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La sécheresse fait le lit de la guerre

Cet article a été publié par Charlie Hebdo le 14 mai 2014

Et si la crise climatique était l’une des causes cachées du soulèvement syrien et des révolutions arabes ? Une pluie d’études montre que l’on a trop longtemps ignoré les fondements écologiques des guerres et des révolutions. Faut que ça change.

Ne plus avoir d’eau. Moins pour les hommes, plus pour les bêtes, plus pour la terre. En 2006, la Syrie connaît une première sécheresse, qui passe inaperçue. Le pays est aride – 45 % est même désertique – et dans les années « moyennes », il n’y pleut qu’entre 200 et 400 mm, contre 750 en France, avec des pointes de plus de 1100 dans une ville comme Brest.

En 2007, tout recommence, en pire. En 2008, tout recommence, en pire. Une situation qui, d’après l’ONU, n’a pas été vue depuis quarante ans. Mais entre-temps, la population est passée de 6 millions à 20, dont beaucoup, installés en ville, ont des exigences nouvelles. À la fin de l’été 2008, au moins un million de paysans et de bergers sont dans la détresse hydrique. Selon des estimations ridicules, mais officielles, 59 000 éleveurs ont perdu la totalité de leur cheptel, mort de soif. En 2009, tout recommence, en pire : 300 000 habitants de l’Est et du Nord-Est – autrefois le grenier à blé – quittent leurs terres, probablement à jamais, et s’installent à Damas, à Alep, à Deir ez Zor. En 2010, tout recommence, en pire : les exilés sont au moins 500 000. La récolte du blé passe de 4,1 millions de tonnes en 2007 – pour tout le pays – à 2,4. Or les Syriens ont besoin d’à peu près 4 millions de tonnes.

Là-dessus, la guerre civile, qui débute au printemps 2011, et une question qui tombe sous le sens : pourrait-il y avoir des liens entre sécheresse et révolte ? Le 27 janvier 2014, la chercheuse néerlandaise Francesca de Châtel publie un article éclairant dans la revue Middle Eastern Studies (1), qui permet de voir la Syrie tout autrement. Oublions un instant les djihadistes, les alaouites, les chiites, les sunnites, le Hezbollah libanais. La Syrie n’a-t-elle pas besoin avant tout d’eau ? De Châtel ne conteste pas l’existence de facteurs sociaux et politiques, mais juge que la question de l’eau les a influencés et a pu être modifiée par eux.

Comme tant d’autres ailleurs, le régime n’a rien vu venir, perdu dans ses rêveries de toute-puissance et d’expansion sans limites. Quand Assad le père – Hafez – arrive au pouvoir en 1970, 7,5 % de la surface agricole est irriguée. En 2006, on dépasse les 25 %. Dans son article, de Châtel met davantage en cause la gestion politique de la sécheresse par Damas que le phénomène lui-même. Le clan Assad, qui mise désormais sur la libéralisation à tout crin et la fin des aides publiques, aurait tout simplement laissé jouer le marché – le prix du fourrage double en quelques mois -, condamnant ses paysans les plus pauvres à l’exil intérieur.

Le dérèglement climatique expliquerait-il les sécheresses à répétition ? Le scénario est conforme aux prévisions régionales, mais de Châtel s’y intéresse d’autant moins que Bachar, le maître de Damas, tente de tout mettre sur le dos du climat, qui serait le seul responsable du désastre. Un autre travail passionnant permet en revanche de poser de nouvelles questions sur l’éventuelle dialectique entre changement climatique et le phénomène connu sous le nom de « révolutions arabes ». Publiée en février 2013 par un think tank américain proche des Démocrates – le Center for American Progress (2) -, l’essai à plusieurs voix ouvre sur un monde inconnu.

On connaît la vulgate répétée de télé en radio depuis des années. Un vendeur ambulant tunisien, Mohamed (Tarek) Bouazizi, s’immole par le feu le 17 décembre 2010 dans la petite ville de Sidi Bouzid. De proche en proche, magnifiée par les réseaux sociaux, la révolte gagne toute la Tunisie et plusieurs pays arabes, dont l’Égypte. Mais n’a-t-on pas oublié en route l’importance décisive du climat et de l’alimentation ?

