Ce monde que j’abhorre

 

Il y a les nouvelles insignifiantes du monde, celles qui dominent du matin au soir. Celles qu’on entend et qu’on voit, celles que l’on lit. Un petite mémé est morte d’une infection à la listeria dans le Nord-Pas-de-Calais. Une pauvre gosse a été tuée, éventuellement martyrisée, à Romorantin. Un avion s’est crashé dans les Alpes. Ces faits-divers sans aucun intérêt, au-delà des familles, et quelle qu’en soit la charge dramatique, saturent l’espace public. Jusques et y compris dans le domaine des livres et de la culture. Ne loue-t-on pas ces jours-ci Régis Debray pour son énième livre que personne ne lira jamais ?

Or il existe des nouvelles autrement fracassantes. On apprend ainsi que si les humains consommaient de la même façon que nous, il faudrait 2,9 planètes pour satisfaire les appétits de tous (ici). Je gage que l’on peut passer des saisons entières à réfléchir sur le sens d’une information à peu près documentée. Moi, j’en resterai à quelques commentaires. D’évidence, TOUS les propos politiques et moraux en deviennent ipso facto illégitimes. N’avons-nous pas – nos ancêtres proches – rêvé l’universalité des valeurs morales ? 1789, avec sa Déclaration universelle des droits de l’homme, c’était exactement cela. L’affirmation, l’assurance que tous les hommes de cette petite Terre sont égaux, et qu’il faut donc partager en frères ce qui existe.

Pardon, mais le programme n’a pas été tenu. Nous sommes des goinfres irrépressibles. Des monstres qui aimeraient tant passer pour de braves gens. Seulement, nous préférons de loin saisir tant qu’il est temps ce qu’on peut encore arracher pendant quelques années aux écosystèmes. Car pour le reste, tous aux canots du Titanic, et vogue la galère.

Si nous étions sérieux, il va de soi que nous n’accorderions plus aucun intérêt aux vaticinations de notre monde égotiste. Je l’ai déjà écrit trente fois ici : je ne vote pas, et je dois reconnaître que j’en suis fier. Car ce monde atroce, qui préfère parfois évoquer la crise démographique – réelle – avant son écrasante responsabilité dans la destruction du vivant, ce monde est détestable. Et je le déteste. Et je l’abhorre. Et j’aurai rêvé toute ma vie sa pleine et entière destruction.

14 réflexions sur « Ce monde que j’abhorre »

  1. L’enfer decrit par deux « geek »:

    https://www.les-crises.fr/la-maison-qui-ma-espionne-par-kashmir-hill-et-surya-mattu/

    (la traduction est parfois approximative, on peut lire l’original americain)

    Abhorent-ils, eux aussi, ce monde auquel ils travaillent et duquel ils tirent vraisemblablement leur soupe quotidienne? Question etrange qui me concerne aussi, et surement d’autres parmi nous!

    Comment faire? Aimer ce qui, dans ce monde, le merite. Voler des forces au systeme et les donner a ce qui les merite. Et viser juste, pas facile…

  2. Hélas, je crains que les décisionnaires n’aient pas prévu de canots pour tout le monde…
    Je citerai Hubert Reeves : « la terre n’est pas en danger, c’est l’humanité qui l’est ».
    Mais peut-on encore parler d’humanité pour notre « civilisation » ?
    Vous avez jusqu’à la fin du monde, enfin…du nôtre.

  3. Vous dites : « nous sommes des goinfres ».
    La plupart des gens vivent comme l’époque leur commande.
    Tant que la survie de la société passe par la consommation et la croissance, je ne vois pas pourquoi ça changerait.
    Ca changera uniquement quand les conditions de croissance n’existeront plus.

    Vous parlez de moralité mais pour vous un gamin qui se fait martyriser n’a aucun intérêt donc vous êtes plutôt mal placé en matière de moralité.

    J’ai du mal à imaginer que l’humanité puisse être différente étant donné la liberté immense que chaque être humain a. Par exemple la violence est proportionnelle à la liberté. Si on restreignait fortement la liberté, l’humanité pourrait sembler plus morale mais serait-ce préférable et durable ?

    Le gros problème à mon avis est l’absence de démocratie. L’humanité peut aller dans toutes les directions à condition que les choix soient assumés par la majorité ce qui n’est pas le cas actuellement.

