Archives de catégorie : Industrie et propagande

Retiens la nuit jusqu’à la fin du monde

Définition : une méta-analyse, c’est une étude qui recense et ordonne une vaste série de travaux scientifiques portant sur une question donnée. Des chercheurs de l’université d’Exeter (Grande-Bretagne) viennent d’en publier une belle dans la revue Nature, ecology and evolution (1). Elle porte sur 126 études publiées, et ce n’est pas aujourd’hui que je ferai rire aux éclats.

En effet, elle révèle que la pollution lumineuse a des effets à peu près insoupçonnés. Son auteur principal, Kevin Gaston : « The effects were found everywhere – microbes, invertebrates, animals and plants ». Or donc, microbes, animaux, plantes seraient touchés. Et le même d’ajouter qu’il serait temps de considérer la pollution lumineuse comme le grand désordre systémique qu’il est. À côté, tout à côté mais oui, du dérèglement climatique.

Mais de quoi parle-t-on ? De la fin de la nuit, très simplement. L’éclairage des villes, des ports, des rues, des autoroutes, des fermes même fait reculer partout le vital repos nocturne. De nuit, les êtres vivants fabriquent une hormone, la mélatonine, qui régule les cycles du sommeil. Eh bien, toutes les espèces animales étudiées en ont un taux de production diminué à cause de la lumière, ce qui bouleverse tous leurs rythmes.

Des exemples ? Les insectes pollinisent moins. Les arbres sont en feuilles plus tôt au printemps. Les oiseaux de mer se tuent en heurtant les phares. Les oiseaux de terre chantent plus tôt, confondant l’aube et la gabegie lumineuse. Les rongeurs, qui se nourrissent la nuit, mangent moins à cause des illuminations. Les tortues de mer, attirées par les halos fous des hôtels, se perdent à terre, croyant avoir trouvé le jour.

Sommes-nous concernés ? Ce n’est pas impossible. Nous avons ainsi laissé déferler les lampes LED, ce douteux miracle qui nous a été vendu comme un « progrès ». Elles durent plus longtemps, mais profitant de cette « économie », les autorités de tout niveau en ont augmenté le nombre et la puissance. Or leur luminescence a un spectre plus large, comme le soleil.

Les images satellite montrent sans surprise une planète qui repousse sans cesse plus loin la nuit : l’augmentation des lumières extérieures serait d’au moins 2% par an. Mais il serait injuste d’accuser d’inaction nos gouvernants. Un pompeux Arrêté (3) « relatif à la prévention, à la réduction et à la limitation des nuisances lumineuses » a bien paru au Journal officiel du 27 décembre 2018. Grotesque et impuissant, il affirme que « les émissions de lumière artificielle des installations d’éclairage extérieur et des éclairages intérieurs émis vers l’extérieur sont conçues de manière à prévenir, limiter et réduire les nuisances lumineuses ». Je dirais même plus : il faut « prévenir, limiter et réduire ».

Pendant ce temps d’inaction radicale, les astronomes gueulent dans le vide. Ceux de l’Union astronomique internationale ont publié il y a quelque temps un document qui raconte la folie des satellites, cette autre menace (3), hélas en anglais. J’en extrais cette phrase : « Outre leur visibilité à l’œil nu, on estime que les traînées des satellites seront suffisamment lumineuses pour saturer les détecteurs des grands télescopes. Les observations astronomiques scientifiques à large champ seront donc gravement affectées ».

Rappelons que le crétin intersidéral Elon Musk, qui tient le président américain – après Trump, Biden ? – by the balls, programme d’envoyer au total 42 000 nouveaux satellites dans l’espace. Il vient de proposer de les équiper de pare-soleils. Authentique.

Il y aurait bien une solution, qui consisterait à éteindre la lumière dans des millions de points terrestres où elle n’est qu’un gaspillage évident. Et de la limiter ailleurs. Mais ainsi que le note Kevin Gaston, « notre aptitude à changer la nuit en quelque chose qui ressemble au jour va bien au-delà de la nécessité de le faire ». Mehr Licht – plus de lumière -, aurait murmuré Goethe sur son lit de mort. Sommes-nous assez cons pour ne plus supporter le noir, en plus du reste ?

(1) Le plus simple, désolé, est de taper sur un moteur de recherche : A meta-analysis of biological impacts of artificial light at night

(2) theguardian.com/environment/2020/nov/02/treat-artificial-light-form-pollution-environment

(3) legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000037864346/

(4) iau.org/news/pressreleases/detail/iau2001/

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Mélenchon et Montebourg s’embrassent sur la bouche

Mélenchon, poil au menton. Lectrice énamourée, toi qui aimes le Grand Jean-Luc, lecteur envapé par le chef de la France insoumise, épargne-toi ce qui suit. Donc, le voilà candidat. Et l’un de ses amis, le député Adrien Quatennens, souhaite gentiment que Mélenchon fasse « équipe » avec Arnaud Montebourg. On voit l’intérêt : rassembler plus largement au premier tour, de façon à atteindre le second. Comme ces gens sont malins.

On le sait, la France Insoumise ne veut plus des accords politiciens d’antan, qui provoquent abstention ou, pire encore, le vote Le Pen. La clarté passe avant l’unité. Avec elle, on ne reverra pas de sitôt les accords pourraves qui décourageaient les meilleures volontés. Sauf que.

