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Sur François de Rugy, nouveau ministre (2)

Je sors de mes cartons électroniques quelques vieilleries écrites ici, sur Planète sans visa, à propos de François de Rugy, notre nouveau ministre de l’Écologie. Ne loupez pas ceux sur les lobbies et les partenariats public-privé, c’est assez éclairant.

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Mais qu’est donc ce merveilleux Macron ?

15 mai 2017

Si vous ne le savez pas, je vous apprends que j’ai ferraillé contre certains, présentés comme écologistes, qui soutenaient sans hésitation le vote en faveur d’Emmanuel Macron. Contre Yves Paccalet et Corinne Lepage, notamment, auxquels j’aurais pu ajouter Matthieu Orphelin, ancien de la fondation Hulot, et très proche de ce dernier. Je laisse de côté, car ils sont par trop grotesques, des gens comme François de Rugy – lui aussi, comme Valls, avait signé la charte de la primaire socialiste avant de s’essuyer les fesses avec – ou Cohn-Bendit, désormais commentateur de matchs de foot et chroniqueur entre deux pubs chez Europe 1.

J’ai pu dire à certains, ces dernières semaines, que je préférerais me couper un bras que de voter Macron, et c’était faux. J’ai besoin de mes bras, surtout depuis le 7 janvier 2015, car mes jambes ne sont plus ce qu’elles étaient. C’était faux, mais c’était vrai, car je voulais surtout dire : jamais. Mais pourquoi, amis lecteurs ? Le psychodrame finalement comique du deuxième tour de la présidentielle a opposé deux personnages très détestables, mais également très différents.

Il va de soi, et qui me lit un peu le sait évidemment,  que je ne donnerai jamais ma voix à des crapules racistes. Je m’empresse de dire que je comprends aisément ceux qui, craignant – à tort, selon moi – une victoire de Le Pen, ont placé un bulletin Macron dans l’urne. Je les comprends, mais je ne les approuve aucunement. Ils en sont restés à des considérations nationales, estimant, cette fois à juste titre, qu’il est préférable de vivre dans un pays qui n’est pas dirigé par une clique comme celle-là.

Là-dessus, nous pourrions presque – presque – tomber d’accord. En effet, il est plus tranquille de vivre dans un pays où l’on n’expulse pas massivement les étrangers et où la bouille de madame Le Pen n’envahit pas les écrans. Seulement, la question posée n’est pas celle du confort moral, mental et quotidien d’une partie de la population. La question est : où va-t-on maintenant ? J’ai eu l’occasion d’écrire – encore dans mon dernier livre, Ce qui compte vraiment – sur les migrations humaines en cours. Des études concordantes indiquent qu’une bande de terre peuplée de 550 millions d’habitants, courant du Maroc à l’Iran, via l’Algérie, l’Égypte, Israël, la Palestine, l’Irak, la Syrie, l’Arabie saoudite, devient peu à peu inhabitable sur fond de dérèglement climatique. Les températures diurnes vont atteindre 50 degrés, celles nocturnes ne descendront plus sous les 30 degrés.

En clair, des dizaines de millions d’humains, peut-être des centaines de millions à terme, quitteront des territoires grillés par la chaleur. Regardez une carte, et dites-moi, je vous prie, où ils iront en priorité. Ce cataclysme désormais si proche – encore dix ans, encore trente ans ? – représente un danger abyssal pour les valeurs qui sont les nôtres, et ramènerait le Front National à bien peu de choses. Car de vous à moi, comment des peuples habitués à commander le monde – comme le nôtre, depuis le conseil de sécurité de l’ONU – réagiraient-il à des arrivées en masse ? Essayons d’être tous sincères, cela changera des mauvaises habitudes. De ce point de vue, le Front National de 2017 est hélas, hélas, hélas, bien peu de choses.

