Mais où est passé le coucou gris ?

 Qui ne connaît le coucou (gris) ? Je vais poser la question autrement : qui n’a jamais entendu son chant, annonciateur du printemps ? Même le plus indifférent sait que le coucou pond dans le nid d’un autre oiseau et lui laisse le soin d’élever sa progéniture. Vu de plus près, c’est stupéfiant, car la femelle coucou revient chaque année dans la zone qui l’a vue naître, retour de son exténuant périple africain. Sur place, on se doute bien qu’elle fornique un peu, activité heureuse et réparatrice, comme chacun sait. En tout cas, vers la fin mai, lestée d’une dizaine d’œufs, elle se livre à un rituel sidérant.

Un à un, elle dépose un œuf et un seul dans le nid d’une autre espèce – essentiellement des passereaux plus petits qu’elle -, profitant d’une absence momentanée des parents. À toute vitesse, madame pond son œuf et jette par-dessus bord l’un de ceux déjà déposés. Ni vu ni connu. Neuf fois, dix fois, le même processus. Je ne vous raconte pas tous les détails, qui sont pourtant incroyables, et passe directement à la naissance de l’intrus. Ce qui suppose bien sûr qu’il n’a pas été repéré avant. Après, c’est trop tard : le coucou se change en tyranneau, car il devient plus gros que ceux qui l’ont nourri. Au point que certains « parents-passereaux » se mettent sur son dos pour pouvoir continuer à lui enfourner sa ration. Laquelle doit absolument être à base d’insectes. Si la mère dépose un œuf dans le nid d’une espèce granivore, le petit meurt d’inanition.

Ne nous égarons pas, même si ce chemin est saturé pour moi d’odeurs, de saveurs, de couleurs et de musique. Ne nous égarons pas. Je viens de découvrir une nouvelle très rude : le coucou gris entre dans la Liste rouge des espèces les plus menacées en Grande-Bretagne (ici). David Rosane m’avait signalé il y a quelques semaines les inquiétudes autour du déclin de cet oiseau merveilleux, mais cette fois, officiellement, la sinistre Liste Rouge (ici). Le coucou est accompagné, en direction de la tombe, par des oiseaux jadis aussi communs que le vanneau huppé ou la bergeronnette printanière. 52 des 246 espèces communes d’oiseaux de Grande-Bretagne sont désormais, comme on dit là-bas, « red-listed ». 52, soit 21 % de l’ensemble. En 2002, ils n’étaient que 40, soit 16 %.

Je ne reviens pas sur la multitude de causes croisées qui expliquent très probablement le drame en cours. Vous les connaissez plus ou moins. Qu’elles tiennent à nos pratiques criminelles ici – les pesticides -, aux changements globaux – le climat – ou aux bouleversements dans les zones de migration saisonnière, surtout en Afrique. Je n’y reviens pas. Juste un mot sur la Grande-Bretagne. Ce pays si proche est la patrie de l’immense Royal Society for the Protection of Birds (RSPB, ou Société royale pour la protection des oiseaux), fondée en 1889. Les élégantes de l’ère victorienne avaient pris la détestable habitude d’orner leurs chapeaux et même certains de leurs vêtements de plumes de grèbes. Surtout de grèbes huppés, alors menacés d’extinction. Jetez un œil sur la petite illustration du bas de cet article. L’on y voit des manifestants d’il y a plus d’un siècle protester contre le commerce de plumes d’oiseau. Je l’aurais bien mise ici, en regard de ce que j’écris, mais un mauvais sort technique m’en empêche.

C’est sans importance. Mon propos d’aujourd’hui est simple. Je ne sais aucun autre pays que la Grande-Bretagne où le sort des oiseaux soit à ce point cause nationale. La RSPB rassemble plus d’un million de membres, gère près de 170 réserves, sur plus de  1150 km2. Notre LPO (Ligue pour la protection des oiseaux), vaillante pourtant, en compte autour de 40 000. Les birdwatchers, ceux qui observent les oiseaux, sont chez nos voisins (presque) aussi nombreux que les sarkozystes chez nous. Et pourtant, le coucou. Ce coucou qui, depuis le début des civilisations humaines, annonce le printemps et fait chanter les cœurs. Annonçait le printemps et faisait chanter les cœurs. Désolé, je n’ai pas envie de rigoler.

