Archives de catégorie : Beauté

Les navires de Sea Shepherd éperonnés !

Breaking News, comme on dit de l’autre côté de l’Atlantique. Dernière heure, ce 20 février 2013 à 21 heures, heure de Paris. Ça chauffe dans l’Antarctique, où les défenseurs des baleines affrontent notre monde barbare.

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Les navires de Sea Shepherd éperonnés par les baleiniers japonais dans le sanctuaire antarctique

20 février 2013 - Escalade de violence en AntarctiqueLes navires de Sea Shepherd Conservation Society, le Bob Barker et le Steve Irwin, ont été éperonnés par le navire-usine de la flotte baleinière japonaise, le Nisshin Maru dit « l’étoile de la mort » – un monstre d’acier de plus de 8 000 tonnes. Cet abattoir flottant est 10 fois plus lourd que le Steve Irwin.

Le Bob Barker et le Steve Irwin étaient derrière le Sun Laurel, le navire-ravitailleur de la flotte baleinière nippone – le Steve Irwin à bâbord, le Bob Barker à tribord.

Avec un haut-parleur, le Shonan Maru #2, le navire de sécurité japonais, a ordonné au Sam Simon, navire australien de Sea Shepherd se trouvant en eaux antarctiques australiennes, de quitter la zone sur ordre du gouvernement japonais. Des grenades assourdissantes ont été lancées sur le Bob Barker et le Steve Irwin par l’équipage du Nisshin Maru.

Le Capitaine Peter Hammarstedt a informé le navire-usine Nisshin Maru par radio que le Bob Barker maintiendrait son cap et sa vitesse et que l’obligation légale et morale d’éviter la collision incombait au Nisshin Maru.

Le Nisshin Maru a alors viré de bord et s’est approché par tribord. Il a presque percuté le Bob Barker avant de se tourner vers le Steve Irwin et de l’éperonner au niveau de la proue.

Le Nisshin Maru a maintenu son cap de collision et a éperonné le Steve Irwin une nouvelle fois à bâbord.

Le Nisshin Maru a ensuite éperonné le Bob Barker. Le Steve Irwin a accéléré afin d’éviter un nouvel éperonage.

Le Bob Barker a remplacé le Steve Irwin sur le côté gauche du Sun Laurel.

Le Steve Irwin a fait demi-tour et le Nisshin Maru a poussé le Bob Barker contre le Sun Laurel, le coinçant en sandwich. Le Nisshin Maru a ensuite reculé derrière le Bob Barker et l’a éperonné à pleine vitesse contre le flanc gauche du Sun Laurel, détruisant l’un de ses deux radeaux de sauvetage et détruisant le bossoir permettant de lancer l’autre radeau. Le Nisshin Maru a ensuite de nouveau éperonné le Bob Barker par l’arrière, détruisant l’un de ses radars et la totalité de ses mats.

2013_escalation_in_antarctica_01Tout le courant a été coupé à bord du Bob Barker qui a émis un signal de détresse May Day. A l’émission de ce signal de détresse, le Nisshin Maru s’est retourné et s’est enfui vers le nord.

Le co-chargé de campagne de Sea Shepherd Australie, l’ancien sénateur Bob Brown, a informé le gouvernement australien des mutltiples violations des lois internationales par la flotte baleinière et a demandé à ce que Tokyo soit sommé de retirer ses navires de cette region située au nord de la base Case australienne et de cesser de violer ouvertement les lois australiennes et internationales. Des navires de la Marine devraient être dépêchés sur place pour faire respecter la loi.

Actuellement, le Sun Laurel est en train d’être escorté vers le nord par la flotte de Sea Shepherd puisqu’il n’a pas d’équipement de sauvetage de secours adapté aux eaux très dangereuses de l’Océan austral.

Jeff Hansen, directeur de Sea Shepherd Australie a affirmé: « Le Nisshin Maru s’est rendu responsable de collision volontaire et d’un délit de fuite. Il a éperonné le Sun Laurel, mettant la vie de son equipage en danger et les a ensuite tout simplement abandonnés. »

Tous les navires font maintenant route vers le nord, les braconniers japonais, se trouvant à deux miles au devant de la flotte de Sea Shepherd.