Le dérèglement climatique est la mère des batailles, car il porte en germe la dislocation de toutes les sociétés humaines, et la guerre de tous contre tous. Or n’est-il pas certain que l’aggravation continuelle de l’effet de serre est intrinsèquement lié à l’explosion du commerce mondial ? Et que cette explosion est fatalement soutenue par cette divine croissance que la plupart des pays sont décidés, comme naguère ce pauvre imbécile de Sarkozy, à aller chercher avec les dents ?

La croissance, c’est bien sûr de l’effet de serre concentré. La croissance de biens matériels, c’est inévitablement des émissions de gaz supplémentaires. Mon satané ordinateur en a produit, mais aussi la moindre chaussette si bon marché fabriquée au Vietnam par des gueux. Mais aussi le moindre ballon de foot cousu par des gosses dans un entrepôt sans lumière du Pakistan. Mais encore tout ce que vous portez, tout ce que vous possédez, tout ce que vous souhaitez posséder un jour. Et je parle de climat, mais je pourrais parler aussi de notre contribution nette, par nos importations, à la désagrégation de tant d’écosystèmes. Et d’ailleurs de l’appétit de tant de classes dites supérieures,  dans les pays du Sud, pour nos propres signes extérieurs de richesse : bagnoles, parfums, alcools, fringues, bijoux.

Tel est en trois mots le commerce mondial, largement dominé par la surpuissance des transnationales, qui n’ont plus à prouver leur amoralité. Celles du tabac, de l’amiante, des pesticides et de milliers de produits chimiques tous différents, ont amplement montré ce qu’étaient leurs buts, et leurs actions. Moi, je crois bien que c’est dans ce cadre, car c’est celui de la réalité, qu’il faut juger l’arrivée au pouvoir suprême d’Emmanuel Macron. Faut-il une fois de plus radoter ? Oui, visiblement.

Mais d’abord un petit détour par le rapport Rueff-Armand, bible des technocrates, publié en 1960. Il insiste beaucoup sur les « retards »  de l’agriculture, l’« archaïsme des structures parcellaires » et le manque de productivité de ce qu’on n’appelle déjà plus des fermes. Ce texte décisif et limpide « ne peut se dissimuler […] que le progrès des rendements tendra à accentuer la contraction des effectifs de main-d’œuvre ». Tout est dit en peu de mots. Il va falloir remembrer, c’est-à-dire augmenter les surfaces moyennes par la loi, et chasser de leurs terres les paysans « surnuméraires ». Le rapport Rueff-Armand n’est pas la seule cause du grand massacre des paysans et des campagnes, mais il leur servi de cadre explicatif. De justificatif auprès des puissants qui allaient dynamiter la civilisation paysanne. Tout devait disparaître, et tout a disparu avec : outre les mares et les tas de fumier dans la cour, outre les haies, les talus, le bocage, outre les abeilles, les grenouilles, les oiseaux, outre le nom des combes, des fossés, des champs, des bois, outre la lenteur et l’épaisseur du temps, la beauté d’un monde encore possible.

Si je parle de ce texte, c’est tout simplement parce qu’il a servi de repère, explicitement, à un autre rapport, connu sous le nom de Rapport Attali. À son arrivée en 2007, Sarkozy a aussitôt confié à son ami – de gauche, on s’en doute – le soin de réunir de toute urgence une « Commission pour la libération de la croissance française ». Pardi ! il fallait relancer la machine. Ces corniauds, qui de droite, qui de gauche, promettent depuis 1974 la fin du chômage de masse, et comme ils échouent à en pleurer, ils rêvassent de retrouver l’élan perdu de ces foutues 30 Glorieuses – une partie de notre vrai drame en vient -, quand la croissance atteignait 8% – en 1960 – ou encore 7,1 % en 1969.

Donc, une Commission de plus. J’en extrais les lignes directrices suivantes :

• Préparer la jeunesse à l’économie du savoir et de la prise de risque ;
• Participer pleinement à la croissance mondiale et devenir champion de la nouvelle croissance ;
• Construire une société de plein-emploi ;
• Instaurer une nouvelle gouvernance au service de la croissance.

