Archives de catégorie : Journalisme

Un édito en cadeau (sur le nucléaire)

Lecteurs de Planète sans visa, voici une exclusivité mondiale, que vous pourrez essayer de vendre sur le marché ce mardi 4 septembre. L’éditorial qui suit est celui du hors série de Charlie-Hebdo sur le nucléaire, qui sort demain mercredi. En somme, vous avez entre les mains, pour une fois, le journal du lendemain. Quelle chance vous avez ! Je n’ai pas encore fini mon entreprise publicitaire au profit de ce fabuleux – extraordinaire, unique, saisissant, prodigieux, jamais vu, jamais lu – hors série de 64 pages. Demain, je vous demande un vrai coup de main.

L’édito

L’avenir d’une escroquerie

C’est un peu con d’écrire comme Le Monde, mais le nucléaire est à un tournant. Même si les services de propagande d’EDF et d’Areva font tout pour le cacher, la folle aventure de l’atome se barre en sucette. En couille, pour être franc. La dernière blague — en cours — est belge. Le réacteur numéro 3 de la centrale de Doel, en Flandre, a été arrêté après des contrôles aux
ultrasons qui ont révélé l’existence de 10000 anomalies dans la cuve. Et, parmi elles, des milliers de fissures, dont les plus grandes atteignent 20 mm. On appelle cela une catastrophe industrielle.

Un qui s’en fout, c’est le fabricant de la cuve, le groupe néerlandais Rotterdamsche Droogdok Maatschappij, disparu sous ce nom en 1996 après avoir vendu vingt cuves du même type dans toute l’Europe et sur le continent américain. Mais la France n’est pas la Belgique, non ? Ben, on se demande : au moment où Charlie boucle ce hors-série, on apprend que les réacteurs nucléaires français ont, eux aussi, leurs fissures. Mais, comme le serine la chanson officielle, rien à voir avec celles des si minables cuves belges.

Le merdier est partout. L’Allemagne a renoncé au nucléaire et prend trente ans d’avance sur nous en misant sur le soleil et le vent. Fukushima a démontré qu’aucune technologie, aussi « avancée » qu’elle semble, ne met à l’abri de la catastrophe majeure. Chez nous, Areva a perdu plus de deux milliards d’euros en 2011 et doit à n’importe quel prix fourguer son nouveau réacteur expérimental, l’EPR, à des pays solvables, aussi stables que la Chine, au bord du gouffre. Mais les deux prototypes
d’EPR en construction, en Finlande et en Normandie, sont la risée générale, multipliant les (énormes) retards, explosant les coûts, accumulant les embrouilles et… les fissures.

En résumé, tout va bien. Mais les enjeux sont tels qu’il faut continuer à sourire sur les photos de groupe. C’est ce moment que choisit Charlie pour raconter à sa façon une histoire profondément française. Notre journal est né en même temps que le programme électronucléaire. Son premier numéro, après l’interdiction de Hara-Kiri Hebdo, date du 23 novembre 1970. Six mois plus tard, sous l’impulsion de Fournier, soutenu par Cabu, Cavanna, Reiser et tous les autres, Charlie lançait la première grande manif antinucléaire, à Bugey, dans l’Ain. Ceux qui ont connu cet été 1971 n’en sont pas revenus. Charlie non plus.

La contestation du nucléaire et de ses inimitables méthodes est dans nos gènes. Non, on n’aime pas les salopards qui ont créé, sans le moindre débat, cette industrie de la terreur. Oui, on veut la fin du cauchemar. Vous allez découvrir dans ce numéro de Charlie quantité de choses que les gazettes arrosées de pub atomique ne vous ont jamais dites. Des personnages sortis de la naphtaline, comme Guillaumat, Mendès, de Gaulle, Messmer, s’apprêtent à prendre la parole pour dire enfin ce qui s’est vraiment passé. La commission Peon, qui aura à peu près tout décidé en notre nom, fait un coming out on ne peut plus involontaire. EDF et le CEA, qui donna naissance à Areva, apparaissent enfin pour ce qu’ils sont : des machines de guerre.

Car voilà la vérité cachée de ce dossier infernal : une poignée de soi-disant responsables jouent notre avenir commun à la roulette russe. Contrairement à ce qui a été affirmé pendant quarante ans par les joyeux atomistes associés, le risque d’accident grave est réel. Et, du même coup, cinglé. Qui a envie de fuir un nuage radioactif ? Qui a envie de vivre dans une France privée à jamais du Cotentin ou de la vallée du Rhône ? Qui se souvient que la centrale de Nogent-sur-Seine n’est qu’à 80 kilomètres de Paris ?

