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C’est la guerre (à Notre-Dame-des-Landes)

Vous êtes sans nul doute au courant. Ce matin, des centaines de flics et de militaires, appuyés par des hélicoptères, ont délogé par la force un grand nombre d’habitants de Notre-Dame-des-Landes, près de Nantes, où ce pauvre imbécile de Jean-Marc Ayrault, ancien maire de la ville, aujourd’hui Premier ministre, entend bâtir un second aéroport (voir ici, ici et ). En agissant de la sorte, le triste gouvernement de la France vient de franchir un pas qui, pour moi, révèle l’ampleur du gouffre entre eux et nous. Cette expression, « eux et nous », a beaucoup servi dans le passé des idées, et pas toujours, loin s’en faut, d’heureuse manière. Il n’empêche qu’elle m’est venue spontanément. Car entre ceux qui défendent un avenir possible pour les hommes et tous les êtres vivants d’une part, dont je suis, et les autres, il existe un univers. Quand je dis les autres, inutile d’insister je pense, cela fait beaucoup de monde. Mais c’est ainsi que je vois les choses, qu’y puis-je ?

Foin d’illusions : le gouvernement socialiste est un adversaire. Et même un ennemi. L’incroyable opération militaire lancée contre les habitants de Notre-Dame-des-Landes n’a rien à voir, évidemment, avec les tueries d’Alep, les massacres de la République démocratique du Congo, ni même les ignobles opérations menées au Brésil, en Argentine, au Paraguay pour chasser les petits paysans de leurs terres et y imposer le soja transgénique. Non, rien à voir.

Pour autant, il s’agit à mes yeux d’un acte de guerre, dans un sens précis : il marque une frontière, infranchissable. Il désigne deux camps irréconciliables, qui défendent assurément deux manières de voir la vie ensemble, et l’avenir qui nous attend. Pour leur part, les socialistes sont maîtres de tout le jeu politique alors que leur candidat à l’élection présidentielle n’a recueilli, au premier tour, que 25 % des électeurs inscrits. Au pouvoir, ils se montrent incapables de seulement imaginer régler les problèmes du modèle qu’ils défendent pourtant. Cette économie, cette banlieue, ce racisme fou, cette lancinante question des retraites, ce prix de l’énergie, ce nucléaire, cet effondrement de l’industrie automobile, ce chômage de masse interminable, mais c’est leur legs ! Le leur et celui de leurs jumeaux de l’UMP, car tous deux se partagent le pouvoir depuis des décennies sans que rien n’ait bougé, sans que rien n’ait jamais été résolu.

Ces derniers jours, burlesques au possible, ont vu le gouvernement chanceler sous des coups de butoir en papier mâché. Ridicules « pigeons » défendant les patrons de start-up, ridicule Peillon réclamant un débat sur le shit, ridicule Tartempion s’embourbant au sujet de la taxe télé dans les résidences secondaires, etc. C’est bien parce que Jean-Marc Ayrault est incapable, et risible à force, qu’il a cru malin de monter l’odieuse opération aéroportée contre ceux de Notre-Dame-des-Landes. Quand tout s’effondre, quand tout démontre que la politique ancienne ne peut rien et ne sait pas davantage, reste l’apanage essentiel de l’État : la coercition. Autrement dit ce monopole de l’usage prétendument légitime de la force.

On peut aussi le dire autrement. Ayrault, nécessairement soutenu en la circonstance par Hollande, a voulu montrer qu’il bandait encore. C’est vulgaire ? Que oui, ce l’est. Mais personne ne saurait l’être davantage que Jean-Marc Ayrault, qui masque de la sorte sa si cruelle impuissance politique. Je l’accuse, en plus de tout le reste, de violer allègrement la loi du pays qu’il représente si mal. Car en effet, la France est dotée depuis juillet 2005 d’une loi sur l’énergie dont j’extrais, de l’article 2, cette phrase : « En outre, cette lutte [contre le dérèglement climatique] devant être conduite par l’ensemble des Etats, la France soutient la définition d’un objectif de division par deux des émissions mondiales de gaz à effet de serre d’ici à 2050, ce qui nécessite, compte tenu des différences de consommation entre pays, une division par quatre ou cinq de ces émissions pour les pays développés ».

De ce point de vue, Notre-Dame-des-Landes n’est pas seulement une lamentable ânerie, qui nous ramène de manière fantasmatique au temps où le climat semblait éternel. Franchement, est-il compatible de miser, avec de l’argent public, sur le développement du trafic aérien, et de prétendre diviser par cinq nos émissions de gaz ? Franchement. Mais ce foutu aéroport est aussi et surtout un symbole. Le symbole éclatant que culturellement parlant, au sens le plus profond, les socialistes ne lâcheront rien. Parce qu’ils en sont incapables. Parce qu’ils ne savent pas même ce que l’expression « crise écologique » contient d’inévitables contraintes au regard desquelles les leurs – par exemple le déficit public – perdent toute signification.

Bien entendu, mais faut-il, ici du moins, insister, les écologistes officiels EELV ne valent guère mieux. Ils ont abdiqué à propos de l’aéroport au moment où leurs petits chefs signaient un déshonorant accord électoral avec le parti socialiste. Et si j’écris déshonorant, ce n’est pas, non pas, pour me faire plaisir. C’est parce que lorsqu’on prétend que le feu est au lac, on ne se tourne pas vers le bac à sable pour y faire des pâtés. Alors que la crise infernale du climat est à nos portes, se vendre pour un ministère et demi est une insulte faite aux hommes.

