Ces pneus qu’il fallait immerger

Je serai rapide, tel le Guy L’Éclair de mon enfance. Il ne s’agit ce jour que d’une historiette, mais qui en dit long. Une dépêche de l’AFP en date du 13 mai rapporte que l’Agence des aires marines protégées (ici) – un petit établissement public français – vient de commencer un drôle de travail. Il s’agit de sortir de l’eau une partie des 25 000 pneus usagés immergés entre Cannes et Antibes, en Méditerranée donc. On a commencé de balancer dans les mers du monde des pneus usés à partir des années 1960. D’abord quelques milliers, ensuite quelques millions.

Pourquoi une telle idée ? Officiellement, pour créer des récifs artificiels, et du même coup fixer sur place toute une biodiversité qui aurait profité aux pêcheurs locaux. On sait parfaitement, aussi hideux que cela paraisse, que des blocs de béton finissent par attirer au fond de l’eau, sur eux et autour d’eux, quantité d’organismes, dont des poissons. Mais des pneus ? Il y a cinquante ans, nos magnifiques autorités habituelles garantissaient que les pneus sont inertes, et définitivement non-polluants. C’était une foutaise car, ainsi que le déclare mon ami Jacky Bonnemains à l’AFP, « Si la colonisation n’a jamais eu lieu, c’est parce que les pneus usagés sont recouverts d’hydrocarbures et que leur décomposition progressive libère dans l’environnement des métaux lourds toxiques pour les organismes marins ».

En Floride, où l’opération a pris des dimensions géantes – 2 millions de pneus immergés au large de Ford Lauderdale à partir de 1972 -, le désastre est pris au sérieux par le département de protection de l’environnement de l’État de Floride. Outre une pollution considérable autant qu’invisible, des bancs coralliens ont été détruits en partie, à cause de pneus arrachés de leurs liens. Mais, ne l’oublions pas, c’était censé être bon pour les poissons et les pêcheurs. Qui le dit, qui l’a dit ? En Amérique, le constructeur de pneus Goodyear, qui y avait lancé l’idée. Quoi de plus simple, en effet, que de jeter aux poubelles marines ce qui devra ensuite être racheté, neuf, chez le marchand de pneus ?

On ne serait pas étonné que Michelin ait, chez nous, donné le même conseil. Les gens de l’industrie, dont les moyens sont à peu près sans limite, sont partout. Dans les commissions, chez les experts, dans mille lieux publics ou parapublics où sont avancées des idées ou des propositions. Attention ! je ne veux pas dire qu’en 1960 ou 1970 les industriels du pneu savaient qu’immerger leur marchandise était une menace directe pour les écosystèmes marins alentour. C’est presque pire : la seule chose qui comptait était la défense de leurs intérêts et de leur vision du monde. Ce mécanisme simple s’applique à tous les produits maudits de la chimie de synthèse, aux pesticides, à l’amiante, à 10 000 autres saloperies.

Combien de projets du même genre sont en train d’aboutir quelque part ?

13 réflexions sur « Ces pneus qu’il fallait immerger »

  1. Toujours ces « autorités » qui prétendent qu’il n’y a pas de danger… et en réalité, aussi stupide que ça : « loin des yeux, loin du coeur ». Et les cancers pour les descendants.
    Nos politiques sont INCAPABLES de nous protéger de tous ces maux. Pire, ils y collaborent.
    Qu’ils dégagent tous l’un après l’autre !

    Et pour un peu d’oxygène, n’hésitez pas à soutenir et diffuser largement, plus que quelques jours pour atteindre leur objectif avec un très beau projet… :

    http://www.kisskissbankbank.com/fr/projects/medved-le-mangeur-de-miel–2

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    ECOLOGIE : la crise écologique est une bombe à retardement qui a commencé à exploser. Elle est double : changement climatique ET EXTINCTION MASSIVE DE LA BIODIVERSITE. Ses dégâts potentiels et durables sont plus graves que ceux des deux guerres mondiales réunies et nous en sommes tous responsables. Comment penser et agir pour se tourner rapidement vers une civilisation durable, respectueuse de tous les Humains et enfin accordée aux écosystèmes ?