Sauf que Mélenchon se veut plus écologiste que René Dumont, Ivan Illich et André Gorz réunis. Montebourg colle-t-il avec le programme ? Ce petit monsieur, à peine nommé par Hollande ministre du Redressement productif – on ne rit pas -, s’empresse de déclarer en août 2012 que « le nucléaire est une énergie d’avenir », précisant pour les sourds que « la France a un atout extraordinaire entre ses mains [avec le nucléaire] qui lui a permis de bâtir son industrie ». L’année d’avant, il avait eu cette pensée visionnaire : le nucléaire « est le moyen d’avancer sur le chemin de la réindustrialisation ».

Six mois plus tard, il donne à la société Rexma un permis d’exploitation d’une mine d’or en Guyane. Dans un secteur du Parc National interdit à l’activité minière. Mais c’est cohérent, car Montebourg veut aussi rouvrir la criminelle mine de Salsigne, dans l’Aude. Tout pour la production !

Ajoutons enfin que Montebourg était jusqu’en 2016 un chaud partisan de l’exploitation des gaz de schiste en France, rêvassant de créer une industrie prospère, et bien entendu « propre ». Il s’appuyait sur un rapport secret, finalement publié par Le Figaro, qui vantait des « bonnes pratiques et des réglementations contraignantes, sous le contrôle de l’administration ». Ah ! charmant garçon. 1981, le retour.

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Les SDHI en veulent aussi au poisson zèbre

Résumons ce qui ne peut pas l’être. L’agrochimie – Bayer-Monsanto, BASF, Syngenta – a ouvert un nouveau marché avec les fongicides SDHI, l’un des chevaux de bataille du mouvement des Coquelicots. Une procédure judiciaire lancée par les Coquelicots – soutenue par Générations Futures et FNE – réclame l’interdiction de trois de ces molécules. Pour commencer.

Pourquoi ? J’ai longuement raconté dans un livre (Le crime est presque parfait, LLL) comment une équipe scientifique a été violentée par l’administration française, en l’occurrence l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES). Pierre Rustin et Paule Bénit, de l’INSERM, et quelques autres chercheurs avaient dès avril 2018 alerté sur le danger de ces nouveautés. Rustin, spécialiste mondial des maladies mitochondriales, et Bénit avaient pu montrer avec clarté que les SDHI s’attaquent au cœur de la respiration des cellules humaines et de quantité d’autres êtres vivants.

L’ANSES les a ridiculisés avant de faire (un tout petit peu) machine arrière devant l’accumulation des preuves. Et voilà que deux études récentes renforcent les pires inquiétudes. La première (1) montre que le bixafen, l’un des SDHI, provoque de graves anomalies in vivo du système nerveux chez le poisson zèbre, modèle de nombreuses études de toxicologie. Et la seconde (2) décrit la toxicité du fluxapyroxad, un autre SDHI, sur le développement de ce même poisson. L’ANSES, grande amie des hommes et des écosystèmes.

(1) https://insb.cnrs.fr/fr/cnrsinfo/le-bixafen-un-sdhi-fongicide-provoque-des-anomalies-du-systeme-nerveux-chez-le-poisson

(2) sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0045653520312303

Les filouteries de l’agence européenne

Les bureaucraties sont globalement les ennemies de la vérité. Ce qui s’appelle enfoncer une porte ouverte. On devait plutôt prendre ses gouttes, au lieu de quoi, on pique sa millième crise de rage depuis disons le mois de juin. Mais parlons plutôt, puisqu’on ne peut pas l’étrangler, de l’Agence européenne de l’environnement (AEE). Cette structure de l’Union européenne (1) a pour but proclamé de « fournir des informations fiables et indépendantes sur l’environnement ».

Bon, on se doute déjà que c’est une blague, car par quel miracle, avec un tel fil à la patte, pourrait-on se montrer indépendant ? Mais n’importe : l’AEE vient de publier un rapport que vous trouverez sur son site. C’est simple : en Europe, la nature va très mal. Certes, on le sait, mais ça s’aggrave. 81% des habitats naturels étudiés sont dans un état mauvais ou médiocre. La dernière fois, il y a une courte poignée d’années, c’était 77%.

Le Lituanien Virginijus Sinkevičius, commissaire européen à l’Environnement, interrogé dans le rapport, enfile trois perles, déclarant : « Cette évaluation de l’état de la nature est le “bilan de santé” le plus complet jamais réalisé dans l’UE. Elle montre très clairement que nous continuons à perdre notre milieu vital ». Bon, la logique élémentaire devrait conduire à abandonner sa bagnole, son chauffeur, ses petits fours, son salaire mirobolant, ses innombrables avantages de fonction, non ? Et d’annoncer, flamberge au vent, qu’on se lance dans une croisade pour la reconquête de notre « milieu vital ». Non ?

Non. Ces gens sont perdus à jamais et nous abreuvent de textes émollients, passant de litotes en euphémismes. La raison en est très simple : ils se contrefoutent du sens premier, synonyme de cataclysme. Qu’attendent-ils ? Que 100% des habitats soient foutus pour un siècle ou dix ? Le rapport n’emploie même pas le mot de pesticide, sans doute parce qu’un des rédacteurs, plaisamment pris en main par un lobbyiste, aura estimé que toutes les vérités ne sont pas bonnes à dire.