Contrairement à ce que les bons esprits racontent dans les salons, il n’y a pas de compromis possible avec le nucléaire. Demander moins de nucléaire, c’est réclamer de moins mourir. Les socialistes au pouvoir ont massivement choisi : le gouvernement en place, bien loin des fausses frayeurs du candidat Sarkozy, est empli de militants du nucléaire, à commencer par la ministre de l’Enseignement supérieur, Geneviève Fioraso, et celui des Affaires européennes, Bernard Cazeneuve. Au fait, qui a déclaré : « Je crois au contraire que le nucléaire […] justifie pleinement l’organisation d’un vaste débat dans notre pays ; enfin informés, les Français pourront se prononcer par référendum ? »  Qui ? François Mitterrand en 1981. Il n’est jamais trop tard pour tenir une promesse. Charlie, après bien d’autres, réclame un véritable référendum sur l’avenir du nucléaire. Il permettra d’enfin tourner la page. Chiche ?

Pour jeter le nucléaire, c’est maintenant

Je squatte deux ou trois jours Planète sans visa pour une tournée personnelle de propagande promotionnelle. Il s’agit de vendre un hors série de Charlie-Hebdo à paraître ce mercredi. Si je m’autorise cette basse opération, c’est que j’ai abominablement contribué à ses 64 pages, et même au-delà. Aujourd’hui, je vous laisse en compagnie d’un communiqué qui annonce le lancement. Mais demain, je vous en donne plus, car je suis un roublard.

Regardez donc la couverture, pour commencer : charlie-nucleaire.pdf

Nous en sommes donc là (une photo de presse)

Ce n’est qu’un signe parmi des milliards d’autres. Le signe en tout cas que l’esprit public se contente d’inepties. De billevesées, sornettes et coquecigrues, qu’on pardonne mon usage des synonymes. Alors même que la pensée vive devrait se concentrer sur l’essentiel, et cet essentiel ne saurait être autre chose que la crise écologique, elle se perd dans les sables du désert de l’intelligence. Regardez, oui regardez bien la photo ci-dessous, tirée d’un article de Libération de ce 12 juillet 2012.

Ce journal, né en 1973, avait alors pour bannière : « Peuple, prends la parole et garde-la ». Aujourd’hui, voici comment débute l’article qui accompagne la photo : « Qu’on se le dise: Jean-François Copé a déjeuné hier avec Nicolas Sarkozy. Opportunément alerté, un photographe de l’AFP a surpris le secrétaire général de l’UMP sur le chemin de ce rendez-vous, auquel s’était joint Brice Hortefeux, gardien du temple sarkozyste ».

Un journaliste professionnel de l’AFP a donc, sur ordre bien sûr, attendu Copé sur un trottoir parisien, après arrangement avec son staff pour régler les questions d’horaire. La photo publiée aurait pu être prise deux ans avant, cinq ans plus tard, sans que rien n’en soit changé. Elle dit à la perfection le vide dans lequel nous acceptons tous de vivre. Jusqu’à cette fausse distance prise par le journaliste de Libération, qui tente sans y parvenir de nous faire croire qu’il n’est pas dupe. Eh si ! il l’est. Il est la dupe que l’on espérait, et il nous prend du même coup pour ses pigeons. En quoi il a raison.

Attention les yeux : le 14 juillet, dans le cadre de l’entretien télévisé coutumier du président de la République, il est question que François Hollande aborde la question du tweet que sa nana, Valérie Trierweiler a envoyé en juin au candidat « dissident » de La Rochelle, Olivier Forlani. Je n’en dors plus. La photo :

Le patron de l'UMP Jean-Francois Copé en route pour son déjeuner avec Nicolas Sarkozy, le 12 juillet 2012, à Paris.

Le patron de l’UMP Jean-Francois Copé en route pour son déjeuner avec Nicolas Sarkozy, le 12 juillet 2012, à Paris. (Photo PIERRE VERDY.AFP)

Planète sans visa l’avait bien dit (sur l’Espagne en ruines)

Cette fois, je ne saurais nier. Oui, ce qui suit est de l’autopromotion. Selon la vieille logique que chacun connaît, si je ne dis pas du bien de moi, qui le fera ? Alain Lipietz, peut-être ? Le fait est, amis de Planète sans visa, que j’ai écrit ici, il y a deux ans, et trois, et quatre, ce qu’il fallait penser du « miracle économique » espagnol. Les banques devraient m’embaucher, elles gagneraient de l’argent.

