Comme je suis désolé ! Henri Weber m’indiffère en totalité, et c’est pourtant de lui que je vais vous parler. Qui est-il ? Un sénateur socialiste, soutien fervent de Laurent Fabius. Il a été l’un des fondateurs des Jeunesses Communistes Révolutionnaires (JCR), ancêtre politique de la LCR de Krivine et Besancenot. On l’aura entendu jadis réclamer des armes pour monter à l’assaut du ciel ; on le retrouve attablé avec Christian Poncelet, président du Sénat, autour d’une bouteille millésimée. L’histoire est vieille comme le monde, et recommencera dès que j’aurai le dos tourné.
Non, Weber n’a aucun intérêt. Mais j’ai lu l’autre jour dans le journal Le Monde une tribune par lui signée, et dont voici le titre intégral : Pourquoi le socialisme recule en Europe (ici). J’allais ajouter que ce texte est chiant comme la pluie, mais c’est une absurdité bien sûr, car la pluie est d’une beauté sans nom et d’un intérêt sans fin. Je me reprends donc : ce texte est creux et vain, ce texte ne dit rien, n’apporte rien, ce texte est déjà oublié à jamais par ses rarissimes lecteurs – sauf moi, malheur ! -, ce texte finit même par faire rire intérieurement, mais pour des raisons qui n’ont pas grand rapport avec lui.
Je résume, à l’attention des masochistes qui sont encore là. En bref,la gauche de gouvernement, qui tenait 13 gouvernements de l’Union européenne sur 15 il y a sept ans, n’en dirige plus que deux – le Portugal et l’Espagne – et trois si l’on y ajoute la Grande-Bretagne de M.Brown. Il faut chercher l’explication de ce reflux peut-être historique. Je n’aurai pas la patience de vous résumer le propos de Weber. Si ça ne va pas bien pour sa (toute) petite gauche, c’est qu’elle n’a pas su s’adapter à la mondialisation, à la montée des demandes d’ordre, à l’explosion des individualismes, au vieillissement de la population, etc.
Bon, rien là-dedans qu’un simple logiciel de traitement de texte ne serait capable de fabriquer seul, sans le concours d’un cerveau humain. Ces mots ont été brassés des milliers de fois au point de donner la nausée, et ne servent au total, et en l’occurrence, qu’à une seule chose : montrer qu’Henri Weber, le 19 août 2008, a le droit socialement reconnu d’écrire un texte dans le grand journal national. C’est bien.
Au-delà, je suis fasciné par le vide sidéral de l’un des principaux responsables d’un des principaux partis de France. Cet homme-là – mais vous pouvez les ajouter tous à la liste, de Buffet à Sarkozy, de Hollande à Pasqua, de Royal à Villiers – est simplement ignare. Il ne sait rien, n’a pas la moindre envie de savoir quelque chose, et passe donc à côté de la seule question qui devrait et pourrait nous réunir tous : la crise de la vie sur terre. Le plus grotesque du propos de Weber se trouve dans l’ultime paragraphe, où il glisse dans le catalogue des questions en suspens celle du réchauffement climatique. C’est grotesque, car cela ne prouve qu’une chose : qu’il lit au moins les titres des journaux et se sent obligé en conséquence, comme tous désormais, d’évoquer la crise climatique. À côté et au même niveau que la « croissance forte et durable », la « maîtrise de l’immigration », ou encore la « régulation du capitalisme mondialisé ».
Autrement écrit, Weber est sourd et aveugle, à défaut d’être muet. Et ils le sont tous. Je dois vous dire que ce coup de griffe complète à mes yeux celui contre Cohn-Bendit et l’ami Besset, avant-hier.