce qui devait l’être. Donc, coupable, si l’on veut. Mais pas seulement. Car en réalité, j’ai trouvé déplorable la réaction très vive – elle a écrit à La Croix pour un droit de réponse ! – de Florence.

Brusquement, et parce qu’elle se sentait visée, la critique devenait insupportable. Et moi, qui ai constamment défendu le bel animal, et de bien des manières, je devenais un malotru, pis peut-être. Eh non ! Une nouvelle fois, et je me répète, nous avons un besoin forcené de liberté de l’esprit. Certes, il faut absolument faire attention aux personnes. Oh oui ! Je dois avouer que je vais parfois un peu loin, et qu’il me faut donc mieux réfléchir à cet aspect de la critique publique. Mais enfin, qui croira jamais qu’on ne peut étriller jusqu’aux militants de la cause écologiste ?

Dernier point, Jean-Pierre Raffin. Je connais ce monument historique de la protection de la nature depuis 1991. J’ai un immense respect pour son parcours impeccable, son savoir, sa gentillesse. Ancien prof de fac, président honoraire de France Nature Environnement, ci-devant député européen, longtemps président du conseil scientifique du parc national des Écrins, Jean-Pierre est un homme formidable.

J’ai donc été marqué par la lettre qu’il m’a envoyée à la suite de ma chronique dans La Croix, dont il est un fidèle lecteur. Il était en colère, et insistait sur le fait que, contrairement à ce que je sous-entendais – selon lui, pas selon moi -, le bulletin La Voie du loup n’avait jamais caché la réalité d’attaques du grand carnivore sur l’homme.

En homme de bien qu’il est, Jean-Pierre m’annonçait au passage qu’il allait lire avec une grande attention le livre de Moriceau, et en novembre, il m’adressait un second message par lequel il me livrait ses commentaires. Son courrier était du plus haut intérêt, mais comme il m’arrive, je l’avais mis de côté, puis oublié.

Or ces jours-ci, à l’occasion des échanges de voeux, Jean-Pierre m’a fort justement rappelé cette lettre restée sans réponse. Et j’ai aussitôt pensé que je devais la rendre publique, ici en tout cas. Car la critique de Jean-Pierre est bien meilleure que la mienne. Son savoir sur la question est aussi, soit dit en passant, bien plus grand que le mien. Je m’étais contenté de la lumière apparente du livre de Moriceau. Jean-Pierre en scrute les ombres, bien réelles. Je suis donc ravi de vous livrer ci-dessous le texte que m’a adressé Jean-Pierre Raffin.

 

 

Cher Fabrice,

Après ton papier dans la Croix du 11 septembre et notre échange épistolaire, j’ai donc lu l’ouvrage de Moriceau sur le « méchant loup » et te livre quelques réflexions sur cet ouvrage.

Dans le même temps que je me plongeais dans Moriceau, je lisais le livre d’un historien américain, R.O. Paxton, « le fascisme en action » : aucun rapport sur le fond, bien sûr, mais une comparaison sur la méthode. À chaque fois que Paxton réfute ou soutient une thèse, il donne les références exactes : écrits ou propos publics et avance les arguments qui lui permettent de contrer ou d’approuver, c’est donc un travail sérieux.

Ce n’est pas le cas du livre de Moriceau sur certains points. L’axe de son livre est de vouloir apporter des éléments pour réfuter un « discours idéologique » notamment sur l’innocence du loup dans le cadre d’un débat opposant lycophiles et lycophobes (cf. les pages 14, 15, 19, 84, 403, etc. ). Mais, jamais, tout au long des 510 pages du corps de son livre, Moriceau ne cite un seul auteur ayant dénié des attaques de loups sur l’homme, ce qui laisse perplexe sur le sérieux d’une approche qui n’identifie pas la thèse combattue. Le « on » n’est pas une catégorie scientifique.

L’essentiel des données recueillies provient de la compilation de registres paroissiaux et Moriceau avance, à juste titre (p.55) que la plupart des curés de campagne étaient des témoins fiables, « savaient beaucoup mieux distinguer un loup qu’un certain nombre de nos contemporains laïcs et citadins » et de ce fait sont des « informateurs hors pair » même s’il convient de faire preuve de vigilance par rapport aux témoignages anciens comme l’auteur le signale lui-même (p..19).

Mais alors, pourquoi, ensuite, ne respecte-il plus ces informateurs ? En effet, on constate que Moriceau attribue, de son propre chef, sous la rubrique « attaques de loups anthropophages » des attaques imputées par ces informateurs « hors pair » non pas à des loups mais à des « bête inconnue », « bêtes féroces », « bêtes sauvages », « loups et autres bêtes sauvages », « loups et chiens » voire « ours » ? Si l’on comprend que cette rubrique rapporte les attaques identifiées par ces informateurs « hors pair » comme dues à des loups ou « à la (les) bête(s) féroce(s) », terminologie qui fait souvent allusion à un ou des loups connus dans le secteur, on comprend mal que lorsque l’informateur « hors pair » reste dans le doute et parle d « ’une bête », d « ’un animal inconnu ».

Moriceau ne fasse pas preuve de la même réserve. De deux choses l’une ou ces informateurs sont effectivement « hors pair » et alors il faut leur faire confiance y compris dans leurs doutes et incertitudes ou alors ils ne sont pas fiables et dans ce cas l’exploitation de leurs relations est pour le moins aléatoire. Cela ne change rien au problème de fond (hommes attaqués par des loups) mais cela conduit à une certaine suspicion sur le sérieux du chiffre de 3000 attaques annoncé dans le titre de l’ouvrage. Il aurait été plus rigoureux d’établir trois listes, l’une des attaques clairement attribuées au loup, une ou les attributions sont incertaines ou paraissent peu vraisemblables (hyène, once, ours, etc.) et une où les informateurs sont eux-mêmes restés dans le doute (une bête inconnue, une bête sauvage, un animal féroce).

Il est par ailleurs curieux que l’auteur dans la présentation de son travail fasse passer la question de l’identité des animaux ayant attaqué l’homme après celle du relevé des attaques, comme si l’affaire était entendue et que l’identité réelle de l’attaquant était une question secondaire. Il est gênant que l’on ne sache pas de manière claire sur quel matériel l’auteur a établi son analyse. En effet, il est, dans le texte, tantôt question de 3000 actes de décès répertoriés de 1580 à 1830, tantôt d’un échantillon (1855 cas) de l’ensemble des victimes recensées de loups prédateurs de 1571 à 1870 (fig. 8) alors que le corpus des attaques (je me limite aux loups anthropophages) va de 1421 à 1918. Si j’ai bien compris, Moriceau, n’a, en fait, analysé que l’échantillon ci-dessus mentionné, ce qui rend difficile la lecture de différents tableaux fournis en annexe qui ne s’inscrivent pas dans les mêmes pas de temps.

Les démonstrations sur l’identité réelle ou supposée du loup comme attaquant (chap. IX) par rapport à d’autres possibilités me semblent sujettes à caution.

Loups-lévriers (pp. 307-308) ?

Moriceau ignore manifestement qu’il existe une race de chien à poils rudes, l’ « Irish Wolfhound » sélectionnée en Irlande avant notre ère pour la chasse au loup et à l’élan , race très utilisée en Europe continentale à partir du XV° siècle justement pour courir le loup. C’est l’un des plus grands chiens qui soient (une soixantaine de kilos.), à allure de lévrier (il y a quelques années l’animal figurait sur une pièce de monnaie irlandaise) et il semble qu’il puisse être facilement confondu avec un loup Il n’y a donc pas besoin d’aller chercher midi à quatorze heure avec des hybrides loups-lévriers !

Loups-cerviers (pp. 308-309) ?