Dans le détail, c’est pire. Ce pourcentage de 81%, qui est de loin l’information capitale, est noyée au beau milieu de développements grotesques. On lit par exemple dans l’introduction, texto : « Le rapport de l’AEE montre une évolution positive des efforts de conservation ». Avant de comprendre, mais c’est volontairement confus, que l’on parle des minuscules zones protégées sous l’appellation « Natura 2000 ».

Et tout à l’avenant. L’expression « situation désespérée » est remplacée par « avenir incertain ». Ces aveugles volontaires nous l’assurent, « sur le plan politique, il y a également de l’espoir grâce à la nouvelle stratégie de l’UE en faveur de la biodiversité à l’horizon 2030 et à la stratégie «De la ferme à la table», deux éléments essentiels du pacte vert pour l’Europe ».

Mais bien entendu, il faut des études. Beaucoup d’études. Quand vous entendez un expert, parlant de la crise écologique, qu’il faut encore d’autres travaux, vous pouvez être certain qu’il est là pour embobiner, consciemment ou non. Extrait : « Actuellement, de nombreuses lacunes persistent en termes de données, notamment en ce qui concerne les espèces et les habitats marins ».

Quant à lui, le paragraphe « Perspectives » commence par cette phrase d’anthologie : « Le rapport met en évidence certaines évolutions positives, principalement à l’échelle nationale ou régionale. Un certain nombre d’espèces et d’habitats ont connu des améliorations, comme la grenouille agile en Suède, les lagunes côtières en France et le gypaète barbu au niveau de l’UE ».

Ne nous y trompons pas, c’est de la canaillerie. Propre sur elle, estampillée Union européenne, mais canaillerie tout de même. Comme ces désinformateurs sont habitués à ce que leurs chefaillons les félicitent de leurs douteux exploits, ils n’imaginent pas que quelqu’un les chope au col et leur demande des comptes. En quoi ils ont parfaitement raison. Les opinions, la nôtre de même, sont inertes, amorphes, complices pour dire toute la vérité du grand mensonge.

(1) eea.europa.eu/fr/about-us

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Ce ministre qui me crache à la gueule

Cadeau. Le 15 septembre, j’étais reçu avec des amis par Barbara Pompili, ministre de l’Écologie, pour lui remettre 1 135 000 signatures en soutien de l’Appel des coquelicots, pour l’interdiction des pesticides. Mais pendant l’été, j’avais aussi demandé rendez-vous à Julien Denormandie, ministre de l’Agriculture.

Le 31 juillet, j’adresse un mail au directeur de cabinet de Denormandie, Fabrice Rigoulet-Roze. J’écris : « Nous souhaitons vivement remettre ces signatures à monsieur Denormandie (…) Il nous semble que le grand mouvement démocratique que nous avons suscité doit pouvoir s’exprimer devant monsieur le ministre. Dans une atmosphère de respect mutuel ».

Le 6 août : « Je vous adresse à nouveau mon message du 31 juillet, qui se sera peut-être perdu en route ». Réponse : « Elle est en en effet bien parvenue et j’avais quelques urgences à gérer avant de vous répondre ». Le même jour, Victor Schmidt, chef de cabinet : « J’ai bien pris connaissance de votre message et de votre demande d’entretien, mais il ne m’est pas possible d’y accorder une suite favorable pour le moment ».

Je réponds : « Merci de votre réponse (…) Le mois d’août est en effet particulier, et c’est pourquoi j’ai pris soin de présenter ma demande de longues semaines à l’avance » Et puis silence total. Le 7 septembre, j’écris aux deux : « Je m’étonne beaucoup de ne pas avoir reçu de réponse à ma demande de rendez-vous avec M.Denormandie. Je vous rappelle que je suis le président du mouvement « Nous voulons des coquelicots », et que mon premier courrier date du…31 juillet ». Le 11, j’insiste : « Est-ce que la politesse républicaine ne commanderait pas, au moins, d’accuser réception de mes courriers ? Le mépris dont vous faites preuve à mon égard, qui représente 1 100 000 citoyens de ce pays, ce mépris n’est pas digne de ce pays. Du moins dans l’idée que je m’en fais ». Réponse de Schmidt : « Nous tâchons dans la mesure du possible de répondre à chacune des sollicitations, dans des délais aussi raisonnables que possible ». Et puis silence définitif.

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Le soleil au service de la destruction

Jusqu’où ira la malignité ? À Oradour-sur-Vayre, dans le Limousin – 40 km au sud-ouest de Limoges – une saloperie se prépare. Allons-droit au but : un proprio – il habite l’Aveyron – veut sacrifier 47 hectares où l’on produit du sarrasin bio. En y installant une immensité de panneaux photovoltaïques (1). Le mec qui les installerait, prenant sans doute les habitants pour de braves couillons (2) s’essaie à une grossière désinformation : « Le projet photovoltaïque va non seulement permettre la poursuite de la culture du sarrasin, mais va aussi permettre le développement d’autres pratiques agricoles ». Tu parles, Charles.