Les auteurs ne font pas plus dans le simplisme que de Châtel. Les changements en cours du climat ne sauraient être la cause des changements de régime, mais leurs conséquences peuvent avoir allumé la mèche, faite des causes habituelles. Et ils reprennent à leur compte l’expression « threat multiplier » : la crise climatique serait un multiplicateur de menaces. L’extrême sécheresse de 2010 en Chine, qui a renchéri le prix du blé sur le marché mondial, a évidemment eu des répercussions sur l’Égypte, plus grand importateur de blé de la planète. D’une manière générale, les pays arabes sont fragiles, car ils disposent de peu de terres cultivables et de peu de ressources en eau, ce qui contraint la plupart à devoir importer entre 25 % et 50 % de leur consommation de céréales. En pointant des relations auxquelles le regard n’est pas habitué, comme celle entre la place Tahrir et la place Tienanmen, on court le risque d’être chahuté, voire ridiculisé par les chercheurs plus classiques, de loin les plus nombreux.

Et il est vrai qu’aucune preuve, au sens scientifique comme au sens policier, ne peut être apportée. Deux des rédacteurs de ce travail, Sarah Johnstone et Jeffrey Mazo concluent par ces mots : « Le printemps arabe se serait probablement produit d’une manière ou d’une autre, mais le contexte dans lequel il s’est produit n’est pas sans conséquences. Le réchauffement climatique n’a peut-être pas provoqué le Printemps arabe, mais il peut l’avoir fait arriver plus tôt ».

Ce n’est pas la première fois que des chercheurs – encore rares – s’intéressent aux liens pourtant puissants entre conditions écologiques et crises humaines paroxystiques. Aux Amériques, l’universitaire canadien Thomas Homer-Dixon – très connu, il a dirigé différents instituts traitant ce sujet – publie le 31 janvier 1992 (dans le New York Times) un article que beaucoup tiennent là-bas pour pionnier. Clinton vient d’être élu pour un premier mandat, et Homer-Dixon l’invite à agir au plus vite. S’appuyant sur les exemples du Bangladesh, de la Chine, des Philippines, d’Afrique du Sud, du Sénégal, de la Mauritanie, du Pérou, d’Haïti, il constate que « les pénuries de ressources renouvelables contribuent déjà à des conflits violents dans de nombreuses parties du monde en développement ». Et il ajoute plus loin : « Nous comprenons maintenant que [ces pénuries] produisent souvent des effets sociaux cachés et cumulatifs, comme les grandes migrations et des troubles économiques. Ces événements peuvent entraîner des affrontements entre groupes ethniques ainsi que des conflits civils et insurrectionnels ».

Dix ans plus tard, la guerre civile du Darfour semble bien lui donner raison. En 2003 commence dans l’ouest du Soudan – le Darfour – une guerre atroce entre les Janjawids et des tribus comme les Four, Massalit et Zaghawa. Les premiers sont des miliciens noirs arabisés, souvent nomades, les seconds des paysans sédentaires, noirs eux aussi.

La guerre devient si démentielle que, dès 2004, le Congrès américain la désigne comme un génocide, ce qui demeure contesté. Le fait est que le climat a changé entre le Nil et le lac Tchad. Le chercheur Jérôme Tubiana résume ainsi (3) l’état des lieux : « Au cours des quarante dernières années, [la région] a connu des vagues intenses de sécheresse, des précipitations de plus en plus variables et une diminution générale de la durée de la saison des pluies. On estime qu’au Darfour les températures ont déjà augmenté de 0,7°C entre 1990 et 2005 ».

En 2007 (le 16 juin), le secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon se paie une tribune retentissante dans le Washington Post. « Si la violence a éclaté au Darfour pendant la sécheresse, écrit-il, ce n’est nullement par hasard. Jusque-là, les bergers nomades vivaient tranquillement au contact des agriculteurs sédentaires. Un récent article décrit la manière paisible dont les agriculteurs partageaient leurs puits et accueillaient les éleveurs qui sillonnaient le pays en faisant paître leurs chameaux. Mais quand les pluies ont cessé, les agriculteurs ont clôturé leurs terres de peur qu’elles ne soient ravagées par les troupeaux ».