Les arguments avancés pour écarter l’éventualité de l’attaque par lynx ne sont pas très convaincants. Le poids des proies humaines trop important pour le lynx ? Moriceau démontre que nos ancêtres, notamment les enfants étaient beaucoup plus chétifs qu’aujourd’hui (pp. 377-379 ) , or l’essentiel des attaques attribuées à des loups-cerviers telles que répertoriées dans les annexes (tableaux 47 A, B, C et D ) concerne justement des enfants de moins de 10 ans (contrairement d’ailleurs à ce qu’écrit Moriceau p. 308). Ainsi sur un échantillon de 14 relations d’attaques (dont certaines indiquent, sans plus de précisions, « plusieurs enfants ), 10 fournissant l’âge dont 8 concernent des enfants de 10 à 2 ans. Or le lynx peut s’attaquer à des proies d’une centaine de kilos. (renne) même si son ordinaire se situe entre 15 et 30 kilos (chevreuil).

On s’étonne que Moriceau qui cite Rollinat (1929) ne cite pas Lavauden (1930) écrivant « Dans la hiérarchie des animaux redoutables, le loup ordinaire doit céder le pas au loup-cervier. Un homme vigoureux, ayant courage et sang-froid, pourrait à la rigueur, sans armes, triompher de l’attaque d’un vieux loup. Dans un combat avec un lynx, il succomberait à coup sûr. Et si, parmi nos fauves, le lynx est le plus dangereux, il est aussi le plus féroce. Son goût du carnage est sans limites. ».

On s’étonne également que Moriceau qui invoque la polysémie pour écarter l’identité lynx –loup-cervier notamment aux XVII-XVIII ° ne cite pas Gaston Fébus qui écrit dans son Livre de chasse rédigé en 1387 à propos du lynx : « les uns les appellent lous-cerviers, les autres chatz-lous » ou Kempf, plus récent (1979), un spécialiste du lynx qui répertorie les divers noms donnés à l’animal (loup-cervier, loucerve, chat-loup, lonce, loup-cervin).

Bref si tout ceci n’atteste pas que toutes les attaques attribuées à des loups-cerviers doivent être imputées à des lynx, le moins que l’on puisse dire est qu’il peut y avoir doute et que le « incontestablement, la qualité de loup-cervier n’a donc rien à voir avec le lynx » de Moriceau (p. 310) est pour le moins péremptoire.

Écrivant (p. 348), « Quand bien même l’agresseur n’aurait pas été identifié nommément dans tous les actes, il est bien difficile, sous nos latitudes, d’imaginer- en dehors de quelques très rares exceptions, toujours possibles- d’autres prédateurs que le loup anthropophage », Moriceau élude la question car il n’explique pas à quel autre prédateur il fait allusion lorsqu’ il envisage « de très rares exceptions » et comment il en apprécie le caractère exceptionnel. C’est de l’ordre de l’affirmation et non de la démonstration. L’affirmation plutôt que la démonstration est d’ailleurs utilisée en d’autres passages du livre. Par exemple (p. 284), l’auteur avance que la raréfaction (sur quoi repose cette affirmation ?) du gibier « ardemment chassé depuis la révolution (…) conduisait bien des loups hors des forêts ».

Ce faisant, Moriceau semble relayer une opinion répandue selon laquelle la Révolution a largement ouvert la chasse au bon peuple français (c’est ce que prétend une partie du monde cynégétique et certains politiques brandissant à tout bout de champ 1789). Mais les choses ne se sont pas passées comme cela ! Effectivement en 1789, la chasse, alors réservée à la noblesse et à certains propriétaires, a été ouverte à tous notamment après intervention de Robespierre, mais devant les dégâts causés aux cultures et après de multiples plaintes en particulier, de maires, l’Assemblée nationale s’est empressée de voter le 30 avril 1790 une loi réservant la chasse aux seuls propriétaires ! Par ailleurs, il est amusant de constater que l’historien Robert Delort (Les animaux ont une histoire. 1984) attribue l’importance des effectifs de loup au début du XIX° à une « prolifération du gibier », c’est-à-dire , l’exact contraire de ce qu’invoque Moriceau …

Tuer et dévorer (chap.X)

Il manque manifestement une comparaison entre les conclusions de Moriceau sur la prédation du loup sur l’homme (modalités d’attaque, de capture, de consommation, etc.) tirées des descriptions recueillies pour l’essentiel dans les registres paroissiaux et ce que l’on sait de la prédation du loup aux travers des travaux menés sur la biologie de l’espèce, par exemple en Amérique du nord, dans les Balkans ou en Russie. Ce sont des travaux contemporains qui ne sont peut-être pas directement transposables à ce que pouvait être le loup jadis.

L’on peut certes imaginer que les différents aspects du comportement d’un loup anthropophage étaient différents de ceux d’un loup simplement prédateur de faune sauvage mais encore faudrait-il étayer cette éventualité. Une comparaison aurait permis un éclairage qui manque dans ce livre. Par exemple, la décapitation de victimes par des loups anthropophages intrigue (à signaler que la décapitation des proies est signalée pour le lynx…). De même manque-t-il une comparaison avec les attaques actuelles sur homme en Inde auxquelles il est fait allusion (p.499).
La référence à un traité de vénerie du XVI° siècle est quand même bien succincte !

On ne peut que s’étonner d’un certain anthropomorphisme dans le langage dont use Moriceau. Laisser entendre que le loup égorge sa victime, voire même lui arrache la langue (p.347) pour qu’elle n’alerte pas le voisinage ne peut que faire sourire ceux qui étudient les comportements animaux et donnerait à penser que ces loups-là pratiquent également la bipédie. On trouve ailleurs cette touche d’anthropomorphisme quand Moriceau (p.308) écrit , à propos du lynx : « comment un simple lynx aurait-il pu venir à bout de proies humaines souvent âgées de plus de 10 ans (ce qui ne ressort pas de l’inventaire des attaques attribuées au loup-cervier. cf. ante) et les traîner sur plusieurs dizaines de mètres dans un repaire pour les consommer à discrétion, sans risquer d’être dérangé ? ». On voit poindre l’image du repaire où vont se réfugient, après leur forfait, des brigands pour se partager un butin volé. Il y a quand même un petit problème, le lynx a plutôt tendance à consommer sa proie sur place et à rester plusieurs jours (voire semaines) à proximité de l’endroit où il l’a capturée…

En résumé, si Moriceau utilise de manière fort intéressante les témoignages recueillis (par exemple : saisonnalité et spatialisation des attaques, répartition par classes d’âges des attaqués, différence entre loups anthropophages et loups enragés, etc), d’autres aspects ne me semblent pas aussi pertinents (identité des prédateurs, validation des attaques répertoriées). Je ne suis pas aussi enthousiaste que toi à propos de ce livre. L’accumulation de données ne fait pas forcément un bon travail surtout si leur interprétation est hâtive.

Sur l’une des questions de fond : le loup a-t-il ou non attaqué l’homme en Europe et en France, Moriceau n’apporte rien de nouveau. Rollinat (1929), Hainard (1948), Ortalli (1973), Delort (1984) l’écrivaient déjà tout comme de Beaufort (1987-1988), Carbone (1991-2003), Linnell (2002), Baratay (2003) ou le dossier publié par la Voie du Loup en 2006. Sur l’importance numérique de ces attaques, le chiffre avancé de 3.000 attaques me semble relever plus du sensationnalisme que d’un tamisage sérieux des données recueillies.

On ne voit donc pas pourquoi « ceux qui plaident depuis quinze ans en faveur du loup » (dont je ne suis ni un porte-parole ni un contempteur) auraient dû entonner un péan comme tu regrettais qu’ils ne l’aient point fait dans ton papier du 11 septembre. Je ne vois pas non plus pourquoi il faudrait invoquer une « gêne évidente » pour expliquer un silence qui n’est peut-être dû, après tout, qu’au rythme de parution des bulletins des zélateurs du loup.