Plus sérieux : pourquoi personne ne parle ? On va encore nous servir la sauce idéologique selon laquelle les banques voraces seraient coupables. Mais merde, à la fin ! Il est dans la nature de ces entreprises de chercher à faire du blé quel que soient les coûts humain et écologique de leurs opérations. Le problème est ailleurs. Pourquoi cette horrible complicité des classes politiques européennes ? Pourquoi cette affolante propension des peuples à se gaver de biens matériels inutiles, dispendieux, destructeurs de tout ? Les socialos français – ils ne sont pas les seuls – ont ENCENSÉ la politique criminelle de leurs copains espagnols du PSOE. Ils ont applaudi la destruction accélérée du littoral ibérique. Ibérique, car le Portugal est lui aussi concerné. Ayrault, notre Premier ministre, veut à toute force un second aéroport à Nantes, sa ville, au moment où des dizaines d’aéroports espagnols, financés par l’impôt, sombrent dans l’insolvabilité et la ruine.

Je vous en prie ! Assez de jérémiades ! Assez d’explications qui jamais ne rendent compte de rien. Le monde doit changer de base, je crois que cela a déjà été écrit.

Ci-dessous, pour ceux qui veulent voir, de leurs propres yeux éblouis, deux articles anciens de Planète sans visa, et même un troisième. 2010, 2009, 2008 : qui dit mieux ?

Espagne, castagnettes et dominos

Après la Grèce, l’Espagne ? Je n’ai pas le temps, hélas, de rechercher quelques perles égrenées par nos économistes-en-chef, nos politiques princiers, de droite et de gauche bien sûr. Il y a une poignée d’années, l’Espagne était LE modèle que nos élites proposaient à une France jugée malade, en tout cas assoupie. Son taux de croissance faisait chavirer le cœur de tous les abrutis qui croient penser, quand ils ne font que braire. Le problème est que tout reposait sur un château de cartes, un lointain château en Espagne que personne ne possèderait un jour.

La politique criminelle des élites espagnoles tient en peu de mots : corruption de masse, destruction de la nature, délire immobilier. On a détruit là-bas ce qui restait de rivage après la stupéfiante flambée franquiste des années soixante du siècle passé. Et construit, souvent au bord de l’eau, mais aussi dans d’improbables banlieues, des milliers de programmes immobiliers qui jamais ne trouveront acquéreurs. Jamais. Certains sont achevés, mais sans aucune adduction. D’autres sont commencés, et se trouvent à divers stades. Mais le cochon de client s’est évaporé. Il s’agissait d’une chaîne de Ponzi, la même pyramide que celle qui a conduit l’escroc Madoff en taule. Tant que les gogos achètent et que d’autres gogos se lancent à leur suite, tout marche à la perfection. Mais dès que le doute s’installe, c’est l’effondrement.

Cela fait longtemps que j’ennuie mon entourage en répétant que l’Espagne est d’une fragilité de verre. On conspue aujourd’hui les gouvernements grecs dans les rues d’Athènes. Il n’est pas exclu que l’on fasse pire demain avec ceux du Parti populaire (PP) espagnol et du Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE). Car ils ont mené la même politique et créé les conditions du chaos. Je vous, je nous le demande : qui paiera pour ces appartements morts-nés ? Qui paiera le prix de la corruption et de la dévastation écologique ? N’oubliez pas que des banques ont massivement prêté aux margoulins pour faire leurs galipettes monétaires. Je vous l’annonce, pour le cas où vous ne le sauriez pas : celles de France sont plombées par le désastre immobilier espagnol. Pas toutes, non, et pas à la même échelle. Mais si mes informations sont bonnes, on peut s’attendre à des surprises. Et elles seront mauvaises.

Tiens, je vous remets pour le même prix un article de Planète sans visa, qui n’a, après tout, qu’un an. Il renvoie à un article qui en a deux.

