GDF-Suez, mes factures, les barrages, et la haine

Deux nouvelles, dont l’une fracasse. Un, je donne du fric à GDF-Suez en échange du gaz qui me chauffe. Avant, je donnais à une société nationale qui, certes, arrachait des contrats comme n’importe quelle boîte privée, avec les mêmes moyens, mais qui incarnait une histoire, liée à la Libération. Gaz de France (GDF) avait été créée, en effet, par une loi de nationalisation du gaz et de l’électricité, en 1946. Avant de se vendre, sur ordre de Villepin, à Suez, en 2006. Encore merci, monsieur le grand gaulliste.

Deux, GDF-Suez vient de fusionner avec un groupe énergétique britannique, International Power (lire ici), ce qui en fait un géant mondial. Youpi, nous avons un géant mondial de plus dans notre petite escarcelle, c’est le bonheur. Seulement – le croirez-vous ? – GDF-Suez détruit le monde à peu près partout où le groupe passe. Ainsi de la rivière Madeira, dans l’État brésilien du Rondônia, principal affluent de l’Amazone. C’est à ce point magnifique que GDF- Suez, qui contrôle le consortium Energia Sustentável do Brasil, y construit le barrage géant de Jirau, qui sera accompagné de quatre centrales hydroélectriques.

Jirau déplacera au total des milliers de familles riveraines et saccagera à jamais les terres de plusieurs tribus indiennes, y compris celles de groupes isolés, pratiquement sans contact avec notre si joli monde. Le Prix Nobel de littérature Jean-Marie G. Le Clézio et le directeur de Survival en France, Jean-Patrick Razon – salut, Jean-Patrick ! -, ont dénoncé ensemble et publiquement l’opération. Il ne fait aucun doute à leurs yeux retors que nous cautionnons ainsi « non seulement la destruction d’une région d’une exceptionnelle biodiversité, mais surtout la disparition, plus que probable, de quelques-unes des dernières sociétés qui constituent une part essentielle de la diversité humaine (ici) ».

Ce n’est pas tout, car ce ne sera jamais suffisant. Survival publie en anglais un rapport accablant, déprimant, désespérant sur la relance des grands barrages partout dans le monde (ici). Cette frénésie s’était un peu calmée après la parution il y a dix ans d’un autre rapport, celui de la Commission mondiale des barrages. Ce texte livrait sans fard le bilan des 45 000 grands barrages qui existaient alors sur terre. Écologique, bien sûr, mais aussi social, culturel, humain. Des centaines de millions de pauvres avaient été déplacés de force pour laisser place à la fée Électricité, celle qui aide si bien à la fabrication des bagnoles, des télés, des ordinateurs et des téléphones portables.

Une sorte de pause – une sorte seulement – donc, ces derniers temps, mais voilà que ça repart, avec en première ligne la Chine, avide comme aucun autre pays dans l’histoire de tout enfourner, avant de tout recracher. Que dit Survival en 2010 ? C’est la curée. La Banque mondiale, des banques chinoises, brésiliennes, la Banque africaine de développement financent des centaines de nouveaux projets, dont la plupart s’attaquent de plein fouet aux peuples autochtones jusqu’ici épargnés. Dans les forêts d’Afrique, en Malaisie, dans le bassin amazonien, partout. Notre monde fou avance, et de plus en plus vite. Ce mot d’un chef tribal du Sarawak (Bornéo), qui tente de lutter contre le barrage de Bakun : « Même si nous étions payés des millions de dollars, cet argent ne pourrait garantir notre survie. L’argent peut être imprimé, mais la terre ne peut pas être créée ».

Je cherche, et j’espère ne pas être le seul,  le moyen de faire payer son infamie à GDF-Suez, à qui je suis contraint pour l’heure de payer mes factures de gaz. Mais il doit bien exister d’autres comptes, et d’autres factures. Il faudra bien régler cela.

15 réflexions sur « GDF-Suez, mes factures, les barrages, et la haine »

  1. pour le gaz pas d’alternative en ecolo connu,pour electrique je suis chez Enercoop mais gaz je cherche comment faire,le bois un poele,mais a paris j’ai aussi un petit poele mais pas assez pour chauffer tout,ou j’installe chaudieres granules et le toutim,faut de la place et pas evident de changer d’habitude,il manque un alternatif en gaz.

