Pourquoi la France est-elle à ce point-là de droite ?

Je viens de lire un papier de l’hebdo libéral Le Point. C’est pas bien ? Aucun journal ne me convient, aucun ne me convainc, aucun ne provoque en moi l’une de ces étincelles qui, autrefois, révolutionnaient mon quotidien. J’apprenais qu’un coup d’État – juillet 1971 – avait eu lieu au Soudan, et j’étais triste pour la journée. Ou qu’un commando tupamaro, s’était emparé d’une ville entière d’Uruguay, avant de repartir sans une anicroche, et j’en étais heureux.

C’est le passé. Le Point, donc. Un papier comme tant d’autres de Sophie Coignard, qui note : « Toutes les enquêtes le prouvent, la France est à droite comme jamais dans son histoire ». Est-ce vrai ? Évidemment ! La Nupes, dont je rappelle qu’elle rassemble toute la gauche traditionnelle, n’aura obtenu qu’environ 12% des Français en âge de voter. Soit 88% qui n’ont pas choisi ses candidats. Si cela vous embête, trop, admettons qu’un quart des votants au premier tour des législatives ont voté pour la gauche. Ça change quelque chose ?

Pourquoi ? Oui, pourquoi cette embardée à droite, et à l’extrême-droite ? Il n’existe que des hypothèses, et le plus que probable est que de multiples phénomènes combinés expliquent tant bien que mal ce qui se passe sous nos yeux. On me permettra d’ajouter mon grain de sel. Je crois profondément que l’opinion française est travaillée comme jamais par l’angoisse. Une angoisse aussi diffuse que multiforme, dont je serais bien en peine de définir le cadre et ses limites.

Il n’empêche. Les générations d’avant étaient installées – de gré ou de force – et maintenues dans une société de classe. Avant la guerre en tout cas, peu de gosses d’ouvriers ou de paysans échappaient à un sort promis par celui de leurs parents. Les Trente Glorieuses – disons à partir de 1950 – ont créé un tourbillon social inédit. Le fameux ascenseur social a permis à des centaines de milliers de gosses pauvres de radicalement changer de direction. De devenir ce que je vomissais, moi, dans mon jeune temps de fils de prolo. C’est-à-dire des cadres de la société que j’appelais bourgeoise. Des collabos de la domination.

La crise a en bonne part ruiné l’édifice. Ils sont bien rares, les parents qui rêvent encore d’un meilleur avenir pour leurs enfants. Vous savez quand a commencé le chômage de masse ? En 1974, à l’époque où un Giscard d’Estaing président préférait parler d’un simple trou d’air. La disparition de millions d’emplois et l’installation de tant de gens dans une sorte de retraite plus ou moins définitive, ont rompu les os de notre société. Aujourd’hui, au fil des décennies, se sont ajoutées des questions apparemment sans solution : l’insécurité, le djihadisme, la numérisation du monde, l’immigration.

L’insécurité. Ce n’est pas une invention de la droite. Dans l’immeuble HLM de mon enfance, la porte restait ouverte jour et nuit toute l’année. Qui diable aurait pensé fermer ? Et celle qui donnait sur la cour, puis la rue, n’avait de toute façon pas de clé. Ce n’est pas une expérience isolée. Tous les gens d’un certain âge le savent. Le sentiment d’insécurité est aussi une grande insécurité. Qu’il soit fondé sur le roc ou plus fragile n’y change rien. Quand on ferme sa porte, on referme plus d’une serrure mentale. Juste un mot sur le terrorisme djihadiste, que des médias irresponsables ont contribué à mettre en scène. Non pas qu’il serait inexistant. Mais sa kalachnikov passe désormais avant tout autre information. C’est du délire. Mais ça compte dans la déréliction de tant d’esprits.

La numérisation du monde est une folie globale, mais ce n’est pas de ça que je souhaite parler. Non, je souhaite écrire que ce phénomène fulgurant laisse sur les bords de sa route des millions de naufragés. Des millions en France. Qui ne savent pas. Ne comprennent pas. Ou mal. Et qui n’osent en parler tant règne un discours univoque sur le “progrès” si manifeste qu’est Internet. Ils souffrent sans disposer du moindre relais d’opinion.

L’immigration. Faut-il rappeler que je suis depuis toujours un antiraciste incandescent ? Cela n’interdit pas d’écrire que l’immigration sème dans l’esprit de millions de Français un sentiment de peur, voire d’angoisse, voire de panique. Nul n’avait rien prévu quand des patrons sont allés faire leur marché de main-d’œuvre en Algérie, au Maroc, en Tunisie au début des années 60. Nul n’a rien prévu depuis. Et par exemple le fait évident que la numérisation a fait disparaître tant d’emplois peu qualifiés. Occupés jadis par les laissés pour compte. Une partie de la jeunesse immigrée – même si elle est parfois française – reste seule avec la drogue et ce fantasme de la richesse immédiate, alimentée en boucle par la télé, les réseaux sociaux et le net.

Toutes ces questions si mal appréhendées se mélangent, Dieu sait. Et font des ravages, Dieu sait. Mais il faut y ajouter désormais ce qu’on nomme l’éco-anxiété. Je rappelle un sondage – paru dans la revue The Lancet Planetary Health, une garantie – portant sur les jeunes de 10 pays du monde : Australie, Brésil, Etats-Unis, Finlande, France, Inde, Nigeria, Philippines, Portugal et Royaume-Uni. Eh bien, voici le résultat : « Les trois quarts des 16-25 ans dans dix pays, du Nord comme du Sud, jugent le futur « effrayant ». Vous avez bien lu : effrayant. Au Nord comme au Sud. Avant tout face à cette crise climatique qui ne fait que commencer.

Mon hypothèse principale est que cette terreur-là, ajoutée aux autres, travaille comme jamais la psyché humaine. Et qu’elle produit entre autres un désir d’ordre, ou au moins de sécurité. La droite est dans ce domaine imbattable, en tout cas pour le moment. Bien sûr, elle est incapable de régler quelque question que ce soit, mais elle peut au moins faire semblant. La gauche reste aux oubliettes, dans ce domaine comme dans tant d’autres.

Où veux-je en venir ? À cette antienne : il faut inventer des formes politiques nouvelles et abandonner sans remords toutes les autres. Mélenchon et ses amis-concurrents des Verts sont de très vielles personnes, à grand-peine peinturlurées. Ils me font penser, mutatis mutandis aux groupes d’extrême-gauche de l’après-68, qui ont totalement loupé la critique si féconde pourtant de la production d’objets, de leur consommation aliénée, du fric. Ils en tenaient pour des “héros” à peine sortis de leurs catafalques : Lénine, Trotski, Mao, Guevara.

C’est une règle sociale que bien des problèmes pourtant urgents soient considérés avec les yeux du passé. C’est ce qui se passe selon moi avec la Nupes, mais on n’est pas obligé de me croire. En tout cas, si l’on veut espérer faire bouger la société française dans la bonne direction – la société réelle, pas son fantôme mélenchonnien -, eh bien, cherchons ensemble comment l’assurer et la rassurer. Je sais à quel point notre temps est tragique, mais justement. Traçons des lignes, projetons-nous dans un avenir humain, malgré l’avancée apparemment irrésistible de la barbarie. Imaginons. Créons. Ouvrons sur une autre aventure, avec pour viatique et seul viatique ces deux mots : espoir et coopération.