Et pour le reste, bien sûr, MOBILISATION ! Non-violente, cela va de soi pour moi, mais MOBILISATION tout de même. Nous n’avons, nous les écologistes sincères, pas le droit de reculer. La bataille de Notre-Dame-des-Landes, qui ne fait que commencer, doit être gagnée. Perdre ici serait lâcher partout ailleurs. Ce combat est à mes yeux une cause sacrée. ¡ Sin jamás retroceder, adelante!

PS : j’attends les commentaires de tous les foutriquets écologistes enrubannés et décorés présents à la Conférence environnementale du mois dernier. Le mois dernier. Elle est bien belle, la transition écologique de cet excellent monsieur Hollande.

Et une con-fait-rance environnementale, une !

La bouffonnerie est reine. Rions donc comme à Carnaval. Pleurons de même, puisque, de toute façon, notre impuissance est totale. Pour ce qui me concerne, je regarde avec stupéfaction la pantomime qui se prépare. Comment ? Vous n’êtes pas au courant ? Je résume pour les sourds et mal-entendants : M.Hollande réunit vendredi 14 et samedi 15 septembre, au palais d’Iéna de Paris, une Conférence environnementale. Sur le modèle, mais en parodie, du Grenelle de l’Environnement voulu par Sarkozy en septembre 2007. Je vous glisse sous forme de PDF deux documents que l’on a le droit de juger hilarants. Un sur le déroulement (organisation des débats.pdf), l’autre qui donne la liste des participants (invités.pdf).

Mon premier commentaire sera évident : le simple fait que se tienne pareil conclave marque une défaite du mouvement écologiste. En effet, le cadre imposé par les socialistes est digne de l’émission télévisée des années 70 qui s’appelait Chefs-d’œuvre en péril. On y considérait la France des villages et l’affreuse atteinte du temps sur les nobles monuments légués par l’Histoire. Il s’agissait de dépenser quelques picaillons pour sauvegarder un clocher ou l’aile d’un château. Ma foi, cela ne mangeait pas de pain. Refaire le coup près de cinquante ans plus tard n’est pas seulement ridicule : il s’agit d’une insulte jetée au visage des centaines de millions – qui seront bientôt des milliards – de victimes de la crise écologique planétaire.

Hollande and co, qui se moquent tant de l’écologie qu’ils ne savent pas ce que c’est, prétendent donc, avec l’aval des écologistes officiels qui participent, incarner une vision nationale des écosystèmes. C’est baroque, inutile de s’appesantir, mais comme il faut entrer dans les détails, allons-y. La question de l’énergie ? Les pauvres âmes qui nous gouvernent ne pensent qu’à une chose : gagner un point de croissance pour éviter d’être jetés au prochain scrutin. Le dérèglement climatique ? Plus tard, un jour, peut-être. Je sais que Hollande a vu à plusieurs reprises Christophe de Margerie, patron de Total, par l’entremise de Jean-Pierre Jouyet, cousin de ce dernier et patron de la Caisse des dépôts et consignations (ici).

C’est on ne peut plus normal compte tenu de leurs rôles respectifs, mais que se sont-ils dit ? Selon ce que j’ai glané – je ne suis pas certain -, ils ont abordé la question des gaz et pétrole de schiste. Côté cour, Hollande et ses amis refusent toute exploitation en France, où la technique de fracturation hydraulique est interdite par une loi votée par la gauche et la droite l’an passé. Côté jardin, les mêmes misent sur un retournement de l’opinion, qui sur fond d’augmentation continue du prix du gaz domestique, pourrait accepter des forages en France. À la condition, par exemple, que les pétroliers bidouillent une technique présentée comme différente de la fracturation hydraulique. En façade, donc, intransigeance gouvernementale face aux gaz de schiste. Et en privé, encouragements donnés à Total pour malaxer l’opinion publique. L’affaire Bezat montre que nous sommes face à un plan concerté. En deux mots, Jean-Michel Bezat, journaliste au Monde, y publie le 26 juillet un reportage réalisé aux États-Unis – 700 000 puits en activité, des régions entières transformées en Lune aride – sur les gaz de schiste. Surprise relative – Bezat est un grand admirateur de l’industrie -, ce reportage est très favorable au point de vue des pétroliers. Et puis plus rien.

Et puis on apprend que le voyage de Bezat a été payé par Total (ici). On, mais pas les lecteurs du si déontologique quotidien du soir, qui n’ont évidemment pas le droit de pénétrer dans l’arrière-boutique. En résumé : Total prépare le terrain, en accord avec Hollande, pour qui l’exploitation des gaz de schiste en France serait une bénédiction électorale. Et une violation grossière de la loi Énergie de juillet 2005, qui prévoit une division par quatre des émissions de gaz à effet de serre en France à l’horizon 2050. Mais que représente la loi au regard d’une possible réélection ?