Et j’y ajoute, pour faire bon poids, la fin du principe de précaution voulu par Chirac en 2005, pourtant si frêle garde-fou contre les délires « développementistes ». Parmi les 20 mesures-phares du rapport, pas une ne parle même de la crise écologique planétaire. Le dérèglement climatique n’est seulement pas évoqué. Ces gens sont irresponsables,  au point d’en devenir criminels.

Or, et j’y arrive enfin, qui est le rapporteur de ce funeste document, appelé à révolutionner la France au service de la croissance ? Emmanuel Macron, comme certains de vous le savent. Il était alors, à 29 ans, déjà l’ami d’Attali, et l’est resté. Ce qu’est Attali et ce que j’en pense, je l’ai écrit la dernière fois ici, après bien d’autres papiers. Ce type est profondément détestable. Il sera peut-être ministre.

Macron est un être radicalement petit. Je ne discute pas qu’il est doté de ce que certains appellent « l’intelligence logico-mathématique ». Il a fait des études, dont l’ENA. Apparemment fort bien. À ce stade, cela prouve que son cerveau fonctionne, ce qui est bien le moins lorsque vos deux parents sont médecins, dont l’un une sommité. Et puis ? Mais rien du tout ! On sait qu’il a été banquier d’affaires, ce qui prédispose assurément à considérer le sort des humiliés de ce monde. On se souvient, mais on ne se souviendra jamais assez de cette phrase prononcée en mai 2016 en face d’un gréviste : « Vous n’allez pas me faire peur avec votre tee-shirt. La meilleure façon de se payer un costard, c’est de travailler ». Travailler. Parler de travailler, quand cela veut dire pour lui lire des textes, recevoir, blablater, contresigner des ordres. Il a lu des livres, certes, mais surtout passé 99 % de son temps disponible en compagnie de gens riches, en bonne santé, échangeant de plaisants propos avant que de passer à table. Que sait-il du monde réel ? Une infime rumeur du sort de milliards d’êtres humains dont la vie est une plainte.

Ne parlons pas même de la France. Parlons une fois au moins du monde. Des paysans de partout, chassés de chez eux par le marché mondial et les satrapes locaux, qui finiront dans des bidonvilles sans eau ni chiottes. Des grands singes qui meurent, comme meurent les fabuleuses forêts de notre Terre. Des océans dont nous sommes sortis un jour, et auxquels nous rendons ce cadeau par l’empoisonnement et l’hécatombe. Des sols dont tout dépend, gorgés de toutes les bontés chimiques estampillés Monsanto ou Bayer, entreprises si performantes que Macron les porte au pinacle. Des éléphants, des Pygmées d’Afrique, des lions et des tigres, des Bochiman, des Yanomami, des îles Andaman, des habitants de Lagos, de Mexico, de Mumbai, des gosses d’Agbogbloshie brûlant le plastoc de nos vieux ordinateurs pour en retirer un fil de cuivre, de la puanteur, de la saleté, des maladies qui ne guériront jamais, des plaies aux jambes, au nez, aux yeux, aux mains qui ne se refermeront jamais. Il faudrait parler de ceux qui « soufflent vides les bouteilles que d’autres boiront pleines ». Macron se tait et se taira toujours, car il ne sait rien, mais le dit avec ce sourire kennédien qui plaît tant aux commentateurs et aux cuistres, si souvent les mêmes.