31 réflexions sur « Pourquoi la France est-elle à ce point-là de droite ? »

  1. Bonjour M. NICOLINO,
    Droite – Gauche, ça ne veut plus rien dire !
    La seule distinction à faire ce serait ceux qui sont « pro » ou « anti » capitalisme économique néolibéral mondialisé or, ils sont tous, tous, pour la continuation de cette idéologie mortifère cause de covid, cancers, casse climatique, massacre de la biodiversité et tous les cygnes noirs qui désormais pullulent ! D’où l’absence réelle de choix – d’où l’abstention massive !

    1. Politiciens – Syndicats, tous dans le même panier !
      A force de se côtoyer ils finissent tous par se ressembler !

      Députés – Sénateurs – Ministres – MEDEF – dirigeants des confédérations syndicales – dans la majorité, l’opposition, la droite, la gauche, le centre et les extrêmes, tous, absolument tous sont accros au système, se délectent du capitalisme économique ultralibéral mondialisé quoi qu’ils en disent, ont le même langage, le même habillement, c’est pourquoi ce n’est pas près de changer.
      Les uns s’en gavent, en jouissent tellement, même quand ils font semblant de s’offusquer de telle ou telle mesure, l’accompagnent confortablement comme la plupart des syndicats, mais ce ne sont que des opérations politico-politiciennes, à finalité électoraliste, de pouvoir, de domination, d’autres le subissent notamment la classe populaire qui elle aussi se soulève parfois contre telle ou telle attaque de ses droits sociaux, mais jamais, aucun d’eux ne condamne réellement cette idéologie qui les opprime, qui produit exactement ce qu’elle est sensée faire c’est-à-dire l’exploitation d’une très grande majorité condamnée à vivre aux minimas sociaux par une extrême minorité de richissimes et de puissants, l’oligarchie qui règne sur le monde.
      Les conséquences sont pourtant gravissimes, d’une violence inouïe, criminelles pourraient-on dire par les dégâts et conséquences sur le climat, le massacre de la biodiversité, les guerres, la finitude de la Terre, et le devenir de l’espèce humaine elle-même, tous les signes noirs sont là mais c’est une couleur qu’ils ne connaissent pas, rien n’y fait, tous dans le déni, tous dans l’incantation, aucun homme providentiel, aucun visionnaire, continuons toujours dans le même sens, toujours plus vite, toujours plus fort, toujours avec le même novlanguer mensonger, toujours les mêmes carabistouilles, faut-il que nous soyons à ce point mauvais pour les uns et heureux d’être serf pour les autres?
      Rien ne changera jamais ainsi, la plupart des gens sont malheureux mais contents de l’être dans un monde dominé par les jeux de hasard, la téléidioty, le numérique, l’IA, personne ne sait où l’on va mais on y va, aucun ne veut entendre ni prononcer de mots ou idées différentes de la ligne officielle assénée par les grands médias, considérés comme négatifs, arriérés, pessimistes, collapsologues, rien ne doit venir perturber l’économie, la mondialisation, la libéralisation, la dérégulation, la casse sociale, vive le PIB, la croissance perpétuelle, la science et la technique le progrès, le marché.
      Il faut être moderne, dans le nouveau monde, optimiste malgré « les crises » même si tout cela ne veut absolument rien dire, ne sont que des éléments de langage pour noyer le poisson, du bourrage de crâne, mais tout le monde s’en nourrit, ne le remet en cause.
      Comme des prophètes, ils nous disent quoi dire, quoi penser, quoi faire, et nous promettent un avenir exponentiel, illimité, inépuisable, radieux, que rien ne viendra jamais troubler, l’immortalité.
      Ainsi le monde de demain ne sera plus celui d’hier, vous devrez changer de multiples fois de métiers, accepter n’importe quoi, et vous payer vous-mêmes votre retraite si vous le pouvez en travaillant jusqu’à la mort car travailler est un plaisir même lorsque la plupart des gens seront au chômage, c’est le cantique et la pensée unique des dirigeants sortis du même moule qui se disent même « trop intelligents » pour être compris.
      Si ce système était une secte, on pourrait dire qu’elle a formidablement réussi, entrainant le monde entier derrière elle, mais c’est le baiser du diable qu’elle nous a donné.
      Les qualificatifs de réforme, de justice, d’égalité, simplicité, universel, sont complètement dévoyés et se traduisent systématiquement par du négatif pour la population, la casse et le démantèlement des droits et protections sociales devenus des charges insupportables pour les entreprises et les gouvernants.
      Les intégristes du capitalisme économique ultralibéral et tous ses chiens de garde nous leurrent en permanence ; Les empoisonneurs (qui « soignent » les plantes et les animaux) ont le droit de nous empoisonner car l’argent est roi – les lobbys font les Lois – Les ténors du barreau épaulent la bourgeoisie – Ils nous inventent une « écologie capitaliste » qui n’a rien d’écologiste avec leur soi-disant neutralité carbone et compensations qui ne compensent rien, avec leur « neige de culture », la taxe carbone un droit de polluer, c’est la légalisation de la pollution sous toutes ses formes, comme est légalisée la fraude fiscale à partir de l’optimisation fiscale et des paradis fiscaux.
      Pas plus qu’il n’y a d’adaptation à la crise environnementale ni de transition écologique, c’est de la pipe.
      On ne veut plus de fonctionnaires mais dans le même temps les entreprises, le monde agricole sont tellement subventionnés, exemptés, optimisés, niches fiscales, sinistrés permanents qu’ils deviennent quasiment une nouvelle catégorie de super fonctionnaires qui ne porte pas son nom (privatisation des profits – socialisation des pertes).
      Après avoir organisé le déséquilibre des retraites par le chômage de masse et le numérique, ils prétextent qu’il faut « réformer » au motif que les régimes spéciaux (SNCF – RATP – EDF – fonctionnaires…) seraient des nantis qu’il faut supprimer, pour en réalité casser le régime général par répartition, ouvrir la porte à l’assurance privée, tirer tout le monde vers le bas, tellement nébuleux que même le gouvernement est incapable de démontrer quoi que ce soit à l’appui de ses affirmations ! C’est le capitalisme économique ultralibéral dans toute son horreur.
      Le narcissisme des petites différences entre les pauvres et les modestes est utilisé pour dresser les uns contre les autres mais par contre il est interdit de parler, critiquer ou remettre en cause les retraites chapeau, les stock-options, la poignée de milliardaires qui possèdent autant que tous les autres réunis.
      L’égalité de traitement, la qualité de vie, l’Etat protecteur, l’écologie, la finitude de la Terre ils s’en moquent !
      Economisez, plaçez votre argent en actions, en assurance vie, livret A, les purges du système financier et la dette se paieront sur les économies des pauvres, des modestes, baisés nous seront toujours baisés sous prétexte de « crises » qui ne sont en réalité que le fonctionnement normal du capitalisme économique ultralibéral mondialisé.
      Ce système est bon pour une extrême minorité, il est mauvais pour tous les autres et la planète Terre.
      Il faut vivre pour l’argent, aimer l’argent, adorer l’argent, croire à l’argent, se nourrir d’argent alors que dans ce système peut-être 80% des gens seront à terme aux minimas sociaux toute leur vie ! C’est le progrès ! Sur une Terre ravagée, polluée, recouverte d’ordures, artificialisée, devenue inhospitalière pour l’ensemble du vivant.
      Et oui, vous savez tout cela mais on ne vous entend jamais le dire politiciens, syndicats, journalistes et tous les autres, ni rien faire pour nous en extirper! Car vous en jouissez tellement !
      Mais vous n’êtes pas obligés de me croire. (décembre 2019)
      —————————