Revenons à la Conférence qui commence demain. Si j’ai abordé en commençant le dossier des gaz de schiste, c’est parce qu’il est emblématique. Comme l’est le nucléaire, défendu sans état d’âme par ce gouvernement, ainsi que par le précédent. Reportez-vous plus haut au déroulement des festivités. La table-ronde numéro 1 s’appelle : « Préparer le débat national sur la transition énergétique ». On devrait mettre au centre de toute discussion la crise climatique et les extrêmes dangers d’une industrie sans contrôle, le nucléaire. Or non. On va comme à l’habitude blablater, de façon à « définir les enjeux du débat national », puis « définir les grandes règles du débat national ». En 2012, après tant de centaines de rapports, tant d’alertes et de mises en garde, d’engagements passés – le référendum sur le nucléaire promis par Mitterrand en janvier 1981 -, nous en sommes encore au point mort.

Et nous le resterons, je vous en fiche mon billet. Deux ministres en exercice participent à cette table-ronde truquée : Delphine Batho, ministre de l’écologie, et Arnaud Montebourg, ministre du redressement productif. Les deux sont en faveur du nucléaire. Le second clairement en faveur de l’exploitation des gaz de schiste. Et de même madame Batho, qui, en hypocrite accomplie, fait semblant de croire que le dossier ne bouge pas. La fracturation hydraulique n’est-elle pas interdite par la loi ? À côté des deux ministres, une « facilitatrice » du nom de Laurence Tubiana. J’ai écrit sur elle en 2008, si cela vous intéresse : c’est ici.

Ceux qui acceptent de siéger dans ces conditions sont des dupes ou des manipulateurs. Peut-être les deux. Il n’y a pas de débat sur l’énergie, car les décisions ont déjà été prises. Ce que le pouvoir veut, c’est une caution. Il l’aura. Les écologistes officiels qui ont servi la soupe à Sarkozy il y a cinq ans peuvent bien aujourd’hui feindre qu’on ne les y reprendra plus. Si, on les y reprendra, aussi longtemps que les structures dégénérées qu’ils conduisent existeront. Voulez-vous qu’on parle des autres tables-rondes ? Bon, soit. L’intitulé de la deuxième est saisissant. La biodiversité s’effondre partout, mais, cocorico, on va s’atteler à la mise en œuvre de « la stratégie nationale pour la biodiversité » de manière à « favoriser la prise de conscience citoyenne ». C’est tellement con que ce n’est même plus drôle. On trouve ceci sur le site de notre ministère de l’Agriculture : « Grâce à l’Outre-mer, avec 11 millions de km2 de zone économique exclusive (ZEE), la France dispose du deuxième espace maritime mondial, après celui des USA. Dans l’Océan Indien, les zones sous juridiction française s’étalent sur une surface huit fois plus grande que celle de la métropole. Cet immense espace maritime, réparti dans tous les océans, dote la France d’une grande richesse en matière de biodiversité marine, ce qui constitue à la fois un atout et une responsabilité. »

Formidable, hein ? Alors que l’Europe, pour une fois inspirée, souhaite interdire progressivement le chalutage profond, notre France vertueuse s’y oppose. S’y oppose, à nouveau pour de sordides intérêts politiciens. Or le chalutage profond est une catastrophe écologique planétaire (ici). Autre menu exemple : le nickel est en train de tuer à jamais des espèces endémiques de Nouvelle-Calédonie, venues en droite ligne du  Gondwana, supercontinent créé il y a 600 millions d’années et dont la Nouvelle-Calédonie est l’un des ultimes morceaux, à la dérive depuis bien avant l’arrivée des hommes sur terre. Non, bien sûr que non, on ne parlera pas de biodiversité. Et pas même chez nous, dans notre vieille France où l’agriculture industrielle est reine. Le Foll, ministre de l’Agriculture, a dealé depuis des semaines avec la FNSEA, puissance dominante, au point de ne pas même inviter à la Conférence de demain la Confédération paysanne, pourtant proche de la gauche. Au point d’aller visiter le 3 septembre les industriels français des biocarburants, fiers défenseurs d’une filière criminelle (ici). Je dois bien reconnaître que ces gens me dégoûtent.

Le reste ? Quel reste ? Table-ronde 3 : « Prévenir les risques sanitaires environnementaux ». Ministre présente : Geneviève Fioraso, militante déchaînée du nucléaire, des nanotechnologies, de la biologie de synthèse (ici). Les deux dernières tables-rondes, chiantes comme la mort dès leur énoncé, devraient causer fiscalité et gouvernance. Tout cela est à chialer. Mais comme je n’écoute que mon grand cœur, je n’entends pas vous quitter sans positiver un peu. Attention ! ce qui suit est à prendre au premier degré, malgré ce qui précède. Un certain nombre d’écologistes officiels, qui se rendront demain au palais d’Iéna, gardent ma sympathie. Notamment ceux du tout nouveau Rassemblement pour la planète (ici), comme André Cicolella, Nadine Lauverjat, Franck Laval ou François Veillerette. Ils vont tenter d’arracher quelques mesures dans le domaine de la santé, et même si je crois qu’ils se trompent sur le fond, ils ont mon estime et mon affection. Ceux-là du moins pensent à l’avenir.

