Vive les écoguerriers ! Evviva !

Des fois, et de plus en plus souvent, je craque, je bous ! On n’a pas toujours envie de discuter, cela se saurait. Non, il arrive aussi qu’on brûle du désir d’agir. Là et maintenant. Maintenant ou jamais. Autant vous dire que j’applaudis de toutes mes forces les bandits océaniques de Sea Shepherd. Oh oui ! Je ne sais si vous êtes au courant de leurs aventures, et dans le doute, je résume.

Paul Watson, un ancien de Greenpeace né en 1950, a créé la Sea Shepherd Conservation Society (site). Le berger des mers. C’est un très brave, cité par Time, en 2 000, dans sa courte liste des Héros de l’Environnement du 20ème siècle. Je sais, Time n’est pas une référence. C’est pour vous dire qu’il est connu.

Watson est un vrai combattant, cela ne se discute pas. Et Sea Shepherd est devenu le symbole de l’action, bien davantage que Greenpeace, du moins dans le monde anglosaxon. J’en arrive à leur dernière fantaisie. Le 2 mars, un bateau de la noble association a pratiquement abordé dans l’Antarctique (afp) le baleinier japonais Nisshin-maru. À dix mètres seulement – il faut imaginer ce que sont 10 mètres dans un océan comme celui-là -, les écologistes ont balancé sur le pont des bouteilles d’acide butyrique, tiré donc du…beurre. Regardez plutôt cette belle photo ! Moi, cela me fait envie, je dois le reconnaître.

Vous l’imaginez, la bande à Watson voulait empêcher ces salopards d’encore prélever des baleines destinées aux restaurants de Tokyo. Le Japon a violemment protesté, affirmant que trois marins auraient été brûlés aux yeux, ce que démentent les écologistes, qui disent avoir tout filmé. Pour eux, l’acide ne sert qu’à rendre le pont glissant et impraticable pendant des jours, tout en emplissant l’air d’une odeur insupportable. Bon, je vais vous dire : dans le pire des cas, je doute que les effluves de beurre provoquent autant de mal que les harpons à tête explosive lancés sur le corps magnifique des rorquals.

Les ecowarriors – les écoguerriers – sont des frères. Ni plus ni surtout moins. Aux États-Unis, ces activistes sont traqués par le FBI d’une façon qui surprendrait encore un peu en France. Au dernier congrès de l’Association américaine pour l’avancement des sciences, un sociologue visiblement ami des flics a mis en garde contre « l’écoterrorisme ». Lequel serait pire aux États-Unis que la violence d’extrême droite. Ces sociologues-là sont plaisants. Je rappelle pour mémoire l’attentat fasciste perpétré le 19 avril 1995 dans le centre d’Oklahoma City par Timothy McVeigh : 168 morts, dont 19 enfants et un secouriste. Une (courte) paille.

Il n’empêche que le FBI flippe, car les écoguerriers seraient des « gens instruits » – je cite -, ce qui compliquerait leur tâche. Après avoir beaucoup défendu l’usage de la violence en mes jeunes années, je confesse que j’ai changé de point de vue. Je suis devenu un non-violent actif. Ce qui veut dire ? Ce qui veut dire que, tant qu’on ne s’en prend pas aux hommes et à tout ce qui vit, l’opposition à ce monde doit conserver un espace, dût-il déplaire aux policiers des âmes et des corps.

Il y aura bientôt quatorze ans, j’ai rencontré à Fontainebleau un certain Samuel Baunée, qui avait créé là-bas un groupe clandestin appelé Bleau-Combat. Il était un écoguerrier, décidé à bien des actes pour sauver la forêt de Fontainebleau d’une exploitation industrielle. Comme je ne sais pas ce que je peux révéler ici, disons seulement qu’il a combattu, avec une poignée d’autres. Contre les engins. Contre les coupes. Contre les résineux. Contre une vision déchaînée de l’exploitation des arbres, qui forment à mes yeux, avant tout autre considération, une communauté hautement respectable. Je n’espère qu’une chose : que le récit de ce qu’il faut bien appeler du sabotage soit un jour publié. Moi, j’en ai pleuré de rire.