Les trois navires de Sea Shepherd ont été éperonnés, le Bob Barker essuyant les plus gros dégâts. Le courant est maintenant rétabli à bord du Bob Barker. Heureusement, aucun membre d’équipage n’a été blessé.

Nous avons rempli notre mission en empêchant le Sun Laurel de réapprovisionner l’abbattoir flottant, le Nisshin Maru en carburant. Nous continuerons jusqu’au bout à protéger les baleines de ce sanctuaire.

 

Les Indiens du Canada ont chopé la rage (Idle no more)

Ce papier a été publié dans Charlie Hebdo le 6 février 2013

Au Canada, les Indiens en ont marre de la droite extrême au pouvoir. Dernière trouvaille du gouvernement : une loi qui livre les lacs et rivières au fric. Le mouvement Idle no more pourrait bien annoncer le printemps.

Au Canada, ça chie d’un bout à l’autre de ce pays bizarre. Le mouvement Idle no more (1), qui n’en est qu’à ses débuts, va peut-être changer la gueule des environs. On va voir. Avant cela, deux mots sur cette immensité de 10 millions de km2, presque 20 fois la France. Les descendants des anciens colons se partagent la mise, avec à l’Est un Québec parlant français; et vers l’Ouest, jusqu’au Pacifique, des provinces angliches. Au milieu, si on laisse de côté les ours, les loups et les caribous, on trouve ce qu’on appelle là-bas les Premières nations, c’est-à-dire les Indiens. Des Cris, des Micmacs, des Hurons, des Mohawks, entre autres. Auxquels on ajoute des Innus, des Inuits, et les métis. D’après le recensement de 2006, ils seraient 1 172 785, soit 3,8 % de la population totale (31, 6 millions).

Sont-ils bien traités chez eux ? Évidemment. Les abus sur les gosses indiens dans les pensionnats cathos ont été si nombreux, jusque dans les années 70, que le gouvernement fédéral a créé en 2007 un fond d’indemnisation des victimes de deux milliards de dollars. Appelé, car les politiques locaux ont gardé le sens de l’humour, « Paiement d’expérience commune ».

Les Indiens du Canada ont certes obtenu, il y a quarante ans, trois décisions judiciaires qui ont modifié en leur faveur la situation générale. Et une révolte des Mohawks, en 1990, a foutu une grande trouille aux Blancs d’Ottawa et de Montréal. Les Indiens protestaient contre l’élargissement d’un terrain de golf sur des terres sacrées. Depuis, ça va, ça vient. Jusqu’à cette foutue Loi « mammouth C-45 », présentée en octobre dernier devant le Parlement.

Précisons, pour comprendre la suite, que le parti conservateur au pouvoir ferait passer l’UMP pour une tendance extrémiste de Lutte Ouvrière. La loi C-45 dynamite des dizaines d’années de protection de la nature et bouleverse au total la bagatelle de 60 lois déjà en application. Pour se concentrer sur un exemple, le projet ruinerait la protection des lacs et rivières, qui se comptent en dizaines de milliers. Seuls 97 lacs et 62 rivières resteraient à l’abri du bétonnage et des barrages. Commentaire de la responsable du parti Vert canadien, Elizabeth May : « C’est un moment tragique ». Tu l’as dit, Babeth.

Ce que n’avaient pas prévu les bonnes âmes au pouvoir, c’est la révolte indienne, immédiate, bouillonnante, formidable. Au point de départ, en novembre, quatre femmes de la Saskatchewan, Nina Wilson, Sheelah Mclean, Sylvia McAdam et Jessica Gordon. En épluchant les 443 pages de la loi C-45, elles découvrent, au détour d’une phrase, que la vente des terres indiennes au privé sera simplifiée, pour « l’adapter au rythme de la vie moderne ». Et elles décident de lancer un mouvement sans chef ni frontières, Idle no more. Ce qui veut dire à peu près : Plus jamais d’inaction. Ou encore : Ras-le-bol de ne rien foutre. À leur suite, l’Indienne Theresa Spence, une Attawapiskat, mène une grève de la faim dure de 44 jours, arrêtée le 24 janvier.