Pascal Canfin, nouveau ministre, face à un putain de barrage

Ne quittez pas de suite cette page, même si le préambule vous paraît long. Je vais bel et bien parler de Pascal Canfin, dirigeant d’Europe Écologie – Les Verts, devenu depuis peu ministre délégué en charge du « développement ». Mais patience, car je dois avant toute chose vous parler de la vallée de l’Omo, en Éthiopie. Je doute que beaucoup d’entre vous connaissent ce lieu, qu’il me faut donc présenter en quelques mots. L’Omo est une rivière, qui coule le long de 760 kilomètres depuis ses sources situées au sud-ouest d’Addis-Abeba, la capitale. La ville est installée sur un haut-plateau dont l’altitude varie de 2300 à 2600 mètres. L’Omo, après avoir taillé sa route là-haut, descend par une vallée sublime qui s’achève en delta dans le lac Turkana, qu’on a longtemps appelé Rudolf. Je laisse aux spécialistes le soin de dire si une rivière se jetant dans un lac est aussi un fleuve.

Cette partie inférieure de la vallée de l’Omo se trouve aux portes du Kenya – le lac Turkana est pour l’essentiel sur son territoire -, très près de cette Rift Valley – la vallée du Rift – où l’aventure humaine a connu de saisissants mouvements. On a découvert ici de nombreux fossiles humains, dont certains d’Homo abilis, un ancêtre qui pourrait bien avoir inventé l’outil. Mais il n’y a pas que les morts, dans cette vallée basse de l’Omo. Il y a les vivants, les survivants du terrifiant développement imposé au monde entier. Huit peuples au moins, 200 000 personnes peut-être, vivent le long de l’Omo. Qui est paradoxalement une zone semi-aride. L’eau est tout.

Les Bodi, les Daasanach, les Karo, les Muguji, les Mursi, les Nyangatom attendent tout des crues de l’Omo, en quoi ils ont raison (ici). Depuis des temps plus anciens qu’internet, ces peuples cohabitent avec la rivière, qui dépose sur ses rives un limon qui apporte, après travail, du sorgho, du maïs, des haricots, et quelques pâturages pour les bêtes. La biodiversité autre qu’humaine ? Ce territoire à peu près unique abrite 300 espèces d’oiseaux, 80 espèces de gros mammifères, sert de refuge aux lions, aux rhinos, aux éléphants, aux chimps, aux buffles, aux léopards, aux girafes. Merde, croyez bien que je n’en rajoute pas.

Mais il y a Addis. Où, comme partout ailleurs dans le Sud de ce monde malade, trône une folle bureaucratie urbaine. Qui réclame les mêmes standards de vie que les nôtres. Qui connaît parfaitement la chanson du « développement » et des aides publiques déversées par la Banque Mondiale et tous ses clones. Ne croyez pas que l’Éthiopie est une vague province oubliée. C’est un immense pays qui compte chaque jour un peu plus. Un pays grand comme deux fois la France, et dont la population dépasse 90 millions d’habitants. 90 millions ! L’Éthiopie fera parler d’elle sous peu, et ce ne sera pas pour jouer de la mandoline. J’ajoute qu’un régime atroce, inspiré par l’expérience soviétique stalinienne, et longtemps soutenue en France par notre si bon parti communiste, a régné en Éthiopie de 1974 à 1990. On appelait cela le Derg – gouvernement militaire provisoire de l’Éthiopie socialiste -, puis la République populaire démocratique d’Éthiopie, le tout mené après 1977 par l’une des plus belles crapules du siècle passé, Mengistu Haïlé Mariam. Lequel, après avoir été chassé du pouvoir en 1991, s’est réfugié au Zimbabwe, où sévit Robert Mugabe, un autre salopard qualifié.

C’est dans ce pays éthiopien qu’ont été construits une dizaine de grands barrages, de manière à pouvoir gaspiller l’électricité comme EDF nous a appris à le faire à la maison. L’un d’eux devrait être achevé en 2014, qui s’appelle Gibe III, à environ 300 km au sud-ouest d’Addis. Comme son nom l’indique, il est le troisième. Le troisième d’une série de barrages édifiés sur l’Omo. Mais Gibe III appartient à une race différente, car lorsqu’il fonctionnera – s’il doit jamais fonctionner -, il sera le plus haut barrage hydro-électrique d’Afrique, et permettra en un coup de doubler la capacité électrique installée de toute l’Éthiopie (sur la base des chiffres de 2007).

Ce qui se passera à l’aval des 240 mètres de hauteur du mur de béton, on le devine. Mieux, on le sait. Des peuples entiers – si l’on considère qu’un peuple est aussi sa culture – mourront à jamais. Cette manière si singulière qu’ont les Daasanach ou les Muguji d’habiter le monde partira à la benne. La gigantesque benne à ordures où tout s’entasse à une vitesse désormais stupéfiante. Plus de crue, plus de vie. Plus de pâturages, plus de villages. Est-ce bien compliqué ?

Comme le chantier est avancé, il faut tenter de comprendre ce qui passe par la tête des demeurés habitant aujourd’hui les rives de l’Omo. Pardi ! pour eux, c’est la vie ou la mort. Tout le reste est insignifiance. En ce moment, au moment précis où j’écris ces mots qui se perdront à coup certain, des flics et des militaires éthiopiens ratissent hameaux et villages de la vallée de l’Omo. Sans témoins, ils tabassent, arrêtent et emprisonnent les récalcitrants, volent et tuent le bétail. Vont-ils plus loin ? Je n’en serais pas autrement étonné – je doute fort que CNN et TF1 envoient sur place des équipes rutilantes -, mais je n’en ai aucune preuve. Je me base sur une enquête de terrain d’une des ONG les plus respectées de la planète, Human Rights Watch (ici). Outre le gaspillage d’électricité, le barrage servira à irriguer 100 000 hectares de terres vendues par Addis à l’encan. À des transnationales étrangères, dans le but principal de cultiver la canne à sucre, plante de grand rapport. L’accaparement des terres, c’est-à-dire le vol, c’est cela : s’emparer de vastes surfaces par tous moyens étatiques, puis détourner l’eau, sans laquelle le pillage ne serait pas assez rentable.