Enfin, je connais d’autres travaux de Moriceau, notamment ceux qui ont trait à l’élevage en France que j’ai approchés dans le cadre d’un colloque organisé chez moi, en Brionnais, en 2004. J’aurais aimé retrouvé dans son travail sur le loup la même rigueur. J’ai bien l’impression que, comme l’écrivait Delort (1984), le livre de Moriceau s’inscrit dans le cadre de cette réflexion « Il y a donc quelque chose qui bloque toute curiosité, toute objectivité humaine dans l’étude et la présentation du loup »…

Bien amicalement,

 

J-P. Raffin

34 réflexions sur « Sur Bové (à nouveau), sur le loup (encore) »

  1. sur la première partie de ton article ( la deuxième, c’est interessant, mais je ne suis pas assez spécialiste pour prétendre à un quelconque avis sur la question).
    José Bové est comptable des espoirs qu’il a fait naitre, . en effet, il a su faire naitre des espoirs, dont celui de la non moindre démocratie en France, et mobiliser dans ce sens une énergie formidable . Pour cela, déjà, je lui rends homage . Je maintiens que j’ai vivement regretter la politisation de ses actions, les réduisant en effet considérablement . Ailleurs, le contre grenelle a perdu tout son sens avant même de commencer pour les mêmes raisons . Bien . aujourd’hui, il fait la grève de la faim . Et bien, je ne suis pas si tranchée que toi sur la question, j’attends de voir . Comme l’a souligné Terramorsi, il n’est pas seul, ce qui rend l’action embarassante pour nos dirigeants . C’est pourquoi, malgré les distorsions politiques bien françaises que nous connaissons, il faut du monde derrière ces actions, en particulier le 15 . le fond de la question, c’est qu’est-ce que nous défendons, contre quoi luttons nous ? Pas de savoir s’il faut dédier un culte à Bové, ou à un autre , toi, par exemple ? Non, tu n’es pas un gourou et c’est très bien que tu l’affirmes, et je ne suis pas nicoliniste, bien que ton amie ! mais, tu parles de la révolution en homme sensé, et tu as fait naitre des espoirs …alors, comptable ?

  2. suite a ton très bon article du 27 Aout, une déclaration d’intention, il y a un commentaire de serge Grass que je recommande vivement à tous les lecteurs dont voici une phrase : nous avons la démocratie que nous méritons. A méditer et vite . dans ma région, j’ai cherché longtemps une amap, mais il n y avait rien . j’en ai constitué une . dans les villes alentours, il n’y en a toujours pas , et les gens se lamentent . Actions, actions, actions…allez !

  3. Jose est comptable de rien du tout,depuis les années soixante,on est tres nombreux a denoncer deja ce qui se passe et ce dont tu parles depuis si peu,je n’attends pas de voir, je les porte et les aide,chacun est grand et ce que signifierai une loi scelerate prete et ficelée sur ces folies perverses et l’ecologie politique existe et tant mieux malgré les efforts repétés de tout les gouvernants successifs de les reduire a la moulinette ,Mitterrand avait deja utilisé Borloo pour reduire a zero les verts,un danger donc pour eux,restons des rigolos ,non ,culte de quoi,il donne un elan par ses actes , tout eux qui en ont marre de rester a subir le blabla de tous,et là il incarne le,courage,point,dommage que ton manque d’ouverture te permette d’ecrire et de deblaterer comme tout les medias ,de telles banalites et tu hurles avec les loups,moi j’ai horreur de ceux qui en profite pour descendre un homme sincére et qui connait le pourquoi de ces actes et que comme pour roule ma fleur,inepte,,tu persistes et signes et cela te dessers,c’est nulissime ,une personne public est exposée a ce genre de chose ,on attendait autre chose de toi,dommage cela ressemble aux medias qui lachement profitent de lui et tuent ce qui les derange ,la non- langue de bois,la vérité toute crue,Bové existe et ce n’est pas le moment de le descendre,lache et irresponsable,le mouvement est tres important,tiens toi au courant ,la France bouge contre les OGM,et Bové te deplaises ou pas a une vision moins simpliste que le protrait que tu en fais.
    Decroissons et vite,car autremment cela va être tres violent,et ici aussi,la faim,la soif et la misere ,alors rejoins nous au lieu de chercher les ombres des autres et de ne pas voir la tienne

  4. Avis,

    C’est l’ultime fois que je passe un commentaire comme celui de terramorsi, dont je ne connais que l’identité de façade, contrairement à celle que j’assume tranquillement et publiquement. C’est l’ultime fois, ce qui signifie que ce type de propos ne figurera plus sur ce blog, dont je suis responsable.

    Cette brave terramorsi aurait dû, pour commencer, se renseigner un peu, ce qui ne coûte rien. Cela fait des décennies, ici ou là, que je défends devant la société les valeurs dont je me réclame, et non depuis « si peu ».

    Je n’ai pas vocation à subir des imbécillités et des insultes ad hominem. Qui a envie de me lire me lise, et que les autres aillent en paix, mais sans moi. Je vois et surtout j’imagine la hauteur de vue et la qualité humaine de terramorsi. Ma foi, je ne réclame pas une telle compagnie, je le confesse.

    Et j’ajouterai pour finir que le ton, les approximations, la suffisance rassemblés dans ce court texte sont tout ce que j’ai toujours abhorré. C’est ainsi.

    Fabrice Nicolino

  5. Bonjour,

    ce qui est ahurissant c’est que l’on ne peut pas dire ce que l’on pense sur ces blogs, sinon on se fait lincher. Aucune démocratie possible donc…

    J’ai osé dire des choses sur un article et tout le monde a réagi négativement. Chacun a ses opinions, justement les envies contraires sont nécessaires. Si on ne lit que des articles de même opinion on n’est plus objectif.

    La droite ou la gauche, je m’en moque, le principal est l’IDEE et son contenu. Actuellement si un parti pense à une idée l’opposition va trouver n’importe quel arguement pour la contrer.

    C’est absurde…

  6. @ Christophe, bonjour, revenu de vacances ? bon, plus sérieusement, dire ce que l’on pense ne nécessite pas forcément les insultes . Mais je reconnais qu’il m’est arrivé de craquer / à des arguments semblant manquer tellement d’humanisme sur le fond . Par exemple, tu défendais ton bien-être au volant , tes vacances en indonnésie pendant que je passe toute mon énergie ici à lutter contre le réchauffement climatique et les misères qu’il engendre . Ainsi, si je ne peux plus parainner l’enfant cambodgienne dont je parlais dans mes anciens commentaires, c’est à cause, entre autre, des innondations de plus en plus fréquentes au Cambodge et de l’inaccessibilité croissante des villages cambodgien . d’après les experts, il ne fait aucun doute que ces innondations sont les conséquences du réchauffement climatique . Cette gamine a deux pieds bots et je ne sais ce qu’il adviendra d’elle . J’essaye de ne pas m’attacher aux enfants que je parrainne, mais c’est inévitable . alors quand tu pensais faire de l’esprit en parlant de ta joie de rouler à 220 sur autoroute, j’ai simplement eu mal en pensant à tous ces gens et à , disons, l’inconscience dont tu faisais preuve . Voilà, à titre d’exemple .
    Mais le principal en effet, c’est l’idée et son contenu . Nous ne devons jamais perdre ceci de vue, et 6 milliards d’humains, six milliards de vérités . Maintenant, nous avons un combat à mener contre nos égoïsmes, nos angoisses, nos « tares  » culturelles, moi autant que les autres . nous y mettons nous ?

  7. Chère Bénédicte,

    Tout d’abord meilleurs voeux pour cette année.

    Les vacances géniales mais trop courtes.

    Je m’exprime très mal par écrit, je préfère les chiffres ! Dans mes propos précédents il y avait bcp de provocation notamment sur la vitesse.

    Je dis simplement aujourd’hui que même si j’ai pas les mêmes avis, je les lis et je les respecte tout en argumentant le mien.

