Franz-Olivier Giesbert est un zozo

(On parle ici, et quand même, d’écologie. Mais cela se situe – mille pardons – à la fin de cet article)

Ah là là ! Est-ce si important ? Du point de vue de la crise écologique, ce n’est pas dérisoire, c’est directement dépourvu du moindre sens publiable. Mais d’un autre côté, pour ceux qui continuent d’habiter ce monde délirant, cela garde un petit intérêt que je vais essayer de mettre en scène. Le journal Le Point a été créé en 1972 par des journalistes venus de L’Express, parmi lesquels Claude Imbert et Georges Suffert. Imbert serait une sorte de Jean Daniel un peu plus jeune, et de droite, si toutefois Daniel est de gauche. Si toutefois être de gauche conserve un territoire identifiable. Un peu plus jeune mais largement aussi chiant.

Bon. Je ne dirai qu’une chose de la protohistoire du Point, qui m’est restée coincé en travers de la gorge : le 21 juin 1976, la « une » du Point accuse le communiste égyptien Henri Curiel d’être un agent du KGB et de diriger un réseau terroriste. Sous la signature de Suffert. J’ai toujours le « dossier » chez moi, et il ne fait aucun doute que Suffert a en l’occurrence servi la soupe à un service policier, par exemple la DST de l’époque. Tout respire l’air épuré des officines. Rien n’est établi. Mais Suffert sait qu’il sera soutenu, et par la police, et qu’il l’est déjà – et comment – par son journal.

Deux ans plus tard, le 4 mai 1978, Curiel est abattu en plein Paris par un mystérieux commando, aussi vaporeux que celui qui tua Goldman en septembre 1979. Je ne sais pas quel lien unit les deux événements, mais Suffert ne mérite certes pas la médaille d’or du journalisme honnête et indépendant.

Je voulais bien sûr vous parler du Point d’aujourd’hui, dirigé jusqu’à ces derniers temps par un certain Franz-Olivier Giesbert (FOG, comme on dit à la télé). Venu de la gauche soixante-huitarde, il a patienté des années à L’Obs, dans l’espoir vain d’enterrer sous les fleurs Jean Daniel. Puis il a dirigé Le Figaro et longtemps Le Point avant de se contenter d’éditos mornes et répétitifs qui, ces derniers temps du moins, varient entre trois pôles : la dénonciation des supposés néandertaliens de la CGT et assimilés; la promotion béate du libéralisme le plus vif; la détestation personnelle de Sarkozy.

Est-ce intéressant ? Je ne recommande pas. Dans le dernier numéro paru le 23 juin (2285), Le Point fait preuve de son habituelle idéologie en produisant en couverture la tête de Michel Rocard, au-dessus de ces mots : « La gauche française est la plus rétrograde d’Europe ». Notez avec moi les guillemets, qui désignent à coup certain une citation, en la circonstance tirée d’un entretien. Page 28 – et cela dure interminablement jusqu’en page 42 -, commence en effet un entretien avec Rocard. C’est distrayant, dans un genre mineur, car le pauvre garçon sucre pas mal les fraises – il a 84 ans – et il est quand même difficile de croire que personne ne s’en rend compte.

Page 32, les glorieux intervieweurs – Emmanuel Berretta, Caroline Galactéros et Olivia Recasens – posent la question qui leur brûlait les lèvres depuis le début, car l’entretien n’a qu’un but : montrer que les socialistes de bon aloi, comme Rocard ou Macron, détestent la gauche, cette si ringarde disposition de l’esprit. Et cela donne : « Diriez-vous que la gauche française est la plus rétrograde d’Europe ? ».

Cela donne, sauf vilaine erreur, une information de taille. Le titre de couverture provient en fait d’une question posée par Le Point. Ma foi, cela doit être déontologique. Mais attendez plutôt la réponse de Rocard : « Dans toute l’Europe, la gauche française est celle qui a été la plus marquée par le marxisme. Elle en porte les traces. On peut admettre que la pensée politique marxiste, ou ce qu’il en reste, est rétrograde ». Je ne vous ferai pas l’injure de croire que vous ne savez pas lire. Comme vous le savez, vous voyez comme moi que Rocard ne dit en aucune manière ce que Le Point était de toute manière décidé à lui faire dire.