Ce barrage coûte très cher. Évidemment. Si le gouvernement éthiopien devait le financer, il ne le pourrait. Et c’est pourquoi, dans sa grande sagesse industrialiste, il a fait affaire avec le club des Grands Destructeurs Associés de la planète, au premier rang desquels la Banque Mondiale. Cette merde globale est une merde globale. Mondialisée, je veux dire. Et je ne me lasserai jamais de rappeler que deux institutions clés de la destruction du monde ont été récemment dirigées par des socialistes français. Plus exactement, l’Organisation mondiale du commerce (OMC) l’est encore : le socialiste Pascal Lamy, qui serait autrement ministre français, commande à cette association de malfaiteurs depuis 2005. Et M.Strauss-Kahn, qu’on ne présente plus, a dirigé le Fonds Monétaire International de 2007 jusqu’à ses menus soucis sexuels.

La Banque Mondiale est donc au centre de ce maudit barrage éthiopien. Et elle vient de débloquer 243 millions de dollars à l’Ethopie et 441 millions au Kenya pour réaliser le raccordement électrique de ce dernier pays au grand barrage en construction. C’est dégueulasse ? C’est au-delà des mots. Sauf que notre belle Agence française du développement (ici) est dans le coup, qui finance elle aussi ce que les promoteurs nomment « l’autoroute électrique ». Je n’ai pas le temps de détailler ce qu’a été, ce qu’est encore cette AFD, véritable bras armé de l’État français depuis sa naissance en 1941. L’AFD est indissociable de ce qu’on a nommé à juste titre la Françafrique.

Et c’est à cet instant que nous retrouvons Pascal Canfin, membre éminent d’Europe Écologie – les Verts, et nouveau ministre délégué, en charge du « développement ». Je ne connais pas cet homme, que des amis, qui l’ont fréquenté, présentent comme un garçon respectable. Je vais donc faire comme si, et lui adresser la lettre suivante :

» Eh bien, monsieur le ministre, vous voilà d’ores et déjà au pied du mur. Du barrage, si vous me permettez. Je sais, et vous savez mieux que moi que les attributions de votre ministère vous donnent la tutelle de l’Agence française du développement (ici). Ne présidez-vous pas le conseil d’orientation stratégique de cette institution ?

» Aussi bien, votre responsabilité personnelle concernant le barrage sur l’Omo est-elle immense. Certes, vous pouvez vous abriter derrière les décisions déjà prises, et prétendre qu’elles n’engagent vraiment que vos prédécesseurs. Vous le pouvez. Ce serait commode, ce serait aussi suicidaire. Car vous suivriez alors, inéluctablement, le sort de Jean-Pierre Cot, éphémère ministre de la Coopération de Mitterrand après 1981, congédié tel un domestique des temps passés pour avoir osé parler de la Françafrique. Ou, en plus dérisoire encore, celui de Jean-Marie Bockel, « exfiltré » en catastrophe de son poste de secrétaire d’État à la Coopération, en 2008, pour avoir déplu à MM.Bongo et Sassou-Nguesso.

» Faut-il, dans un autre registre, rappeler le sort ministériel funeste fait à votre camarade de parti Dominique Voynet ? Incapable d’œuvrer comme la ministre écologiste qu’elle prétendait être, elle restera dans la (très) modeste histoire récente comme celle qui fut incapable de trouver les mots justes après la marée noire de l’Érika. Vous pourriez bien, mutatis mutandis, vous retrouver rapidement dans une situation proche. En accompagnant une politique indigne et en tournant le dos au vrai changement, lequel vous mettrait forcément en danger. Dans le monde tel qu’il est, monsieur le ministre, celui qui s’oppose à la marche à l’abîme ne finit pas avec une retraite de ministre.

» Il est pour vous une autre voie que celle du déshonneur ou de la démission. Si cela vous semble nécessaire à votre carrière, eh bien assumez donc ce financement, au nom du passé. De la France, si vous préférez. Chargez au passage la barque de ces messieurs de la Sarkozie, qui ne sont plus à cela près. Mais aussi et surtout, dénoncez ! Mais ruez ! Mais criez sur tous les toits que l’aide de la France au barrage de l’Omo est en contradiction totale avec les valeurs qui sont les vôtres. Une forte parole de cette France que vous représentez aurait un effet direct, majeur, sur les autres bâilleurs de fonds, qui se tiennent tous par la barbichette. Dont la présence d’un seul entraîne et rassure tous les autres. En revanche, si par malheur vous deviez rester muet, que vous soyez alors maudit à tout jamais ! Car rien ne vous interdit de poser des limites. Rien ne vous empêche de dire à vos alliés socialistes et au pays que vous ne serez pas une potiche. Une déclaration ferme de solidarité avec les peuples de l’Omo vous vaudrait l’exécration des industrialistes et le soutien définitif de ceux, partout dans le monde, qui savent ce que cache le mot amer de « développement ».