  2. Cher Fabrice,
    Quelle belle question ! Je me suis souvent interrogée sur la droitisation des pauvres au travers de celle de mes parents. Issus d’un milieu très modeste et rural, ce sont les études qui leur ont permis, lentement mais sûrement, de prendre l’ascenseur social avec, pour mon père, un poste de cadre à responsabilité à la CPAM, quand celle-ci était en plein déploiement de cette belle protection sociale qu’est l’accès à la santé pour tous.
    Mon père a fini par avoir des liens d’amitié avec des responsables d’entreprises, des personnes plus aisées, à devenir chiraquien, à s’abonner au Point. Ma normalité à moi, qui suis donc née dans une famille de « droite », était donc d’être de droite. Il est arrivé le moment où mon esprit critique s’est aiguisé et que je me suis sérieusement interrogée sur le fait que mon père soutenait des mesures, des idées, qui ne nous aidaient pas nous, ma famille, dans notre petite vie qui s’embourgeoisait effectivement mais pas dans des proportions délirantes.
    Le fait de gagner un peu plus d’argent pouvait permettre l’accès à un certain confort, ce qui était bien. Mais il arrive un moment, à mon sens, où l’acquisition de biens devient du surconfort, du non-essentiel. Cela va du lit plus grand, de la télé plus grande, plus plate, puis de la chambre individuelle pour chaque enfant, de la voiture plus grosse, de la 2è et 3è télé, 2è voiture, etc… Avec tout cela, imaginant -peut-être !- créer de l’envie chez les autres, finies les portes ouvertes, les clés laissées sur le tableau de bord de la voiture, il a fallu poser des serrures et mettre une alarme.

    Et puis, je ne comprenais pas non plus, en feuilletant le Point, comment le fond des articles pouvait susciter un intérêt réel pour les problèmes et idéaux de mon père, quand ceux-ci parlent « de problèmes de riches » que nous n’avions pas. Le tout avec des publicités où nous n’étions pas non plus le public-cible (bijoux, fringues, voitures de luxe, lieux de vacances etc.).
    Plus tard, j’ai commencé à questionner mon père sur son intérêt pour le Point et l’incohérence que je voyais par rapport à son niveau de vie (qui n’était plus le mien maintenant, en tant qu’adulte indépendante). Quand il ne s’énerve pas à tout bout de champ (ma gauchisation et ma révolte sont pour lui une erreur éducative), j’arrive quand même à saisir que notre société baigne dans une envie pour les biens de consommations. Posséder des objets, s’afficher avec, défendre des idées qui permettront d’acheter plus, plus beaux, plus chers, de changer plus souvent de voitures… Avec cette idée, aussi, de « se mettre à l’abri », de la misère, des conditions de vie plutôt dures. Ce sont mes parents, je ne peux pas leur reprocher de ne plus avoir à restreindre l’accès à l’eau pour un bain (hebdomadaire !) chaud, le chauffage dans une seule pièce,… Mais il s’est passé quelque chose (pardon, je ne suis pas autant érudite que vous au point de fournir une analyse sociologique fine de la droitisation des pauvres, mais Thomas Frank a écrit un livre sur le sujet qui est sur ma table de nuit) dans une pensée sociale majoritaire tendant à centrer les problèmes sur l’individu ou un cercle restreint (la famille) et non plus sur la collectivité, à vouloir être « de l’autre côté » et penser à soi d’abord. Sauver sa peau et se fondre dans la masse pour vivre en paix.
    Il y a aussi une auto-alimentation du système : en créant l’envie pour l’accès à tout un nombre de « trucs de riches », sans jamais pouvoir y parvenir (il faudrait gagner 100 à 1000 fois plus !), j’ai l’impression qu’ils vivent dans l’illusion que voter toujours à droite (sans remise en question possible) les met dans la classe sociale qu’ils envient. Et ça, c’est peut-être déjà faire partie – un peu- d’elle. Et en bons chrétiens, ils pardonnent sûrement à cette classe sociale-là qu’elle ne le leur rende pas si bien. Ils acceptent alors d’être dans la classe moyenne qui trinque peut-être le plus, mais qui a tout pour être heureuse (avec les besoins primaires et secondaires assouvis, j’entends).

    Une fois quand même, mon père m’a montré le fascicule « spécial Noël » du Point, où il n’y avait pas d’idées cadeaux à moins de 2500€. Il était -enfin- choqué. Je lui ai proposé de se désabonner « tu vois bien papa, que ce journal ne te correspond pas, par essence-même, à ce que tu es, d’où tu viens… Je veux bien, sinon, que tu m’offres cette bague, si tu veux assumer pleinement ton abonnement 😉 ». J’ai bien failli réussir, puis il m’a dit qu’il n’allait pas trouver d’autre journal qui lui correspondrait et qu’au final, non non, ce journal lui convenait bien en terme d’idéologie, malgré les pubs.
    Il parait plus facile d’adhérer à la majorité et d’adopter les codes de la classe sociale enviée pour se sentir « comme les autres », c’est-à-dire de droite. Je pense aussi qu’il est plus facile de gérer un certain nombrilisme qui circonscrit sa vie dans une résolution de problèmes abordables (poser une clim’ quand les étés sont de plus en plus chauds, installer la fibre pour que les téléchargements durent 1 min au lieu de 3, prendre un abonnement à BEIN sports si Canal+ n’a plus les droits…), plutôt que de s’attaquer à des enjeux globaux qui donnent le vertige. On va à la messe pour prier pour ça, c’est largement suffisant.

    Je suis parfois usée de tenter d’éveiller la conscience de mes parents ; je ne prétends pas être dans le juste avec ma vision politique et sociale mais j’en appelle juste à la cohérence. Et puis, je n’ai pas l’impression qu’ils soient si heureux que ça. Mais je sais qu’il y a quand même des ressorts actionnables pour faire changer certaines idées, notamment sur les enjeux collectifs qui doivent être défendus au-delà du nombrilisme confortable. Mes parents vivaient de façon plus communautaire quand ils étaient moins aisés et je pense qu’ils se souviennent de l’amour et l’humanité qui faisaient partie plus profondément de leur quotidien, quand on regarde les vieux albums photos. Ils avaient assurément moins peur de l’autre, de l’étranger, de l’inconnu.
    L’effet inter-générationnel fonctionne aussi. S’il est plus facile de s’énerver contre sa fille étiquetée « intellectuelle gauchiste », le regard que portent leurs petits-enfants sur eux importe. Il m’est arrivé que mon père me balance des arguments (ce que j’appelle des salades) pour justifier un changement de voiture (neuve) tous les 2 ans, et où j’ai pris mon fils pour le planter devant lui en lui disant « vas-y, explique-lui à lui, parce que ton choix le concerne plus que moi ». Et finalement, sa voiture, il ne l’a pas changée.