Protest against the plume trade, London 1911
Protestors against the plume trade

 

36 réflexions sur « Mais où est passé le coucou gris ? »

  1. le coucou,ne nous fera plus jamais coucou,et ses mélodie bercera nos nuit;l’ors de nes insommnies futur,quand la nostalgie du monde,que l’on a dévoré,sera à un tel point douloureux,que les larmes,seront comme des étoile dans le ciel de demain,quand le soleil sortira de sa boite(de pandorre),et illuminera nos derniers voeux,quand le coucou et tous les etres seront absent de la scène,et le seul acteur(nous bien sur),se verra en face pour la première fois,les yeux dans les!!!reflet de nos propres angoisses,dans le vide face a nous meme.quel progré,quel brillante réussite .

  2. Le dernier coucou que j’ai entendu; c’était l’année dernière; je n’en ais pas encore entendu cette année!

    Je dois bien dire maintennant qu’elle sont revenuent; qu’il n’y a presque plus d’hirondelles ici; curieusemment il y en a plus dans la ville d’à côté; qui n’est qu’a une dizaine de kilomètres! Le soir avec ma fille on regarde après les pipistrelles; de petites chauve-souris locale; je n’en ais pas encore vu!

    D’une année à l’autre on voit la différence; ça s’emballe…

    Je ne sais que dire; que hurlée ma tristesse! Est-ce que bientôt pour entendre des chants d’oiseaux qui peuplaient ma vie, je vais devoir les écouter sur enregistremment!

    Je ne sais pas non plus qu’elle vont être les conséquences de toute ces disparitions; à part me coller une déprime carrabinée!

    J’ai par contre croisé quelques abeilles en bonne santé; des grosses noires; ma main à coupé que ce ne sont pas des locales; je cherche des renseignemments dessus je n’ai toujours pas trouvé!

    Si lors de mes balldes j’entends un coucou, je le dirrais ici!

  3. cette année est comme une chance incroyable chez moi . le vanneau huppé à recouvert des champ entiers,l’oedicnème réapparait, l’alouette lulu , la huppe et son oupoupa, même le loriot s’est laissé photographié et le coucou, oui, a annoncé le printemps entre les chants plus communs des verdiers et rouge-queue noirs . de même, je n’ai jamais vu autant de moineaux et d’hirondelles . Et puis la mante religieuse, et puis le grillon d’Italie et les orchidées , et puis …Alors, croyez moi, je goute chaque instant, j’écoute et regarde .

  4. En Allemagne on chante une chanson sur le coucou qu’on peut lire en allemand et en français ici: http://www.mamalisa.com/?p=256&t=fs&c=38. Elle date du 18ème siècle et le coucou est le symbole de la liberté et de la résistance contre l’absolutisme.
    La semaine dernière j’ai vu pour la première fois de ma vie un coucou, il était dans le vieux frêne juste au-dessus ma cabane de jardin. J’étais très très content. Je ne connais pas d’animal plus lié à l’idée de printemps (l’hirondelle n’étant pas de taille comme tout le monde sait). Si vous venez dans mon jardin je vous la chanterai.

  5. moi je suis ornitho( c’est ma passion) et je constate les dégâts, beaucoup d’espèces sont en chute libre les alouettes en nombre réduit, les tariers sont de moins en moins communs (les agriculteurs coupent de plus en plus tôt pour le regain), la caille est devenu rare, le coucou lui est bien présent, et pour l’anecdote, dans un secteur (que j’appelle mon paradis pour naturaliste en herbe) j’ai imité le coucou, et il a fini par venir suffisamment prés pour que je l’observe à la lunette.
    je m’occupe particulièrement des pies-grièches (grise, écorcheur et tête rousse pour la région Auvergne) et bien leurs effectifs sont en dégringolade, ces oiseaux sont devenus rares ou exceptionnels dans de nombreuses régions de France;
    pendant ce temps, certaines espèces prolifèrent les corvidés (pies,geais…) et les goélands. c’est normal ils ont très peu de prédateurs et pour les goélands sont attirés par nos décharges à ciel ouvert
    je constate aussi de moins en moins d’insectes ceux qui expliquent en partie la diminution des oiseaux en partie ou totalement insectivore;

    Plus nous serons nombreux dans les associations (nous pouvons prendre exemple pour une fois sur les anglais) et plus nous pouvons espérer peser dans les décisions des pouvoirs publics (il faut bien rêver un peu de temps en temps)

    Bruno l’Auvergnat

  6. Le coucou, je l’ai entendu hier sur les bords de l’Allier en Bourbonnais…
    Pour le voir, rien de plus facile, il suffit de savoir l’imiter !
    Cela se passait sur les bords du Bassin d’Arcachon, lorsque j’étais enfant et dès que nous entendions le coucou, ma mère se mettait à l’imiter et à tous les coups, il finissait par nous survoler…
    Aujourd’hui que je suis « grand », je fais pareil et ça marche ! ça fait partie de ces instants qui font du bien.
    Euh par contre, ce soir Michel (le chat de ma compagne) a bouffé une nichée de rouge-queue à front blanc, je ne sais pas si il y avait un jeune coucou parmi… où les a-t-il trouvé ? les 4 rouge-queue qui eux sont dans un nichoir inaccessible se portent à merveille !