Zapatero, Zapatera, socialauds d’Espagne et d’ailleurs

Je souhaite ardemment que personne ne vienne prendre leur défense, ici tout au moins. Car ailleurs, je sais combien ils sont choyés, aimés, cajolés. Madame Ségolène Royal – dite la Zapatera – ne s’est-elle pas excusée il y a quelques jours, au nom de nous tous, auprès de son si cher ami José Luis Rodríguez Zapatero, Premier ministre espagnol en titre ? Ne lui a-t-elle pas demandé de pardonner des propos prêtés à notre Sarkozy national ? Si.

Or que font donc les socialistes espagnols ? Ils détruisent avec frénésie ce qui reste de ce pays de légende. En janvier 2008, avant donc l’annonce de la crise économique que vous savez, j’ai écrit (ici) sur quoi reposait le soi-disant miracle espagnol, avec ces taux de croissance admirés d’un bout à l’autre de notre Europe si malade. Tenez, je me cite : « Du temps de Franco, vieille et sinistre baderne aux ordres du pire, le choix majeur a été de vendre le pays au tourisme de masse. Une aubaine pour les vacanciers français découvrant, dans les années 60, la défunte Costa Brava, puis le reste. Les héritiers du Caudillo, de droite d’abord, puis de gauche, ont poursuivi dans la même direction, toujours plus vite, toujours plus loin. Le Premier ministre en place, José Luis Rodríguez Zapatero, ne cesse de vanter l’état de l’économie espagnole, qui lui devrait tant. Par parenthèses, faut-il rappeler l’enthousiasme de madame Royal chaque fois que quelqu’un l’appelle la Zapatera ? ».

Tout est malheureusement connu, et le Parlement européen lui-même a condamné sans appel des « projets d’urbanisation massive (…) sans rapport avec les véritables besoins des villes et villages concernés », contraires « à la durabilité environnementale » et qui ont des effets « désastreux sur l’identité historique et culturelle » des lieux (www.batiweb.com). Voilà pourquoi, bien qu’aimant l’Espagne et sa langue, je mets rigoureusement dans le même sac le PSOE – parti socialiste au pouvoir – et le PP, ou Parti populaire, de droite. Plutôt, parce que j’aime profondément l’Espagne. Mais vous aurez rectifié de vous-même.

Pourquoi ce rappel ? Mais parce que les socialistes au pouvoir à Madrid s’attaquent aujourd’hui au grand joyau ornithologique de la péninsule, l’Estrémadure. Je connais ce lieu, qui est rude au regard et au corps. Froide l’hiver, brûlante l’été, la région abrite une sorte de savane arborée méditerranéenne, la dehesa. Comme un compromis entre la nature et l’homme, immémorial, sur fond de chênes verts, d’oliviers sauvages, de genêts, d’arbousiers et de troupeaux. C’est aussi le pays des oiseaux. Des grandes outardes. Des vautours fauves, moines, percnoptères. Des grues. Des oies. Des canards. L’Éstrémadure est si pauvre que les bureaucrates madrilènes l’ont laissée en paix, tout occupés qu’ils étaient à ronger les côtes sublimes du pays.

Fini. Le gouvernement vient de décider une série de mesures scélérates au dernier degré. La plus extravagante est peut-être le cadeau fait à une transnationale étasunienne, Florida Power and Light (ici), qui pourra construire deux usines solaires cette année à Casas de Hito, en Estrémadure. 600 millions d’euros d’investissement – on ne sait rien d’autres arrangements éventuels, qui peuvent se produire néanmoins – et 100 emplois à la clé. 100 emplois en échange d’un paradis des oiseaux. En 2007, on a dénombré à Casas de Hito 11 325 grues. Et sept espèces d’oies, et 140 000 canards hivernant à trois kilomètres, sur le lac de barrage de Sierra Brava. Je dois vous avouer que je n’ai pas regardé de près les dangers que feront peser sur les oiseaux sauvages ces installations. Et vous renvoie à une pétition des naturalistes espagnols de SEO (ici). Ils sont déprimés. Moi aussi.

D’autres projets simplement criminels menacent l’Estrémadure. Une raffinerie de pétrole à Tierra de Barros, des centrales électriques, des parcs éoliens lancés dans des conditions douteuses de légalité, et qui sont apparemment dangereux pour des oiseaux comme les vautours. Lesquels sont magnifiques, à la différence de ceux qui traînent dans les bureaux des promoteurs d’Ibérie comme de France.