    Réveillement vôtre,
    Thaïs

    1. Bonjour Thaïs,
      Je suis surpris de votre étonnement, car c’est d’une banalité absolue, ça se passe toujours comme cela !
      Ce n’est qu’une question d’intérêts personnels, de pouvoir et de domination, de fréquentation de gens dits « supérieurs », d’adoption d’un parlé plus « distingué » et de tous les autres apparats tels que la belle villa, la piscine, le SUV, les voyages en avion autour du monde, les sports d’hiver, le CAC40…et faut pas leur parler d’écologie ni de décroissance si vous ne voulez pas vous faire traiter d’écolomich ou de complotiste !
      Ils ne veulent plus savoir d’où ils viennent !
      Nous voulons tous accéder à la catégorie supérieure (rares sont ceux de la classe inférieure qui y arrivent) mais lorsque c’est le cas c’est très souvent chez eux que l’on trouve les pires comportements, les dénégations les plus radicales, les revirements les plus extrêmes !
      C’est comme en politique avec les extrêmes tels le FN ou RN, dès lors qu’il faut en passer par eux pour accéder au pouvoir ils deviennent tout d’un coup tout à fait fréquentables voire recommandables par tous ceux qui les vouaient auparavant aux gémonies !
      C’est la même chose à l’international, avec ceux qui deviennent des tyrans sanguinaires uniquement lorsqu’ils ne veulent pas signer la feuille de route Américano-Occidentale et vendre leur pays !
      Les notions de bien et de mal, par une espèce aussi nuisible et vénale que la nôtre, relève de la prestidigitation !
      Là où vous m’étonneriez beaucoup, ce serait si vous-même ne répétiez pas la même histoire !
      N’est pas Albert Jacquard qui veut !
      Bien cordialement.

  3. « un avenir meilleur pour ses enfants »… Qu’est-ce que ca veut dire ? Si c’est avoir une voiture ou une maison plus grosse, alors ce reve (qui a toujours ete mensonger comme Thais le decrit si finement) n’est plus de mise. Un ingredient essentiel de ce reve etait le « train de vie » occidental et surtout la mise en scene de sa comparaison avec le train de vie du « Tiers Monde » et la gestion indirecte de ces pays par l’intermediaire de son elite economique en lui vendant (cher) les colifichets du train de vie occidental. Ils lisent non pas le point mais le New York Times et le WSJ et roulent en BMW, mais avec chauffeur…

    Maintenant l’occident comme « bourgeoisie mondiale politiquement organisee » (expression de Rudolf Steiner vers 1920) fait face a la fin de son regne, et le plus dur n’est meme pas la baisse de prosperite economique, toute relative, mais la fin de la credibilite d’un recit qui assurait sa domination politique.

    Moment d’authenticite qui peut etre tres beau. Se desaliener de la fascination des objets, comme dit si bien Fabrice ! Mais se mefier aussi de la fascination pour le logiciel, encore plus alienante (tournant deja pris par le forum economique mondial) !

  4. La nouvelle constitution du Chili avait de quoi faire rêver, plus écolo, plus féministe, plus partageuse …. Elle a été refusée par plus de 60% des votants. Il semble fort possible que les raisons soient en partie celles présentées cet article. On n’en n’a pas encore fini avec le modèle actuel.

    PS que penses-tu des problèmes récents de Paul Watson avec Sea Shepperd USA et global ?

    1. Cher Jean-Gabriel,

      Pour le Chili, j’aimerais mieux comprendre. Ce ne peut être toute l’explication, mais j’ai vu que la question mapuche a joué un rôle dans le rejet de la Constitution, ce qui me rend amer.

      Quant à Watson, il est difficile de juger à distance. J’ai tendance à lui faire confiance. Et je sais que tous les groupements humains stables ont une tendance irrépressible à s’institutionnaliser. Et à perdre de la vigueur, consacrant toujours plus de temps au maintien de la structure qu’au but proclamé. Watson est un cas : il refuse l’assagissement.

      Amitiés,

      Fabrice Nicolino

      1. cher Fabrice
        un grand merci pour ta réponse. Désolé de répondre tard.

        Pour le Chili, la Réaction (je ne sais comment l’appeler autrement) a littéralement investi des sommes gigantesques en communication qui ressemblait beaucoup à de la désinformation, afin que rien ne change.
        Les Mapuches sont caricaturés en terroristes séparatistes et certains ont eu peur que l’Etat leur vole leur maison ou les empêche d’avoir un terrain à la campagne. L’analyse post scrutin a montré que les gens avec le moins de ressources ont voté le plus contre. L’information est vraiment primordial. Certains politiques qui avaient promis une autre négociation en cas de victoire du rejet commence à faire pression pour tout abandonner. Pour rappel, la Constitution actuelle est issue de l’école des Chicago boys et considéré comme la vitrine du néo libéralisme « tout privé pas d’Etat ». La Corée du Nord du modèle ne peut faillir. Espérons que le processus de changement de Constitution continue et apporte un peu d’espoir d’un futur différent.

        Quant à Paul Watson, difficile effectivement de tout connaitre de loin. Ce dont j’ai l’impression, c’est que ressemble à une « greanpeacisation », des chefs veulent assagir le mouvement, le transformer en prestation de service pour la recherche et arrêter de faire des vagues. Certains pays ont viré le fondateur, d’autres le soutiennent. Dans tous les cas, le manuel de l’éco-guerrier reste indémodable. Espérons que les dégâts ne seront pas trop importants.

        Longue vie à Planète Sans Visa et aux défenseurs du vivant !