    Tout simplement

  8. Pour finir, je n’admire personne au monde autant que ces réfugiés climatiques , qui , par envie de vivre, par ambition de travail inexistant chez eux, bravent tous les dangers, toutes les humilitations . les grands héros de ce monde sont dans les coquilles de noix qui traversent la méditerrannée toutes les nuits . Nous devrions les accueillir en fanfare, les interwiever à leurs arrivées, ce sont des demi-dieux ! Ils sont mon obsession, la preuve du gâchis . Imaginez, imaginez si l’on donnait des moyens à ces énergumènes de faire quelque chose ! Il y en aurait de l’innovation ! Et aucunne barrière, aucun mur ne pourra jamais contenir le flot des réfugiés climatiques à venir , c’est un leurre . Quand j’étais gosse, dans les livres de géographie, on criait « viva » : la France avait éradiqué les bidons villes . Et aujourd’hui ?
    Nous ne nous en sortirons qu’en étant solidaires avec le monde entier !

  9. Bonne année Christophe . Même si tu voulais juste provoquer, parfois, sans que ce soit voulu, ça peut faire mal . Contente que tu ailles bien .

  10. Nicolino,
    mon nom veritable est Anana Terramorsi
    et je ne me cache pas,moi non plus
    Je suis artiste et therapeuthe guerisseuse,monographie et divers sur mon compte trouvable sur net et ailleurs
    Je connais bien l’âme humaine et suis impliquée depuis quarante ans dans ecologie et conscience
    je dis ce que je pense et d’autres nombreux qui ont lu ce texte sur votre blog sont ulcérés par votre aboiement avec les loups (fastoche),ce coté conventionnel et superficiel de votre argumentation et l’ negativeenergie mise pour le critiquer encore et encore, le Bové et sur le mouvement alter ,decroissant et les millions de gens qui fauchent et resistent en ce moment,cela vous regarde mais il est de mon droit de parler franc et de vous dire ce que je pense de ce genre d’acte a un moment primordial du mouvement anti ogm,unique au monde et proche de la reussite.
    la censure,franchemment,ce sera de votre responsabilité
    votre ton meprisant ,quelle importance,votre ego sans doute!
    je suis entre autre membre de la Fondation pour Une Terre Humaine,nous avons aidé financiérement plein de gens dont Veillerette a la creation du MGRDF,et des campagnes tres ciblées,Rabbhi ,ASPAS,RAC,A Pas de Loup ,Longo Maï,Robin des Toits ,Criirem creation,CNIID, etc,sur des projets tres precis,et je connais pas si approximativement Bové,nous avons finançé et nous sommes les seuls en Europe a le faire,etude sur le maïsMON de Seralini ,sauvetage de Velot et de son labo ,reunion sur Semence de Berlin dernierement ,prochaine reunion a Bonn mai 2008,etc……………….
    Je suis particulierement douée pour trouver les assoces qui vont être a la pointe des alternatives innoventes et concretes et de terrain et locales,petites et naissantes,semence paysanne,colloque sur OGM,INFO ogm sur toute europe ,surtout pays del’ EST,allez voir sur le site de la Fondation: terrehumaine.org
    Vous jugerez par vous même de notre engagement independant .
    Vous ne supportez pas d’entendre des choses desagréables sur votre prose,mais un blog est ouvert,votre point de vue ne doit pas engendrer le silence ou approbation, choisir ce moment pour denigrer cette action est a mon avis une erreur, car a mes dernieres infos ,le gouvernement changerait cette loi et mettrait le,principe de sauvegarde,la pression est si forte grace a ces jeûnes et visites d’ elus ,conseillers generaux de s’engager officiellement et sur papier,sur ce projet de loi inique,dont je suppose vous connaissez le contenu,
    Donc cette action va être eclatante et faire plier ces laches ciniques larbins des lobbies.
    Dommage que vous ne trouvuez qu’ a le denigrer

  11. @ Bénédicte et Christophe : bravo, bel exemple de dialogue !
    @ Fabrice et Terramorsi : encore un effort, on y est presque 🙂

    Vous allez voir qu’on va y arriver à se parler :
    tous ensemble, tous ensemble, ouais, ouais !!
    (politisons le débat…)

    Fabrice, vu que parfois les commentaires prennent l’allure de discussion, ne serait-il pas judicieux d’envisager un forum ?

  12. Je ne les ai pas entendus en octobre mais les propos tenus à France Inter par J. Bové avaient-ils vraiment pour but de « parader » ou n’était-ce pas plutôt une façon de prendre au mot les déclarations d’intention du gouvernement ? Comme l’action menée aujourd’hui pour le pousser au-delà des beaux discours – non ?
    Ce que fait J. Bové est critiquable (comme toute action humaine) mais, bon, je ne peux que déplorer, comme Valérie et Philippe Maréchal hier, le fait de ne pas réserver les flèches aux véritables adversaires qui ne manquent pourtant pas. Les pro-OGM manquent-ils à ce point de solidarité ?

  13. je vous rapelle que le 15 , il y a une marche à paris contre les OGM (18h ou 18h30) dans le coin de st Michel . En province, il ya certainement d’autres choses organisées .

  14. retour à nos moutons et à la lettre de Raffin. Juste un passage et une critique : il faudrait être aveugle pour confondre un loup et un irish wolfhound. Le second à le poil dru, de la moustache au museau, des sourcils… C’est un mixte entre grand lévrier et griffon (pour le physique approximativement pas en généalogie). Voilà, c’est tout !

  15. C’est sans doute la grève de la faim menée en 1961 par Louis Lecoin (1888-1971) pour la reconnaissance du statut des objecteurs de conscience qui a, outre sa réussite finale, eu le petit avantage colatéral d’éveiller ma conscience en gestation. Lecoin avait très clairement mis sa vie en jeu et son engagement – en pleine guerre d’Algérie – sur un objectif clair et exceptionnel lui avait donné une chance d’être entendu.
    Depuis, on a vu des gens déterminés faire des jeûnes de protestation (Théodore Monod, Solange Fernex pour revenir du côté de l’écologie), des vrais désespérés faire des grèves de la faim jusqu’au-boutistes, le député Lassale donner le pire exemple d’inadéquation entre la fin et les moyens et combien d’autres, oubliés parce qu’ils n’avaient jamais envisagé leur propre fin et avaient joué avec un moyen. Voilà comment on en est venu à une dévaluation du moyen et une confusion sur les fins.
    Tu as donc bien raison, Fabrice, de discuter l’action de Bové, tant au plan des fins que des moyens.
    FdB

  16. Pour ne pas mélanger les sujets, quelques lignes sur les sur les loups. En dehors de quelques fanatiques, il n’est, effectivement peu de connaisseurs du loup qui s’entêtent à prétendre que les loups n’attaquent jamais les humains et, qu’il y ait 3000 ou 300 attaques sur 500 ou 200 ans documentées en France, la faim, l’occasion et,après les guerres, l’habitude, ont engendré assez de cas avérés pour qu’ils ne soient pas qu’anecdotique et qu’on a tort de vouloir étudier avec des outils forgés au Canada ou en Russie où les ressources alimentaires et les milieux sont bien différents). Toutefois, les statistiques, même après discussion par J.P. Raffin, ne rendent pas compte d’une des dimensions du sujet : qu’en pensaient les victimes potentielles, c’est à dire ceux qui vivaient à la campagne, au contact quasi quotidien des loups. Il en ressort, au moins pour la Bretagne où un bon corpus est disponible que, malgré la densité de l’animal, la peur du loup n’existait pas, l’animal étant réputé peureux (et on enseignait aux enfants à l’effrayer). En fait, on ne niait pas les attaques, mais on les attribuait à des loups anormaux, surnaturels. C’était en reconnaître l’existence mais en en soulignant le caractère plutôt exceptionnel.
    Grâce à quoi, avant que le poison et l’idéologie du progrès (avec l’invention de la peur urbaine du loup) ne conduisent à l’extinction des populations de loups, la cohabitation était, bon an, mal an (mais accompagnée d’une destruction en routine écrêtant l’augmentation démographique), rendue possible et vivable dans le contexte de la société rurale traditionnelle.
    FdB