Je vois bien que naît sous nos yeux encore ébahis un capitalisme vert censé nous clouer le bec. Si vous avez le moindre doute, jetez un œil ici, je crois que nous nous comprendrons. Eh bien ? Au risque flagrant de me répéter, il n’est pas question de considérer ces gens-là, qui incluent évidemment nos socialistes comme de vagues cousins un (long) temps égarés. Ce sont des adversaires. Ce sont des ennemis. Et je vous jure que je les exècre. Zapatero, Zapatera, toutes ces camarillas, tous ces sbires, tous ces fifres et sous-fifres, tous ces petits marquis, ces Dray, Mélenchon, Royal, Hollande, Fabius, Weber, Bartolone, Aubry, Rebsamen, Le Guen, Hamon, Delanoé, Désir, Bloche, ad nauseam. J’ai pris le parti des oiseaux et du vol libre au-dessus des cimes, celui des migrations, celui de Nils Holgersson, celui de la beauté. J’ai pris le parti du soleil, de la lune, de la pluie et des arbres. Et ce n’est pas le leur.

La Stampa sauve l’honneur de la presse française (le cas Schmidheiny)

Grand merci à Marie, fidélissime lectrice de Planète sans visa. Elle envoie le lien suivant, vers le quotidien italien La Stampa. L’article ci-dessous évoque la personne détestable de Stephan Schmidheiny, dont j’ai eu l’occasion de parler plus d’une fois ici, et notamment et . En deux mots, ce copieux salaud, héritier de l’empire Eternit – l’amiante – a été condamné en février 2012 à 16 ans de taule par le tribunal italien de Turin. Il a été jugé coupable de la mort de plusieurs milliers de prolos travaillant dans ses usines et alentour. Mais bien avant cela,  Schmidheiny avait refait sa vie en Amérique latine, devenant, par la grâce de chirurgiens esthétiques d’aujourd’hui – les agences de com’ – un « philanthrope écolo». Cet invraisemblable Janus a été l’un des principaux organisateurs du Sommet de la terre de Rio, en 1992. Il sera présent à coup sûr dans les coulisses – au moins- de celui de 2012, qui s’ouvre dans quelques jours. N’est-il pas président d’honneur du World Business Council for Sustainable Development, ou WBCSD ?

L’article de La Stampa rappelle qu’une pétition, que j’ai relayée, réclame que Schmidheiny soit déclaré persona non grata à Rio. Rêvons. Et il précise : « Compare al fianco di Clinton nel ruolo di consigliere, va all’Onu e in Vaticano (…) In Europa stringe la mano a tutti i potenti, fra cui non manca l’allora commissario europeo Romano Prodi ». Ce qui veut dire que celui que le magazine Forbes présente comme le Bill Gates suisse « apparaît aux côtés de Clinton dans le rôle de conseiller, va à l’Onu comme au Vatican, serre la main de tous les puissants, parmi lesquels celui qui était encore Commissaire européen, Romano Prodi ».

Quand vous verrez – bientôt – les images de Rio 2012, pensez à ce type et au système qui le protège. Pensez aux morts. Pensez à Brice Lalonde, organisateur officiel de la conférence, qui laisse une place de choix à Schmidheiny. Ainsi va le monde réel, et pas autrement. À ma connaissance, aucune association écologiste officielle française n’a seulement évoqué le nom de Schmidheiny. Certaines, il est vrai, lèchent directement le cul de gens comme lui. Et les autres ont opportunément la mémoire qui flanche.

Cronache

04/06/2012 – il caso

Ambiente, appello contro Mr. Eternit « Non deve partecipare al vertice »

ALBERTO GAINO

«Ci rivolgiamo alle Nazioni Unite, alle autorità internazionali, ai capi di stato e di governo, alla presidente del Brasile Dilma Rousseff, affinché dichiarino Stephan Schmidheiny “persona non gradita” alla Conferenza di “Rio + 20”, organizzata dall’Onu sullo sviluppo sostenibile in programma a Rio dal 20 al 22 giugno».

Rimbalza nella Rete l’appello di Abrea, l’associazione brasiliana degli esposti all’amianto, vittime anche dell’Eternit locale, sino al 1998 controllata da Schmidheiny. In Italia la petizione è stata sottoscritta dall’Associazione dei familiari delle vittime di Casale Monferrato, da numerose altre, da sindacati e scienziati come l’epidemiologo Benedetto Terracini. Stupisce che si debba ricordare niente meno che alle Nazioni Unite: «Schmidheiny è stato condannato per aver causato un disastro ambientale, e per questo dovrebbe essergli vietata la partecipazione a questa importante riunione che preparerà un piano e discuterà di come proteggere il futuro della Terra».