  7. On peut ajouter concernant le Coucou et ses prodiges que les oeufs de la femelle ressemblent à ceux de l’espèce qu’elle parasite. Et ces espèces sont variées. Je ne sais si une même femelle peut parasiter différentes espèces au cours de sa vie… Peut-être quelqu’un aura-t-il une réponse !
    J’ai la chance d’entendre un coucou depuis chez moi, chaque jour, de même que les huppes, que l’on peut observer très fréquemment. Elles sont bien plus nombreuses qu’il y a 15 ou 20 ans. Les cigognes aussi. Par contre, les hirondelles et les papillons sont devenus bien rares, je trouve, même si parfois, dans des coins préservés, ils sont assez nombreux. Sûr que c’est pas la gloire dans l’ensemble, mais on a parfois de bonnes surprises quand même…

  8. En ce moment cela n’arrête pas de « traiter »
    Ce matin c’était dans un petit champ près d’une habitation ou il y a des jeunes enfants.
    4000m2 de blé pas plus avec un 120 chevaux.
    Le champ est entouré de haies le nuage toxique s’est trouvé bloqué.
    Je ne supporte plus.
    Mon potager n’est qu’à quelques mètres séparé par un vieux chemin.
    Ils s’étonnent de la baisse de la consommation du lait.
    Personne ne parle de surproduction.

  9. Eh bien, là je peux vous dire qu’on les entend, les hirondelles ! + plein d’oiseaux, mais bizarrement cette année, pas de pies. Mais plein de papillons et d’abeilles. Et pourtant je suis en pleine ville… Je suis sûre qu’on est moins pollué qu’à la campagne.
    En revanche, pas encore vu de petites chauve-souris…

  10. pour voir des papillons il faut mettre de l’origan dans son jardin ou sur le balcon. Pour voir le machaon et ses chenilles, mettre du fenouil cela ne rate jamais.

  11. Coucou:

    Vendredi 29 mai 2009, à partir de 19h30
    à l’occasion du salon des éco-énergies de Mérindol le WE prochain
    (www.ecoenergies.net),
    Rencontre-pique-nique avec Christian VÉLOT

    AVIGNON, VERGERS URBAIN V, près d’Utopia Manutention

    « organisée » par les collectifs :
    « Vaucluse Sans OGM »
    et
    « MANGER SANS PAYSANS »

  12. à sylviane:
    la grosse abeille noire est peut être l’abeille charpentière (xylocopa violacea); autrefois limitée aux régions méditérannéennes, il semble qu’elle remonte vers le nord. Elle creuse son nid dans du bois mort, et aime beaucoup les glycines en floraison

  13. Oui, je suis très étonné aussi de voir autant de papillons cette année.

    Quant au coucou, je garde toujours cette image d’un jeune gros coucou affamé et de ses « parents « troglodytes » qui s’épuisaient à le nourrir… C’était en Ecosse;

    MH

  14. Voir l’émouchet, d’habitude si farouche, se poser à quelques dizaines de mètres de ma fenêtre, sur la dernière branche des bouleaux, fut l’une des grandes émotions de mes printemps de révision de lycéen. Son cri entêtant, oui, mais surtout ce vol à nul autre pareil, cette longue silhouette un peu maladroite, et son regard pris dans mes jumelles. Quelle beauté! (malgré le dossier de la Hulotte qui l’avait bien classé parmi les « traders » de la société des animaux plumes).
    C’était il y a bientôt 15 ans. Depuis, les crédits immobiliers, la spéculation foncière, et la médiocrité du désir d’accession à la propriété excité par un maire divers droite sans imagination, ont fait pousser sur les bosquets, les haies, et les mares bordées de saules, périphériques à ma petite ville flamande, de grosses maisons obèses habitées par une classe moyenne inférieure dépendante de son Scénic et de son barbecue. Je ne devrais pas dire ça, il est facile de dénier pour queques animaux sauvages l’environnement pavillonaire dans lequel j’ai moi-même grandi (mais c’était la strate d’urbanisation précédente), et c’est sûrement une jeunesse plus plaisante que cette de Fabrice.

    Mais le coucou, lui, s’est tu.

  15. Ah, j’ai encore entendu le coucou il y a quelques jours. C’est plein d’oiseaux là où je suis. La « faute » à la déprise agricole? Très peu de cultures, quelques pâtures, la forêt qui gagne les pentes autrefois défrichées, les chemins qui se ferment. Je suis pourtant pas dans la France profonde, plutôt un peu trop près d’une (petite) ville.