Est-ce aussi clair que semble le penser Ban Ki-moon ? Le Darfour a donné lieu, dans les marges, à des débats de grande qualité. Ainsi cet article inspiré du chercheur Marc Lavergne (CNRS, Groupe d’études et de recherches sur la Méditerranée et le Moyen-Orient), publié dans Revue Tiers Monde (Le réchauffement climatique à l’origine de la crise du Darfour ?). S’interrogeant sur les liens entre déplacés et mouvements de population d’une part, dérèglement climatique d’autre part, il note : « Le réchauffement climatique fait (…) office de facteur déterminant d’explication de ces mouvements de population. Cette « récupération » (…) peut conduire à des schématisations outrancières, voire à des erreurs permettant d’évacuer les responsabilités des acteurs effectivement à l’origine des crises ou des conflits ».

De fait, les autorités de Khartoum – la capitale soudanaise – ont surabondamment exploité l’explication « climatique ». Car non seulement elle masque leurs écrasantes responsabilités, mais elle fait retomber la faute historique sur les sociétés du Nord, qui sont bel et bien le déclencheur de la crise climatique. Mais malgré l’excellence des autres arguments avancés par Lavergne, il ne fait pas de doute que le climat devient une question politique majeure, au Darfour comme ailleurs.

La revue bien connue Science publiait le 1er août 2013 une méta-analyse portant sur 60 études publiées et 45 conflits (4). Le résultat – controversé – montre une corrélation évidente entre des événements climatiques parfois mineurs et l’irruption de conflit. À toutes les échelles spatiales et temporelles. On passe des violences domestiques à cause d’une canicule aux meurtres sur fond de sécheresse, des révoltes paysannes à l’effondrement de civilisations comme celles de Mésopotamie ou des Indiens mayas. Une fois encore, les auteurs – Solomon Hsiang, Marshall Burke, Edward Miguel – insistent sur les limites de leur travail. Le climat, en toute hypothèse, viendrait se surajouter à des causes plus coutumières, et ne serait pas nécessairement la cause principale des affrontements entre humains.

Corrélation ne veut pas dire explication. Mais le chantier qui vient de s’ouvrir ne fermera pas de sitôt. Selon des extrapolations tirées de cette dernière publication, le risque de guerre civile pourrait augmenter de 50 % dans un grand nombre de pays au cours des prochaines décennies.

(1) The Role of Drought and Climate Change in the Syrian Uprising: Untangling the Triggers of the Revolution
(2) The Arab Spring and Climate Change
(3) In « Darfour-Tchad : s’agit-il de la première guerre du climat ? »
(4) Quantifying the Influence of Climate on Human Conflict

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Entre récoltes et génocide

Faut-il ajouter le climat aux autres facteurs expliquant le génocide rwandais de 1994 ? En 1984 et surtout 1989, des sécheresses graves ont en tout cas frappé le pays et provoqué des famines. Avec entre les deux, les pluies surabondantes de 1987, détruisant les cultures de pommes de terre, de haricots et de maïs.

La suite n’est pas plus réjouissante. Dans un article publié en 1996 (Climat et crise rwandaise), l’agrométéorologue de la FAO René Gommes rapproche les conditions climatiques locales et la tenue des massacres. À l’automne 1993, quelques mois avant le début des tueries, « les pluies de septembre et d’octobre sont très faibles et conduisent à une réduction notables des rendements et des surfaces plantées. La première récolte de haricots est perdue, et les pluies insuffisantes ne permettent pas de replanter ». En mars 1994, quelques semaines avant l’embrasement, c’est pire, car des centaines de milliers de réfugiés du Burundi aggravent une situation alimentaire devenue critique. « Dans le nord, le déficit de production est du à la sécheresse et à des déplacements massifs de population (…)  Le sud a été particulièrement affecté par la sécheresse et la population est confrontée à des déficits alimentaires de proportions très inhabituelles. On signale des morts dus à la famine ».

Une autre question, totalement ignorée, pourrait avoir joué un rôle : l’érosion des sols. Dès 1992, l’agronome allemand Dieter König alerte sur la disparition du sol arable sous l’action des pluies : « Au Rwanda, écrit-il, les dégâts d’érosion peuvent être observés partout. La plupart des collines sont complètement déboisées et intensément cultivées ». 100 tonnes de sol par hectare, selon König, disparaissaient chaque année, à jamais. Rappelons que le Rwanda est un pays de 26 000 km2 – la Bretagne en fait 34 000 -, dont la population est passée de 1 830 000 habitants en 1949 à 6 750 000 en 1990, soit près de quatre fois plus. Juste avant le génocide, la densité de population pouvait atteindre 500 habitants par km2 à la campagne, conduisant les paysans à défricher toujours davantage. Un cercle vicieux menant à l’épuisement accéléré des sols et donc à une baisse des rendements de cultures vitales pour l’alimentation, comme le sorgho, les petits pois ou les haricots.

