À qui se fier ? Mais à personne, ce sera nettement plus simple. Commençons par un mot sur l’association Robin des Bois, créée jadis par Jacky Bonnemains et les sœurs Kanas. Il y a trois ans, je me suis fâché – grave – avec Jacky, que je connais depuis bien vingt ans (lire ici). Je trouve que la querelle avait un sens, un sens qu’elle conserve pleinement. Mais je dois dire que j’ai pour Jacky Bonnemains de l’estime, une estime ancrée en moi, en dépit de tout. Et une pointe d’affection, peut-être ? Bien qu’il n’entrouvre jamais son impressionnante cuirasse, oui, une pointe d’affection.
Je ne l’ai pas vu depuis trois ans, car en général, je ne fais pas semblant de m’engueuler. Mais ces derniers temps, nous avons tout de même échangé quelques mots au téléphone. On verra bien la suite. En tout cas, Jacky est non seulement un écologiste, mais aussi une sorte d’artiste, doublé d’un enquêteur hors-normes. Aurait-il été flic que je n’aurais pas aimé être voyou. Quoique. Au long de trente années de militantisme, il aura mis au jour des dizaines d’histoires passionnantes, inquiétantes, édifiantes. Des dizaines. Qui pourrait dire mieux ?
Il y a de cela peut-être quinze ans – ou dix ? -, il m’avait entretenu des traverses de chemin de fer. Des anciennes traverses réformées par la SNCF et qui étaient revendues à je ne sais quel mercanti, qui les changeait en charbon de bois pour les barbecues. Et Jacky m’avait alors dit : « Mais c’est bourré de créosote ! ». Sans doute avait-il ajouté d’autres noms ésotériques, que j’ai oubliés depuis. La créosote, en tout cas, est une merde hautement toxique et cancérigène. Si les traverses en sont recouvertes, c’est pour les protéger de la pluie et du soleil. Quelle bonne idée ! Et quelle bonne idée de faire cramer cela en même temps que les saucisses ou les côtes de porc ! Toujours penser au déficit de la Sécu. Toujours.
Donc, Jacky en précurseur. Mais le voilà rattrapé par le ministère de l’Écologie qui n’aura jamais mis que des décennies à réagir. Hourra ! Borloo et Jouanno viennent de signer une charte avec plusieurs utilisateurs de bois à la créosote – dont Réseaux ferrés de France (RFF) et France Telecom – de manière à « tracer » les traverses et les poteaux téléphoniques en fin de vie. Oui, il y a aussi les poteaux téléphoniques en bois, évidemment. On retrouve de ces charmants souvenirs jusque dans certaines maisons, où ils peuvent, selon, servir de poutres, de séparations dans les potagers, de bois de chauffage, etc. Croyez-moi, cela fait du volume. Si l’on en croit madame Jouanno, « 80 000 tonnes de bois traités usagés sont retirées chaque année des réseaux d’infrastructures de RFF, France Telecom et ERDF ». 80 000 tonnes, et combien de cancers à l’arrivée, gente dame ?
Je n’insiste pas, car à quoi bon ? Allez regarder le site de Robin des Bois, qui a beaucoup publié sur le sujet (lire ici). La sombre morale de cette ténébreuse affaire, c’est la même que si souvent. Le monde est victime d’un empoisonnement universel. Ou l’on abattra, je ne sais comment, l’industrie – notamment chimique – qui s’est insinuée dans le moindre interstice de nos vies, ou l’on pleurera misère jusqu’à la fin des temps. Qui risquent de ne pas être si éloignés que cela. Ou, ou. On appelle cela une alternative. Laquelle contient deux choix, et pas trois.