    1. Groumpf,

      Ce serait mieux de me lire que de seulement vous en prendre à moi en sortant mes propos de leur gangue pour mieux me disqualifier. Si j’ai écrit « sans intérêt », c’est en ajoutant « au-delà des familles ». J’ai voulu signifier, et cela je l’assume, que de tels faits divers ne DEVRAIENT pas saturer l’espace public, car ils EMPÊCHENT de parler du reste. Mais pensez donc ce que vous voulez.

      Fabrice Nicolino

      1. Je ne suis pas d’accord pour dire que les faits divers (en fait à partir d’une certaine quantité cela devient des faits de société) saturent l’actualité. C’est le cas uniquement sur les sites spécialisés ou dans les émissions spécialisées.
        Par exemple cela ne m’a pas empêché de lire au sujet des hécatombes d’insectes, d’oiseaux et d’abeilles pour prendre un domaine qui vous est cher, et je suis loin d’être un spécialiste.
        Par ailleurs, je trouve que les faits divers ont le mérite de faire prendre conscience de la diversité des situations et des comportements hors de notre quotidien.
        Mais pour moi tout revient au problème démocratique. Qui décide que les faits divers sont plus importants que la crise écologique ?
        Actuellement ce sont les milliardaires qui possèdent les media. En passant : ces mêmes milliardaires qui ont fait élire Macron.
        La liberté éditoriale des media est un problème démocratique.

  4. Bonjour,
    Si, je crois que les faits divers sordides touchent beaucoup plus loin que les familles de victimes, surtout lorsqu’il s’agit d’enfants, car malgré tout, il reste quelques personnes humaines dans ce monde dégueulasse…
    Il faut en parler, même si des journaleux sans scrupules se comportent parfois comme des charognes… Par contre, le bouquin d’un Debré, c’est plus qu’inutile.

    Ce qui m’horripile le plus, c’est qu’on ne puisse ouvrir un journal sans voir les gueules hideuses des politiques, lire leurs dernières phrases débiles, leurs derniers tweets -je déteste les réseaux sociaux-, et pareil pour certains pipoles milliardaires, leurs dernières débilités, leurs derniers procès en diffamation, pour gagner toujours plus, alors que des gens beaucoup plus simples n’ont même pas droit à une justice tout court… Que c’est vil..!
    Personnellement, je ne me porterais pas plus mal si ces immondes personnages n’envahissaient pas les unes !

  5. Juste une petite remarque : vous dites « Nous…nous…nous »…
    Qui est ce « nous » ? Les Français, les consommateurs, tout le monde ?
    Si ce « nous » comprend une majorité, il y a aussi ceux qui vivent très sobrement sans être les plus malheureux du globe.
    Pour ma part, et sans vouloir me vanter, j’essaie de réduire au minimum les consommations les plus polluantes, même si on veut nous imposer le plastoc par tous moyens, quitte à boycotter certains produits que l’on peut aussi fabriquer soi-même.
    Je crois que si chacun avait mon impact écologique, ça ferait baisser largement la moyenne pour toute la France.

    Dans mon villages, des gens qui se goinfrent sûrement comme des porcs sont tellement stupides, qu’ils ne sont même pas capables de faire le tri pour les poubelles, et ce n’est pas faute d’avoir été informés… ils jettent n’importe quoi dans n’importe quel container; c’est immonde; ces salauds ne pigent pas les bases les plus élémentaires du savoir vivre sur Terre, alors que si on explique le tri à un jeune enfant, dès qu’il sait marcher, il sera capable de différencier ce qui va au compost, recyclage ou autre, sans se tromper. C’est juste une question d’éducation qui manquent à ces porcs. on leur a appris à consommer, à se bâfrer comme des égoïstes, à idolâtrer le fric et ceux qui en possèdent, et à mépriser les mauvais consommateurs ou les pauvres qui ne font rien pour LA CRRRRROISSANCE…! :-((

    Et pour la deuxième ligne du dernier paragraphe : moi non plus ! 😉

    1. L’horreur, j’ai mis « mon village » et « manque », au pluriel, j’ai vu double; désolée, merci de corriger…

  6. Merci Fabrice,

    « Ce monde est détestable. Et je le déteste. Et je l’abhorre. Et j’aurai rêvé toute ma vie sa pleine et entière destruction. »

    Hein? T’es pas sérieux là! Et tes petits, tu y as pensé? Tous les petits? Et tous ceuxcelles de bonnes volontés qui font leurs possibles pour préserver la planète? Et tant d’autres encore.