Pour le Rwanda comme pour d’autres pays, l’évocation de causes autres que politiques, sociales, économiques peut hérisser le poil. Le livre de l’Américain Jared Diamond « Effondrement » (Gallimard, 2006) concentre les critiques, car l’auteur y écrit notamment : « La population rwandaise a augmenté à un taux moyen de plus de 3 % l’an (doublement en moins de 24 ans). Le développement économique du Rwanda fut stoppé par la sécheresse et l’accumulation de problèmes environnementaux. Le pourcentage de la population consommant moins de 1600 calories par jour (niveau en dessous de celui de la famine) était de 9 % en 1982, 40 % en 1990. D’où le génocide en 1994. Il n’est pas rare, depuis, d’entendre des Rwandais soutenir qu’une guerre était nécessaire pour diminuer une population en excès et pour la ramener au niveau des ressources en terre disponibles. »

Pourquoi je vomis la politique (et les particules fines de l’air)

Comme ils sont détestables ! Parmi les (nombreuses) raisons qui expliquent pourquoi je ne vote pas, il y a bien entendu cette terrible pollution de l’air contre laquelle aucun de nos responsables n’entend bouger. D’un côté, on sait que tantôt les particules fines, tantôt l’ozone troposphérique – au ras des poumons -, tantôt les deux, les trois, les cent tuent massivement. Par milliers chaque année en France. Et même 42 000 personnes en 2 000, selon une étude contestée mais sérieuse (ici). Je ne parle pas des vastes massacres qui adviennent en Chine et en Inde par exemple, car aujourd’hui, c’est de la France que je souhaite parler.

Donc des milliers, des dizaines de milliers de morts par an chez nous. Nos Excellences sautent dans un avion dès qu’un fait divers quelconque attire les caméras, comme autant de mouches. Trois vitrines cassées à Nantes permettent à un Valls de rouler des mécaniques dans l’espoir de toucher Matignon en prime. Mais quand il s’agit de sauver d’une mort prématurée des vieux, des faibles, des gosses, des asthmatiques, plus personne. Honte à eux !

Franck Laval, que je tiens pour un ami – Dieu sait qu’il est éloigné de moi sur divers plans – et Nadir Saïfi, de l’association Écologie sans frontière viennent de déposer plainte contre X pour mise en danger de la vie d’autrui. C’est une plainte pénale – une première – qui pourrait (très) éventuellement déboucher sur la mise en cause d’individus, tenus pour responsables. Je fais grande confiance à l’avocat François Lafforgue, qui défend victimes de l’amiante et des pesticides, pour tirer de ce dossier tout ce qui peut l’être.

En attendant, le spectacle politique est simplement lamentable. Vous lirez tout au-dessous un article de Stéphanie Senet, du Journal de l’Environnement. Il est excellent et montre comme nos ministres se défilent. Philippe Martin, en charge de l’Écologie, tenait les moyens d’imposer la circulation alternée, seul moyen disponible – hélas ! – pour faire baisser d’un coup les teneurs en particules fines de l’air. Il ne l’a pas fait. Pourquoi ? On peut espérer qu’il l’a envisagé. Mais bien entendu, dans le contexte pourri des municipales – mon Dieu, allons-nous perdre 100 villes ? – et du pacte de responsabilité – la seule bouée de secours imaginée par Hollande et son clan -, il ne pouvait en être question.

Il ne faut à aucun prix embêter l’industrie, l’automobile, risquer une baisse de la confiance et de la sacro-sainte consommation. Il faut continuer, accélérer encore, et tant pis pour les vaincus et les cadavres. Cela porte un nom : l’ignominie. Je rêve du temps, qui viendra peut-être, où ces gens qui nous gouvernent pourront être jugés pour ce que je considère comme des crimes. On n’est pas obligé d’être d’accord.