        Amicalement

        Jean-Gabriel

  5. Bonsoir Fabrice, Christian, Laurent, René (c’est qu’on est nombreux par ici 😉 )
    Je vous remercie pour vos messages et éclairages.
    Sachez que je suis, par essence, en étonnement pour beaucoup de choses et que je compte bien le rester! mon esprit un peu azimuté me positionne souvent à l’extérieur, à regarder un peu ce qui se passe pour tenter de comprendre (je fais de la photo aussi, ce qui va bien avec ça).
    Je n’arrive pas à faire des généralités de ce qui se passe, y compris de la droitisation largement généralisée – j’en conviens-.
    Ce que je voulais simplement partager à travers cette analyse sans prétention, c’est une expérience personnelle, qui, je pense, humanise un peu à travers des microphénomènes, ce qui se passe à l’échelle macro. J’en viens à cela car la généralisation du phénomène empêche parfois, souvent, à mon humble avis, tout espoir de pouvoir faire changer le cours des choses.
    Je suis hyper gênée de parler de masse comme si celle-ci était homogène, sans singularité, sans son propre vécu, ses propres aspirations. De même que je suis assez gênée, Christian, que vous me prédisiez un chemin qui répond, peut-être, à vos prévisions statistiques issues « de la masse » mais qui ne concernent aucunement ma propre singularité : je vous dis ça avec toute ma sincérité et sachez que je n’aime pas les GPS non plus, ou tout autre machin qui prétend me trouver le meilleur itinéraire selon lui 🙂
    Je porte un regard étonné également parce qu’il s’agit de personnes que je connais comme si je les avais faites (mais non, c’est l’inverse, suis-je bête ) et que je sais que ce ne sont pas des personnes banales (je n’aime pas ce mot, pour tout vous dire). J’ai peut-être besoin de comprendre ce qui s’est passé pour saisir pourquoi nous sommes si différents (alors qu’ils m’ont faite, si vous suivez toujours ce que je raconte).
    Honnêtement, je ne souhaite pas atteindre la catégorie sociale supérieure et je savoure la chance de pouvoir l’écrire parce que je ne suis pas tout en bas. Si je regarde en haut, c’est pour regarder le ciel.
    Je ne suis pas d’accord sur le fait que « les gens » oublient d’où ils viennent. Je n’y crois pas une seule seconde. Il suffit de prendre 10 min pour discuter avec n’importe quel inconnu.e et on voit vite ce qui remonte d’essentiel dans une écoute active.
    Je persiste à penser que cela compte quand on a envie d’embarquer avec soi les autres vers un autre chemin qui n’est sur aucune carte ni prédite par aucun modèle statistique.
    Pour ce qui est des objets, je n’ai pas le temps de développer mais je pense qu’il y a peut-être derrière la problématique de la droitisation « la capacité à posséder », plutôt que l’objet en lui-même. Et la propriété (de lieux, de biens, de ressources « naturelles », la Lune! etc).
    Merci pour le conseil lecture de Gramsci.
    Albert Jacquard est une belle évocation. Avant tout, il était lui-même et dans l’action, en cohérence avec ses convictions. Et ça, c’est accessible à chacun et à chacune d’entre nous et ça s’appelle la liberté <3
    Cheminement vôtre,
    Thaïs

  6. vous avez peut-être lu ceci :
     » La protection de la nature n’est pas un hobby d’écolos, c’est le nom de notre rapport au monde. Mais ce n’est pas de la protection et ce n’est pas de la nature. C’est défendre le tissage dynamique des parents qui nous ont faits, qui nous constituent et qui nous maintiennent en vie à chaque instant. Défendre le tissage, indépendamment de ce qui serait utile ou inutile pour nous. Accepter qu’il s’agit de trajectoires en transformation, et défendre en elles les potentiels d’évolution et les dispositifs d’équilibration. Le vivant n’est pas un monde d’objets, c’est la communauté du monde à laquelle on appartient: cela ne peut jamais être dehors, c’est nous qui sommes dedans. Nous sommes le vivant qui se défend ».

    C’est en fin d’ouvrage (Baptiste Morizot « Raviver les braises du vivant » p 186
    Actes Sud 20 € septembre 2020 ) avoir lu ce livre m’a beaucoup changée. J’y ai trouvé bien des fois l’expression de ce que confusément je ressens sans arriver à l’exprimer aussi clairement que l’auteur qui montre que la dualité humain/ nature est une impasse de même qu’un « monisme » qui considèrerait tous les vivants de la même manière de la bactérie à l’éléphant.

    Merci aussi Fabrice pour vos livres qui informent sur des faces cachées de  » l’économie » et que toute personne désirant faire de la politique devrait lire .
    J’en ai lu quatre (« La faim, la bagnole, le blé et nous »bouquin qui avec le dérèglement climatique va retrouver une actualité aiguë , » Pesticides , révélation sur un scandale français… » , »Bidoche »,  » Le crime est presque parfait », sur les SDHI qui sont vraiment des molécules nocives pour tout le vivant justement )

  7. Chers contributeurs, et particulièrement Thaïs et Fabrice, je vous lis, et j’hésite entre l’angélisme ou la poésie pour qualifier vos propositions : créer un mouvement « vivants »? Mais franchement, si les « mouvements » fonctionnaient, dans la société contemporaine, ça se saurait non? Il n’y aura pas d’effet boule de neige. Parce que l’écrasante majorité des esprits ne sont pas d’accord, voire pas du tout d’accord avec le type de vision du monde généralement évoquée ici. Et si on observe un éveil écologique, ici ou là, c’est beaucoup trop lent!! Enfin, la « pensée-colibri » : « moi j’agis, un tout petit rien est déjà bien, etc » rejoint à mon sens l’angélisme… Ou la poésie. C’est beau, c’est bien, je ne dis pas. Il faut essayer, il faut y croire : ok. Mais enfin, vous voyez bien que, malgré une montée de convergence et d’action écologique, c’est réellement trop lent et quasi négligeable devant l’écrasante majorité des esprits absolument pas acquis à la cause. Si on était sincères, pourquoi ne parlerions nous pas de sabotages illégaux, organisés ? Qui bloqueraient enfin, au moins dans un petit pays comme chez nous, « l’appareil de production »? Ah mais! On les trouve où, là, les gens pour le « mouvement »? Et d’ailleurs les trouverait-on, est ce que ça produirait les effets attendus? Quelques exemples analogues puisés dans l’histoire montreraient facilement que non. Que personne ne se méprenne : je ne cherche pas à faire l’apologie de casses illégales, qui déborderaient d’ailleurs sans doute inévitablement vers de violences. Mais je me creuse la cervelle, et pour l’heure, sans succès. Ce qu’on peut faire, même si c’est peu, il faut le faire, le tenter. Oui… Mais croyez-vous franchement qu’un mouvement (de plus) verrait comme par miracle se lever les foules? Croyez-vous vraiment qu’un mouvement de plus) est une pierre à l’édifice ? Allons… Mais c’est beaucoup trop lent, trop inertiel par rapport au pb qui nous occupe! Que faire sinon? Occuper tous les grands canaux de communication (mais comment, sans recours à la force? Pr le nombre?) et remplacer les heures d’infos, de divertissements et de pubs par des messages longs, édifiants, choquants. A zut, ça ressemble aux méthodes de propagande totalitaire. Ah, qu’elle rage douce on a au coeur, et comme on aimerait enfin savoir agir sans cette bête impression de PISSER DANS UN VIOLON dès qu’on tente qq chose!!:)

    1. Cher Patrick,

      Il n’y a pourtant qu’une voie, celle d’un surgissement de la société. C’est impossible ? Alors mourons gaiement. Je vous rappelle que j’ai créé en septembre 2018, sans un sou, avec le soutien au départ de trois personnes, le mouvement des Coquelicots. Qui, avant d’être percuté par le coronavirus, comme tous, a généré la bagatelle de 850 groupes locaux se réunissant chaque premier vendredi du mois pendant…deux ans. Avec 1 200 000 soutiens au texte que j’avais rédigé. Et qui était, comment dire ? Radical.

      Amitiés,

      Fabrice Nicolino

      1. Merci cher Fabrice pour ce magnifique mouvement dont le « silence etudie » dont il a ete entoure est la preuve de son authenticite et de son caractere authentiquement irrecuperable ! Bravo !