La singolarità della situazione corrisponde alla singolarità della figura del sessantacinquenne Stephan Schmidheiny, perfetto per il ruolo di Giano bifronte del nostro tempo. Così lo descrivono gli autori dell’appello al segretario Onu Ban Ki-moon: «Schmidheiny è uno dei fondatori del World Business Council for Sustainable Development. E’ pure un benefattore, il filantropo che ha creato la Fondazione Avina per sostenere progetti ambientali e sociali in America Latina».

«Ma è anche l’ex proprietario dell’Eternit, la multinazionale produttrice di amianto-cemento e il 13 febbraio scorso il Tribunale di Torino (Italia) l’ha condannato a 16 anni di carcere per aver provocato – ripetono quelli dell’Abrea per mettere bene in chiaro l’informazione apparsa approssimativa nella Rete, vedi Wikipedia – un disastro ambientale doloso permanente e per omissione volontaria di cautele antinfortunistiche. Se fossero state attuate, tali misure avrebbero potuto proteggere le vite dei lavoratori e della popolazione locale dai ben noti rischi di morte derivanti dall’esposizione all’amianto. Minerale cancerogeno e, secondo l’Organizzazione mondiale della sanità, responsabile della morte di oltre 107 mila persone l’anno».

Apparentemente quest’uomo, che la rivista americana Forbes ha definito il Bill Gates svizzero, ha vissuto due esistenze. A 25 anni eredita una delle due galline dalle uova d’oro che hanno immensamente arricchito la sua famiglia: l’Eternit. Al fratello Thomas, invece, va il colosso del cemento, l’Holcim. Stephan fa sostenere ad agiografi e avvocati di aver cercato di innovare con forti investimenti e nuove tecnologie la tradizionale produzione di manufatti Eternit contenendone la pericolosità. Ma nel 1972, quando il controllo azionario della multinazionale passa dai belgi a lui, non mette assolutamente al bando la crocidolite (l’amianto blu, il più pericoloso) che negli stabilimenti italiani di Casale Monferrato e Bagnoli continuerà ad essere utilizzata sino alla chiusura, quasi quindici anni dopo. Il 1992 è l’anno della svolta: in Italia si mette finalmente al bando l’amianto, e a Rio, per il primo «Vertice della Terra» sull’ambiente da salvare, Stephan Schmidheiny si presenta come l’«eroe» dello sviluppo sostenibile.

Ha raccolto decine di grandi industriali dietro le sue convinzioni, lo si conosce come il produttore degli Swatch e uno dei grandi soci del colosso bancario Ubs. L’Eternit è un mondo a parte, «svaporato» o quasi nei progetti di riforestazione, di sostegno alle culture, di filantropia terzomondista. Gli assegnano grappoli di lauree ad honorem come guru dell’ambiente, compare al fianco di Clinton nel ruolo di consigliere, va all’Onu e in Vaticano a sostenere le ottime ragioni della green economy. In Europa stringe la mano a tutti i potenti, fra cui non manca l’allora commissario europeo Romano Prodi.

Finché non gli piomba in testa la tegola del processo torinese, attesa e temuta a tal punto che da un decennio aveva fatto spiare il magistrato Raffaele Guariniello e speso milioni nella strategia della greenwashing. Fernanda Giannesi, piccolo eppure irriducibile ispettore del lavoro brasiliano, gliel’ha rovesciata addosso per attribuirgli una particolare abilità nella disinformazione e nell’ambiguità. Tuttora Schmidheiny preferisce versare «liberalità» alle vittime Eternit (in cambio però del ritiro delle querele) anziché i risarcimenti decisi dai giudici.

Ci-dessous, une traduction proposée par Flore. Merci à elle.

Schmidheiny, condamné à 16 années de prison pour les milliers de victimes, sera présent à Rio.
ALBERTO GAINO

«Nous nous adressons aux Nations Unies, aux autorités internationales, aux chefs d’état et de gouvernement, à la présidente du Brésil Dilma Rousseff, pour que Stephan Schmidheiny soit déclaré “persona non grata” à la Conférence de “Rio + 20”, organisée par l’Onu, sur le thème développement durable, programmée à Rio du 20 au 22 Juin».