  2. Pris pour des Rats. Le gaz part et la facture arrive. Comme il a raison ce Chef tribal. Que valent des millions de dol…d’euros, lorsque c’est d’une patate douce que dépend la survie. Oui, d’autres comptes, d’autres factures à régler se préparent, depuis longtemps(à mon échelle)…Autrement plus contraignants. Ah! Si trouvé, ne pas mettre un courant alternatif dans le gaz!

  3. Bonsoir,

    Chauffage,augmentation?Ce qui est grave,c’est ceci…

    http://www.lavenir.net/article/detail.aspx?articleid=8958323

    Les Pakistanais n’ont pas fini de subir les conséquences des inondations qui ont fait 1.600 mots et deux millions de sans-abri : l’eau qui a tué le bétail et dévasté les terres fertiles cause une envolée des prix des aliments. Des millions de personnes sont donc menacées par la famine.

    Ce sont les terres nourricières des Pakistanais. Le bassin du fleuve Indus et les plaines de la Khyber Pakhtunkhwa fournissent fruits, légumes et blé. Ou plutôt fournissaient, car les pluies torrentielles de la mousson ont tout ravagé. Il n’y aura pas de récolte cette année. Les Pakistanais sinistrés manquent de tout, et les autres subissent aussi de plein fouet la hausse des prix.

    Car les produits alimentaires viennent désormais de loin, souvent difficilement en raison des routes inondées et du manque de carburant. A un prix évidemment revu nettement à la hausse : le kilo de tomates vendu au marché de Rawalpindi, près d’Islamabad, est passé de 40 à 120 roupies, le kilo de petits pois de 70 à 130 roupies… Plus grave, le sac de 20 kg de farine, qui coûtait auparavant 550 roupies, se négocie maintenant entre 1.200 et 1.500 roupies. Une fortune pour des Pakistanais qui ont souvent tout perdu.

    ———–

    Canicule en Russie.

    L’embargo sur le blé russe fait grimper les prix

    La FAO s’inquiète de la flambée des cours du blé sur les marchés mondiaux. La sécurité alimentaire des pays pauvres pourrait être menacée.

    Blé OGM résistant a la sècheresse?

    Bien a vous,Léa.

  4. @ Léa

    elle est chère, cette cuisinière.

    Autre alternative au gaz: le gaz, le pétrole :
    Continuons de polluer encore plus, le réchauffement climatique s’accélèrera et donc plus besoin de chauffage.
    ou alors installer un buste de Napoléon dans son gourbis.

    désolé, ce matin, j’ai envie de déconné…

  5. Hello,

    « elle est chère, cette cuisinière. »

    C’est un exemple,il doit y avoir moins cher ailleurs.Foyer Espoir?

    Alternative bois?

    Les anciens savaient…

    Maisons avec plafond bas
    Nombre de pièces a vivre réduit
    Petite laine sur les épaules
    Grosses couettes
    Des chaussettes pour dormir
    Ramassage du bois dans la forêt
    Reboisage judicieux
    L’essentiel pas le superflu,voila la différence.

    Les anciens savaient et n’en sont pas morts!

    Allez dans la forêt et regardez tout le bois au sol.Un gâchis.C’est ce bois qui fait que les incendies deviennent moins maitrisables.TOUT est a revoir,TOUT.C’est a chacun de faire des efforts et de voir s’il veut aller dans la bonne direction,pour la continuité de la vie humaine.La Terre n’a pas besoin des hommes pour son futur,ce sont les hommes qui ont besoin d’elle.A eux de la respecter et de la préserver.Combien sont ils?

    Flûte,pincer moi fort,j’ai un gros doute!!!!

    PS.Quand nous allions dormir chez ma mamie,le soir avant d’aller au dodo,mamie nous mettait une bouillote dans le lit.La matin sur les vitrages des fenêtres,le froid de la nuit,laissait des arabesques givrées somptueuses a faire palir le plus doué des artistes.

    Pour les chaussettes,je déconne…:)

    Bises,Léa.

  6. Les fleuves, ce sont les veines de la terre. Les couper, c’est plus qu’un crime. Le sang n’arrive plus, l’hémorragie menace.

    Je fais souvent le rêve étrange et pénétrant… que tous ces barrages explosent. Que l’eau retrouve son cours naturel.
    Peut-être, un jour…

    C’est vraiment étrange la période dans laquelle nous vivons. A horizon X + 100-200 ans, on se dira que temps aura été celui des destructions impardonnables, des méfaits les plus crasseux.

