La mer, c’est grand

Je crois bien me souvenir que je vous ai fait faux bond. Sans prévenir, sans m’excuser, avec un sans-gêne qui devrait me gêner. Mais non, pour dire la vérité. Je me suis sauvé, je me suis ensauvé et j’ai gagné l’océan majeur de nos côtes, cet Atlantique qui est l’athlète définitif  de tous mes rêves. Je ne peux me passer longtemps de ce contact physique. Six mois est une sorte de maximum. Or j’avais passé ce délai, puisque je me suis baigné la dernière fois en novembre. Presque huit mois avant de me jeter dans l’eau froide et folle de ce géant infatigable. Mon Dieu, croyez-le, le bonheur existe.

Un lien d’une puissance surnaturelle, à ce point surnaturelle qu’elle m’est spontanée et sans appel, me lie à la mer. Nul n’y pourra rien changer, je vous en préviens à toutes fins utiles. Notre corps est pour l’essentiel fait d’eau et de sodium, je ne crois pas vous apprendre grand chose. De l’eau et du sodium. Il me semble, et qu’on me corrige si je divague – ce n’est pas un jeu de mots – que 70 % de notre carcasse est constituée d’eau, à quoi il faut rajouter bon poids – 15 % du total ? – de sodium, dont le chlorure est comme notre sel de cuisine. Nous sommes la mer. Elle est nous-même. Nous en venons, nous y retournons, nous y finirons d’une manière ou d’une autre, même si cela doit prendre un peu de temps, à l’échelle dérisoire qui est la nôtre. La mer, je préfère que les choses soient claires entre nous, est ma mère et ma fille et mon amour éternel, et mon berceau et mon tombeau.

En somme comme en résumé, j’ai nagé et pris du soleil pleine face. J’ai tout oublié du reste. Mais y avait-il un reste où que ce soit ? Je me dis que non. Je me dis que j’ai gravement tort, eu égard à la marche des événements et du monde en déroute, mais je dois me répéter : il m’a semblé qu’il n’y avait rien au monde en dehors de ce que je vivais. Et c’est fini. Et me voilà.

11 réflexions sur « La mer, c’est grand »

  1. « il m’a semblé qu’il n’y avait rien au monde en dehors de ce que je vivais » On appelle cela « être en équilibre » ou encore « être totalement présent dans l’instant présent ».

    Pas étonnant que ce soit dans la Nature, si parfaite, que l’on puisse toucher à l’équilibre.

  2. C’est qu’on s’est fait un peu de souci quand même ! Bon, vu le texte que tu nous offres en rentrant, c’est vite oublié !
    La mer est ton amer en quelque sorte, elle te permet de te retrouver. Je parle bien sûr de l’amer de la navigation, pas de celui de l’apéro !!! Encore que tu boives peut-être la tasse volontairement, qui sais ?! 😉

  3. Simplement merci à vous tous. Et j’ajoute pour Hacène que j’ai en effet avalé volontairement une demi-tasse d’eau de mer, que j’ai réellement trouvée délicieuse.

    Fabrice Nicolino

  4. Pour Fabrice,

    Quelques petites précisions physiologiques au sujet de l’importance quantitative de l’eau et du sodium. Sur les quelques 70% d’eau, les 2/3 sont de l’eau intracellulaire, le 1/3 restant est de l’eau extracellulaire (sang et lymphe).

    Notre milieu intracellulaire est majoritairement constitué (en nombre) de molécules d’eau puis de protéines et d’ions potassium (mille fois moins/ à l’eau).
    Dans notre milieu extracellulaire, c’est l’eau qui domine puis le sodium et enfin les protéines et le potassium.

    L’eau demeure la grande oubliée de la biologie et de la médecine. Notre représentation (du moins occidentale) du monde cellulaire est anhydre !

    Bien à vous

  5. donc la phrase : poussière, nous ne sommes que poussière et nous retournons à la poussière est inexacte. dommage, çà me plaisait bien.

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