Depuis l’automne, la mobilisation indienne ne cesse de prendre de l’ampleur. On ne compte plus les routes, lignes de chemin de fer et ponts – internationaux – bloqués, les manifs aux chutes du Niagara, le tout suractivé par ces si fameux réseaux sociaux à l’œuvre en Tunisie ou au Caire. La chose nouvelle, c’est que le mouvement Idle no more est désormais rejoint sur le terrain par des syndicats, des associations comme Greenpeace, ou encore des groupes aussi solides que Public Interest Alberta (2), dont l’origine remonte aux combats de l’Américain Ralph Nader, dans les années 70. Les altermondialistes de Vancouver, d’Ottawa, de Montréal, sont désormais de la partie, et bien malin celui qui pourrait dire ce qui va se passer.

La certitude, c’est que le pouvoir riche, le pouvoir blanc, le pouvoir fédéral d’Ottawa ne sait pas quoi faire pour calmer le jeu. Le Premier ministre Stephen Harper a rencontré une délégation indienne et a promis, dans l’inimitable langue de ces foutriquets, qu’il faudrait « se revoir ». Les filles et les garçons d’Idle no more ont organisé le 28 janvier une Journée mondiale d’action. On ne voudrait surtout pas porter la poisse aux salauds au pouvoir là-bas, mais ces satanés Indiens multiplient les cérémonies du Salut au soleil. On a beau ne pas être superstitieux, gaffe.

(1)    http://idlenomore.ca/
(2)    http://pialberta.org

Massacre au bois de Tronçay (un autre Notre-Dame-des-Landes)

Une putain d’affaire. Vraiment, on ne voit pas un pareil désastre tous les matins. Je résume, et prie les acteurs locaux d’excuser d’éventuelles erreurs. Comme souvent, les choses sont un peu compliquées. Je commence par le lieu, qui est une forêt de 110 hectares bordée par l’Yonne d’un côté, la rivière Sardy et le canal du Nivernais de l’autre. Nous sommes tout près du du parc naturel régional du Morvan, dans l’arrondissement de Clamecy et le département de la Nièvre. Un château fort connu des historiens, celui de Marcilly, domine les environs.

Pascal Jacob, président du Medef

Le coin est paumé, c’est-à-dire en réalité préservé comme bien peu. Les élus locaux, aussi malins qu’ailleurs, décident voici une poignée d’années de « créer de l’emploi » et achètent à prix d’or, dans des conditions d’ailleurs discutées, le bois de Tronçay, avant de le refiler à une scierie industrielle belge, Fruytier. Laquelle, après mûre réflexion, décide d’aller installer ailleurs en Bourgogne ses activités. Tête des élus, qui ont emprunté et se retrouvent lourdement endettés. Heureusement pour eux arrive Pascal Jacob, président du Medef en Bourgogne. Comme le gars a fait une école du Bois, il a de grandes idées sur le sujet, et depuis une bonne dizaine d’années, il est lobbyiste en chef de l’industrie du sciage. Il a fait le siège de tous les politiques possibles pour leur vendre son idée fixe, qui est de « réindustrialiser les campagnes » par l’installation de scieries. Bon, après le lâchage des Belges de Fruytier, les élus locaux tombent dans les bras de Jacob, dont on lira pour se marrer le blog, chef-d’œuvre on ne peut plus involontaire (ici).