  2. Les autres chemins suivis par les vieux pneus sont les suivants :
    – rester 500 ans dans une décharge à ciel ouvert
    – trempage dans l’azote liquide, un coup sur la tête, l’acier part d’un côté et le reste est brulé dans les cimenteries (Humm, ça sent bon)
    – broyage et transformation en revêtements de sol…
    De toutes façons, on finit par les bouffer, d’un côté ou de l’autre…
    On devrait directement élire un gouvernement formé des pdg du cac 40, comme ça on n’aurait pas de surprise, on éviterait -au moins- aux fantoches qui croient nous gouverner de se remplir les poches…
    Il est de toutes les façons évident qu’on va finir par se retrouver seuls sur terre, avec les blattes, les fourmis et les scorpions… Charmante compagnie.

  3. Coucou,

    Merci Fabrice,

    Déchets jetés dans les mers et les océans.

    634 000 kilos de déchets sont déversés dans les océans chaque seconde, soit 20 milliards de tonnes de déchets par an, dont 80% proviennent des terres !

    https://www.youtube.com/watch?v=J6qGU6zSu9k&spfreload=10

    http://www.sur-la-plage.com/breves/les-plages-d-oleron-recrachent-des-ordures-216.php

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    http://www.agoravox.tv/tribune-libre/article/nucleaire-francais-60-ans-de-49939

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    Allez les filles, nous montrons aux garçons de quoi nous sommes capables! Quoique? Cela pourrait aussi bien servir de gymnastique rééducative. 😉 😉

    http://www.humanosphere.info/2015/04/une-machine-a-laver-qui-fonctionne-sans-electricite-pour-118-euros-oui-oui/

    Bien a vous toustes. Gros bisous.

  4. Fabrice,

    Comment fais tu, pour encaisser tout ces savoirs négatifs?

    Bon sang! De quelle planète tu viens?

    Poutoux,

  5. Les objets : on pollue d’abord en extrayant les matières premières, ensuite en les fabriquant, bien souvent en les utilisant, et finalement en s’en débarrassant. Embarrassant, non ?

  6. Insupportable !
    Cela vient alimenter une révolte qui n’a jamais cessé depuis que j’ai appris, petite, qu’il y avait des enfants qui mouraient de faim dans le monde.
    Au secours !
    Les pneus sont d’une grande utilité pour retenir la terre quand on veut faire des terrasses sur un terrain en pente…
    Bref ! Il y a bien des moyens de les utiliser sans polluer la mer… non ?

  7. Courage Fabrice, je suis sûre que tu vas remarcher bientôt et mettre dans la nature bien vite pour te ressourcer de vivant, de simple et de beau, tu dois en avoir bien besoin. Amitiés du clan de la neige 🙂

  8. L’être humain n’est pas à court d’imagination, encore devrait-il apprendre à s’en servir : https://populationspeakout.org/postcards/trashing-planet-tire-dump/

    Selon le ministère français de l’écologie
    ( http://www.developpement-durable.gouv.fr/Nouvel-article,12040.html )350 000 tonnes de pneus arrivent en fin de vie chaque année. Croyez-vous que tous pourront être « revalorisés » ? Et même pour ceux-là, à plus long terme, combien d’années pour la réabsorbtion, digestion comprise, par la planète ?

    Pour vous Fabrice : réapprendre à marcher, quelle symbolique enchanteresse ! Oui vous avez de la chance, d’abord d’être resté en vie, puis de redécouvrir la marche. Bon courage, je suis sûre que vous y arriverez.

  9. N’est ce pas le même problème pour les couches,
    pas du tout biodégradables.

    Je ne sais pas si en volume c’est plus ou moins que les pneus !

  10. Les pneus des poids lourds durent beaucoup plus longtemps que les pneus de tourisme. Ils sont regravés et rechappés ; ils ont plusieurs cycles de vie.

    Pourquoi ne pas imposer par la réglementation que cette pratique soit étendue aux véhicules de tourisme ?

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