    2. Mais « le mouvement », il existe. On le voit, on le reconnait chez les uns et chez les autres, que l’on ne connaissait pas et dont on se demande comment ca se fait qu’on ne s’etait pas rencontres plus tot ! Rencontres sur un chantier, sur internet, via des actions de resistance, et on se rend compte qu’il n’y a pas de « petites » ou « grandes » actions, ou plutot que l’on s’en aperoit toujours apres, on ne decide pas en avance. Il n’y a pas de plus grand plaisir que de reconnaitre une soeur ou un frere ! Apres, « gagner » ou « perdre », on ne le decouvre qu’apres-coup, on ne le comprends qu’apres-coup, on croyait avoir « gagne » mais on a perdu, ou vice-versa… La vie gagne toujours, et nous en faisons partie, comme de la nature, comme dit si bien Baptiste Morizot cite plus haut.

  8. Attention avec les idées de « sabotage » ! La résistance parfois c’est de construire, de continuer à faire son travail, c’est à dire ce que l’on conçoit personnellement et intérieurement comme son véritable travail, et qui souvent ne recoupe pas exactement ce que les autorités voudraient qu’on fasse, et surtout aujourd’hui ou l’on voit de plus en plus que la casse délibérée fait partie de la panoplie du capitalisme. Le coronavirus, ou a part l’Afrique, la quasi-totalité des gouvernements du monde, démocratiques ou pas, ont choisi d’obéir à une poignée de charlatans dont la crédibilité scientifique est aussi mince qu’une feuille de papier et se résume en général à un diplôme de doctorat et trainent souvent derrière eux plusieurs gaffes scientifiques et trafics d’influence, est un cas tragique. Les guerres d’Irak, de Syrie, du Yémen et maintenant d’Ukraine en sont d’autres. Tenir bon, maintenir les valeurs, refuser d’obéir. Nos témoins sont nos enfants, les enfants de nos enfants, c’est à dire des gens qui n’ont aucune autorité. Nos témoins ne sont pas « les autorités », qui viennent et s’en vont comme les vagues sur la plage.

    1. Cher.e.s camarades
      Je vous remercie de tous ces échanges stimulants .
      Entre angélisme et poésie, je prends volontiers les deux!

      J’aurais aimé pouvoir le dire en premier, mais Fabrice, vous m’avez devancé.

      Je vais le dire à ma manière quand même….sachez que le mouvement des Coquelicots est effectivement un bel exemple de la mobilisation citoyenne qui a sensibilisé un tas de gens qui étaient d’une très grande diversité. Les rassemblements ont germé de partout. Le plaidoyer n’y allait pas avec le dos de la cuillère sur les pesticides tout en invoquant des valeurs assez simples : la fin du massacre des êtres vivants en éliminant l’une des principales causes, l’agrochimie.
      Le nombre de signataires n’est qu’une petite valeur visible de l’effet que ça a fait. Cela en a fait un sujet de société. Qui fait encore un effet boule de neige. Même si, je le regrette, il y a eu un essoufflement covid, le passage de ce mouvement-là a fertilisé un certain nombre d’esprits. ça n’a peut-être pas abouti à des actions, mais au niveau individuel, peut-on vraiment l’évaluer?

      Qui sait si tel agriculteur, après ça, ne s’est pas mis à penser à un changement qu’il essaie de mettre en place?
      Qui sait si telle maman, dont l’enfant est malade, ne s’est pas mise à réfléchir à ses balades, enceinte, dans des vignes traitées quelques jours avant, prise dans une menace invisible?

      Je peux vous certifier qu’il n’est pas rare à mon échelle, que j’observe ces micro-changements. Et 1, 1 seul!, agriculteur qui passe au bio, il protège combien de personnes selon vous? sa famille, les riverains (3km à la ronde, je ne parle pas de la ZNT de 5m de nos autorités (in)-compétentes), les consommateurs (des centaines de personnes)… on pourrait étendre plus loin, il y a bien des économistes qui pourraient bien nous quantifier cela.
      Et puis, à côté de ça, la médiatisation des livres de Fabrice (merci) a permis de faire peser sur d’autres acteurs en lien avec les pesticides : les scientifiques qui travaillent dessus, l’Anses, qui les autorise et peut les interdire. Là encore, il n’est pas simple de le voir, mais je vous le dis parce que je suis en mesure de l’affirmer : sans cette mobilisation, la situation aurait été pire. Pour les SDHI, pour le glyphosate, …. Il faut faire une pression continue « pour que ce ne soit pas pire ». Et sans les Coquelicots, la situation sur les pesticides serait bien pire. Les décideurs, les régulateurs, se sentent observés par la société. Et quand c’est rendu public grâce aux médias, ça les emmerde +++ Je ne parle pas là de la fable du colibri, mais nous devons gérer le syndrome de la Reine rouge, comme sur un tapis de course qui défile en continu : si on ne court pas, on tombe. Donc peut-être que, de loin, on peut juger que les actions de mouvement ne servent à rien mais non, elles nous protègent. Je conviens que ce n’est peut-être pas suffisant, mais face aux puissants, il faut passer par là.

      Pour revenir au sujet initial, Fabrice, vous nous dites que vous étiez 3. C’est réellement formidable que ces 3 « illuminé.e.s » ne se soient pas dit que ce serait impossible!!! au contraire, il semblerait que les rêveurs soient plus à même « d’y croire », mais ici, ce sont des rêveurs faiseurs, ce qui change beaucoup les choses.
      Regardez quand même en Suisse, où il y a eu une votation sur l’interdiction des pesticides de synthèse en 2021. Avec une mobilisation citoyenne, politique, scientifique… ce n’est pas passé loin. Et c’était à côté de chez nous. Les choses bougent.

      Je suis de mon côté rêveuse lucide et par rapport à ma position sociale, mon travail etc, j’arrive à mettre en mouvement, des personnes pas rêveuses du tout, mais qui trouvent du sens dans cette défense de ce qui est juste, portées par une personne « qui y croit ». J’embarque avec mon idéalisme, que je ne nie jamais voire même, que j’annonce d’entrée de jeu. Et il y a 1000 moyens de former « un gang de la clé à molette » chacun.e à son échelle. Je pense que cela compte. Je pense qu’il faut commencer par là. Moi j’y prends beaucoup de plaisir.

      Je pense aussi qu’il faut qu’il y ait dans les rangs, des personnes qui font le chapeau noir aussi, avec des critiques constructives, hein 😉
      Ce qu’écrit Baptiste Morizot est inspirant. Il met cela en pratique à sa proche échelle. Moi aussi j’adore hurler « je suis la vivante qui se défend » en me roulant dans l’herbe…. mais bon, en terme d’engagement dans des actions ensuite, je trouve que cela ne suffit pas. ça aide à savoir pourquoi on fait mais il faut quand même faire.
      Et pour ça, on a besoin de tout le monde, les poètes, les contemplatives, les rêveurs, les lucides, les meneuses, les suiveurs, les besogneuses, les stratèges, ceux qui savent préparer du café…
      De toute façon, comme le dit si bien Fabrice, on n’a pas le choix.

      La justesse des causes se voit aussi au travers de ce que met en place l’industrie pour nous contrer. Regardez par exemple le glyphosate. Les millions de $ mis pour contrer le CIRC, tricher sur les études, c’est démentiel. C’est dans cette laideur humaine (portée par peu de gens mais des puissants) qu’il faut piocher l’énergie pour défendre la beauté. Mais oui, je suis neuneu, mais est-ce vraiment ça le problème? Et, c’est comme au judo, il faut utiliser la force de l’adversaire pour le renverser. C’est comme ça que des gringalets mettent des poids lourds au tapis. Il faut être habile et futé.