De quoi s’agit-il ? D’une grossière désinformation, de la part de gens qui se croient tout permis, et qui ont bien raison, car en effet, nul ne conteste leur droit extravagant à mentir. FOG et tous autres, entrez les pieds devant dans le vaste Panthéon des journalistes officiels, car votre place y est toute préparée.

Quant au reste, un naufrage. Rocard, le Rocard sautillant qui faisait semblant d’avoir des idées – l’autogestion, l’écologie – se vautre dans la discussion de bistrot. Macron, Valls, Hollande, Mitterrand, Chirac, les Iraniens, le numérique, les migrants, la Russie, le voile islamique, les 35 heures, etc. Par un effet comique non recherché, Le Point lui demande au bout de quinze pages : « Vous avez déclaré : “Il faut écologiser les politique”». Enfin ! Rocard a là l’occasion, – n’était-il “ambassadeur” sarkozyste pour l’Antarctique ? – de dire son sentiment sur l’extrême gravité de la crise écologique.

Mais comme il s’en tape, il évacue. Après moins d’une phrase sur le changement climatique, il embraie sur bien plus important : les règles de désignation de secrétaire général de l’ONU. Le successeur de Ban Ki-Moon ne risque-t-il pas de venir d’Europe de l’Est ? Et puis rien d’autre. Strictement rien d’autre. Je vous jure que c’est vrai. Un naufrage, vous dis-je.

9 réflexions sur « Franz-Olivier Giesbert est un zozo »

  1. nan… rien..

    les résultats pour l’aéroport de nddl viennent de tomber

    🙁

    en passant je découvre ça >> Libé: « Pour organiser ce scrutin un peu «particulier», qui ne nécessite pas un seuil minimum de 50% de participation pour être validé… »

    😮

    ils ne disent pas quel pourcentage d’électeurs se sont exprimés

    … possiblement une majorité… de bétonneurs à la con

  2. C’est sûr, FOG est un zozo. Et Rocard aussi. Mais le Point ne fait pas vraiment autorité. Et Rocard encore moins. Quand on en est réduit à consacrer 14 pages à un croulant pareil, c’est qu’on n’a rien de pertinent à proposer à ses lecteurs. Ce journal est vide.

    Je reviens à l’actualité du moment, à savoir le référendum sur Notre Dame des Landes. Les habitants de Loire Atlantique qui se sont déplacés ont voté à 55 % pour l’aéroport (résultats en cours). Le zozo qui m’inquiète davantage, c’est Valls. Lequel déclare à qui veut l’entendre que 51 % de participation à ce référendum serait « exceptionnel ». Et par conséquent que les travaux de l’aéroport doivent démarrer au plus vite.

    Evidemment, ce référendum purement consultatif (pléonasme) n’a aucune légitimité. J’aurais dit la même chose si le résultat avait été inverse. Mais surtout, je reste persuadé que si le Non l’avait emporté, ce zozo de Valls aurait trouvé cette fois que 51 % de participation aurait été un taux bien faible… Et il aurait continué son travail de sape pour que les travaux se fassent aussi. Ce qui , entre nous, n’est pas gagné (et tant mieux). L’été arrive et j’en connais beaucoup qui vont aller passer quelques mois de vacances là bas !

  3. Merci Nicolas pour vos articles si décapants . Je me pose une question et je vous la pose : comment et pourquoi nos politiques ne prennent ils pas la crise ecologique et climatique comme la priorité des priorités ???
    Je me dis qu’ils ont des enfants et des petits enfants dont l’avenir risque d’être compromis si on ne fait rien …. Alors soit ils sont stupides soit ils sont égoïstes ( mais ils subiront aussi les conséquences du réchauffement climatique ) soit ils n’ont pas vraiment conscience de la gravité de la situation ( comme tant de personnes hélas ) .
    Je dois dire que j’ai fait une prise de conscience il y a 5 ans car j’ai eu le temps de lire et de m’informer ne prouvant plus travailler pour des problèmes de santé . J’avais déjà des inquiétudes pour les problèmes de pollution , mais je n’avais pas compris la gravité de la situation dans laquelle est l’humanité . Et je trouve qu’il faut beaucoup de temps pour comprendre l’ensemble du problème en passant par l’agriculture , les transports , l’énergie , le commerce international , l’accaparement des terres …..Alors les politiques seraient ils sous informés ou dans le déni ? Seraient ils comme tant de gens qui n’hésitent pas à voyager en avion plusieurs fois par an sans comprendre que c’est le transport le plus polluant ? C’est une question qui me turlupine !
    Qu’en pensez vous ?