Je me suis constamment amusé avec Samuel, qui est un garçon de grande élévation. Et je lui garde, il le sait, une amitié vive. Son action on ne peut plus illégale a fini par le conduire en prison – mais oui, c’est vrai -, sans qu’il ne renie rien de ce qui fut. Et moi, je continue de m’interroger. Jusqu’où peut-on aller pour défendre une cause aussi essentielle que la vie sur terre ? Jusqu’où ?

PS : Je signale à toutes fins utiles que l’éditeur Gallmeister entreprend d’éditer ou rééditer les livres d’Ed Abbey, l’auteur de l’admirable Désert solitaire (Payot). Abbey fut un vaillant écoguerrier, et son roman Le gang de la clé à molette rapporte en partie des événements réels.

13 réflexions sur « Vive les écoguerriers ! Evviva ! »

  1. oui, il nous faut agir maintenant sinon il sera trop tard. Agir non pas en se prenant pour des héros romantiques ni pour sauver le monde mais pour continuer à se regarder dans une glace et faire connaitre au plus grand nombre la nécessité d’agir. Comment faire pour contacter les personnes dont vous parlez ?

  2. La jurisprudence française, tout du moins, ne s’est-elle pas, depuis peu, orientée vers une notion de crime par pertes économiques induites (avec divers types de méfaits comme vecteurs, surtout des grèves) ?
    Si c’est le cas, tout éco-guerrier à venir sera donc puni, non seulement en fonction de la valeur des dégâts commis dans une action, mais surtout de n’avoir pas laissé détruire la biosphère et donc en fonction des gigantesques profits financiers possibles à jamais renvoyés dans les limbes (snif).
    Peut-être est-ce parce que la mégamachine sent sa fin proche qu’elle tente de crier plus fort.

    P.S. Philippe (CF commentaires d’hier), juste à côté du lien que vous avez donné, il y avait ça aussi :
    http://www.lemonde.fr/europe/article/2008/02/29/espagne-des-fissures-dans-le-beton_1017320_3214.html
    Cependant, il n’y a pas pire sourd que celui qui ne veut rien entendre; le temps des prêches dans le désert n’est pas terminé. Vu la proportion d’imbéciles ne voulant rien savoir, les éco-guerriers restent plus proches de la corde que des louanges.

  3. « Jusqu’où peut-on aller pour défendre une cause aussi essentielle que la vie sur terre ? Jusqu’où ? »
    On peut toujours passer par Lyon, son salon Primevère, sa navette, son accordéon (aphone) et se faire immortel le temps d’un échange avec une silencieuse lectrice.
    Salute !

  4. puisque l’on parle d’ecoguerrier
    je suis en train de lire ‘les racines du ciel ‘
    forcément vous connaissez , mais je ne peux m’empêcher de dire a tout le monde combien j’aime ce romain gary.
    1956, il l’ a écrit ce bouquin en 1956. Quel chemin parcouru depuis…pas forcément dans la bonne direction mais a grande vitesse.
    1956 donc et Gary nous raconte l’histoire ce ce Morel qui est pret a prendre les armes pour défendre les éléphants.
    défendre des animaux !? défendre la beauté de la vie ? défendre la liberté d’exister ? quelle drole d’idée !
    j’aurai envie de vous écrire des lignes et des lignes tellement je trouve ca beau , noble , sage, juste mais je vais me calmer ! Juste une phrase
     » Comment pouvons nous parler de progrés alors que nous détruisons encore autour de nous les plus belles et les plus nobles manifestations de la vie ?  »
    c ‘est promis, moi aussi, avant la fin du livre je prend une arme , de l’acide butyrique ou un stylo mais je passe a la vitesse supérieure ..