      J’ai dans mon bureau cette carte qui dit  » ceux qui pensent que c’est impossible sont priés de ne pas déranger ceux qui essaient » 🙂
      Ces échanges sont très constructifs, le tout est de ne pas démotiver ni être fataliste, sinon, on est déjà mort.

      Clé à Molettement vôtre
      Thaïs

      1. Thaïs, Fabrice,
        Merci pour vos réponses et commentaires. Je médite tout cela.
        Il peut arriver qu’une clé à molette en ait marre de s’échiner sur des écrous grippés.
        Mais bon. Quelques lectures comme celles d’ici peuvent il est vrai raviver des vocations pour la plomberie.
        Bien à vous

  9. Bonjour M. NICOLINO,
    Ne sachant pas comment vous joindre autrement que par ce formulaire, si on inversait un peu les rôles ! Pour une fois ! Pourquoi ne traiteriez vous pas le sujet suivant :

    Encore une personne tuée par la Police !
    Mais on peut faire autrement !

    Ce glissement, ces « dérapages » de la police en général, vers toujours plus d’armement, toujours plus d’équipement létal, toujours plus de facilités pour tirer sur les gens, toujours plus de textes à sens unique, en leur faveur, toujours plus de violence, toujours plus de répression, obtenus par leurs syndicats lobbyistes qui interfèrent même jusque dans les élections, toujours plus d’Etat policier pour en réalité protéger les riches et puissants, qui s’exerce quasi exclusivement sur le peuple, les gens pauvres, sans aucune analyse des causes, sans déterminisme, sans remise en question du capitalisme économique néolibéral mondialisé qui s’effondre et qui est responsable de tous les maux qui nous frappent, c’est tout simplement scandaleux, monstrueux.
    On voit bien cette dégradation du comportement policier depuis quelques années qui ont de toute évidence obtenus des textes ou des engagements de l’autorité pour qu’ils se sentent suffisamment « protégés » pour agir ainsi, tirer de sang froid sur les gens qui sont dans la vie courante, à l’Américaine comme des « Rambo », ils en rêvaient, ils l’ont semble-t-il obtenu ! Ils le font ! Parce que ça correspond à l’idéologie néolibérale !
    « Tuer » des gens, des civils, comme ça, dans la vie courante, avec une telle banalité, quel que soit le prétexte, ça ne devrait pas exister ! On n’est plus en démocratie ! On n’est plus en liberté ! Qu’ont-ils donc dans la tête pour commettre des choses aussi horribles ? Il faut quand même avoir un état d’esprit particulier pour en arriver là ! Personnellement, jamais je ne pourrais faire cela !
    On ne parle jamais non plus de la façon dont les services de police travaillent, s’organisent, « interpellent » les individus ! Par exemple je peux vous assurer que suivant la manière dont ils s’y prennent pour contrôler, le choix du lieu, la façon dont ils se positionnent, ils auront de très fortes probabilités d’aller à la confrontation, voire à se mettre en danger et se croire en légitime défense, ou au contraire que ça se passe bien quitte à laisser filer – c’est tout un état d’esprit, une organisation différente, une conception de la société, une certaine éducation et vision globale, et non pas avoir comme seule idée en tête « force doit rester à la Loi » « répression – sanction » « prison » « légitime défense » « sommation » « tir » ! On peut faire autrement !
    Faudrait peut-être se reposer la question de savoir qui est au service de qui au lieu de se conduire comme en terrain conquis ? Si tous les automobilistes qui ont la priorité n’appliquaient d’autre critère que la priorité, les yeux fermés, sans s’adapter, sans laisser le passage quelque fois pour les autres mal engagés, ce serait les carambolages permanents et la guerre civile, des morts à la pelle !
    D’autant que cela se passe la plupart du temps, non pas pour arrêter des « terroristes » armés jusqu’aux dents mais pour de simples et banales infractions au code de la route ou des questions de comportement qui résultent presque toujours de la pauvreté, du chômage, « les laissés de côté », les « sans dents »…
    C’est toute la différence entre un « gardien de la paix désarmé » et un « fonctionnaire police actuel harnaché comme pour aller à la guerre » !
    Moi ça me terrifie cette « police » du 21° siècle en France ! Et je suis persuadé que certains policiers me comprennent ! Mais les vrais responsables c’est les politiques !
    Mais vous n’êtes pas obligés de me croire (juin 2022)
    ———————————–

    1. Cher Christian,

      Les questions que vous évoquez sont complexes, et je ne peux y répondre ici, car il me faudrait des heures, dont je ne dispose pas. Mais sachez que je suis en grand désaccord. La police était beaucoup plus violente dans l’après-guerre, puis au moment de la guerre d’Algérie, puis autour de mai 68. Je vois que vous avez oublié. Pour ne citer qu’un exemple, celui de l’été 1973, qui met largement en cause le comportement de la police française : des dizaines – oui, des dizaines – d’immigrés ont été tués. 50, selon l’ambassade d’Algérie en France. Et 300 blessés, toujours selon elle. J’ai été le témoin direct de graves affrontements avec la police, comme au soir du 21 juin 1973, où des jeunes couillons comme moi tentaient d’empêcher la tenue d’un meeting raciste salle de la Mutualité à Paris. De mémoire, 71 policiers ont été blessés, dont nombre hospitalisés. Je ne me souviens pas du nombre de blessés chez les manifestants, mais cela donne une idée de l’extrême violence des heurts.
      Par ailleurs, et pour de multiples raisons, la violence et la délinquance n’ont cessé de s’aggraver. Et les 100 000 flics – à peu près – et les 100 000 gendarmes – à peu près – et les milliers de flics municipaux sont désormais au contact quotidien de jeunes et moins jeunes aux marges de la loi, pour dire le moins. Il faut impérativement les surveiller. Il faut les critiquer en permanence. Il faut s’inquiéter – plus encore – de la montée des idées racistes et d’extrême-droite dans ce que sont des institutions si cruciales.
      Mais de grâce, restons-en au réel. Aujourd’hui en tout cas, il est manifeste que ces corps de polices sont à peu près contenus. Car sinon, il est évident que les bavures seraient quotidiennes. Et ce n’est pas le cas. Demain est un autre jour.

      Fabrice Nicolino

  10. Pour être encore plus direct,

    Sans l’éradication de la délinquance qui mine la vie et tue l’espoir de millions de gens ,
    il n’y aura pas le début d’un centimètre de révolution écologique .
    C’est quasi existentielle chez une majorité de français ;
    le nier, c’est au mieux vivre dans sa tour d’ivoire , au pire, dans l’insulte à ceux qui subissent enfermés à double tour…

    Entendons par délinquance – insécurité , mafias de la drogue, ‘intimidation islamique sur une grande partie du territoire (excepté dans les beaux quartiers) etc …..