  4. Gauche ou droite, c’est le même sort que redoutent les galets du Frau de Lavercantière dans le Lot: http://www.lelotenaction.org/pages/content/archives/carriere-du-frau-une-mission-interministerielle-debarque-dans-le-lot.html

    http://www.lotnature.fr/spip.php?article1191

    Pour Rocard, Desproges l’avait bien remarqué: http://www.desproges.fr/citations/index/197

    précision: je suis né au moment du Front Populaire …., et je lis toujours Planète sans visa avec beaucoup de plaisir..

    1. Oui mais,
      ne pas être né au moment du Front Populaire et valser pour s’en réclamer… c’est y pas mieux, hein ?
      😀

  5. Salut a tous,

    Suis en Loire-Atlantique. Bine sur, il n’y avait rien a attendre de ce pseudo référendum qui n’en est pas un.
    Il y a 3 -4 ans, personne ici n’était pour cet aéroport. Mais depuis ce temps là, il y a eu une grande campagne « OUI » a l’aéroport, fiancée a grands coups de deniers publics , des pressions incroyables des gros élus et des boîtes de BTP sur les collectivités locales et les petits élus, et puis des pressions des collectivités locales et des petits élus sur la population…et puis des pressions d’une toute petite portion de la population sur une grande partie de la population.
    On nous parle d’un grand nombres de procurations. J’imagine volontiers les partisans du « oui » aller soutirer le bulletin de la vielle tante Madeleine et celui du grand-père du coin qui n’a jamais mis le pied dans un avion.

    Au final, la bande de brigands qui gouvernent ce petit quart de crétins de Loire-Atlantique peuvent pavaner aujourd’hui si çà leur fait plaisir. Qu’ils en profitent bien, car ils ne sont qu’une insulte à la démocratie. Leurs manœuvres n’ont rien d’un vote démocratique dans les règles de l’art, mais ne sont dans les faits qu’un véritable hold up au bénéfice de la mafia locale.
    Mais tout ce paye, un jour, n’est-ce pas?

    Pour ma part, je pense que nous aurions du boycotter ce référendum illégal.

  6. @ Nathalie : Fabrice, pas Nicolas :-).
    Je te rejoins tout à fait : le bruit ambiant de ce qu’on nomme « l’information » est tellement lénifiant, que, même si on est sensibilisé, et faute de creuser le sujet, on n’a absolument pas conscience de l’ampleur de la gravité de la situation.
    La plupart de nos concitoyens, dirigeants compris, vivent dans une bulle dans laquelle nous sommes tous embarqués, bon gré mal gré. Une bulle dont on se rend compte qu’elle a la solidité et la précarité d’une bulle de savon. Impossible de connaître le moment aléatoire où elle éclatera, précipitant tout ce petit monde dans le vide, on sait juste que ça ne saurait tarder…
    Je pense que chez les politiques il y a de tout. Du « après moi, le déluge », de l’incompétence, et surtout du déni. Le déni est omniprésent, chez les politiques comme dans un bonne part de la population. On préfère tourner la tête et regarder ailleurs, c’est trop dérangeant, ça ne correspond pas aux « mythes » sur laquelle notre civilisation et chaque individu s’est construit.
    Chaque fois, je ne peux m’empêcher de comparer avec l’état-major français de 1940, dans le déni jusqu’au bout, malgré les rapports alarmants des équipages de reconnaissance durant 3 jours qui voyait les colonnes de chars allemands traversant les Ardennes. Ce n’était pas dans leur conception du possible.
    A voir ce brillant hors-d’œuvre de Pablo Servigne (43min), dont je n’ai pas encore lu le livre, et pour lequel il a étudié, entre-autres, le côté « psycho » de la chose :
    https://www.youtube.com/watch?v=2b6npw-xgvM

    1. Bonjour ( Nicolas ..Nicolino … Ma langue a fourché ) oui ça doit être du déni , quand je suis un peu alarmiste avec des gens , on me prend pour une folle , on ne me croit pas , et pourtant effectivement il y a de quoi être inquiet , j’ai lu le livre de Pablo Servigne remarquable , mais ça fait peur , mais si tout le monde s’y mettait on pourrait changer l’évolution actuelle , heureusement la prise de conscience se fait mais trop lentement je le crains ….
      J’aime bien l’analogie avec 1940 mais une guerre finit toujours par se terminer , alors que notre situation …..

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