On préférera sûrement écouter Jean-Pascal Farges, de Vox Plebeia (3) : « Il n’y avait surement pas d’autres endroits que celui de ces champs (…), près d’un village de quelques dizaines d’habitants, dans une commune d’un peu plus de 1 500 âmes où même les GPS se perdent. L’industrie verte n’aime pas la campagne et se fout des bouseux qui y vivent encore. Mais le plus incroyable c’est que l’industriel prétend conserver voire sanctuariser la nature qu’il recouvre. En Haute-Vienne, l’agence de la transition écologique, l’ADEME, a identifié plus de 115 sites propices à l’implantation d’usines solaires (friches industrielles, parkings, etc.) Mais non, ce sont les cultures bio qui les branchent, c’est la dévastation des terres agricoles qui les font vibrer (…) Les habitants, les riverains, les associations, les agriculteurs ? Pas consultés ; ça serait sans doute trop démocratique ! ».

(1) On peut contacter, mais faut se magner, Oradour Défense Environnement. Tel : 06 08 17 63 56. vodeasso87@gmail.com.

(2) https://france3-regions.francetvinfo.fr/nouvelle-aquitaine/haute-vienne/au-pays-arbre-eau-panneaux-solaires-sont-ils-bienvenus-1876844.html

(3) youtube.com/channel/UCBp64IrWs6CRlLvIiEw003w

Ceux qui ont voulu tuer Seralini

Attention, brûlure à l’âme. Pour bien lire L’Affaire Roundup à la lumière des Monsanto Papers (par Gilles-Éric Seralini, avec Jérôme Douzelet, Actes Sud), il faut raconter en préambule une histoire qui se perd désormais dans les brumes. Le 19 décembre 2012, le biologiste Seralini publie une étude dans une revue scientifique de bonne tenue, Food and Chemical Toxicology (FCT) . Comme il est de règle, l’article a été relu par des pairs avant publication. D’emblée, c’est la tornade, une tornade en vérité voulue par Seralini, qui a accepté l’aide et les conditions d’une boîte de com pour transformer l’événement en bombe médiatique. C’est que des rats de laboratoire nourris avec un maïs transgénique et/ou du Roundup (dont le constituant principal est le glyphosate) ont développé d’affreuses tumeurs. Les photos l’attestant font le tour du monde.

Une partie des chercheurs, en France et ailleurs, vont contester le travail de Seralini. Cela n’a rien d’anormal, car s’il dit vrai, l’édifice mondial des OGM – et peut-être celui des pesticides – est tout entier menacé. Mais un autre phénomène s’est déclenché, sans que personne ne le comprenne sur l’instant. Après des mois d’une polémique planétaire sans précédent, la revue FCT décide en novembre 2013 de « rétracter » ce qu’elle avait publié. C’est-à-dire la retirer de ses sommaires. L’étude ne figurerait pas même dans les archives. Une telle décision n’a jamais été prise qu’en cas de fraude ou d’erreurs involontaires. Or il n’y a pas fraude. Ni d’erreurs involontaires.

En janvier 2014, dans un édito, le rédacteur-en-chef de FCT, Wallace Hayes, fournit une explication ridicule : l’étude aurait été effacée parce que non concluante. À ce compte-là, la moitié des études au moins, et peut-être bien davantage, auraient depuis beau temps disparu. L’explication de cette étrangeté radicale sera apportée sur un plateau grâce aux Monsanto Papers. En deux mots, une décision judiciaire contraint Monsanto, en 2017, à rendre publics des montagnes de documents internes, sous la forme de courriels, de comptes rendus de réunions, de rapport, de correspondances.

Ce que l’on voit apparaître est sordide. Hayes est lié secrètement par un contrat de consultant avec Monsanto. Mais bien au-delà, il se confirme ce que beaucoup pressentaient depuis longtemps : Monsanto ment, truque, entretient un cabinet noir auteur des coups les plus tordus. Dont la destruction systématique de la réputation des scientifiques jugés dangereux pour ses intérêts. Dont Seralini ? Dont Seralini surtout, car le Roundup est le produit-phare de Monsanto.

Venons-en au livre. Le biologiste, s’appuyant sur les Monsanto Papers – vu leur nombre, ils n’ont pas tous été dépiautés -, démontre sans peine qu’il est ciblé par cette structure sans foi ni loi depuis au moins 2005. Il insiste sur un point qui reste très méconnu : le vrai grand danger du Roundup, ce n’est pas le glyphosate, mais ce qu’on appelle tantôt surfactants, tantôt adjuvants, tantôt formulants, que l’on ajoute à la matière active de départ. L’ensemble serait incomparablement plus toxique que le glyphosate lui-même.

Le tout – les dates, les noms, les faits – donne la nausée, car il n’y a aucun doute que l’on a voulu assassiner moralement, psychologiquement, professionnellement Seralini. Il est évident que Monsanto était prêt à tout pour ruiner la réputation de Seralini. À tout ? Seralini évoque une infection terrible et fulgurante qui le cloue sur un lit d’hôpital anglais, entre la vie et la mort, à un moment très important de sa défense. Le plus fou sans doute, le plus terrible pour Monsanto en tout cas, c’est que l’on suit Seralini quand il se demande « Hasard ou parapluie bulgare ? ». Se peut-il ? Je ne sais pas.

Deux choses pour finir. Un, je n’ai aucune lumière sur l’étude de 2012, et mon soutien à Seralini ne porte pas sur cette question. Deux, et j’en suis bien désolé, je dois dire que ce livre si nécessaire souffre de sa confusion. Il eût sans doute fallu un travail d’édition plus exigeant et c’est tout de même bien dommage.