  7. Suite à un stage avec l’association APTE de Mérindol j’ai découvert l’existence des digesteurs biogaz, déjà fort utilisés en Asie. Peut-être que le solution à cet écrasement par les sociétés pyramidales « distributrices » est un mouvement de la base qui reprend ses autonomies fondamentales et qui pense en cycle non pas monétaire mais biologique (au sens de la vie). Ceci dit , je n’ai pas encore construit de digesteur et je continue à cuisiner au gaz en bonbonnne.
    Concernant le chauffage de l’habitat, il existe une méthode thermique solaire sous vide (vaporisation d’eau à 40° )qui semble révolutionnaire -dont j’ai appris l’existence au cours du même stage-. (Je me chauffe au bois -un seul poêle pour 100 mètres carrés-).

  8. Lu dans « L’Oiseau magazine » de la LPO :
    « Le parc national de Keoladeo, situé dans l’état du Rajasthan, est désert. Les oiseaux l’ont fui. Depuis sa récente mise en service, le barrage de Panchana retient l’eau de la rivière Gambhir, en amont du parc de 30 ha, privant les quelque 380 espèces d’oiseaux sédentaires et migrateurs d’une ressource indispensable pour assurer la réussite de leur nidification. Peu d’endroits au monde peuvent rivaliser avec une telle profusion d’oiseaux, véritable paradis ornithologique indien. L’association TWSI (Tourism Wildlife Society of India) qui rassemble tous les défenseurs des oiseaux et de la nature se bat depuis des années par tous les moyens légaux pour inciter les pouvoirs publics à trouver une alternative à l’assèchement de ce site Ramsar, classé patrimoine mondial de l’humanité par l’Unesco ».

    Autre article sur le même sujet ( http://www.ornithomedia.com/pratique/voyages/voyage_art192_3.htm )

  9. A propos de barrages, mais en Afrique cette fois :

    « Le gouvernement du Mozambique a approuvé en début de semaine le projet de construction, sur le Zambèze, du barrage hydroélectrique de Mphanda Nkuwa. D’une capacité de 1.500 mégawatts (MW), cette installation sera située à une soixantaine de kilomètres en aval du barrage de Cahora-Bassa (2.075 MW), construit par le Portugal avant l’indépendance.

    Le montant de l’investissement total est évalué à plus de 2 milliards de dollars (1,5 milliard d’euros), dont la moitié servira à la construction des lignes de transport d’électricité. Porté par une société mozambico (60 %)-brésilienne (40 %), ce barrage sera financé par des capitaux chinois.

    Sa production sera essentiellement vendue à Eskom, l’électricien public sud-africain. Situé dans la province du Tete, ce barrage est à haut risque économique. Faute de pluie suffisante, l’ouvrage du Cahora-Bassa n’a fonctionné, au début de la décennie, qu’à 14 % de sa capacité, indique International River dans une note. Comme nombre de pays d’Afrique australe, le Mozambique devrait voir diminuer sa pluviométrie, du fait du réchauffement climatique. »

  10. J’ai tapé  » Eskom » dans mon moteur de recherche et je suis tombée là-dessus :
    – « Eskom est l’opérateur du projet controversé de centrale au charbon de Medupi » ( 7 mai 2010 – http://fr.wikipedia.org/wiki/Eskom ).
    – Puis « Medupi » et ça donne « Eskom attend un prêt de 3,75 milliards de dollars de la Banque mondiale, dont 3 milliards iraient à la construction de la méga centrale à charbon thermique de Medupi » ( 18 mars 2010 – http://www.amisdelaterre.org/Centrale-a-charbon-de-Medupi-la,4608.html ).
    Dans ce dernier article, j’apprécie tout particulièrement ce passage : « Le coût lié à la construction des nouvelles centrales devra donc être supporté par les citoyens sud-africains. Eskom a déjà annoncé une augmentation de ses tarifs de 25 % par an pour les particuliers de 2010 à 2013. Les populations les plus pauvres ne pourront payer la facture et se verront privées d’accès à l’électricité. […] Le prêt de la Banque mondiale ne servirait à rien d’autre qu’à soutenir des entreprises occidentales très riches, et ne permettrait en aucun cas d’améliorer l’accès à l’électricité des plus pauvres ».

    C’est en gros ce que j’aurais aimé répondre à certains commentateurs – lus ailleurs qu’ici, je le précise haut et fort – qui s’imaginent que ces entreprises sont des « humanistes », qui n’oeuvrent que pour apporter des conditions de vie meilleures pour tous.

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