Voyez-vous, quelqu’un qui, en 2017, ne voit pas l’abîme qui vient, est à mes yeux irrécupérable. Et tel le cas de Macron, à ce point immergé dans l’idéologie de la machine, de la puissance matérielle, des droits de l’homme industriel à tout saloper, et pour tout dire du capitalisme débridé, qu’il ne rêve que d’une chose : encore plus. Encore plus loin, encore plus vite, toujours plus loin, toujours plus vite. Ne vous y trompez pas : son élection a son importance. Elle en aura dans le domaine clé de l’économie réelle, quand il s’agira de se partager les parts de marché comme on découpait jadis le territoire futur des colonies. Je vous le dis en toute certitude : Macron sera l’homme de la fuite en avant, car il l’est déjà.
Je ne doute pas qu’il offrira des colifichets à ceux des supposés écologistes qui lui auront fait suffisamment de lèche. Ici, un poste de député, là des strapontins au Conseil économique, social et environnemental (CESE), ailleurs quelque poste ou fromage républicains. Et les heureux récipiendaires iront comme de juste vanter le fort engagement « écologiste » de leur maître, avant de pourfendre les sectaires et fondamentalistes de mon espèce. Je ne les plains pas, je les vomis.

Moi, en ne votant pas pour ce sale type au second tour de la présidentielle, je savais ce que je faisais. Moi, je pensais au monde et à ses êtres. Moi,  je ne fantasmais pas un péril fasciste pour mieux cacher que je défends à mon profit un monde moribond, aussi dangereux que peuvent l’être certains blessés déchaînés. Moi, je suis un écologiste.
 

Sur François de Rugy, nouveau ministre (1)

Je sors de mes cartons électroniques quelques vieilleries écrites ici, sur Planète sans visa, à propos de François de Rugy, notre nouveau ministre de l’Écologie. Ne loupez pas ceux sur les lobbies et les partenariats public-privé, c’est assez éclairant.

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Placé, Cosse et Pompili sont magnifiques

11 février 2016

C’est tellement fendard que je ne résiste pas à l’envie de vous donner à lire ci-dessous un article du Figaro. Ça vient de tomber, comme on ne dit plus. Eh bien, pluie d’étoiles pour les amoureux transis du pouvoir socialiste. Ou plutôt, pluie de météores. Commençons par le plus drôle. Placé, qui avait tant rampé, tant tenu de fils dans ses mains, tant invité au restaurant, tant intrigué, tant caressé de rottweiler pour la cause – la sienne -, reçoit un tout petit sac de verroterie.

Secrétaire d’État ! Secrétaire d’État en charge de la simplification du même État. J’imagine le fou rire rentré de ses nouveaux maîtres ! Dans un an, tout aura disparu, façon bulle de champagne, et l’État n’aura évidemment pas bougé d’un nanomillimètre. Mais Placé sera heureux. Je l’espère en tout cas, car autrement, une telle facétie ne vaudrait pas la peine.

Pompili. Je ne connais pas la dame, mais je l’aperçois de temps à autre au fenestron, via le net. Comment ne pas rire de bon cœur ? Madame Pompili n’a strictement rien fait de sa vie – j’ai lu son impressionnant CV -, et elle continue avec allégresse. Secrétaire d’État à la biodiversité, face au délire « développementiste » des Valls et des Macron ! Ce qu’on appelle, quand on veut rester poli, une caution. Ou peut-être entend-elle faire dans la  « compensation », comme à Notre-Dame-des-Landes ? Tu me détruis un lieu unique de 2000 hectares, et je m’occupe de creuser trois mares à canards au bord de l’autoroute ? En tout état de cause, Pompili ne parlera jamais du vrai, vu qu’elle est assignée au faux. Depuis cinquante ans, la moitié des oiseaux qui nous faisaient l’insigne honneur de vivre ou d’enfanter en France ont disparu. Tel est le fond. Et telle est Pompili, qui s’éteindra doucement quand la bande au pouvoir sera passée à autre chose. En toute certitude, pas après le printemps 2017.