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Cette PAC aussi verte que l’herbe des cimetières

Est-ce que cela finira un jour ? Non. Le 23 octobre, le Parlement européen a voté le texte d’une nouvelle Politique agricole commune (PAC), qui s’étendra jusqu’en 2027. La somme mobilisée représente au total 387 milliards d’euros, dont 58,12 milliards pour la seule année 2020, soit 34,5% du budget général de l’Union européenne. Énorme ? On est d’accord.

Non, Charlie n’a pas lu les centaines de pages du document, rédigées dans une langue que seuls ses rédacteurs connaissent. En tout cas, le ministre français de l’Agriculture, Julien Denormandie, applaudit le vote et parle d’une « PAC plus verte, et surtout plus juste ». Nos amis du mouvement « Pour une autre PAC » (pouruneautrepac.eu) parlent à propos du texte voté d’un « absurde fourre-tout », mêlant une poignée d’amendements apparemment positifs et un texte profus qui les noie et les contredit. On maintient le cap d’une agriculture industrielle, favorable aux grandes surfaces et à l’exportation, qui se contrefout des équilibres naturels.

Rappelons où en est l’agriculture française. 200 fermes disparaissent chaque semaine, le tiers des paysans en activité vont prendre leur retraite dans les toutes prochaines années, un quart sont sous le seuil de pauvreté. Les insectes et les oiseaux disparaissent à des rythmes jamais observés, principalement à cause des pesticides, dont la consommation a augmenté d’au moins 20% dans le même temps qu’on prétendait en diminuer l’usage. L’élevage concentrationnaire transforme des millions d’animaux en bagnards.

Compte-tenu du rapport de forces en Europe, cela n’est pas près de changer. Ne serait-il pas temps de penser à d’autres stratégies ? Qui suit, fût- ce loin, ce dossier constate combien les mots eux-mêmes sont piégés. Les opposants français à cette politique – comme les valeureux de la Confédération paysanne – ne cessent de parler depuis plus de vingt ans de la nécessité d’une PAC plus « verte », mot fétiche facilement détourné par tous les Denormandie européens. Rien n’est simple, mais n’est-il pas temps d’un débat sur le débat ?

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En Suisse, les pesticides se baladent librement

Les Suisses seront-ils moins cons que nous ? En 2021, grâce à une mobilisation sur le terrain à la manière des Coquelicots de chez nous, on votera. Des activistes tranquilles ont en effet déposé une Initiative – terme consacré –, appuyée par 140 000 signataires. Elle réclame qu’on ajoute à la Constitution des phrases comme : « L’utilisation de tout pesticide de synthèse dans la production agricole, la transformation des produits agricoles et l’entretien du territoire est interdite ».

L’Office de la nature et de l’environnement du canton des Grisons, tout ce qu’il y a d’officiel, vient de publier un rapport expliquant (1) : « i prodotti fitosanitari impiegati in Alto Adige oltrepassano effettivamente il confine e arrivano fino a Valchava ». Les pesticides qui sont épandus dans le Haut-Adige passent bel et bien la frontière suisse et arrivent à Valchava, hameau suisse des Grisons. Or Valchava se trouve à 1440 mètres d’altitude – bonjour l’air pur -, mais surtout à 14 km de la frontière italienne. Conclusion : « vi è una grande necessità di agire ». Ben oui, il y a grande nécessité d’agir.

Rappelons pour rire ce qui s’est passé en France. Le 11 mai 2019, le maire de Langouët Daniel Cueff prend un arrêté qui interdit l’usage des pesticides à moins de 150 mètres de bâtiments. Retoqué bien sûr, l’arrêté permet en tout cas de poser la question de l’empoisonnement de tous, paysans compris. Le gouvernement, éternellement à la botte, interdit désormais l’épandage de pesticides à moins de cinq mètres – dix au mieux – des habitations.

(1) gr.ch/IT/media/Comunicati/MMStaka/2020/Seiten/2020092901.aspx

Ce téléphone est (insup)portable

Publié sur Charlie

Essayons de prendre cela avec bonne humeur, mais ça va chier. Vraiment navré. Des petits salopiauds allemands viennent de réaliser une méta-analyse – analyse d’analyses – portant sur 190 études publiées. Sur le total, 83 ont été jugées scientifiquement relevant – pertinentes – et 72 de ces dernières montrent que les ondes des téléphones portables ont des effets négatifs sur les abeilles, les guêpes, les mouches.

Les effets décrits sont nombreux : désorientation des bestioles, ce qui peut conduire au drame, atteintes au « matériel » génétique et à la santé des larves, dégradation des champs magnétiques, vitaux pourtant. Est-ce possible ? Apparemment, ça l’est. Le rayonnement des portables et des réseaux sans fil, type WIFI, pourrait provoquer, chez les insectes exposés, une ouverture de leurs canaux calciques. Qu’est-ce donc, ami de la science ? D’abord un canal ionique, présent dans la membrane de toute cellule, qui permet le passage au travers d’un ou plusieurs ions à très grande vitesse. Des ions de sodium, de potassium, de calcium dans le cas qui nous intéresse. Leur rôle, dont tu n’as jamais entendu parler, mon ami lecteur de Mickey Parade, est essentiel.