L’appel de l’ABREA, l’association brésilienne des personnes exposées à l’amiante, également victimes de l’Eternit local, administrée par Schmidheiny jusqu’en 1998, se propage sur le Net. En Italie la pétition a été signée par l’Association des familles de victimes de Casale Monferrato, et par beaucoup d’autres, par des syndicats, par des scientifiques comme l’épidémiologiste Benedetto Terracini. Étonnant qu’il faille rappeler à rien moins que les Nations Unies ceci : «Schmidheiny a été condamné pour avoir causé un désastre environnemental, et pour ça il devrait lui être interdit de participer à cette importante réunion où il s’agit de discuter et de préparer un plan sur comment protéger le futur de la Terre».

La singularité de la situation correspond à la singularité du personnage même de Stephan Schmidheiny , âgé de 65 ans, parfait dans le rôle d’une personne ambiguë typique de notre époque. Les auteurs de l’appel lancé au secrétaire de l’Onu Ban Ki-moon le décrivent ainsi : «Schmidheiny est l’un des fondateurs du World Business Council for Sustainable Development. Également un bienfaiteur, le philanthrope qui a crée la Fondation Avina pour soutenir des projets environnementalistes et sociaux en Amérique Latine».

«Mais il est aussi l’ex propriétaire d’Eternit, la multinationale productrice d’amiante-ciment et le 13 février dernier le Tribunal de Turin (Italie) l’a condamné à 16 ans de prison pour avoir provoqué – ceux de l’ABREA le répètent pour que les choses soient bien claires car l’information apparaît approximative sur le Net, voyez Wikipedia – un désastre environnemental criminel et permanent par omission volontaire de mesures de précaution contre les accidents. Si elles avaient été prises, de telles mesures auraient pu protéger la vie des travailleurs et des populations locales des risques de mort, bien connus, liés à l’exposition à l’amiante. Minéral cancérogène, selon l’Oms, responsable de la mort de plus de 107 000 personnes par an ».

Apparemment, cet homme, que la revue américaine Forbes définit comme le Bill Gates suisse, a vécu deux existences. A 25 ans, il a hérité de l’une des deux poules aux oeufs d’or qui ont immensément enrichi sa famille : l’Eternit. Tandis que son frère Thomas a reçu le colosse du ciment, l’Holcim. Stephan fait plaider à ses biographes et à ses avocats d’avoir cherché à innover avec de gros investissements et de nouvelles technologies la production traditionnelle de l’usine Eternit pour en limiter la dangerosité.

Mais en 1972, quand le contrôle des actions de la multinationale passe des belges à lui, il ne mets pas au ban la crocidolite (l’amiante bleu, le plus dangereux) qui dans les établissements italiens de Casale Monferrato et de Bagnoli continueront à être utilisés jusqu’à la fermeture, quasiment 15 ans après. 1992 est l’année du virage : en Italie c’est le bannissement de l’amiante, et à Rio pour le premier « Sommet de la Terre» sur la sauvegarde de l’environnement, Stephan Schmidheiny se présente comme le «héros» du développement durable.

Il a rassemblé des dizaines de grands industriels derrière ses convictions, là il se distingue comme le producteur des Swatch et l’un des plus grands actionnaires du géant bancaire Ubs. L’Eternit est un monde à part, «évaporé» ou quasi, dans des projets de reforestation, de soutien à la culture, de philanthropie tiers-mondiste. On lui attribue tout un tas de diplômes ad honorem comme gourou de l’environnement, il brille aux cotés de Clinton dans le rôle de conseiller, va à l’Onu et au Vatican défendre les excellentes raisons d’une économie verte. En Europe, il serre la main de tous les puissants, parmi les quels ne manque pas le président de la commission européenne de l’époque Romano Prodi.

Tant que la tuile du procès de Turin ne lui plombe pas la tête, il attend et il a peur à tel point qu’il avait fait espionner le magistrat Raffaele Guariniello et qu’il a dépensé des millions pour sa stratégie de greenwashing. Fernanda Giannesi, petite mais irréductible inspectrice du travail brésilienne lui a attribué une particulière habileté dans la désinformation et aussi dans l’ambiguïté.

Schmidheiny préfère toujours verser des «libéralités» (dons) aux victimes d’Eternit ( en échange toutefois du retrait des plaintes) au lieu des réparations décidées par la justice.