  17. pour finir sur l’autre mouton (n’y voyez aucun jeu de mot douteux, y en a pas) . la lutte contre les OGM symbolise, au delà de ce que sont les OGM en terme de pollution massive des terres, une lutte pour la démocratie : les français l’ont dit et répété, agriculteurs largement majoritaires compris : ils n’en veulent pas . Alors il faut se battre , ensembles, avec nos divergences, sinon…

  18. Bien sûr qu’on va se battre, qu’on se bat, bien sûr qu’on n’en veut pas, et que là, le boycott ne suffit pas : ne pas en acheter ne veut pas dire ne pas en consommer.
    (le message précent -d’Hervé- c’est moi, encore oublié de changer le nom, désolée)

  19. @ Valérie, ça veut dire que l’on est sur la bonne voie, si on suprime tous les « si » du gouvernement . Si le gouvernement envoie la clause de sauvegarde à Bruxelle, c’est bon. Ca veut dire qu’ils craignent probablement un mouvement de masse ,(et que l’action de José Bové est payante) et bien il en faut un ! Il s’agit de se battre avec une détermination encore bien plus forte et plus grande sur les autres thèmes de l’environnement .

  20. Mon petit coucou hebdomadaire depuis la République Transgénique, j’ai nommé l’Argentine (euh, j’ai pas les chiffres exacts en tête, mais pour le maïs par exemple c’est 75% des terres cultivées OGM, rien que ça)
    Je continue de feuilleter les journaux d’ici : chaque jour un nouvel épisode de la « telenovela », les amours de qui vous savez avec qui vous savez. Bref, je préfèrerais que la France soit représentée par autre chose, et pourquoi pas par Bové…
    Si les Argentins avaient eu un José Bové national (Jose Bovado ?!), cela n’aurait peut-être pas changé grand chose à la contamination de ce pays par les OGM, mais au moins les gens comprendraient un peu mieux ce qui se passe… OGM, antennes-relais, pollution… désolé de le dire, mais par rapport à un pays comme l’Argentine, la France ferait presque figure d’avant-gardiste !
    N’oublions pas que le combat est à échelle planétaire, et qu’il est aussi de notre responsabilité de transmettre l’information là où elle n’arrive pas… en attendant l’arrivée du loup-gourou qui mettra tout le monde d’accord ?!

  21. bonjour Ysmael et bonne année. J’ai pris régulièrement des nouvelles de Luiz flavio cappio sur le net .Autre grève, autre combat .Non, ne l’oublions pas , c’est planétaire. Qui se soucit de ces autres français de Guyanne assassinés dans la plus grande indifférence ? Du nord Niger fermé au public où l’on tue des touaregs pour exploitation des sols pour le nucléaire français (voir asso timidouwa, ils ont besoin d’aide!!!)? Ah! nos belles démocraties où l’on se gave de tartine de nutella dans des voitures plus vertes, aux technologies de pointe . Tant que nos richesses seront dûes aux misères de nos frères, nous ne pourrons que rougir de nous mêmes !

  22. Et les indiens Mapuches en grève de la faim depuis plus de deux mois…. dont personne ne parle, pendant qu’un certain monde est encore confit dans ses ripailles de fin d’année.
    Sinon, vous connaissez hervé René Martin ? je le découvre par un livre « Eloge de la simplicité volontaire », je n’arrive plus à m’arrêter de tourner les pages…

  23. merci pour les infos et le bouquin Valérie . La décroissance est présentée comme un art de vivre par le courrier, mais c’est surtout une possibilité de mieux partager : ce que l’on ne dépense pas inutilement, on le réinvestie dans de l’équitable, des cotisations, ect. Un copain m’a prêté hier : »objectif décroissance, vers une société harmonieuse », il cite plein d’auteurs, dont Paul Ariès, Serge Latouche,ect .

  24. Depuis plusieurs jour, je pense à Gery qui voit ses amis accumuler les miles pendant qu’il reste à terre . Tout d’abord Gery, bonne année et bravo, continue à être généreux . ces miles, réinvestie les !! dans Kokopelli, la nef, dans les produits équitables (y compris français) de ton quartier, dans les vêtements bio et équitables qui fourmillent sur le net…

  25. J’ai hésité entre encombrer ce blog avec une réponse plus longue que l’article ou à l’envoyer directement à Fabrice.

    Finalement, voilà mes remarques sur ce blog :

    Faut-il soutenir Bové ? D’abord je ne soutiens pas José Bové mais le mouvement qu’il représente. Cette personnification des luttes me dérange car combien d’obscurs militants subissent actuellement de nombreux problèmes, garde à vue, etc… Mais qui a parlé de la dernière grève de la faim en mars 2007 pour obtenir le moratoire ? Ils ont quand même tenu 20 jours, sont venus jusqu’à Pau protester contre Euralis, etc… Mais c’est ainsi, sans figure médiatique, pas de media.

    Je voudrais surtout commenter la remarque « les OGM c’est un combat d’arrière-garde ». Je nuancerais un peu quand même. Si tu veux dire qu’on prépare en ce moment bien pire, tu as tout à fait raison. Les nanotechnologies, c’est les OGM à la puissance 10. Il ne s’agit plus uniquement de la manipulation des gènes mais de TOUTE la matière à l’échelle atomique et l’on voit les frontières entre matières vivante et inerte s’estomper. La convergence entre nanotechnologies, biotechnologies et sciences cognitives (cerveau) laissent présager de joyeux lendemains !!

    Quant à la biologie synthétique voilà l’introduction du rapport du « ETC group » sur ce sujet : « Les manipulations génétiques, c’est du passé. Aujourd’hui, les scientifiques ne se contentent plus de cartographier les génomes et de manipuler les gènes, ils construisent eux-mêmes la vie à partir de rien et ils le font en l’absence de tout débat social ou de tout contrôle réglementaire. Les menaces sociales, environnementales ainsi que les armes biologiques de la biologie synthétique surpassent les dangers possibles et les excès des biotechnologies. La biologie synthétique se base sur la convergence de la biologie à l’échelle nanométrique, de l’informatique et des manipulations génétiques. A peu près tout le monde, en utilisant un ordinateur portable, des informations publiées sur des séquences de gènes et en se faisant parvenir par courrier de l’AND synthétique, pourra potentiellement construire des gènes, des génomes entiers à partir de rien (y compris des agents pathogènes mortels).
    Alors, oui on pourrait penser que les OGM sont dépassés. »

    Dans nos sociétés toujours plus contrôlées par la sphère technoscientifique, la lutte contre les OGM c’est aussi une lutte pour que les citoyens puissent redevenir maîtres de leur avenir… c’est à dire pouvoir décider s’ils acceptent ou non certains développements technologiques. On commence par les OGM – ou pour certains par le nucléaire, il y a quelques années – on continue avec les nano, la bio synthétique, les agrocarb, etc… : ce sont les mêmes escroqueries politiques, scientifiques, techniques, financières, démocratiques.

    Tu évoques aussi les agrocarburants. Mais qui pousse derrière à Bruxelles ? Tous les géants des biotechnologies qui, ne l’oublions pas, sont des géants de la chimie (Monsanto, Bayer, BASF, etc…). Lorsqu’on nous parle aujourd’hui d’agrocarburants de seconde génération, il s’agit essentiellement de plantes modifiées génétiquement. Sur le terrain on retrouve tous les lobbies pro-OGM derrière les agrocarburants : Euralis, AGPM, etc… Ce qui va se passer sur terrain avec les agrocarburants dans de nombreux pays, s’est déjà passé avec les monocultures d’OGM . L’exemple le plus frappant restant l’Argentine qui exporte 90% de sa production de soja GM et où une bonne partie de la population ne mange pas à sa faim… Bien sûr on s’attend à ce que près de 5 millions de personnes soient expulsées rien que pour l’île de Kalimantan pour laisser la place à des palmiers à huile. Mais cela n’efface pas les 150 000 familles qui ont été expulsées en Argentine pour laisser la place au soja GM, (au Paraguay, 90 000). Les OGM, c’était le nouvel avatar de l’agriculture productiviste et les agrocarburants vont en rajouter une couche encore pire. Le lien est direct et pour moi, il est difficile de les dissocier.