  5. je suis vraiment enthousiasmée, les écoguerriers, c’est un titre que je rêverais de porter …
    mais il faut que je combatte à mon échelle …
    je supporte de plus en plus mal d’apprendre ce que l’éducation nationale a sélectionné, notemment en histoire et géographie (je suis en terminale)…
    au lieu de se passionner sur la diversité des climats et de l’histoire de nombreux peuples, on se fixe sur les pays les plus riches, comment pourquoi ils sont riches (la triade et compagnie), étudier plus les infrastrucutres que la biodiversité, je suis blasée … en fait on étudie la géopolitique et l’économie, (alors que je suis en filière littéraire et pas économique et social, qui eux doivent en faire encore plus à foison)
    je ne nie pas que c’est intéressant, mais ce n’est plus de l’histoire géographie si on préfère parler du japon économique (de l’endroit) et pas du tout de l’envers, que notre prof soit contrainte d’évoquer les typhons, tsunamis et la mousson juste en introduction pour l’agriculture et les infrastructures adaptées !
    même si tout ce que j’apprends au lycée me paraît intéressant, je me sens complètement décalée du rythme de ma planète et il faut me rappeler sans cesse, abrutie par le système, que la planète se meurs et que je fais presque rien pour elle…
    mais votre blog m’a redonné du courage et conscience de ça, maintenant je prévois d’enregistrer le documentaire « le monde selon monsanto » et de demander à le faire visionner au lycée, le problème serait l’horaire puisque il dure plus d’une heure.
    moi aussi je veux être une écoguerrière et défendre la vie de ma vie !

  6. Bon alors c’est pour quand l’élevage intensif de chenilles d’helicoverpa zea à balancer dans le maïs OGM, nom de diou? Faut penser aussi à la lutte intégrée,c’est de la bonne pratique agronomique.Pis c’est cent pour cent naturel, un peu comme l’acide butyrique.

  7. moi qui parlait de passer a la vitesse supérieur …
    c est drole parfois les coïncidences de la vie
    je passe les détails mais ce soir j ai fais partie d’un commando trés restreint pour sauver un chien vivant sur un balcon
    (1er étage)
    2m² carré maxi, en plein vent, pluie et froid, dormant sur un bout de carton au milieu de ses défécations …
    je vous passe les détails des discussion de la SPA avec le propriétaire qui se revendiquait maitre chien, de l’escalade, du chien qui s’est laissé attraper et porter, trop content trop confiant qu’il était … bref une petite histoire sur une vie de chien qui est pour l’instant en de meilleur main et qui j’espère trouvera un homme digne de ce nom.
    tout ca pour dire que que c’était pas une baleine, même pas un animal sauvage, juste un chien mais que ca fais vraiment du bien
    nous avons bien rigolé, nous appelant ecowarrior, trop fiers de nous, nous rêvant libérateurs des animaux de laboratoire… je vais bien dormir
    j avais vraiment envie de le raconter
    ps : un jeune rodvailler affectueux cherche un gentil maitre sur montpellier

  8. Écoguerrier en formation cherche écoguerrière débutante ou expérimentée pour projets communs et plus si affinités.
    RdV ce soir près centrale nucléaire.
    😉

  9. La suite du « gang de la clef à molette » de Edward abbey est sorti 2007 en traduction française sous le titre « Le retour du gang de la clef à molette », toujours chez Gallmeister.
    Bonne lecture à tous.

  10. Je me demande moi aussi jusqu’où il faudrait aller pour sauver n’importe quelle maillon de cette grande chaîne de la vie dont nous faisons partie.
    Pour ma part, dans l’état actuel des choses, il s’agit tout simplement d’une guerre ouverte contre les destructeurs de la planète.
    Je me suis souvent demandé si le l’harponneur était un père de famille qui pensait à l’avenir de ses enfants. Tout comme ceux qui tronçonnent, où plutôt, utilisent des machines de destructions massives contre les bois de la forêt amazonienne.
    Quant aux japonnais, je n’en parlerai même pas…
    Bref, dans une guerre, il n’y a que deux camps.
    En outre, ici, celui des bourreaux de dame nature qui nous a nourri jusqu’ici.
    Ou, celui de ceux qui respectent cette dernière de tout ce qu’ils lui ont pris et qui ont envie que ceux des générations à venir en profitent aussi.
    A vous de choisir.

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