Si une petite main anonyme – le portable, simple exemple – entrouvre les canaux calciques d’une abeille, celle-ci laisse passer dans un grand désordre des ions calciques qui sèmeront leur merde dans le maintien des insectes et leur reproduction. Car la prolifération d’ions calcium provoque ce qu’on nomme un stress cellulaire. Bien entendu, il ne s’agit que d’un facteur aggravant. La cause centrale de la mort accélérée des insectes – probablement, et en moyenne, la biomasse des arthropodes des prairies a diminué des deux tiers en dix ans -, c’est bien sûr les pesticides. Et la perte des habitats favorables qui lui est associée.

Il n’empêche, mon bel ami. Le portable, dont on savait déjà qu’il est une bouse, renforçant l’individualisme délirant de l’époque, menace donc les insectes de ses ondes. Ne surtout pas croire que cette étude est unique en son genre. En vérité, d’autres travaux scientifiques, depuis au moins dix ans, rapportent les mêmes conclusions que personne ne veut voir.

J’extrais pour ta complète information cet extrait du journal Daily Telegraph du13 mai 2011 : « Signals from mobile phones could be partly to blame for the mysterious deaths of honeybees, new research shows ». De Nouvelles études montrent que le portable pourrait être en partie responsable de la « mystérieuse mort des abeilles ». Et il y en a plein de la sorte, tout au long de chaque année, comme cette conférence en anglais, que je recommande, et qui date, elle, de 2013 (2).

Nous ne sommes pas, j’en conviens, dans le champ si restreint de la preuve scientifique parfaite et définitive. Les démonstrations de cette sorte sont rarissimes, même pour des poisons aussi évidents que l’amiante. Le tabac n’a-t-il pas fait l’objet de polémiques télécommandées par l’industrie pour mieux tromper les sociétés humaines ?

À ce stade, un peuple adulte aurait l’obligation de mettre le sujet des portables sur la table, et de ne plus lâcher. Mais ce n’est pas du tout ce qui se passe. Ayant interrogé quelques écologistes estampillés, je constate que l’affaire n’a pas pénétré leur esprit. Ah ! si l’on pouvait incriminer une transnationale, il en irait tout autrement. Mais en la circonstance, il suffit d’un examen de conscience, et c’est déjà trop.

Ce que révèle après bien d’autres prises de tête l’affaire des portables, c’est que la guerre en cours est d’une nature inédite. Oui, assurément, il s’agit d’une guerre d’extermination de tant de merveilleuses formes vivantes. Mais à la différence des conflits passés, il n’y a pas eux et nous. Il n’y a pas cette ligne capable de désigner les bons et les méchants. Le front passe à l’intérieur de nous-mêmes, qui ne cessons d’envoyer nos obus personnels, dessinés, décorés et contresignés de nos propres mains. Tant que nous n’aurons pas reconnu l’aliénation par les objets, nous ne ferons plus un pas en avant.

(1) baden-wuerttemberg.nabu.de/imperia/md/nabu/images/regional/bw/einmaligeverwendung/thill_2020_review_insekten_komplette_studie_mit_zusammenfassung.pdf

(2)researchgate.net/publication/246044829_The_Effect_of_Cell_Phone_Radiations_on_the_Life_Cycle_of_Honeybees

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Regain zadiste sur les rives de la Loire

Pas de cris, pas de désespoir : on y reviendra. Et même, on ira sur place. Mais en attendant mieux, et vous savez le peut-être, une nouvelle Zone à défendre (ZAD pour les heureux intimes) s’est installée tout contre notre Loire. C’est à 35 km en aval de Nantes. Le Carnet, c’est un territoire naturel de près de 400 hectares, que les aménageurs, qui aménageraient aussi sur Mars, avaient placé en réserve foncière, pour le cas où.

Et le cas est. Le Grand port maritime de Nantes Saint-Nazaire (autrefois appelé le port autonome) est un tout-puissant Établissement public, qui a salopé depuis des décennies notre plus bel estuaire, celui de la Loire. À coups de terminaux pétroliers ou à soja, et d’installations pétrochimiques. Mais le géant n’a jamais assez d’espace et veut maintenant choper 110 des 400 hectares évoqués, dont 51 sont une zone humide, officiellement intouchable. On parle là de 116 espèces animales et végétales protégées.

Côté zadistes, l’ambiance est combative. Extrait de leur site (https://stopcarnet.fr) : « La Zad du Carnet s’est implantée le 31 août aux entrées du site du Carnet que le gouvernement et les industriels veulent convertir en zone industrielle. Nous ne quitterons pas les lieux tant que le projet ne sera pas abandonné».

Côté massacreurs, il y a de la drôlerie et de la novlangue dans l’air. Ils avancent que les 110 hectares serviront à un « parc technologique » plus vert tu meurs. La distrayante présidente – Les Républicains – de la région pays de la Loire, Christelle Morançais : «Le site du Carnet, qui à terme pourrait générer 1200 emplois directs, portera l’écologie de demain. C’est ici que va s’inventer un avenir plus vert et plus écoresponsable ».