    En effet, la lutte contre les OGM est intimement liée à la lutte pour la Souveraineté alimentaire et le contrôle du foncier. Je pense justement que c’est sur la base de ces luttes déjà en place contre les OGM et l’agrobusiness que les luttes contre les agrocarburants se développent (lentement en France, peut-être). Et n’en déplaisent à tous les franco-franchouillards, ces luttes sont déjà très fortes dans de nombreux autres pays, notamment du Sud qui ne nous n’ont pas attendus…

    Pour moi, le problème réside plus dans la présentation très réductrice de la lutte contre les OGM que dans les moyens de lutte choisis.J’ai beaucoup appris au contact de certains militants et j’apprends encore. Merci à eux.

    Je soutiendrai sans réserve cette grève de la faim, comme j’ai soutenu la précédente.

    Amicalement

    MH

  26. AVIS (un autre)

    Ce blog, comme je viens de l’écrire à la délicieuse Terramorsi, n’est pas un dégueuloir. J’assume la portée de ce mot. Je l’ai créé pour parler, certes, pour écouter bien entendu, mais certainement pas pour supporter les cris et injures de qui que ce soit.
    Il me semble que quiconque peut ouvrir son blog et y appliquer les règles de son choix. Telles sont les miennes, et je m’y tiendrai. Je n’hésiterai donc pas à retirer de cet espace, si nécessaire, toute éructation. Le débat oui, mille fois oui, et vif, cent mille fois oui. Mais pas aux conditions dictées par n’importe qui et pour n’importe quoi. En tout cas, pas ici.

    Fabrice Nicolino

  27. Finalement, bien que je ne sois pas très connaisseur, je m’instruis en lisant tous ces messages et je trouve très intéressant la diversité des propos tenus ici.

  28. Bien d’accord avec l’AVIS de Fabrice. Essayons, en cas de désaccord, d’être attentifs à la forme, sinon, tout échange d’idées devient vite difficile.

    On ne compte plus les forums (sur quelque sujet que ce soit) qui finissent par s’étioler parce que les gens, au lieu d’argumenter, finissent par se balancer des noms d’oiseaux à la figure. Les réglements de compte et autres slogans arrivent à rebuter les plus patients !

    Allez, vas-y Fabrice, censure nous si tu t’aperçois qu’on s’excite un peu trop… pour garder à ton blog la qualité qui est la sienne.

  29. Je suis également d’accord pour un contrôle de l’expression (non des idées) sur ce blog… de préférence un contrôle de soi par chacun des intervenants. Il suffit de comparer les interventions d’Anana Terramorsi avec la critique de Jean-Pierre Raffin, pour se convaincre que les deux AVIS de Fabrice sont nécessaires. Si Jean-Pierre Raffin s’était contenté d’écrire que le livre de Moriceau était « nullissime » et « irresponsable », ou qu’il « déblatère » n’importe quoi, il n’aurait intéressé personne. Alors que l’expression mesurée de ses arguments est plus que convaincante, et ne bloque pas à l’avance d’éventuelles réponses. Quelqu’un qui connaît bien l’âme humaine » devrait savoir que les attaques ad hominem, les insultes, les invectives, c’est le degré zéro de l’échange. L’indignation, la colère, la révolte face à l’injustice, à la bêtise, etc., c’est une chose, mais leur expression doit en être une autre. Ou alors ce blog finirait par être rempli de « grrrrrrr! » « pfffffffff! » et autres « rhaaaaaaa! ».

  30. Réponses à diverses critiques sur l’Histoire du méchant loup : Comment passer d’une discussion assez vaine à un débat un peu constructif ?
    cf. aussi le site loup.org

    Aurait-on voulu semer le trouble sur un ouvrage qu’on ne s’y serait guère pris autrement. Signe peut-être que l’Histoire du Méchant loup (Paris, Fayard, 2007, 625 p.) dérange quelques lecteurs – ou simplement contempteurs. Car à examiner certaines critiques diffusées sur internet on se rend vite compte qu’elles pleuvent sans même que leurs auteurs aient toujours pris la précaution de lire le livre, bien décidés à répéter leur propos sur divers lieux d’expression. Parmi ces contradicteurs, figurent quelques naturalistes. Après plusieurs salves lancées par Jacques Baillon, l’une des dernières attaques vient de Jean-Pierre Raffin, dont l’avis, soigneusement accompagné du développement complet de sa titulature universitaire – faudrait-il impressionner l’internaute ? – est reproduit sur plusieurs sites spécialisés (loup.org, ferus, etc.). L’insistance avec laquelle certaines critiques sont émises depuis septembre 2007 – sur les 34 qu’on découvre dans loup.org parmi les 44 messages acceptés depuis le 21 septembre, la moitié émane des mêmes personnes – et la virulence de quelques-unes, notamment l’ « analyse » de Jean-Pierre Raffin dont la version complète accompagne la mise en ligne du numéro 26 de la Gazette des Grands prédateurs (Ferus) appellent de ma part un certain nombre de réponses claires et précises.