Jacob se lance dans un nouveau projet, toutes voiles dehors (ici, la localisation sur Google Map). À la tête de l’entreprise Erscia, lancée tout spécialement, il entend créer ex nihilo un géant du bois : 300 000, puis 500 000 m3 de grumes sciés sur place chaque année. Sont également prévues une centrale électrothermique et une unité de pelletisation, c’est-à-dire de fabrication de granulés de bois. À quoi on ajoutera pour faire bon poids de la cogénération, cette tarte à la crème désormais dans tous les projets dégueulasses, et de la production d’électricité, ainsi que 120 emplois créés, et 148 millions d’euros d’investissement, etc. Notons ensemble qu’il ne s’agit là que de promesses, qui n’engagent jamais que ceux qui les croient. Mais passons, non sans avoir ajouté que Pascal Jacob est un as de la novlangue qui présente son beau projet comme « exemplaire en matière d’énergie verte »,  qui se substituera pour sûr « aux énergies fossiles et à l’énergie nucléaire ».

Au pays des pique-prunes

Or donc, un fier capitaine d’industrie veut s’emparer, pour le bien de la planète, d’un bois de 110 hectares. En août 2011, les pelleteuses et les bulls sont là. Suis-je bête ! J’avais oublié de préciser que le projet incluait la dévastation du lieu, par défrichement quasi-total. Jacob ayant oublié un détail – une telle destruction est tout de même soumise à autorisation -, les travaux sont stoppés. Je résume encore, bien obligé. Une enquête publique a lieu, et un premier avis du consultatif Conseil national de protection de la nature (CNPN) est donné. Il est défavorable pour la raison évidente que le bois de Tronçay est une merveille de biodiversité. On y trouve, au milieu de quantité d’autres beautés, des insectes très protégés, comme le Grand capricorne, la lucane cerf-volant, et ce pique-prune qui, jadis, stoppa à lui seul une autoroute (ici). En bref, les promoteurs de cette scierie sont des barbares, espèce qui semble ne jamais devoir être menacée.

Je survole à nouveau. La population locale se mobilise grandement (ici), le CNPN donne au total trois avis défavorables – ce doit être un record -, mais le projet avance à tous petits pas, sans réellement s’arrêter. C’est qu’il est soutenu d’une manière épouvantable par la préfète de la Nièvre, Michèle Kirry, qui doit tout à la gauche gouvernementale, et singulièrement au ministre de la police, Manuel Valls. Ancienne élève de l’Ena, elle a occupé diverses fonctions dans plusieurs ministères avant d’être nommée préfète en novembre 2012. Sitôt arrivée, elle marque le territoire, et de quelle manière ! Le 4 février 2013, madame Kirry pond un arrêté scélérat, qui malgré diverses décisions judiciaires et administratives, ouvre la voie au grand massacre. Une grosse heure après, les les machines sont là, et les arbres tombent.

Christian Paul et Arnaud Montebourg

Question de simple bon sens : pour quelle raison une préfète si récemment arrivée prend-elle une décision aussi grave ? Outre le fait que les élites, en totalité, se contrefoutent de la nature, il faut y ajouter le poids de Christian Paul. Comme on n’a pas le droit d’insulter un noble élu de la République, je m’en garderai bien. Paul est socialo, ancien élève de l’Ena bien sûr, insignifiant secrétaire d’État sous Jospin, entre 2000 et 2002, et il a occupé diverses fonctions locales, parmi lesquelles maire de Lormes, conseiller général, conseiller régional. Il est en ce moment député de la Nièvre. Et bien sûr, il défend de toutes ses forces d’apparatchik le projet de destruction du bois de Tronçay. Quand on n’a pas la moindre idée de l’avenir, pourquoi ne pas faire semblant ? Il a, au reste, rencontré hier notre si formidable ministre du Redressement productif, Arnaud Montebourg, qui l’a assuré de son indéfectible soutien au projet Erscia. On comprend mieux l’engagement si intense de madame la préfète de la Nièvre.