Cosse. Je la soupçonne sans preuve d’avoir compris l’essentiel. Pas l’essentiel sur la crise de la vie sur Terre – car de cela, elle se moque en totalité -, mais sur le fonctionnement népotique, clientéliste, courtisan et néanmoins ténébreux du sinistre parti EELV. Je vous résume : elle a organisé sa jeune vie sans jamais s’intéresser à l’écologie. Ma foi, elle n’est pas la seule. Mais brusquement, sans nul signe annonciateur, la voilà au sommet. En deux temps et trois mouvements, elle est propulsée après 2009 à la tête d’un parti de gouvernement. Qui l’a faite reine-potiche ? Cécile Duflot, évidemment, qui n’aurait jamais toléré à cette place une personnalité susceptible de révéler qu’elle-même, créature en son temps de Jean-Vincent Placé, n’est qu’une autre bulle de savon.

Cosse avait le choix : tirer sur sa laisse sans l’espoir de la casser un jour, ou s’évader à la première occasion. C’est ce qu’elle vient de faire, aidée en cela par son mari Denis Baupin, que j’ai connu, aussi baroque que cela semble, intéressé par la bagarre contre le tunnel du Somport. Bien sûr, Cosse n’est nullement devenue écologiste, mais le lui demande-t-on ? Elle vient d’envoyer se faire voir Cécile Duflot, en reprenant le ministère du Logement que cette dernière avait quitté au prétexte que « les conditions n’étaient plus réunies ».
Encore quelques motifs de grande rigolade. Duflot, déjà citée, se retrouve avec un jouet en miettes, EELV. Je lui annonce bien des rebuffades et de mauvaises surprises dans le cas où elle se présenterait malgré tout à la présidentielle de 2017. Duflot ? Un personnage secondaire, lisant son pauvre texte  au milieu de l’indifférence générale.

François de Rugy, ou le cocu magnifique. Les socialos ne lui ont rien offert. Rien, pas même une miette de pain. Il a pourtant tout fait, il aurait sûrement donné son corps si on le lui avait demandé. Il a dégueulé sur les zadistes de Notre-Dame-des-Landes, approuvé la déchéance de nationalité, et si j’arrête là, c’est parce que je me marre, et que je n’ai pas envie d’arrêter de rire. Rugy, député de Loire-Atlantique, n’est déjà plus qu’un souvenir. Et il ne peut même pas se refaire à Nantes, ville dirigée par une très jeune femme socialo – Johanna Rolland -, qui ne fait que commencer sa carrière d’apparatchik. Rugy, pas de panique : les Restaus du Cœur ne t’oublieront pas.

Sur un mode encore plus badin, signalons la disparition corps et bien de ce pauvre Jean-Luc Bennahmias, jadis secrétaire national des Verts, comme Cosse aujourd’hui. Depuis bien vingt ans, il ne rêve que d’une chose étrange : devenir ministre des Sports. Cela l’aura conduit bien loin, car après les Verts, il s’est embarqué jusqu’à Marseille avec Bayrou, avant de réaliser – il était temps, il est plus vieux que moi ! – qu’il est indiscutablement de gauche. D’où des discussions répétées à l’Élysée avec Hollande – il en est si fier -, d’où création d’un grandiose Front démocrate d’environ vingt personnes, qui se fond dans une improbable Union des démocrates et des écologistes (UDE), avec Placé et Rugy, sortis entre-temps d’EELV. Et même pas une sucette.

Un dernier mot : il existe parmi les lecteurs de Planète sans visa des électeurs et des soutiens d’EELV. Je forme le souhait qu’ils trouvent une explication générale à ce qui vient de se passer. Je veux dire : une explication qui fasse de la direction de ce parti – et de tous ceux, à la base, qui l’ont soutenue – autre chose qu’un ramassis d’arrivistes et de couillons de troisième zone. Et s’ils n’y parviennent pas, je serais très heureux qu’ils pensent à ces écologistes qui souhaitent la disparition totale et définitive d’une structure parfaitement nuisible. Nous sommes quand même quelques-uns à vouloir combattre l’infernale crise écologique qui déferle. Oserai-je l’écrire ? Nous valons mieux que ces pantins.

 

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Puis-je vous demander ?

