Je crains fort qu’aucun commentaire ne soit bien nécessaire. Le monde dans lequel nous vivons est celui-là. C’est celui de Sarkozy. C’est celui de Strauss-Kahn, sans qu’aucune différence ne puisse être faite entre les deux. L’article ci-dessous est tiré du magazine Challenges, propriété du groupe Le Nouvel Observateur, dirigé jusqu’à son départ vers Europe 1 et Lagardère, marchand d’armes, par Denis Olivennes. Bienvenue dans ce monde tellement meilleur qu’on ne sait plus quoi dire.
Le 20 décembre 2010. L’an dernier, Total, Danone ou encore Suez n’ont pas payé l’impôt sur les sociétés, essentiellement grâce aux niches fiscales.
En France, l’impôt sur les sociétés (IS) est fixé à 33%, et 15% pour les entreprises réalisant un chiffre d’affaires inférieur à 7,6 millions d’euros. En théorie. Car dans la pratique, ces taux sont largement contournés. Une enquête du Journal du dimanche publiée dimanche 19 décembre conclut qu’«une entreprise du CAC 40 sur quatre n’a pas payé d’impôt sur les sociétés l’an dernier ».
En 2009, malgré un bénéfice de plus de 8 milliards d’euros, Total n’a pas payé un centime d’IS en France. Idem pour Danone, Suez, Essilor, Saint-Gobain et Schneider. Ces sociétés ont toutes payé cet impôt à l’étranger: près de 8 milliards pour Total, 433 millions pour Schneider, 424 millions pour Danone…
« Un impôt de chagrin »
Les causes diffèrent selon les sociétés. Pour Total, c’est parce que ses activités françaises, les raffineries, sont en perte. De son côté, « Danone déduit la facture de ses emprunts contractés pour acquérir Numico en 2007 », selon le JDD, profitant de ce que l’on appelle dans le code des impôts de la « déductibilité des intérêts ».
Il n’y a dans cet état de fait rien d’illégal. Si la crise a diminué les bénéfices, donc l’IS, les grandes entreprises françaises profitent surtout des diverses dispositions fiscales qui permettent de multiples exonérations: le report illimité des pertes, le régime fille-mère, le crédit impôt-recherche, la « niche Copé »… L’impôt sur les sociétés est devenu « un impôt de chagrin » selon le ministre du Budget François Baroin, cité par le journal.
Le CAC imposé à 8% en moyenne
Un rapport du Conseil des prélèvements obligatoires publié en octobre indique que les entreprises du CAC 40 sont imposées en moyenne, au titre de l’IS, à 8%, tandis que les PME le sont à 22%, ces dernières n’ayant pas les moyens des grands groupes en matière d’optimisation fiscale. Ce rapport précise que les économies réalisées par les entreprises grâce aux dérogations fiscales représentaient 66,3 milliards d’euros en 2009, contre seulement 18,5 milliards en 2005.
Dans un contre-rapport publié le 30 novembre, le Medef expliquait que ces niches fiscales, qui se multiplient depuis huit ans, étaient la compensation nécessaire pour les entreprises à une imposition parmi les plus élevées d’Europe.
(Challenges.fr)