    Mon objectif est ici de dissiper des malentendus possibles ou montés de toutes pièces pour laisser place à des apports constructifs qui permettront d’aller plus loin. Car deux points de l’ouvrage méritent d’être rappelés d’emblée : le livre dont il s’agit est une synthèse provisoire (p. 18 et 491) qui engage à poursuivre la recherche ; la reconnaissance de la dangerosité du loup vis-à-vis de l’homme dans certains contextes doit être à la fois franche et relativisée si l’on veut parvenir à une « réflexion sereine sur les rapports (actuels) entre le loup et l’homme » (p. 18). * * * Le « fil conducteur » de mon livre est-il de « réfuter un discours idéologique notamment sur l’innocence des loups ? de « combattre une thèse », pour reprendre les expressions de Jean-Pierre Raffin qui renvoie sur ce point à certains passages de l’Histoire du méchant loup (« p. 14, 15, 19, 84, 403, etc »). Évidemment non, en dépit d’une « analyse » partiale et faussée de l’ouvrage et d’une lecture prêtant à l’auteur des intentions qui ne correspondent pas à ce qu’il a écrit lui-même. Quel est donc le propos véritable du livre ? Dès la page 9 l’avertissement est pourtant très clair : il s’agit de fournir « une contribution sereine à un débat » avec le « souci de dédramatiser », d’« offrir un premier bilan » et de « livrer directement les sources de l’historien » (p. 11). Le propos n’a rien d’une réfutation ! Qu’on en juge : « liberté d’examen pour rester ouvert à toutes les interprétations » (p. 15), refus de prendre position à priori : « dans un débat où l’on en vient d’un côté à minorer et d’un autre à surestimer la réalité des prédations sur l’homme, allons y voir plus clair » (p 15). « Quelles que soient leurs positions respectives, toutes les parties auront à gagner à mieux connaître le contenu de ce rapport conflictuel, et à en mesurer les limites » (p. 15)… en aucun cas il ne s’agit de « réfuter » mais de chercher à comprendre en restant ouvert.
    Dans cette mise en perspective, le « fil conducteur » est précisé nettement p. 16-17 : comme je l’indique sans ambiguïté mon propos entend répondre à 3 objectifs : 1. dresser un bilan des travaux existants sur la question des attaques de loups sur l’homme en France ; 2. constituer une importante base de données pour mesurer et comprendre l’impact des agressions dans le temps et dans l’espace ; 3. analyser ces événements comme révélateurs du fonctionnement des sociétés humaines et comme bio-indicateurs de la gestion des espaces ruraux. Ces trois objectifs ne correspondent guère à ceux que me prête Jean-Pierre Raffin. Toute l’orientation partisane de son texte paraît alors en porte-à-faux. Ceci étant, devant l’apparente acuité de certaines « attaques » de mon contradicteur, je ne voudrais laisser place à un motif de suspicion. Je les passe donc en revue. * * * Tout d’abord, la manière dont Jean-Pierre Raffin, suivant en cela quelques autres critiques, semble instiller un doute dans l’utilisation des témoignages – innombrables – des curés de l’Ancien Régime appelle de ma part une réponse. Très légitimement, un certain nombre d’internautes qui ne liraient pas les nombreuses pages que je consacre à ce sujet dans le livre (et en particulier tout le chapitre II) pourraient être circonspects à première vue. Ma réponse se situe sur trois plans complémentaires : D’une part, les sources ne se limitent pas à l’état civil (et en la matière même après 1792 certains maires ou officiers d’état civil ont signalé des décès causés par les loups jusque dans les années 1820, ce qu’il faudrait quand même reconnaître d’autant plus que le livre en donne des exemples, à commencer par les p. 77-78). D’autre part, les sources paroissiales sont loin d’être les seules puisque tout un éventail de documents extérieurs vient corroborer ces attaques : enquêtes administratives, correspondances, mémoires de particuliers, rapports d’experts, sources hospitalières, témoignages médicaux, etc. Enfin, en considérant les actes de sépulture qui focalisent l’attention de Jean-Pierre Raffin et de Jacques Baillon, une fois replacés dans leur contexte historique et reconnu la position sociale et culturelle de leurs rédacteurs, on ne peut les discréditer à priori. Sauf exceptions toujours possibles, les milliers de vicaires et de curés qui ont apporté ces précisions, dans des centaines de localités et sur plusieurs siècles, n’avaient aucun intérêt idéologique commun à dissimuler des crimes derrière des attaques de loups. D’une manière générale, la critique ne résiste pas à l’examen scientifique puisque des procès-verbaux d’expertise et de récollection de témoins précédaient souvent les déclarations et qu’en dehors des actes de décès, d’autres sources viennent apporter des confirmations et des précisions. Imaginer le contraire serait manquer de sens historique. Pour un représentant de l’autorité publique comme l’étaient les desservants de paroisse il eût été bien périlleux de falsifier la réalité. Peut-on concevoir enfin que des milliers d’entre eux aient pu le faire dans le silence le plus absolu de l’administration et des communautés rurales ?
    Dans son souci de critique, Jean-Pierre Raffin en vient à accepter à titre d’hypothèse la « fiabilité » de ces témoignages pour mieux la retourner contre l’historien qui les utilise : il l’accuse de ne « plus respecter » ses informateurs pour ranger dans une seule rubrique « loups » et « bêtes féroces ». Derrière de type de discours, on croit poindre une pointe de polémique. En fait, la contradiction n’existe ici que dans l’esprit du contradicteur. Car, dans l’Histoire du méchant loup, tout un chapitre (p. 299-340) est justement consacré à l’analyse sémantique des termes utilisés. Que le lecteur curieux de juger par lui-même s’y reporte et il verra que, sauf exception toujours possible – encore une fois l’historien ne saurait avoir la prétention de saisir la réalité absolue avec ses sources – le terme de « bête », loin de désigner d’autre prédateur que le loup, n’intervenait sous la plume des rédacteurs que lors des séquences d’attaques les plus dramatiques. Le livre le dit clairement. Tout un développement est ainsi consacré à « la bête : figure emblématique du loup mangeur d’hommes » (p. 319-320). Au-delà de cette rectification qui s’imposait, il ne faut pas rester prisonnier des termes sortis de leur contexte : contrairement à d’autres critiques déjà formulées par Jacques Baillon, ce n’est parce qu’on ne trouve pas le mot loup dans un acte de décès mais le mot « bête », que Canis lupus soit ipso facto absent. La réalité n’est pas aussi simpliste et l’analyse de l’occurrence des termes (souvent alternatifs), de la saisonnalité des attaques (quasiment identique), de la pyramide des âges des victimes (très voisine) et de la technique de l’agression (identique) vient corroborer l’équivalence très majoritaire – ce qui ne veut pas dire absolue ! – : loup mangeur d’hommes = bête féroce. J’ajoute que depuis la sortie du livre, et par souci d’approfondissement, j’ai isolé systématiquement les cas d’agression attribués aux « loups » de ceux attribués aux « bêtes ». L’analyse statistique à laquelle j’aboutis confirme tout à fait les conclusions du livre. La querelle sur les chiffres, reprise ici et là, est par ailleurs un peu vaine. Lorsqu’il m’a bien fallu arrêter mes recherches pour procéder aux analyses avant d’entamer la rédaction, le total était de 3 069 cas d’attaques. Mais comme il était hors de question d’amalgamer les attaques de loups enragés à celles de loups prédateurs, j’ai bien pris la peine de les distinguer. C’est ainsi qu’il y a 1 212 attaques attribuées à des loups enragés et 1 857 à des loups prédateurs de 1421 à 1918 (1 212 + 1 857 = 3 069). Dès l’avertissement (p. 11), je l’ai bien précisé au lecteur. Dans l’annexe (p. 514-515), je fournis par souci de précaution la répartition quinquennale des attaques de loups prédateurs sur trois siècles (1835 cas de 1571 à 1870, qui recoupent la quasi-totalité du corpus). Et pour chaque tableau les données sont toujours bien indiquées : selon la nature des renseignements recherchés, la périodisation retenue ne pouvait être toujours strictement identique et la simple rigueur scientifique imposait de ne considérer à chaque fois que les données pertinentes ! Pour ces analyses sectorielles, la chronologie et les effectifs en jeu sont fournis systématiquement au lecteur. L’abondance des preuves et la publication des bases de données elles-mêmes sont une simple preuve de respect à l’égard du public.