À ce compte, que dire des écologistes d’Europe Écologie-Les Verts ? Les salons et strapontins doivent décidément être confortables. Le 26 mars 2012, il y a donc deux ans, quand Sarkozy était aux manettes, madame Eva Joly, alors candidate à la présidentielle, tonnait (ici). Je la cite : « Alors que l’Ile-de-France et de nombreuses autres agglomérations traversent un nouvel épisode de pollution de l’air, il est temps de dénoncer l’inaction du gouvernement devant ce drame sanitaire ». N’est-ce pas mignon tout plein ? Hier matin, sur RTL (ici), la cheftaine du parti « écologiste », Emmanuelle Cosse, a déclaré sans rire : « Ça fait quand même une semaine qu’on sait que ça va venir. Je regrette qu’on ne soit pas capable d’anticiper. » Ces gens ne sont pas des criminels, certes non. Mais des complices, assurément.

Le pompon provisoire pour ceusses de France Nature Environnement (FNE). Je rappelle ce que j’ai tant développé dans mon livre Qui a tué l’écologie ? (LLL). FNE est un conglomérat de 3 000 – chiffre officiel – associations locales, régionales, thématiques de protection de la nature. C’est le mouvement institutionnel, historique, qui dépend très largement des subsides publics pour survivre. Une petite bureaucratie, insupportable à mes yeux, gère la boutique, et assure représenter ce mouvement associatif. Moi qui appartiens à Bretagne vivante – fédérée à FNE – depuis 1987, je peux vous assurer qu’ils ne me représentent en aucune manière. Bref.

Comme ces bureaucrates sont perpétuellement à la recherche de breloques et de sous, ils s’acoquinent régulièrement avec des industriels dans le cadre de partenariats qu’ils jugent nécessaires. J’apprends à l’instant que FNE a signé un pacte inouï (ici) avec « Keolis, opérateur de transport de voyageurs, MOBIVIA Groupe, leader européen de l’entretien et de l’équipement de véhicules, et la fondation PSA Peugeot Citroën ». Les gens de FNE sont tellement sûrs qu’on ne les attendra pas au coin de la rue, qu’ils ont publié leur communiqué scélérat le jeudi 13 mars, hier même, quand étouffaient les mioches, les vieux, les asthmatiques. La conclusion de leur texte – au fait, vous avez touché combien, les gars ? – est fantastique : « Comme d’autres modes de transport, la voiture a toute sa place dans la mobilité. Il revient aux élus de fournir les conditions pour une mobilité désormais choisie et non plus subie, adaptée aux besoins et aux environnements. »

J’ajoute, car tout de même ! que Peugeot et son ancien patron Jacques Calvet sont les responsables majeurs de ce qu’on nomme la « diésélisation » du parc automobile français. Pendant des années, les équipes de Peugeot ont fait le siège de tous les décideurs publics et ils ont GAGNÉ ! Le diesel, source majeure d’émission de particules fines, est PARTOUT. Et FNE donne quitus à Peugeot, redore son blason, efface les dettes morales si grandes du constructeur pour trois picaillons. Shame on you ! Vous êtes vraiment aux dimensions de vos pires caricatures.

Voilà comment ça marche. L’impunité d’hier efface les morts d’aujourd’hui et prépare les crimes de demain. Et voilà pourquoi j’enverrai proprement chier les bureaux de vote les 23 et 30 mars. Vous n’êtes pas obligé de me croire, mais je ne demande sûrement pas qu’on me suive. C’est seulement que j’avais grand besoin de me soulager. C’est fait.

Dessous, l’article d’actualité dont je vous parlais plus haut.

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L’air pollué a encore de beaux jours devant lui

Le 13 mars 2014 par Stéphanie Senet

Un nouveau pic de pollution aux particules fines est attendu le 14 mars

Un nouveau pic de pollution aux particules fines est attendu le 14 mars

Le seuil du niveau d’alerte (1) pour les particules fines PM10 a de nouveau été dépassé, ce 13 mars, sur la partie Nord de la France ainsi que dans la vallée du Rhône. La pollution atmosphérique voit rouge dans plus de trente départements. Face à cette situation, le ministère de l’écologie annonce la gratuité des transports en commun franciliens mais rejette la circulation alternée.