L’article qui précède, sur Pierre Rabhi, a été lu par près de 15 000 [30 000 au 27 août] lecteurs différents, ce qui est beaucoup. Mais puis-je vous demander un effort supplémentaire contre la calomnie ? Vous pouvez envoyer cette adresse à vos contacts : https://fabrice-nicolino.com/?p=4615

et leur présenter l’affaire comme vous l’entendez. Il faut encore doubler ou tripler le nombre de gens au courant, seul moyen digne de faire face. Je vous fais une entière confiance,

Fabrice Nicolino

Trump fait monter le prix du somnifère

 

Amis lecteurs, trumpistes et non-trumpistes, je vous livre ci-dessous le billet que j’ai écrit vers 14 heures pour le site de Charlie, et qui y est encore visible. Il est court, comme vous verrez, et ne contient donc pas les méandres habituels de ma pensée. Mais enfin, il dit quelque chose que je pense. J’en ai réellement marre des  sérénades et des lamentations. Je viens de lire un papier de Reporterre, dont le titre m’a fait sursauter : « Trump, candidat de l’anti-écologie ». Par Dieu, Clinton ne l’était-elle pas, elle qui était la candidate des transnationales, moteur essentiel de la crise climatique ? Comme je suis fatigué, je ne vais pas plus loin. Mais mon point de vue essentiel, le voici : nous avons grand besoin d’un point de vue écologiste sur la marche du monde. Indépendant des modes, des truismes, des habitudes de pensée. C’est urgent, cela brûle même. Assez de jérémiades : Trump est ce qu’il est, mais Clinton tout autant. Au passage, la question du Tafta – et du Ceta – est un sujet-clé, car son sabordage rendrait un immense service à nous tous. Allez-y de vos commentaires.

 


Le billet de Charlie sur son site :

 

Comme il n’est pas encore intronisé, ce ne peut être considéré comme injure à chef d’État : Trump est un gros empaffé, et le restera. Dans le domaine si décisif de la crise écologique, il va probablement frapper très fort. Ainsi qu’on sait peut-être, il ne croit pas au dérèglement climatique, ce qui risque quand même de plomber l’ambiance à Marrakech, où se déroule en ce moment le 22e épisode des sommets climatiques internationaux. Royal et Fabius passeront moins à la télé.

Répétons : ce gros empaffé – bis – n’en a rien à foutre de rien. Mais est-ce bien une raison pour tout à fait regretter Clinton ? Cette si Grande Dame, défendue par tant de si Braves Gens, était pieds et poings liés au pied du big business américain et se demandait ces derniers temps comment se tirer du bourbier du Tafta, ce projet de traité commercial avec l’Europe. La pauvrette était coincée entre, d’un côté, ses supporters des transnationales et, de l’autre, la révolte de plus en plus vive d’une Amérique qui ne croit plus à la mondialisation.

Trump, ce gros empaffé – ter -, vole au secours des altermondialistes et, s’il tient parole, flinguera le Tafta à la hache et au couteau, comme il aimerait faire avec les Mexicains et les musulmans. Est-ce à dire, docteur, qu’on a mal au fion et qu’il n’y a pas de remède ? Certains jours, oui. Certains matins, on ferme les volets, on se bouffe un somnifère et on oublie le monde.

Ces si chers clampins de la crise climatique

Paru dans Charlie y a pas si longtemps

La crise climatique s’emballe, et de joyeux lurons continuent d’occuper la scène en brassant du vent avec la bouche et les bras. Pendant ce temps, les scientifiques préviennent que rien ne va plus, ce qui n’empêche pas les préparatifs de la COP22. Déjà 22 ? Déjà.