    Une longue partie de la critique de Jean-Pierre Raffin porte sur le cas des « loups-lévriers » (8 cas à peine) et des « loups cerviers » (guère plus, 18 cas). Sur les 1 585 cas d’agresseurs identifiés, ces deux « catégories » terminologiques ne représentent que 1,6 % des effectifs, ce qui devrait relativiser déjà la virulence d’une éventuelle controverse ! L’argument qui manifestement pourrait prêter le plus à sourire ici est celui de « l’ignorance manifeste » de l’Irish Wolfhound, plus connu sous le nom de lévrier irlandais. Imaginer d’emblée une équivalence entre ce que certains contemporains, paysans pour la plupart, appelaient « loups carnassiers ou lévriers » et des « lévriers irlandais » avérés me paraît relever de la simple hypothèse. S’il est vrai que cette race avait bien été élevée pour chasser le loup, c’était dans un contexte aristocratique très fermé et il serait bon de se demander si les représentants de l’Irish Wolfhound étaient si nombreux à errer dans les bois de la France d’Ancien Régime. Enfin le museau de l’animal semble être assez différent de celui de Canis lupus. Sur ce point très particulier et qui, somme toute, reste fort secondaire, je pense que des recherches spécifiques devraient être menées avant d’être aussi affirmatif. Dans le cas des « loups-cerviers » la critique consiste à reprendre l’interprétation traditionnelle du lynx pour contester l’assimilation populaire de cette catégorie à des grands loups prédateurs. Les témoignages des contemporains cités dans le livre le disent pourtant bien et ce sont eux qu’il faudrait réfuter. Une autre critique porte sur les âges des victimes. Le comble est atteint quand Jean-Pierre Raffin considère que les tableaux des Annexes (47A, B, C et D) concernent « justement des enfants de moins de 10 ans » contrairement à ce que j’ai écrit p. 308. L’honnêteté consisterait à regarder la pyramide des âges des victimes p. 375 et les chiffres bruts p. 515 qui rassemblent commodément toutes les indications requises : les victimes de plus de 10 ans représentent 56,3 % du total (693/1225), proportion calculée évidemment à partir des bases de données 47A, B, C et D, qui contiennent l’ensemble des informations tirées des actes. Une simple vérification permet au lecteur de s’en rendre compte. Les enfants de moins de 10 ans ne sont donc pas majoritaires. Ceci étant, même si dans la forme il ne sert à rien de manquer de rigueur quand on en fait justement le reproche public à un auteur, sur le fonds un scientifique comme un historien doit l’être ne saurait écarter une idée considérée comme une hypothèse : qu’il y ait eu des lynx parmi les agresseurs de l’homme, c’est possible. Et ces cas très particuliers peuvent être rangés justement dans la marge d’incertitude que j’évoque p. 348 : « quand bien même l’agresseur n’aurait pas été identifié nommément dans tous les actes, il est bien difficile, sous nos latitudes, d’imaginer, en dehors de quelques très rares exceptions, toujours possibles, d’autres prédateurs que le loup anthropophage ».
    Or ce passage, qui est rappelé dans le texte de Jean-Pierre Raffin, me vaut d’être accusé de défauts contraires. Derrière ce propos, l’auteur est censé avoir voulu « éluder la question » et comble de critique, d’être resté « dans l’ordre de l’affirmation et non de la démonstration » pour ne pas avoir détaillé les autres prédateurs ! Un peu de justice accorderait à l’historien justement le droit de rester prudent quand il n’a pas l’ombre d’une preuve sur un point qui, en lui-même, relève des cas exceptionnels ! Quant au cas des actes criminels déguisés derrière des attaques de loups, même si encore une fois des exceptions sont toujours possibles, l’hypothèse ressort davantage de l’idée préconçue que pourraient avoir certains observateurs du 21e siècle que de l’examen porté par l’historien des sociétés rurales des 15e-19e siècles : l’interconnaissance où l’on était dans les campagnes rendait alors extrêmement difficile l’occultation de tels crimes au sein des populations résidentes. Parmi toutes les victimes recensées, qui étaient bien connues de leurs familles et de leurs voisins – rappelons que les décès anonymes et notamment ceux de populations migrantes ne peuvent apparaître dans les statistiques –, l’imputation au loup ne cachait nul mystère car les décès accidentels faisaient l’objet d’enquêtes et disposaient souvent de témoins. La criminalité rurale n’avait pas besoin de lui pour se dissimuler et les faits-divers les plus horribles, accusant directement l’homme, étaient légion. Quant aux « psychopathes » chers à Roger Mathieu, ils encombrent bien des liasses des archives judiciaires ! Mon livre se termine d’ailleurs par ce constat : « L’envers d’Homo sapiens a été autrement sinistre que celui de Canis lupus » (p. 500). Citer ensuite Gilles et Claude-Catherine Ragache pour trouver un contre-exemple dans leur ouvrage de 1981 (Les Loups en France. Légendes et réalité) sur le camouflage d’assassinats par de prétendues attaques de loup tient encore une fois de la contre-verité. Au fil des pages de leur livre, ces deux auteurs indiquaient nettement – avant même toute analyse comparative et statistique – l’importance des attaques de loups sur l’homme. Et à propos de la « bête » du Gévaudan, ils soulignaient déjà (p. 85) que tout son mystère reposait « sur l’affirmation (fausse) suivant laquelle le loup n’attaque qu’exceptionnellement l’homme », avant d’en rappeler eux-mêmes toute une série de preuves ( à suivre)

    En tordant à ce point quelques extraits sortis de leur contexte, en assénant à l’auteur des critiques contradictoires, en lui prêtant un « fil conducteur » qui n’est pas le sien, en minorant au maximum ses apports (les éléments jugés dignes « intéressants » comme les analyses comparées entre loups enragés et loups sains et les études statistiques n’apparaissant qu’à la fin en détour de phrase), en noyant son originalité dans la bibliographie des autres chercheurs et en caricaturant son propos (« sur l’une des questions de fond : le loup a-t-il ou non attaqué l’homme en Europe et en France, Moriceau n’apporte rien de nouveau… »), il est évident qu’un procureur n’a pas de mal à discréditer un ouvrage. C’est bien dommage pour tout le monde mais ce genre de discours ne résiste pas à la curiosité de lecteurs avertis.
    En suivant les simples recommandations élémentaires que formulait Farid Benhammou dans le compte rendu qui a lancé le forum de discussion à la fois sur Ferus et sur Loup.org, (« rien de tel, écrivait-il à la fin de sa recension, que de se rendre compte par soi-même et de lire directement le livre ») on comprend la nécessité pour avancer dans un débat de lire par soi-même l’ensemble d’un ouvrage avant de le critiquer de manière négative. Si l’on refuse de regarder en face les propos d’un auteur et qu’on poursuive ainsi les discussions, bien d’autres critiques sans fondement pourront être imaginées… jusqu’à décourager leur destinataire d’y répondre. La passion l’emportant sur la raison, le parti pris sur la bonne foi, l’opprobre sur l’examen honnête, le discours sera sans fin. La discussion sera toujours vaine puisque les éléments seront sortis de leur contexte ou bien surinterprétés. C’est la raison pour laquelle, faisant confiance aux lecteurs, je renvoie désormais directement au livre pour ce type particulier de critiques. Si imparfait qu’il soit – mais encore une fois j’ai précisé à plusieurs reprises qu’il s’agissait d’un premier bilan national – l’ouvrage apporte par lui-même bien des réponses à des critiques rapides ou sélectives. En revanche, et en dehors de tout aspect polémique, l’Histoire du méchant loup s’est voulue ouverte à des apports informatifs et à des critiques constructives : depuis sa parution, plus de 250 nouveaux cas d’attaques m’ont été signalés par les lecteurs, avec toutes les références d’archives nécessaires, ce qui élargit encore le corpus d’analyse, si révélateur de l’organisation de la vie sociale et de la gestion de l’environnement dans les espaces ruraux ; des demandes de précision ont été formulées, notamment sur place du chien dans l’économie rurale ancienne (un chien souvent trop coûteux à entretenir pour la majorité des populations rurales). Et par ailleurs un certain nombre d’inexactitudes (notamment dans les localisations ou les orthographes) ont été obligeamment signalées. L’ensemble de ces courriers vient confirmer les analyses du livre et ouvrir quelques perspectives. Pour en revenir aux forums de discussion, il est indéniable que certains internautes sont déconcertés qu’un historien puisse porter un regard indépendant de toute option « lycophile » ou « lycophobe » sur les rapports entre l’homme et le loup, voire irrités qu’ils ose prendre tout simplement Canis lupus comme objet d’étude. Mais le loup serait-il la propriété exclusive d’une discipline scientifique ? Nonobstant la charge émotionnelle que comportent quelques diatribes, certains arguments incitent à poursuivre la recherche et à approfondir des analyses, à condition bien sûr de les reprendre positivement et à titre d’hypothèses. C’est la raison pour laquelle, et quel que soit l’état d’esprit dans lequel fusent certaines contradictions – car toutes ne s’inscrivent pas dans ces démarches aigries ! –, elles ne me paraissent pas inutiles pour l’historien qui respecte son métier. Elles l’engagent à bien se relire et bien vérifier ses propos ; elles le conduisent à apporter des précisions et à poursuivre ses investigations. Elles l’encouragent même à poursuivre l’ouverture qu’il a commencée avec d’autres disciplines scientifiques, sans gommer pour autant sa spécificité historique. Je tiens donc finalement à en remercier leurs auteurs. Jean-Marc Moriceau

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