    Ce n’est qu’à ce moment-là qu’un nouveau récit collectif, autre que la consommation frénétique de biens inutiles, peut éclore
    ce n’est qu’à ce moment-là que des citoyens pourront avancer vers une société sobre en objets et riche en culture …
    Les défenseurs du vivant, inaudibles aujourd’hui, seront entendus quand les portes n’auront plus besoin de clefs …

    Et toute personne qui traite de fasho celui ou celle qui demande à éradiquer l’insécurité, fait comme poutine qui traite de nazi tout démocrate qui s’oppose à lui …

    bises à tous

  11. Les récentes élections générales en Suède et en Italie montrent de manière éclatante qu’il n’ y a pas qu’en France que la droite est hégémonique. Et pourtant, le patronat suédois n’a pas fait son marché en Afrique du nord. La Suède dirigée pendant des décennies par les sociaux-démocrates était, si je me souviens bien, un modèle social pour le reste de l’Europe. Mais dans ce pays , le libéralisme, les dérégulations de toute sorte et la mondialisation « heureuse » sont passés par là…

    1. Cher Fabrice,

      Je viens de lire ce très beau texte de Baptiste Lanaspèze, qui nous confronte finalement à nos douleurs, angoisses et même, névroses, par rapport aux changements que nous devons opérer pour faire face aux nombreuses crises (climatique, écologique..). Il s’agit de l’éditeur de Wildproject, qui a ré-édité Printemps silencieux de Rachel Carson, entre autres. (https://wildproject.org/)

      Voici l’article en question, accessible gratuitement sur AOC (3 articles gratuits par mois sur inscription).
      https://aoc.media/opinion/2022/10/06/la-doublure-interieure-du-desastre-ecologique/

      Le mal-être que l’on peut ressentir à titre individuel, dans notre intériorité, face à des enjeux globaux qui nous dépassent, peut être un abîme sans fond. Mais comme il le dit (en mieux que je ne le fais là), le mal-être, d’autant plus sur ces raisons-là, est aussi un sentiment universel qui peut nous unir et nous aider à nous mettre en action.

      Je vous laisse lire le contenu en détails, car il met en parallèle les maladies mentales, « nos névroses », et le désastre écologique, notre intériorité individuelle et les actions collectives à mener, notre dissociation contre nature de nous séparer justement de notre appartenance à celle-ci- la nature !- nous amenant à la détruire.

      Il pose alors cette question « Peut-on être citoyen·ne d’une cité malade, membre d’une civilisation mortifère, et avoir une vie intérieure placée sous le signe de l’amour et de la paix ? »
      Je constate, de mon expérience personnelle, que cela est de plus en plus difficile.

      Je retiens ce passage qui me parait salvateur et inspirant, Fabrice :
      « Dans ce contexte moral de scission, de dissociation, de séparation et de mort, la question centrale de notre siècle devient donc celle de la santé et de la guérison –de la Terre, de nos corps, de nos âmes. De la façon dont on va pouvoir retrouver et libérer les puissances de la vie. De la façon dont on va pouvoir renaître et engendrer, continuer à naître et à faire naître (selon le sens étymologique du mot « nature »[18]). Lutter contre le désastre écologique, ce serait donc être à la fois un combattant et un soignant : un combattant qui lutte contre les crimes et les mensonges du front moderne ; et un soignant, à l’arrière du front, qui répare le tissu dévasté des âmes et des vivants. »

      Il termine :
      « L’enjeu des pensées de l’écologie – mettre fin à la guerre contre la nature – serait alors, en supplément des immenses luttes politiques et sociales, aussi un enjeu de thérapie collective. »

      Ça me parait faire un vibrant écho au « Mouvement Vivant.e.s ».

      Combattante et soignantement vôtre

      Thaïs

      PS : ref [18] Littré dit : « Nature : du lat. natura, qui vient du radical na, pour gna, sanscr. jan, lat. gignere, du suffixe turus, tri, tor, qui fait des noms d’agent ; natura signifie donc l’engendrante, la force qui engendre. »

      1. Chère Thaïs, chers tous,

        Des événements on ne peut plus indépendants de ma volonté me commandent une pause, du moins ici. Mais je ne suis pas loin.

        Fabrice Nicolino

      2. Il a raison, et il le dit bien, Baptiste Lanaspèze !

        Sans rien retirer à l’idée qu’il exprime si bien, j’ajouterai un autre aspect, qui n’est ni l’intériorité (la nature en nous) ni l’extériorité (la nature en dehors de nous), mais qui n’est pas non plus l’opposé ni de l’une ni de l’autre : La relation. C’est une idée de l’écologie qui est particulièrement présente en Asie, ou peut-être, dans les cultures non-Européennes (et peut-être, pas aussi puissamment fondées sur l’individualité). On retrouve de toute manière cet aspect si l’on réunit dans un même geste la nature en nous et la nature en dehors de nous, car alors la relation apparait en premier. Sur mes chantiers, si j’ai une solution qui emploie moins de matériaux et plus de main-d’œuvre, et si le coût est le même, alors je choisis toujours la solution qui emploie plus de main-d’œuvre. C’est pas toujours facile de convaincre le client car personne n’aime dépendre des humains, nous préférons dépendre de la matière, jugée plus fiable, même si c’est plus cher, et c’est là l’évidence d’un matérialisme irrationnel très profond, au sens le plus littéral du terme, et de croyances parfois difficiles à admettre et à regarder en face. Mais pourtant, seuls les matériaux polluent, la main-d’œuvre ne pollue pas ! Et cette manière de construire donne des opportunités d’échanges et de relations infiniment plus riches, elle tend a devenir une co-éducation de tous: Les ouvriers, les architectes, les ingénieurs, les fournisseurs, le client, tous apprennent les uns des autres, ajoutant de la valeur au projet qui n’était pas (qui ne pouvait pas) être prévue ni calculée au départ, prouvant l’adage: « Si tout s’est passé comme prévu, c’est que vous n’avez pas vraiment travaillé ! »

  12. Sur la relation comme geste fondationnel, au-delà de la division entre intériorité et extériorité, la thèse de doctorat extraordinaire de Sruti Bala (2007) :

    https://openscience.ub.uni-mainz.de/bitstream/20.500.12030/4342/1/1994.pdf

    Son travail d’historienne sur le mouvement Khudai Khidmatgar des Pashtun (1929-1948) ouvre une dimension (qui pour moi en tout cas) est tout à fait nouvelle, à la non-violence, comme action collective et non pas individuelle et noue une relation dialectique à la violence, et non pas d’éradication ou substitution, et ou le corps est compris comme une relation, ou l’autre joue un rôle essentiel, et non pas comme chez Gandhi comme un obstacle à vaincre. En d’autre termes, pour Abdul Ghaffar Khan et les Khudai Khidmatgar, le corps c’est la nature, ou sens où Baptiste Lanaspèze la comprend : La nature comme relation. Une approche qui me semble plus moderne que celle plus individualiste de Gandhi, et dont la force subversive est indiquée par l’acharnement systématique avec lequel le gouvernement colonial Anglais a arrêté et souvent massacré ses membres et avec lequel le gouvernement du Pakistan indépendant a emprisonné ses membres et effacé toutes les traces matérielles (documents, magazines, lettres, etc.) du mouvement, contrairement au mouvement Gandhien qui a été beaucoup plus respecté, même si assez souvent combattu ou récupéré.

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