Mais où en sommes-nous ce 7 février à 22 heures ? Sur place, de valeureux combattants, que je salue ici, occupent comme ils peuvent le bois. Sans pour l’instant parvenir à empêcher le passage des engins. Cela donne à peu près cela :

Seulement, la messe est loin d’être dite, et les défenseurs de la forêt appellent maintenant à la création sur place d’une Zone à défendre (ZAD), sur le modèle de Notre-Dame-des-Landes. Ils attendent de tous ceux qui peuvent un soutien, un coup de main, une visite, plus si c’est possible. J’en profite pour passer le message aux zadistes de Notre-Dame-des-Landes, et leur suggère d’envoyer sur place, au plus vite, une délégation. Ceux de Sardy ont un besoin immédiat de tam-tam, et de mobilisation. Je précise enfin que je n’aurai pas écrit ce texte sans la sollicitation de trois sources différentes :

1/ Mon ami Thierry Grosjean, de l’association Capen 71. Un mail : thierry.grosjean5@wanadoo.fr. Thierry est un véritable combattant de l’écologie.

2/ Une chère lectrice de ce blog, Sylvie Cardona, responsable de l’association Aves, http://www.aves.asso.fr/

3/ Enfin Anne Lhostis, de l’association Adret Morvan.

Un tout dernier mot. De nombreuses associations sont sur le pont, et elles m’excuseront de ne pas les citer toutes. Je me contenterai de donner ici le contact d’Adret Morvan. D’abord un site internet  : http://adretmorvan.org/. Ensuite une adresse électronique : contact@adretmorvant.org. Je (ne) suis (pas) payé pour le savoir, on ne peut se multiplier. Mais le combat pour le bois de Tronçais est un grand combat. Tous ceux qui iront là-bas pourront légitimement être fiers d’eux.

Et deux ours de plus, deux !

Trop, vraiment trop génial. Deux ours vont – peut-être – rejoindre cette année nos sublimes Pyrénées. Tout sera difficile, et les aboyeurs habituels vont forcément donner de la voix. Et ce qui reste un projet peut capoter. Mais un jour comme aujourd’hui, je m’en FOUS. Vive les ours ! Bises et affection à Sandrine Andrieux – que je n’ai jamais vue – et à Alain Reynes, s’il accepte du moins.

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Ferus et Pays de l’Ours – Adet ont décidé de lâcher deux ourses dans les Pyrénées

Les lâchers seront réalisés dès le printemps 2013, ou en 2014, selon la date d’autorisation.

Ils concerneront :

–      une ourse lâchée dans les Pyrénées-Occidentales, afin de commencer à restaurer la population menacée d’extinction rapide ;

–      une autre lâchée dans les Pyrénées-Centrales, afin de renforcer la population qui n’est pas encore viable.

Pour mémoire, les premiers lâchers d’ours en France, en 1996 et 1997, ont déjà été réalisés par ces associations.

Pour ces prochaines opérations, Pays de l’Ours – Adet et Ferus sont entourées de partenaires associatifs impliqués : SEPANSO 64, Nature-Midi-Pyrénées, France Nature Environnement Midi-Pyrénées, Nature-Comminges, Société Française d’Etude et de Protection des Mammifères, et des Parcs animaliers : « La Colline aux marmottes » (Argelès-Gazost) et « Parc’Ours » (Borce) qui apportent leurs compétences et leur expérience.

Ferus, Pays de l’Ours – Adet et leurs partenaires prendront en charge  l’intégralité des opérations : organisation, réalisation, et financement sur des fonds privés, afin d’éviter tout débat sur les dépenses publiques en période de crise.

Considérant la menace de poursuites judiciaires imminentes de la Commission Européenne contre la France pour insuffisance de protection de l’ours brun, le gouvernement a tout intérêt à donner une suite favorable et rapide aux dossiers déposés par les associations : son accord suffit pour lancer les opérations.

Paul Watson fout la zone à l’Élysée

Cet article a paru le 9 janvier 2013 dans Charlie-Hebdo

Le pirate Paul Watson ne se contente plus d’éperonner en haute mer les navires baleiniers. Pourchassé par les flics du monde entier, il veut maintenant obtenir l’asile politique en France. Pour Hollande, c’est la merde.

