Rendez-vous au Sénat

Je vends la mèche, tant pis et à Dieu vat ! Samedi, après-demain donc, je suis invité au Sénat de la République française, pour une sorte de conférence sur les biocarburants. Non, ce n’est pas une blague, et je vous invite à jeter un oeil sur le programme (http://www.senat.fr). Pendant le repas de midi – car je vais me goberger aussi -, Luc Ferry parlera. Je luis fais confiance, il faut toujours faire confiance aux grands hommes.

L’après-midi, Michel Serres causera, ainsi que moi. Moi, le pègreleux. J’en ris à l’avance, je vous jure, après avoir pensé refuser un peu plus d’une fois. Car il se trouve que j’ai de la mémoire, même à propos de temps que je n’ai pas connus. Je sais assez sur l’histoire du Sénat en France pour ne pas être parfaitement tranquille. Les braves qui y siègent depuis un peu plus de deux siècles ont toujours été du côté de l’ordre et du manche, et ce n’est pas près de changer. Avec Thermidor. Avec Napoléon, sauf lorsqu’il s’est agi de le frapper, à terre, mais en 1814, au moment où le vent avait tourné. Contre la Commune de Paris, en 1871, mais pour Pétain bien sûr, en 1940.

En somme, je n’ai rien à faire là-bas. Mais j’y vais tout de même. Pour la blague, sans quoi je ne serais pas qui je suis. Mais aussi pour parler. Le Sénat sera ouvert à tous, et ceux qui, parmi vous, souhaitent venir, seront les bienvenus. Parler, mais de quoi ? De mon obsession actuelle, les biocarburants.

Je n’ai ni illusion ni outrecuidance. La machine de mort qui s’est mise en marche est, et sera soutenue ardemment par le Sénat, car telle est sa vocation. Mais enfin, je crois aussi à la nécessité du témoignage. Je crois à la force des propos, à l’obligation de parler haut et clair. Je crois également à la possibilité du changement, aussi improbable qu’il paraisse.

J’irai donc, mais j’aimerais bien avoir votre point de vue sur le sujet. Ce qui est acquis, c’est que je ne préparerai rien. J’irai comme je suis, porteur de phrases longtemps remuées dans ma tête et mon coeur. Je ne serai pas insultant, cela n’aurait pas le moindre sens. Mais clair, mais direct, mais offensif, oui. Croyez-moi, je le serai.

PS : Cet ajout, une heure plus tard. Je vous invite à aller voir (http://fabrice-nicolino.com) la traduction passionnante d’un entretien accordé à un quotidien espagnol par le prix Nobel de chimie 1988, Harmut Michel. Il n’y a pas de doute : je citerai ce scientifique samedi.

15 réflexions sur « Rendez-vous au Sénat »

  1. Bonjour Fabrice

    uen réaction à chaud : ben oui que tu dois y aller. pour t’exprimer sur tout ça. je ne connais rien à toutes les relations sénat etc… mais toi qui est spécialiste dans ce domaine, il est important d’en parler dans des institutions comme ça. peut être un seul réagira et c’est déjà ça! je regrette de ne pas habiter Paris, je serais venue t’entendre. Peut être que cela va passer sur LCP ?
    ce matin, écoutant la radio belge (La première) , quelqu’un était interviewé sur le pic pétrolier, je ne sais qui c’était mais en tout cas, j’ai trouvé qu’il avait fait un bon résumé de ce pic en expliquant que la solution était de changer de vie …. et que les agrocarburants n’étaient pas du tout une bonne solution. alors, on dirait quand même que ton combat s’étend! hier soir je suis allée à une conférence débat sur le livre « l’or africain » de Gilles Labarthe parlant des implications politiques, multinationales , de la pollution engendrée suite à l’extraction de l’or et de sonimpact sur la santé de la population qui n’en retire aucu bénéfice. Et je pensais à toi, en me disant qu’heureusement qu’il y a des journalistes comme vous !
    Merci et bon sénat ;o)))

  2. j’ai regardé de plus prés le programme de cette journée, vraiment dommage que je ne puisse venir sur Paris. il y a plusieurs personnes intéressantes et quand même une sénatrice acquise à ta cause avec Marie Christine Blandin .

  3. personnellement, quand par étourderie je parle des biocarburants à la maison, je me fais tancer par ma femme : pour ne pas laisser penser que ces carburants ont quoi que ce soit à voir avec l’agriculture bio, on préfère utiliser agro-carburants, ou, plus politique, necro-carburants…

    les mots sont importants, et vous le prouvez souvent dans vos billets.

    damien
    (lecteur attentif et enthousiaste)
    (d’ailleurs je profite de l’occasion pour vous signaler que me permets de vous citer régulièrement sur un site que je co-anime « dessillons | citations sans commentaires »)
    (ex : http://www.dessillons.net/index.php/2007/11/20/188-paradigme)

  4. Je pense que vous devez y aller parcequ’au moins, les Sénateurs ne pourront pas dire plus tard « nous ne savions pas » !!!!
    Je vous souhaite sincèrement bonne chance, bon courage. Un grand merci pour votre combat.
    (il parait que la cantine est excellente au Sénat et que les fruits viennent de leur beau jardin. Je dis ça pour vous remonter le moral ;-))

  5. oh bah oui, vas-y !J’essayerai de me libérer Samedi (je ne te promets rien, mais j’y travaille dès cet instant), en plus ils ont des produits équitables dont les autres français ne voient jamais la couleur (jus de fruits …), j(en parle autours de moi

  6. L’analyse de Hartmut Michel est sans équivoque, mais il reste néanmoins qu’en diminuant la surface agricole dédiée à la production alimentaire on donne un beau coup de fouet au marchés agricoles. Une opportunité pour notre agriculture et une aubaine pour notre balance commerciale.