Pourquoi la circulation alternée n’est-elle pas décrétée dans les régions frappées par des pics de pollution à répétition? Le ministre de l’écologie Philippe Martin n’a pas voulu répondre à cette question lors de la conférence de presse, qu’il a organisée à la hâte, ce 13 mars à l’hôtel de Roquelaure, sept jours après le premier dépassement du seuil d’alerte aux particules fines en France.

Réclamée par les écologistes, cette mesure avait pourtant eu droit de cité, le 18 décembre dernier, au ministère. Philippe Martin avait alors annoncé vouloir la réactiver lors des pics de pollution aux particules fines et aux oxydes d’azote (NOx).

Un décret inutile

Le dossier de presse publié à l’issue du Comité interministériel de la qualité de l’air (Ciqa) précisait qu’il fallait d’abord changer la réglementation. «La circulation alternée fait partie des mesures d’urgence pouvant être prises dans les situations de dépassement du seuil d’alerte, pour limiter l’ampleur des pointes de pollution. Mais ce dispositif ne peut être déclenché à l’heure actuelle que pour les pics de pollution à l’ozone».

Le ministère remettait ainsi à 2014, «l’élaboration d’un décret en Conseil d’Etat permettant d’instaurer la circulation alternée lors de pics de pollution réglementés comme les particules PM 10 ou les oxydes d’azote».

Trois mois plus tard, la circulation alternée semble avoir disparu des écrans gouvernementaux. Mais contrairement aux arguments ministériels, il est tout à fait possible  de l’instaurer immédiatement sans prendre un nouveau décret, et cela dans tous les départements de l’Hexagone. «La loi LAURE (2) votée en 1996 permet de prendre un certain nombre de mesures de restriction de la circulation, quel que soit le type de pollution atmosphérique», confirme Corinne Lepage, qui est à l’origine de cette loi. «J’ai d’ailleurs pris soin que le texte ne renvoie à aucun décret d’application afin d’éviter des retards accidentels dans les bureaux des ministères», ajoute-t-elle.

Gratuité des transports en commun franciliens

Ce 13 mars, le ministère de l’écologie s’est donc contenté d’annoncer, aux côtés du président de la région francilienne Jean-Paul Huchon, la gratuité des transports en commun d’Ile-de-France, du 14 au 16 mars compris. Un bilan sera dressé le 15 mars au soir pour décider une éventuelle prolongation. Tous les habitants sont invités à laisser leur voiture au parking.

Pour d’autres mesures, il faudra attendre le projet de loi sur la transition énergétique, «qui comprendra un volet sur la qualité de l’air», a précisé Philippe Martin.

La pollution de l’air a été classée, le 17octobre 2013, comme cancérigène avéré (classe 1) par le Centre international de recherche sur le cancer (Circ).

L’air pollué, meilleur à vélo?

Hier, la ville de Paris avait ouvert la voie en annonçant la gratuité de la première heure d’Autolib’ et des locations de courte durée en Velib’. Mais qui veut rouler à vélo lorsque l’air est pollué? Les Parisiens ont en tout cas répondu à l’appel. Selon la municipalité, le service Autolib a enregistré, ce 13 mars, une hausse de 46% des parcours, et les locations de Velib’ ont progressé de 72% par rapport à jeudi dernier.

Dans l’attente de mesures adaptées

Le candidat écologiste à la mairie de Paris, Christophe Najdovski a dénoncé «l’inaction irresponsable des pouvoirs publics qui ont attendu les 8ème jour de pollution pour que cette mesure soit prise». Il réclame aussi de compléter le dispositif au plus vite, par la mise en place de la circulation alternée des automobilistes et par le contournement routier de Paris par les poids lourds. Un contournement que la préfecture de police aurait pu instaurer depuis 5 ans, comme le permet le plan de protection de l’atmosphère francilien, selon Claude Bascompte, président des Amis de la Terre Paris.

Plus largement, le responsable associatif réclame trois mesures importantes: «sensibiliser les citoyens sur les enjeux de la lutte contre la pollution atmosphérique par un dispositif d’information et d’alerte cohérent, renforcer les transports en commun et restreindre fortement la circulation automobile». De façon régulière, et pas seulement en cas de pic de pollution.

(1)Le seuil du niveau d’alerte s’élève à 80 µg/m3 d’air sur 24 heures pour les PM10. Le plafond du niveau d’information est égal à 50 80 µg/m3.