Ce qui commence ne sera pas simple, car les écolos endimanchés ont déjà accepté le projet, avec réserves, au moment de l’enquête d’utilité publique de 2017. La LPO – amie de Charlie -, France Nature Environnement (FNE), Bretagne Vivante – dont je suis membre – sont salement coincées. Mais changer d’avis n’a jamais fait de mal à personne.

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Les blaireaux ne sont pas ceux qu’on croit

Parlons-nous tous la même langue ? Partageons-nous assez d’idées et d’émotions pour habiter la même terre ? Lectrice et lecteur, envoyez-moi vos réponses, car la question m’angoisse.

Un ami lointain mais vrai, Pierre Rigaux, m’adresse une vidéo de trois minutes sur un massacre coutumier de ces blaireaux qui ressemblent tant, parfois, à des petits ours. J’en ai vu bien des fois sur le chemin d’un hameau où je suis allé vingt années, entre Causses et Cévennes.

Que voit-on ? Des humains qui d’abord élargissent la piste d’entrée d’un terrier de blaireau. À la pelle. L’un d’eux fourre ensuite à coups de pompes un chien – un jack russel, je crois – au fond du trou. Le chien et ses dents horribles sont là pour choper l’animal au museau. Quand il a harponné la bête, il tente de sortir du trou en reculant. Dans une variante qui n’est pas dans la vidéo, un mec à casquette et combinaison verte de travail tire les pattes arrière du chien.

Quand le blaireau apparaît, les rires des tueurs fusent. Deux armes différentes servent au massacre. De longues pinces en acier, qui permettent de le saisir par le nez en l’écrasant. Et des bêches, avec lesquelles on lui détruit le cerveau. On entend : « Vas-y ! Prends ça ! Il faut un bon coup ! ». Et en effet, ça cogne.

Si on veut en savoir plus, on peut se renseigner auprès de One Voice (2) ou de l’ASPAS. Commentaire des premiers : « Combien de milliers de cadavres et d’images ignobles faudra-t-il pour rallier le public et les politiques à la cause de ces animaux martyrs ? ». Pas mieux à dire.

(1) https://vimeo.com/454047065

(2) https://one-voice.fr/fr/blog/chasse-des-blaireaux-lenfer-sous-terre.html

Tours et détours infinis de la chimie

Publié sur Charlie

C’est une histoire américaine tellement française. La semaine passée, le ministre de l’Agriculture Julien Denormandie, aux ordres de la FNSEA et de l’agrochimie, a donc obtenu le retour des tueurs d’abeilles – ces fameux néonicotinoïdes – sur la betterave industrielle. Seulement sur elle. Pour le moment. Les députés, qui ne savent rien et ne veulent rien savoir, ont avalisé le fabliau selon lequel tout cela est provisoire.

Aux États-Unis, la revue scientifique Science (1) a publié en juin une étude qui montre une pollution des sols du New-Jersey par un redoutable produit chimique, l’Acide perfluorononanoïque (PFNA en anglais). Les PFNA appartiennent à un groupe de plus de 5000 composés appelés perfluorés (PFAS en anglais).

Le film Dark Waters, sorti en 2019, raconte justement le combat d’un avocat contre le géant de la chimie DuPont qui déverse des déchets bourrés d’un PFAS, qui décime pour commencer les vaches d’une ferme.

Les PFAS se retrouvent – mon poussin de lecteur, accroche-toi à ton siège – dans les textiles et tapis, mousses anti-incendie, cornets à popcorn, emballages pour pâtisseries, pesticides bien sûr, fils électriques, cire à parquets, chaussures et vêtements, vernis et peintures, produits de nettoyage. Sans immense surprise, ils atterrissent tôt ou tard dans l’air, la poussière domestique, l’eau potable. Comme ils sont fort stables, chimiquement parlant, ils font partie de ce qu’en Amérique on appelle les forever chemicals. Des produits chimiques éternels. Beaucoup sont cancérogènes, la plupart sont des perturbateurs endocriniens, certains s’attaquent en plus à la reproduction et au fœtus.

Dans ces conditions, la publication de Science évoquée plus haut ne pouvait manquer d’intéresser. Des PFAS dans les sols ? Les scientifiques signataires appartiennent à des institutions comme l’agence fédérale EPA ou le Department of Environmental Protection (DEP), toutes deux surveillées de près par l’administration Trump. L’étude conduit malgré tout à un coupable hautement probable, l’usine de West Deptford, propriété de la transnationale belge Solvay. J’y vois que la pollution « is consistent with Solvay being the source of these compounds ».

Dans le passé, cette boîte avait déjà pollué alentour en relâchant des PFAS, mais cette fois, elle nie toute responsabilité. Selon ses braves communicants, elle prétend que la nouvelle pollution peut très bien provenir d’un autre site, aujourd’hui fermé, qui fabriquait entre autres des mousses anti-incendie. Mais une association pugnace comme j’adore, Consumer Reports (3) a gratté le sujet pour nous, et obtenu sur décision judiciaire communication d’échanges entre Solvay et le DEP, c’est-à-dire l’administration.