» Arrivé à ce stade, monsieur le ministre, je dois avouer qu’il me vient un doute. Ayant lu certains de vos propos depuis votre nomination, je me demande avec inquiétude si vous avez seulement parcouru ce très grand livre : « Le développement : Histoire d’une croyance occidentale ». Dans cet ouvrage essentiel, Gilbert Rist montre comme l’histoire fait d’une idée une idéologie, puis une force matérielle. Tenez, je suis prêt à vous l’envoyer à mes frais. Que diable entendez-vous nous dire, lorsque vous écrivez (ici): « Vous l’avez noté : en remplaçant le terme Coopération au profit de celui de Développement, l’intitulé du Ministère qui m’a été confié par le Premier ministre est d’ores et déjà un marqueur du changement souhaité par le Président de la République. Un symbole qui révèle aussi la marque de la volonté politique qui anime le Gouvernement dans son ensemble ». Je me répète, pardonnez ma familiarité : il me semble que la lecture de Gilbert Rist s’impose.

» Monsieur le ministre, vous et vos conseillers pouvez bien entendu passer ces mots par pertes et profits. Et suivre la voie si naturelle de ceux qui tiennent le pouvoir, puis s’y accrochent. Il me semble qu’il serait plus noble de commencer par aller faire un tour dans la vallée de l’Omo. Un voyage ministériel auprès des Bodi, Daasanach, Karo, Muguji, Mursi, Nyangatom marquerait réellement le changement dont tout le monde se réclame sans jamais avoir à le prouver. Si le cœur vous en dit – sait-on jamais ? -, je suis tout prêt à vous accompagner. Et je suis on ne peut plus sérieux. Avec mes salutations écologistes,

Fabrice Nicolino

Dites-moi, vous croyez qu’il va répondre ?

PS : L’avocat William Bourdon apparaît comme un proche du nouveau pouvoir (ici). Fort bien.  Grand défenseur des droits de l’homme – c’est sans ironie -, créateur de l’association Sherpa, critique résolu de la mondialisation cannibale dont le barrage éthiopien est comme un étendard, Bourdon peut et doit évidemment défendre les peuples de l’Omo. Et démontrer du même coup qu’il se distingue de tous ceux qui, après 1981, ont oublié c e qu’ils prétendaient être, au motif que la gauche était au pouvoir. Je lui demande, je nous demande à tous un sursaut. Bas les pattes devant la rivière Omo ! Cela semble ridicule ? Ça l’est. Qui s’attaque à l’Everest avec une pelle en plastique est ridicule.

Faut-il réellement sauver PSA ?

Ce n’est pas bien drôle, car je m’apprête à parler de la bagnole, ennemie du genre humain et de la vie sur terre, bien au-delà de notre espèce. Je vais même parler de Peugeot et de la France de M.Hollande, mais avant cela, un mot pour détendre l’atmosphère. Je vois que certains continuent de voir des avantages à cette invention des Enfers. Je dois reconnaître que, bien que n’ayant pas d’automobile, je m’en sers à l’occasion. Et l’occasion n’est jamais si loin que cela. Aussi bien, je n’entends pas me complaire dans un exercice de culpabilisation, fût-il tourné contre moi-même. Au fond, la situation est si grave qu’elle mérite davantage que simple flagellation.

J’ai écrit ici plusieurs articles sur le sujet, dont je ne citerai que deux. Le premier racontait une France qui aurait tout misé sur le train il y a cent ans (ici). Comme cela aurait été merveilleux ! J’en ai le frisson rien qu’en y pensant. Nous aurions pu nous passer de l’étalement urbain, de nombre de cancers des bronches, des autoroutes si désespérantes, d’une partie au moins de cette vitesse qui tue l’esprit humain. Dieu ! nous avons échappé à un vrai bonheur.

Le second (ici) évoque une étude apparemment sérieuse de l’été 2009, dont je vous livre ce court résumé : le monde comptait alors 672 millions de bagnoles, mais par la grâce d’une augmentation de 600 % des ventes dans les pays « émergents » d’ici 2018, il pourrait espérer atteindre cette année-là 1,5 milliard d’unités. Nous sommes sur cette route. Bien sûr, cela suppose une apocalypse humaine, géographique et spatiale, sociale, sanitaire, écologique. Complète et totale. Mais qu’importe, franchement, à ceux qui prennent les décisions en notre nom ?

Je serai bien incapable de seulement imaginer, dans les grandes lignes, ce que ce programme de destruction de l’espace, des ressources, de l’avenir signifie. En fait, je crois bien que cet effort d’anticipation dépasse les capacités humaines. Dans le Sud, pour ne regarder que de ce côté, la bagnole individuelle trucide ce qui sert de villes et oppose chaque jour un peu plus, dans une sorte de guerre civile – larvée, pour l’heure – ceux qui tiennent un volant et ceux qui courent derrière. Ces crétins au pouvoir ne semblent pas même imaginer cette évidence qu’une ville a ses limites physiques intrinsèques. Et qu’en y ajoutant chaque jour des milliers de véhicules en plus des autres, il arrive un moment où plus personne ne circule. Je suis injuste : les bureaucrates de Canton, en Chine, viennent de décider de limiter à 120 000 par an le nombre d’immatriculations nouvelles. La ville compte à la louche 2,4 millions de bagnoles, soit 2,5 fois plus qu’il y a cinq ans, avec une croissance annuelle moyenne de 19% (China Business News). Je parie que la mesure ne tiendra pas. Où iraient les millions d’autos produites désormais chaque année en Chine ? Allons, soyons sérieux.