Hollande cherche les emmerdes, c’est pas possible autrement. La scène se passe dans le bureau du président il y a quelques semaines, comme le raconte à Charlie un participant. On fait semblant de parler de la planète entre deux bâillements, en compagnie des écolos de service. Soudain, Hulot s’enflamme à propos de Paul Watson, magnifique défenseur des baleines. Hulot considère que le sort fait à Watson est dégueulasse – il a raison -, et essaie de secouer Hollande. Le président, les yeux écarquillés : « Mais qui est ce Watson ? ». Delphine Batho, présente à la réunion en tant que ministre de l’Écologie, se penche alors vers notre grand homme et lui glisse : « Je vous expliquerai, monsieur le président ». Elle a intérêt à se magner, car Watson a décidé d’obtenir l’asile en France.

Mais reprenons dans l’ordre. Watson est un Canadien de 62 ans, fondateur en 1977 de l’association Sea Shepherd, ou berger des mers si on préfère causer français. Ce type en a simplement eu marre des blablas, y compris ceux de Greenpeace, d’où il a été viré. Pour lui et sa bande, sauver les baleines, les requins, les phoques et tous les poissons de sous les mers passe par l’affrontement avec les salopards qui pêchent illégalement. Ce qui fait du monde. Comme on peut pas raconter tous les éperonnages, abordages et sabotages, contentons-nous de l’exemple du Sierra, qui est le premier de l’épopée.

Début 1979, Watson parcourt les océans à bord d’un bateau qu’il a acheté, traquant un navire baleinier qui fait des ravages, le Sierra. Après bien des aventures (2), il coince le Sierra devant Porto, et l’éperonne à deux reprises, toutes machines chauffées à blanc. Esquinté, le Sierra parvient à grand peine à atteindre le port. Les flics portugais saisissent le bateau de Watson, et un juge le refile en dédommagement aux types du Sierra. Et c’est ainsi que Watson est grand : avec un copain rappelé d’Écosse, il monte clandestinement à bord de son propre navire, et décide de le couler plutôt que de le savoir à la poursuite des baleines. End of story.

Ou plutôt, début de 35 ans de poursuites homériques, au cours desquelles Watson et ses potes courent des risques on ne peut plus réels, car il arrive qu’on leur tire dessus. Ou qu’on les blesse en plein Antarctique à coup de lances à eau et de tiges de bambou. Le 13 mai 2012, Watson est arrêté en Allemagne, à la suite d’une plainte du Costa Rica pour des affrontements datant de 2002. Libéré sous caution, il finit par se planquer, car il redoute qu’une extradition vers le Costa Rica ne le conduise en fait dans les prisons japonaises, où l’on veut sa peau.

Où est-il en ce début d’année 2013 ? À bord du Steve Irwin, un bateau de Sea Shepherd, au milieu de l’océan Antarctique. Watson attend l’arrivée d’une flottille partie dans le plus grand secret des ports japonais pour aller buter des centaines de baleines. Rappelons que ces artificieux Nippons prétendent respecter le moratoire de 1986, qui interdit la pêche commerciale à la baleine. S’ils tuent par centaines chaque année des rorquals, c’est « à des fins scientifiques », faut pas confondre.

En résumé, ça ne va pas tarder à chier sur les mers. Du côté de Watson, quatre navires, un hélicoptère, trois drones et  une centaine de personnes sont sur le pied de guerre. Malgré ces apparences, Sea Shepherd défend les principes de la non-violence, et n’a jamais blessé – a fortiori tué – quiconque, ce qui n’est pas le cas des baleiniers. On va tâcher de suivre. Quant à notre pauvre Hollande, voici ce qui l’attend. Dès la fin de son périple antarctique, Watson redevient un fugitif international. Le petit doigt de Charlie lui a dit qu’il compte venir chez nous, et y rester. Des amis très actifs veulent que la France fasse de lui le premier réfugié politique écologiste de la planète. Ce qui aurait de la gueule. Mais pour Hollande, c’est le cauchemar : ou il accepte la présence de Watson, et il se fâche tout rouge avec les Japonais. Où il le balance aux harponneurs. Bonne année quand même, monsieur le président.

(1) www.seashepherd.fr/
(2) Racontées dans le délicieux livre Capitaine Paul Watson (Entretien avec un pirate), par Lamya Essemlali, Glénat. À déguster à la petite cuiller.