La vérité est épouvantable. En fait, Solvay a bel et bien blousé tout le monde. Comme l’usine avait été épinglée une première fois, elle a simplement changé de PFAS. Sur les 5000 existants, très proches chimiquement, il n’était pas très difficile de trouver un ou des substituts. Et c’est ce que Solvay a fait, utilisant des produits qui ne sont pas recherchés dans les analyses ordinaires. Ils ne sont pas même soumis à réglementation ! Consumer Reports réclame évidemment que les PFAS, tous très proches, soient considérés comme un bloc et soumis de ce fait aux mêmes normes de contrôle. Mais Solvay a aussitôt reçu le soutien du lobby American Chemistry Council, jurant que chaque PFAS est différent et que chacun doit être réglementé individuellement. Soit 5000 fois une tâche qui prend des années.

Concluons dans la gaieté avec Erik Olson, directeur au Natural Resources Defense Council (NRDC), ONG écolo : « We don’t want to continue on this toxic treadmill ». Non, le gars veut pas continuer sur ce tapis roulant toxique, ce qui n’est pas bête. Il ajoute : « Un PFAS est progressivement éliminé, mais remplacé l’un des milliers d’autres qui ont des structures chimiques similaires, et dont on peut attendre qu’ils posent des problèmes identiques à la santé et à l’environnement ». On en est là. Là-bas, ici, partout.

(1) https://science.sciencemag.org/content/368/6495/1103

(2) https://theintercept.com/2020/06/04/pfas-chemicals-new-jersey-solvay/

(3) consumerreports.org/water-quality/new-forever-chemicals-are-contaminating-environment-regulators-say/

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La loi nouvelle qui bousillera tout

Est-ce une découverte ? Non, ces gens sont des voyous. Dans un autre contexte, à une autre époque, sous d’autres cieux, Macron et ses amis seraient traités comme tels. Le vote – en première lecture -, mardi 6 octobre, de la loi ASAP n’est jamais qu’une bassesse de plus. Comme ces gens ont de l’humour – noir -, ils jouent sur l’acronyme anglais ASAP, qui veut dire As soon as possible. Aussitôt que possible. Il s’agit sur le papier de simplifier et d’accélérer les procédures pour les futures installations industrielles. Au détriment des écosystèmes, des animaux, de la beauté ? Pardi.

Cette loi est un capharnaüm de 50 articles qui mêlent savamment – c’est voulu – tout et n’importe quoi. On y parle de permis de conduire, de réforme du statut des agents de l’Office national des forêts, des squatteurs, de l’installation en mer des éoliennes, de la vente des médicaments en ligne, des résidents des Ehpad.

Mais le dur de l’affaire est dans les articles 21, 23, 24 et 26.

23 malabars du droit de l’environnement, dont Christian Huglo, Corinne Lepage, Dominique Bourg, Alexandre Faro y voient une volonté à peine déguisée d’abattre d’un coup les acquis de toutes les lois passées dans ce domaine.

Impossible d’entrer dans tous les détails (1), mais un point mérite développement. L’article 23 donne au préfet le droit exorbitant d’autoriser le début des travaux d’un projet avant toute Autorisation environnementale, aujourd’hui obligatoire. Certes, celle-ci resterait nécessaire, mais sous certaines conditions, ne pourrait bloquer le début d’un chantier : une aubaine pour les promoteurs.

D’une façon générale, les pouvoirs du préfet, créature à la merci du pouvoir politique parisien, seront démultipliés, au moment même où Macron renvoie au néant les propositions pourtant acceptées par lui de sa « Convention citoyenne pour le climat ».

Détail qui ne trompe guère : le seuil des marchés publics sans publicité ni concurrence devrait passer à 100 000 euros pour des travaux. En une année, il est passé de 25 000 à 40 000 euros, puis 70 000 euros en juillet. Miam-miam. 

(1) Voir cet excellent article : lemoniteur.fr/article/projet-de-loi-asap-le-cri-d-alarme-des-experts-du-droit-de-l-environnement.2080081

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Comment vivent les amoureux de la bidoche

J’avoue savourer, de temps à autre, la lecture de Porc Magazine, la revue du porc industriel. C’est alors une échappée onirique dans un monde qui ne peut être qu’imaginaire. J’espère, en tout cas. Trois extraits retenus au pif.

Le premier : « Deux spécialistes de la chimie, Evonik et BASF, ont investi dans une startup technologique chinoise, SmartAHC. Celle-ci (…) a développé des dispositifs de surveillance et des logiciels qui utilisent l’intelligence artificielle et l’Internet des objets ».

Le deuxième : « Une maternité de deux salles de 32 cases liberté chacune a ainsi été construite. “Et pourtant le plan initial du bâtiment comportait des cases standard de 2 m de large. J’hésitais même à mettre des cases balance à l’époque. Mais, aujourd’hui, je suis convaincu que cela aurait été une erreur” », détaille Nicolas L. Aucun regret donc, mais, d’après l’éleveur, certains principes doivent être respectés pour que ce système fonctionne. Le premier : la solidité du matériel, le deuxième : l’ergonomie de la case, mais aussi dans la salle, et le troisième : pas de stress ! ». Le même éleveur : « Il ne faut jamais sous-estimer le pouvoir des truies à tout casser ou bien leur ingéniosité pour ouvrir un verrou qui serait un peu trop facile à manipuler ! »

Le troisième : « En conceptualisant son nouveau bloc naissage de 240 truies dans son élevage de multiplication, Jean-Baptiste B. n’a pas hésité à investir dans des équipements de gestion d’ambiance pour éviter que le mercure s’affole dans les salles ». On est bien, hein ?