Venons-en à Peugeot PSA. Qui annonce en France une baisse de 13 % de ses ventes mondiales. Préalable plus que probable à un plan de licenciements massifs. Notamment à Aulnay-sous-Bois, où j’ai distribué naguère, sous les coups des staliniens de la CGT et des petites frappes fascistes de la CFT, des tracts appelant à l’unité entre Français et immigrés. Si je note au passage cette anecdote, c’est pour insister sur un point : je souhaite que la vie et le travail des milliers de prolos d’Aulnay soient considérés, respectés et d’une certaine manière protégés.

Mais de quelle manière ? La droite – je ne prends pas la peine de chercher – ne voit qu’une solution : un surcroît de compétitivité qui permettrait à PSA de tailler des croupières aux autres constructeurs. En avant vers le néant, et pied au plancher. La gauche gouvernementale envisage – ce sera peut-être fait dans les prochaines heures – d’accorder des aides publiques à l’entrepreneur privé pour sauver les quelques meubles encore debout. Il faut sauver PSA, car la bagnole, c’est l’économie, et si le chômage étend encore son ombre menaçante, adieu aux élections de 2017. En avant vers le néant, pied au plancher. La gauche mélenchoniste et communiste rappelle les profits passés du groupe automobile, et exige que le pouvoir empêche des « licenciements boursiers » et accorde des « droits nouveaux aux travailleurs dans la gestion de leurs entreprises ». Les écolos officiels d’Europe-Écologie Les Verts se planquent derrière dossiers et maroquins. Pas un ne prend la peine de parler aux prolos de PSA de l’avenir. Il y a des coups de pieds au cul qui se perdent.

Le futur est par définition dans les limbes. Mais qui est écologiste ne peut que constater cette évidence : la bagnole individuelle appartient à un temps du passé, pendant lequel les hommes, en naïfs indécrottables, pensaient le monde sans ses limites. Changer, aussi vite qu’il est possible, de modèle universel de déplacement est d’évidence un impératif catégorique. Je sais bien que cela semble un objectif démesuré, mais sauver les écosystèmes de leur affaissement, aussi. La bagnole n’est simplement pas possible. Ainsi qu’on disait naguère, ainsi que j’ai pu le clamer sur les berges de la Seine au printemps 1972, « la voiture, ça pue, ça pollue et ça rend con ». Comme je n’ai pas changé d’avis, comme au contraire j’ai ajouté quantité d’arguments contre le monstre de métal et de plastique, j’en arrive à me demander si je ne suis pas obsédé sur les bords. Possible.

Mais il y a de quoi. Les sommes démentielles englouties dans la voiture, ses réparations, ses accidents, les routes, les cancers induits, les drames et sacrifices familiaux itou, doivent être réaffectées à la restauration écologique de la planète, de manière à assurer le minimum pour les dix milliards d’humains qui seront là dans quelques années. À moins que nous n’entendions nous débarrasser des surnuméraires ? Les humanistes-droits-de-l’hommistes qui n’abordent pas le sujet me font royalement chier.

Tout le reste est aussi absurde que criminel. Les forces politiques préfèrent leur démagogie et leur stupidité coutumières. Pourtant, PSA pourrait devenir une occasion historique de faire comprendre aux ouvriers de l’automobile que The Times They Are a-Changin’. Que cela plaise ou non, les temps sont bel et bien en train de changer. Il faut enfin dire que les métiers associés à l’automobile sont condamnés par la crise écologique. Sans jeter à la benne les ouvriers, qui ont perdu santé et jeunesse dans les ateliers. J’ai une idée, qui ne vaut peut-être pas tripette, mais qui en tout cas permet d’ouvrir une discussion.

Un, il faut garantir l’avenir professionnel des ouvriers de l’automobile. Sans conditions, par une signature publique qui nous engagerait tous. La France est encore assez riche pour cela. Deux, et pour commencer, il faut fermer l’usine d’Aulnay. D’autres suivront, inéluctablement. Trois, il existe sur place un savoir-faire ouvrier et technicien fabuleux. Et des machines. Quatre, il faut faire de PSA-Aulnay – je continue de prendre Aulnay comme point de départ – un lieu symbolique de notre volonté de changement.

Symbolique, mais aussi réel, matériel. Aulnay pourrait devenir la pierre de fondation d’une industrie de l’énergie renouvelable. Cela vous semble niais ? Poursuivons. L’Allemagne est en train de bâtir des services éoliens et solaires qui font de ce pays – qui sort du nucléaire – un exemple. Je n’oublie pas le reste, vous vous doutez bien. Ni Merkel, ni le reste. Mais en tout cas, l’Allemagne nous montre qu’il n’existe pas un seul chemin. Si la question énergétique est en France aussi taboue, c’est bien sûr à cause de la surpuissance de pouvoirs comme EDF et Areva, qui disposent de clientèles politiques dans les deux camps.