(2)Loi sur l’air et l’utilisation rationnelle de l’énergie (LAURE) du 30 décembre 1996 instaure notamment les plans de protection de l’atmosphère et les plans de déplacements urbains

La circulation alternée testée pendant une seule journée

La circulation alternée n’a été mise en place qu’une seule journée dans l’histoire française. Le 1er octobre 1997, alors que Dominique Voynet est ministre de l’aménagement du territoire et de l’environnement, elle est appliquée à Paris et dans 21 communes d’Ile-de-France, en raison d’un dépassement du seuil d’alerte du dioxyde d’azote. Résultat: le trafic a été réduit de 15% dans la zone de circulation alternée, de 20% à Paris et sur le boulevard périphérique et de 8% dans le reste de l’Ile-de-France. Les émissions de dioxyde d’azote ont aussi été réduites de 15% par rapport à la veille.

La violence à Nantes (à propos de Notre-Dame-des-Landes)

Voilà. C’est l’extrême-soir de ce 22 février 2014. Une manif de plus a parcouru les rues de Nantes, en opposition au projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes. Que vous dire ? Que je condamne l’attaque contre un bureau de Vinci, les violences contre les CRS et les gendarmes ? Eh bien, non. Je sais que ces coups de sang seront exploités par le parti socialiste au pouvoir, de manière à nous discréditer un peu plus, mais je m’en fous bien.

La violence, c’est eux. EUX. Eux qui essaient d’imposer leurs lamentables vues sur l’avenir de ce pays, et du monde, dans une indifférence abyssale à la crise climatique qui nous menace tous. Une question, qui n’a semble-t-il rien à voir : aurait-il fallu acclamer Pétain en juin 40, au motif que les députés de la Chambre le plébiscitaient ? Fallait-il suivre le chancelier Hitler dans la destruction des valeurs humaines parce qu’il avait obtenu 44% des voix le 5 mars 1933 ? Et dites-moi, faut-il applaudir cette classe politique lamentable qui nous crie qu’il faut un nouvel aéroport à Nantes ?

Je me répète : cela n’a rien à voir. Sauf que si. Nous sommes en guerre. Une guerre non déclarée contre la vie sur Terre. Et Jean-Marc Ayrault nous somme de sortir des tranchées avant d’être hachés menu par la mitraille. Mais polope, monsieur le Premier ministre, à vous l’honneur. Montrez donc comment meurt un imbécile.

Jusqu’où ira Montebourg (sur les mines) ?

Arnaud Montebourg, aile gauche du parti au pouvoir, ministre sordide. Politicien jusqu’aux ongles, sans morale, sans parole aucune. Pendant la campagne de la présidentielle, en 2012, il écrivait sur son blog – tout a disparu, vous pensez bien -, ainsi que le rappelle le quotidien L’Humanité du 12 juillet 2013, que l’exploitation des gaz de schiste présentait des « risques écologiques démesurés » et qu’elle aurait un « impact considérable en terme de réchauffement climatique ».

Il ajoutait que l’’indépendance énergétique « ne doit pas se faire au prix de catastrophes environnementales », avant de conclure : « La France doit aujourd’hui repenser sa politique énergétique. Il ne s’agit pourtant pas de s’engager tête baissée dans des alternatives plus risquées et plus polluantes, mais de réfléchir à un véritable plan d’essor des énergies renouvelables, afin de limiter notre dépendance énergétique et d’instaurer un véritable développement durable ».

Sitôt en place, sitôt ministre, il oubliait tout, devenant chaque jour un peu plus un militant pro-gaz de schiste, jusqu’au ridicule. Il poursuit sur la même voie, et vient d’annoncer la création patriotarde d’une Compagnie nationale des mines (ici), chargée de prospecter en France au sens très large – la métropole, mais aussi des territoires volés jadis, comme la Guyane -, dans l’espoir d’y trouver de l’or, du lithium, peut-être bien du charbon, car Montebourg se contrefout bien sûr du dérèglement climatique. Ce qui compte, c’est lui.