 

Salut empressé aux branlotins du grand raout appelé Climate Change. Ce « Sommet mondial des acteurs du climat » a rassemblé à Nantes, du 26 au 28 septembre, des héros de l’humanité. Dans le désordre des tribunes, la mairesse socialo de Nantes, Johnanna Roland, le désopilant Ronan Dantec, conseiller écolo de la ville, l’immense Brice Lalonde, la grandiose Laurence Tubiana. Tous d’accord pour un « futur plus solidaire et durable » en compagnie de leurs amis des transnationales. Parmi les sponsors officiels du machin, Air France – à deux pas de Notre-Dame-des-Landes ! -, Veolia et Suez, grands philanthropes de l’eau privatisée, ou encore Bouygues et ERDF. Encore bravo, les comiques associés.

Au fait, cette crise climatique ? Du côté de la propagande, nous volons tous de victoire en victoire grâce à la COP21, où tous les Folleville de la planète se sont copieusement embrassés sur la bouche. Ban Ki-Moon, secrétaire général des Nations unies, vient d’ailleurs de proclamer à New York que l’avenir serait « plus sûr, plus juste et plus prospère », propos qui ressemble étrangement à ceux entendus à Nantes. Pourquoi cet optimisme si réconfortant ? Parce que 31 États ont d’ores et déjà ratifié les beaux engagements de la COP21. Laquelle sera suivie d’une COP22 dès le 7 novembre prochain au Maroc.

Mais est-ce bien sérieux ? Telle est la question que je me propose de traiter en deux coups de cuiller à pot. Quel est le moteur à explosion de la crise climatique ? La production massive d’objets inutiles qu’il faut remplacer au plus vite pour que tourne la machine. Ce qui inclut les télés plasma, les trottinettes électriques, les ordinateurs dernier cri, les bagnoles climatisées avec appareillage électronique de bord permettant de se branler sans ralentir, les vacances à la montagne et à Bali, l’avion pour aller pisser au-dessus de l’Atlantique, les casques pour se tuer l’oreille, la goûteuse nourriture industrielle, etc. Et bien sûr, pour garantir tout cela ici, il faut impérativement envoyer à Pékin, Delhi ou Mexico la même chose, doublée de centrales nucléaires, de turbines géantes pour barrages colossaux, de trains TGV, de champagne et de putes. Non, les putes, ils ont déjà. Au pouvoir.

Nul n’envisage de remettre en cause un modèle si exaltant, et voici pourquoi tous leurs discours ne sont que daube commerciale. Si j’étais le seul à le penser, je me tordrais les mains d’inquiétude, mais les études s’accumulent, qui montrent que c’est encore pire que les prévisions du GIEC. Par exemple, les glaces du Groenland fondent bien plus vite que prévu. Par ailleurs, une réunion scientifique de haut vol vient de se tenir à Oxford, à l’invitation de l’Environmental Change Institute, que je m’empresse de résumer. L’objectif officiel de la COP21 – limiter la hausse de la température « bien en deçà de 2°C par rapport au niveau préindustriel, voire 1,5° » – est ridiculement impossible à atteindre dans le cadre retenu. On aura une augmentation moyenne de 1,5 ° dans une poignée d’années, et la trajectoire – vraiment dans le meilleur des cas, très improbable en l’état – est de trois degrés en moyenne. Et ce chiffre annonce à coup sûr des migrations massives, des guerres, des épidémies, d’innombrables disparitions d’espèces.

Citation très éclairante de Kevin Anderson, du Tyndall Centre for Climate Research, présent à Oxford : « Il y a un risque que [l’objectif officiel] nous détourne de certaines solutions. Le risque est que cela nous pousse vers des solutions de géo-ingénierie, plutôt que de nous inciter à réduire les gaz à effet de serre » en transformant nos économies et nos sources d’énergie.

La géo-ingénierie, voilà l’ennemi ! Incapables de sortir des rails de l’économie et du PIB, nos maîtres provisoires se ruent et se rueront toujours plus sur la pensée magique. Place à la séquestration de carbone ou à la construction de miroirs géants pour renvoyer vers le soleil un peu de ses rayons. Une seule question vraie : comment lutter à mort contre la prolifération d’objets toxiques, nuisibles, et de toute façon émetteurs de gaz à effet de serre ?