Or, il est facile de faire l’inventaire de certains besoins énergétiques satisfaits en dépit du bon sens. Des particuliers, mais aussi quantité de collectivités – villages et bourgs, petites boîtes, paysans, pêcheurs, etc. – pourraient aisément – non, d’accord, pas aisément – basculer vers un usage raisonnable de formes d’énergie renouvelable. Encore faudrait-il définir un cahier des charges, dessiner des prototypes, essayer, prouver, vendre.

PSA-Aulnay, coincé dans une zone industrielle immonde, pourrait devenir un lieu de réflexion et d’action de valeur mondiale. Certes, pas en un mois, pas en un an, pas même en dix ans peut-être. Mais n’est-il pas essentiel, compte tenu de la merde suffocante où nous sommes plongés, de relever enfin la tête ? D’avoir de l’ambition ? De tenter des coups susceptibles au moins de redonner un peu d’espoir ? Une telle initiative est inconcevable sans un débat social de qualité. Sans un engagement collectif sans faille. Sans la garantie qu’on ne laissera pas tomber les prolos d’Aulnay et d’ailleurs.

Est- ce concevable ? Je ne sais. Les forces politiques, Verts compris, sont en dessous de tout. Si l’on met de côté le friselis à peine perceptible de leurs microscopiques divergences, chacun peut voir ce qui se prépare. Le marché automobile français est dit « mature ». Trop de gens ont trop de bagnoles – une, deux, trois-, souvent récentes, rarement à bout de souffle. Renault importe, ce traître, des voitures low cost assemblées en Roumanie, comme la Logan. Le client devient rare. La seule perspective de relance, c’est la prime à la casse, associée à des modèles nouveaux, que l’industrie du mensonge – la pub – rendra appétissants. Toute la classe politique, malgré ce que certains prétendent, est au fond d’accord avec ce modèle, qui nous condamne tous.

Alors quoi ? Alors, en attendant mieux, parler. Se parler. Réfléchir. Ensuite entraîner. Et ne jamais oublier que nous n’avons rien à attendre de ceux qui dirigent, quelle que soit leur couleur. Tant que la société ne sera pas en mouvement, les castes professionnelles au pouvoir resteront au service de la destruction. C’est l’histoire de la poule et de l’œuf ? En effet. Sommes-nous la poule, sommes-nous l’œuf ? Je m’en fous. J’attends l’omelette.

C’est tellement beau que c’est trop con (l’amiante au Québec)

Publié le 30 juin 2012 à 11h02 | Mis à jour le 30 juin 2012 à 17h23

Mine Jeffrey: le Québec va «financer le cancer»

Le Québec va «financer le cancer» et il prépare un «scénario à la Gaspésia»...

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Charles Côté
La Presse

Le Québec va «financer le cancer» et il prépare un «scénario à la Gaspésia» avec son prêt de 58 millions à la société Balcorp en vue de la réouverture de la mine d’amiante Jeffrey, a affirmé la Société pour vaincre la pollution (SVP) suite à l’annonce de Québec vendredi.

«Cette industrie est morte, c’est un fait reconnu, dit Anne-Marie Saint-Cerny, de la SVP. C’est un scénario à la Gaspésia qui se prépare. On ne reverra pas cet argent.»

La Gaspésia est une usine de papier dont la relance avortée a englouti des centaines de millions de fonds publics.

«Ceux qui vont faire les frais de cette décision sont les travailleurs de cette région qui ont besoin de se replacer dans une industrie plus viable, et les malades et les morts de l’amiante au Québec, en Inde et ailleurs», affirme Mme Saint-Cerny.

Balcorp est une société appartenant à Baljit Chadha, qui compte approvisionner des usines d’amiante-ciment en Inde avec la mine Jeffrey.

Lors d’un cocktail de financement organisé en août 2009 à sa résidence de Westmount, M. Chadha a pu compter sur la présence du premier ministre Jean Charest, qu’il connaît depuis plusieurs années, a révélé l’an dernier La Presse Canadienne. Cet événement, dont les billets se détaillaient entre 250$ et 500$, a permis de recueillir un total de 19 000$.

Selon Daniel Green, également de la SVP, le fait que la relance de la mine Jeffrey passe par une exploitation souterraine d’un nouveau filon fait augmenter les risques.

«On parle d’une opération minière souterraine où le risque d’exposition sera plus élevé que dans une mine à ciel ouvert, dit-il. Est-ce que le gouvernement est fier de son geste? Alors pourquoi l’annoncer un vendredi à 16h avant un long week-end? Il va subventionner des cancers.»

Le Parti québécois (PQ) a refusé de commenter l’annonce vendredi. Un porte-parole du parti, Réjean Hébert, candidat dans Saint-François, se limitait à des entrevues aux médias locaux, a affirmé Shirley Bishop, directrice des relations médias au PQ.

Greenpeace a également critiqué l’annonce de vendredi.

«L’amiante tue plus de 100 000 personnes par année dans le monde, a affirmé Catherine Vézina, de Greenpeace. Il est scandaleux et honteux que Québec encourage cette industrie. Le reste du monde attend mieux des Québécois.

«Ces 58 millions devraient être investis dans un développement qui est soutenable à long terme pour les communautés et qui ne menace pas la santé mondiale», dit-elle.

Le Centre international de recherche sur le cancer a réaffirmé récemment que l’amiante est cancérigène sous toutes ses formes. L’Organisation mondiale de la santé estime que la meilleure solution est de cesser de l’utiliser.