Ainsi que le note fort justement un communiqué des Amis de la Terre, « Réouverture de mines en métropole et en outre-mer, accaparement des ressources des pays du Sud, cette compagnie nationale des mines ne sera en fait qu’un nouveau bras armé d’une politique qui est menée depuis des décennies au travers des multinationales françaises. L’État est en effet actionnaire d’Areva  et d’Eramet, dont les activités font des ravages dans le monde depuis trop longtemps ».

Je vous le dis comme je le pense, c’est abominable. Je ne vois décidément pas quel accommodement envisager avec de tels adversaires. Mais ne sont-ils pas plutôt des ennemis ?

Mais qui nous sauvera de ceux qui nous perdent ?

Je lis comme vous les informations du monde. Elles sont mauvaises. Le Nordeste brésilien s’enfonce dans une série d’affreuses sécheresses, qui transforme massivement la pauvreté en misère (ici). En Californie, on est en passe de battre un épouvantable record, vieux de cinq siècles (ici) : l’eau semble avoir disparu de l’un des greniers agricoles des États-Unis. En Australie, la température a localement dépassé 50 degrés et s’est maintenue au-dessus de 45 degrés dans des régions entières, pendant des semaines (ici). Des millions d’animaux, domestiques et sauvages, sont simplement morts de soif. On peut sans exagération parler d’Apocalypse.

Dans le même temps, inondations bibliques en Grande-Bretagne, tempêtes sans fin en Bretagne, chutes de neige dantesques au Japon, etc, etc. Bien qu’aucune preuve directe ne puisse – évidemment ! – être apportée, tout indique que le dérèglement climatique commence à faire sentir ses effets. Ce sera probablement pire demain, mais c’est déjà impressionnant. De manière cohérente, cohérente par rapport aux prévisions concernant le désastre, les phénomènes climatiques extrêmes se multiplient. Ce qui menace à l’horizon, et je suis désolé de devoir l’écrire, c’est la dislocation. La dislocation de toutes les digues sociales, morales, politiques.

Que dire dans ce cadre de nos élites politiques ? Pour une fois, je ne tenterai pas de nous accabler, nous gli uomini qualunqui, nous les hommes ordinaires. J’ai assez dit, et je maintiens, par Dieu !, que nous avons une immense responsabilité dans le lamentable état des lieux. Qui d’autre que nous s’est rué sur la télé à écran plat, la bagnole électronique, l’ordinateur, le téléphone portable ? Mais aujourd’hui, je n’entends parler que de nos dirigeants.

Pour dire les choses simplement, leur médiocrité fait peur. Celle d’Hollande est évidente, celle de Sarkozy également. Pas plus, également. Dignes héritiers tous deux de cet individualisme fou, qui confond toujours plus, depuis deux siècles, droits de l’Homme et fun personnel. Ils veulent, comme les sots accomplis qu’ils sont, le beurre et l’argent du beurre. Le pouvoir, les femmes, la reconnaissance, l’amour même. Crétins ! On serait en droit d’attendre d’eux transcendance, sacrifice, exaltation des qualités les meilleures, et l’on ne rencontre que banalité, train-train et pour tout dire imbécillité. Comment qualifier, dites-moi, le projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes ou les bouffées délirantes répétées sur les gaz de schiste ?

Peu de personnalités atteignent aux dimensions de l’Histoire des humains. Encore moins sans doute seraient à l’échelle plus bouleversante de la crise en cours, qui touche la vie elle-même. Et le tout laisse peu d’espoir d’en voir surgir. Pourtant, il en suffit d’un. Voyez plutôt De Gaulle, officier supérieur de 50 ans en 1940, ayant baigné toute sa vie dans des milieux de droite souvent monarchistes et antisémites. Quand il se lève de toute sa hauteur à Londres, en juin de cette année de débâcle, il est seul. Non, il n’est pas seul : il est entouré de militants fascistes (ici). Il va pourtant sauver la République, avec des militants de gauche.

Est-ce à dire que j’attends De Gaulle ? Non pas, mais un sursaut, certainement. Je ne saurais en décrire les contours, je ne saurais dire qui sera la poule – nous ? lui ? elle ? – et que seront les œufs. Mais nous avons d’évidence besoin d’une rupture. D’une cassure du temps politique si morne dans lequel nous sommes si mal. Ma certitude, tant de fois répétée : il n’y a rien à attendre d’eux, qui nous gouvernent. Il faut chercher ailleurs, et vite.