    Tout comme toi, je n’aime pas la société telle qu’elle a été créée. Le monde n’y est pour rien, parce que ce n’est qu’un costume impropre, un maquillage déloyal, qui lui à été imposé, de plein gré ou non, ruse et manipulation oblige. Il suffit de comprendre qui est derrière cette modification, cette création, et cela devient plus clair.

    N’as tu pas tilté sur le fait que le mot monde donne en anagramme demon? C’est capillotracté, tu peux en rire, tout en sachant que dans la nature les chiffres font loi (Suite de Fibonacci ). Tout étant mathématique, des zélés obscures s’amusent afin de nous garder corps et surtout âmes dans la matrice. En sortir relève de l’utopie. Il n’y a qu’un seul chemin, que tu ne peux que trouver seul.

    Je te mettrais bien un lien sérieux en rapport avec le décryptage de la matrice, tout en sachant que de peut- être « Haut potentiel », je pourrais passer a tes yeux, direct a Hosto Psy. Et pourtant ……. 🙂

    Tu voeux le voir?

    Bisous, gros nounours, bien à vous toustes,

  7. Il m’arrive également d’être hyper-pessimiste quand je vois -parfois car à présent je les évite- les nouvelles affligeantes dans les médias…
    il m’arrive également de souhaiter la fin de l’humanité pour ce qu’elle a fait à son entourage, à son support (la terre), à elle-même…
    mais n’est-ce pas non plus un peu ce qui est voulu, afin de ne plus lutter ? et laisser les décideurs décider ?
    je ne sais pas quoi faire pour ma part pour changer les choses, à part faire mon colibri et essayer d’enseigner la même chose à mes enfants… la Terre, elle, j’espère, s’en sortira ; peut-être pas les abeilles hélas qu’on ne voit carrément plus dans les jardins (j’ai demandé partout et j’ai la même réponse à peu de choses près), peut-être pas les espèces les plus faibles puisqu’on leur a supprimé leur espace vital… mais le monde tournera sans nous, et voilà.
    Ce qui me désespère le plus, c’est d’avoir fait des enfants pour leur donner un monde pareil et dans lequel il va falloir qu’ils se dépatouillent sans le bonheur d’avoir connu ce qu’on a connu…
    Ce qui me maintient dans l’espoir, quand même, c’est qu’il y a partout des êtres humains qui eux se débattent afin de sauver ce qui mérite de l’être ! le grain de sable…

    1. Nadeige,
      tout à fait d´accord avec vous.
      Cela me désespère aussi d´avoir mis une enfant au monde, qui elle-même est devenue maman de deux petits. Comment vivront-ils, que vont-ils affronter ? Je suis saisie d´horreur rien que d´imaginer ce qu´ils vont devoir gérer, eux qui sont mon plus grand bonheur. Que faisons-nous subir à nos enfants ? Je me dis parfois que les animaux non humains nous sont bien supérieurs en ce qu´ils mettent toutes les chances de leur côté, dans la mesure de leurs moyens, pour élever leurs petits et leur donner un bon départ dans la vie. Nous, nous déposons nos enfants sur une gigantesque décharge à ciel ouvert.
      Comme vous, je me raccroche en pensant à ce qu´il y a de meilleur dans notre espèce. Mais je m´attends toujours au pire. Et je crois de moins en moins à un éveil généralisé des consciences. L´être humain est bien trop pétri d´avidité utilitariste pour vouloir renoncer à tirer parti et profit de tout.

  8. Parfois, j’en ai tellement raz le bol du carnage, que je me laisse imaginer comment évoluerait tel ou tel endroit si les humains avaient totalement disparus de la surface du globe emportant avec eux leur agitation, leurs bruits insupportables, leurs destructions…
    D’abord chez moi, qui redeviendrait une grande lande, puis la petite route devant chez moi, avec le bitume qui craquerait sous la poussée des racines, et la ferme de mon voisin, sans doute démontée petit bout par petit bout par le souffle des tempêtes, le centre du village, recouvert par les ronces et les histoires que se racontent les hirondelles et les chouettes, plus loin, partout, les villes grouillantes de mille bestioles, les forêts grandissantes, les marais poussés toujours plus loin par l’océan, les plages désertes enfin sereinement parcourues par les poussins de gravelots a collier interrompu et juste le chant du vent pour englober le tout.
    Ça repose quelques instants…

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