  16. Effectivement la situation est grave et s’aggrave. Mais le coucou n’est pas encore mort. Déjà vu et entendu plusieurs fois cette année chez moi (en Belgique), et entendu ce week-end en promenade en côte d’Opale.

  17. Ici, dans la forêt du Nonnenbruch (Haut-Rhin) les
    nouvelles ornithologiques sont plutôt réjouissantes : le Coucou chante quotidiennement depuis début avril
    (avez-vous déjà remarqué les « râtés » au départ et la fin de son chant ? crrrcoucoucrrr.. c’est trop drôle ! Pour le distinguer, il faut vraiment se situer au pied de l’arbre où il se trouve !).
    Idem pour le Rossignol, qui, les années précédentes, ne s’entendait que sur une période bien plus courte. Le Loriot d’Europe a également refait son apparition, mais impossible à voir dans les frondaisons. Si par chance, vous vous situez au pied de son arbre et que vous levez la tête en direction du son que vous entendez, Monsieur Loriot se tait immédiatement… supportant mal que vous cherchiez à le voir ! C’est frustrant, d’autant qu’un oiseau avec un plumage d’une telle intensité est plutôt rare dans le coin ! Mais, en revanche, quel bonheur de le savoir présent !
    Fabrice, le Coucou n’a peut-être pas disparu. Peut-être ne fait-il que se déplacer, répondant aux changement climatique ?

  18. Hacène a écrit : « Je ne sais si une même femelle peut parasiter différentes espèces au cours de sa vie… Peut-être quelqu’un aura-t-il une réponse ! »

    je peux me tromper mais je crois qu’une même femelle coucou privilégie une espèce, celle qui l’a élevée (troglo, accenteur mouchet, rousserolle…) comme si elle était imprégnée par ses parents adoptifs!

  19. Raton, il me semble avoir entendu qqch de semblable. C’est quand même extraordinaire.
    Si seules les femelles jouent un rôle dans le choix de l’espèce parasitée, en fonction de son ascendance (parents adoptifs), l’évolution divergente qui a peut-être lieu sous nos yeux sans qu’on puisse le savoir est ralentie par les mâles qui contribuent à brasser les gènes… Par ailleurs, cela voudrait dire que si le Coucou disparaît momentanément d’une région et y est réintroduit, certaines espèces parasitées auparavant pourraient ne plus l’être par la suite…
    J’essaierai de voir plus tard si je trouve des choses sur cette histoire bien singulière.

  20. Sylviane; merci. Certains points sont confirmés.
    Kès, merci aussi. Pas encore lu, c’est un peu plus long, je verrai ça ce soir ou demain.
    Stan : Michel Tarrier aussi ? Celui-là, il faut le traquet du désert, non ?

  21. Traquet à changé pour l’appellation Tarier….volontée Humaine, mais Pâtre et Motteux sont restés…les mêmes oiseaux. Par contre; drôle d’oiseau concerne toujours l’Humain, qui, lui, pour l’instant, n’est pas en voie de disparition.

  22. Stan, c’est un naturaliste spécialisé dans l’entomofaune, assez fin connaisseur du Maroc, qui a commis quelques livres aux titres évocateurs : « 2050, sauve qui peut la Terre ! » et plus récemment « Faire des enfants tue. Eloge de la dénatalité ». Je pense que l’on peut dire que c’est une assez gande gueule qui n’a pas sa langue dans sa poche. Il lui arrive de dire des âneries scientifiques (que l’on retrouvent ailleurs), mais on lui pardonnne car c’est un passionné.

  23. J’ai entendu le coucou cette nuit pour la première fois (j’habite cannes centre!) à 3H du matin! On est le 12 mars… Je ne l’ai jamais entendu ici. Seulement en montagne. Etrange non?

  24. Oui je trouve… enfin disons que je traverse une sale période niveau santé…(pas grave mais bon…) et je sais pas, j’ai trouvé ça magnifique. J’ai cru que j’halucinais…Et non car je connais trés bien le cri du COUCOU que j’entendais ou recherchai sdans les forêts quand j’étais petite fille. Et là ça s’offre à moi seule en pleine nuit à 3H du mat. Mais c’est normal de l’entendre en pleine ville? (pas de parc à côté de chez moi). Mais c’est une chance oui. Surtout que la ville dormait… Moi ça m’a révéillée.

  25. Zelia,

    Entendre le coucou en ville, surtout en cette période, n’a rien de stupéfiant, du moins d’après ce que je sais. Vous êtes une veinarde, c’est tout ! Et j’espère de tout coeur que vous irez mieux bien vite.

    Fabrice Nicolino

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