  7. les fruits sont ils bios au sénat ? ;o))
    je me demande parfois ce que mangent les députés, sénateurs, membres du gouvernement , président ……… des légumes nourris aux engrais et aux pesticides ? avec un peu d’OGM comme assaisonnement ?

  8. Ce blog m’a encore empêché de bosser une bonne partie de la matinée, car mon ignorance se révélant à moi tous les jours un peu plus m’oblige à faire des recherches dans tous les azimuts. C’est encore pas aujourd’hui que je porterai la contradiction.

  9. Cher Fabrice,

    J’ai lu votre livre et j’admire votre travail, bien qu’il me soit maintenant impossible d’éteindre la colère qu’il a réveillée, lentement mais sûrement..
    La prise de conscience est radicale et l’écoeurement à sa mesure.
    Malgré ce sujet démoralisant s’il en est, vous gardez votre humour et c’est un régal de vous lire.
    Je me demande cependant pourquoi les sénateurs vous invitent.
    Il n’y a pas grand chose à espérer, en effet.Serez vous « tout seul »?

  10. Fabrice,

    D’accord sur votre commentaire général sur le Sénat, sur l’absence d’illusion, voire d’espoir.
    Mais, oui, je ne doute pas une seconde que vous deviez y aller.
    Laissez-moi pour l’occasion recourir à l’argument à la fois le plus bête et le plus juste qui soit : qui ne tente rien n’a rien.

    Et l’article d’Harmut Michel tombe à pic (allez, soyons fous et voyons-y un signe du destin).
    Un Prix Nobel, quoi qu’on en ait, ça en jette. Difficile de rejeter ses arguments sous le prétexte que c’est un doux rêveur d’écologiste, ou un brave gars mais qui n’y connaît rien, ou toute autre connerie de ce genre.

    Une dernière chose : vous voulez ne rien préparer.
    J’entends par là qu’il ne s’agit pas d’un discours préparé, tant les années de recherche et d’écriture, l’acquisition résultante de connaissances constituent à n’en pas douter la meilleure des préparations.
    Mais bon, le Sénat (malgré tout), l’émotion de pouvoir s’exprimer dans un tel cénacle, toutes ces choses à dire dans un temps qui restera limité, etc., etc…on ne sait jamais.
    On peut être « porteur de phrases longtemps remuées dans [sa] tête et [son] cœur », au risque qu’elles aient été trop longtemps remuées, et qu’ un jour donné elles s’enfuient dans l’esquisse – l’esquisse seulement – d’une force espérée, d’une beauté rêvée.

    Ce n’est donc ni douter de votre connaissance du dossier, ni de vos capacités d’élocution que de vous conseiller d’avoir avec vous un papier, même un petit papier, où seront notés les 3 ou 4 points qui vous apparaissent absolument cruciaux ; ceux qui constituent les fondations les plus solides du message à transmettre.

    Bonne chance.
    De tout cœur avec vous.

    P.S. : vous savez ce qui vous a valu cette invitation ? Ce serait intéressant à savoir.
    P.P.S. : pour une fois, je vais (presque) regretter de ne pas vivre à Paris. J’aurais volontiers assisté à cette conférence.

  11. moi itou, je serais bien venue, parce que si vous lire c’est salutaire, vous entendre (à la radio) c’est encore mieux, le ton, gravité et joyeuseté (joie, je n’aime pas, c’est connoté), la puissance de l’argumentaire implacable. C’est vivant quoi, ça fait trembler les murs. Y a aussi Paccalet, Rabhi… qu’on commence à entendre même dans les médias officiels, tous ceux qui travaillent dans les réseaux pensants. On dirait que les petits ruisseaux se rejoignent, alors, c’est le moment de tenter tous les impossibles, d’aller représenter cette partie des hommes qui existe pourtant, qui n’en croit pas ses neurones de voir l’entropie gagner, éteindre la vie. Merci Fabrice

  12. bonsoir bernard, je préfère ta toute première impression : le problème est sans équivoque. alors un bon coup de fouet économique pour aller plus vite dans le mur….ne serait-ce pas , n’est-ce-déjà pas une sacrée perte de temps que d’y songer ?

  13. Mesdames et Messieurs les Sénateurs, avez vous une conscience, ou est-elle déjà en réparation ds un garage pour voitures flexfuel?

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