Archives de catégorie : Journalisme

Accoyer et les lobbies

Accoyer, vous voyez qui ? En ce cas, vous avez de la chance, mais je dois penser à tout le monde. Bernard Accoyer est le président de l’Assemblée nationale, poste on ne peut plus prestigieux. C’est, comme disent les commentateurs, dont je ne suis pas, “le troisième personnage de l’État”. En outre, c’est un comique-troupier qui s’ignore. Dans le genre “j’ai la rate qui s’dilate”, ou peu s’en faut.

Il y a quelques jours, n’écoutant que son courage, il annonçait sa ferme intention d’encadrer par la loi le travail des lobbies au Parlement. Et puis, constatant qu’il n’y avait aucune urgence véritable, il est passé à l’opération rétropédalage. L’affaire est momentanément enterrée. On en reparlera aux alentours de la Saint Glin-Glin.

C’est un brin fâcheux pour nous, pauvres humains. Car les lobbies font largement la loi, ne vous y trompez pas. Au moins cinquante entreprises et organismes décisifs pour notre avenir disposent de badges qui permettent à leurs hommes d’entrer librement à l’Assemblée, d’aller boire un coup avec les députés, d’entreprendre une amicale causette dans les couloirs, et bien davantage en cas de véritables affinités.

Parmi eux, TotalFinaElf, Air France, EDF, le Medef bien entendu, et même la FNSEA. Ces lobbyistes sont constamment épaulés par une partie notable des assistants parlementaires, dont une centaine au moins complètent leurs revenus en travaillant pour des cabinets de conseil. Et même de conseils avisés. C’est splendide.

Il faut dire que Jean-François Copé, député-maire UMP de Meaux et chef de groupe parlementaire, trouve encore le temps de consacrer deux jours par semaine à l’un des plus importants cabinets d’avocats d’affaires français : Gide Loyrette et Nouel. Copé ne se trouble pas une seconde en avouant qu’il mettra son plantureux carnet d’adresses, constitué dans le cadre de ses fonctions électives, au service de ses patrons privés.

Il ne se trouble pas, car tout le monde s’en contrefout. En 2005, Vincent Nouzille et Hélène Constanty ont publié un livre tout de même étonnant, Députés sous influence (Fayard), sans que cela ne change quoi que ce soit aux moeurs parlementaires qui, il est vrai, ne tombent pas de la lune. La corruption de l’esprit public est générale, chaque personne de bon sens peut s’en rendre compte au fil de sa vie quotidienne.

Se souvient-on seulement que le président en titre du Sénat – il serait Président en cas d’empêchement de Sarkozy – est mêlé à deux très vilaines affaires ? Christian Poncelet a, d’une part, fait salarier sa secrétaire personnelle par La Poste, puis France Telecom pendant de longues années. Et d’autre part, il serait intervenu à plusieurs reprises en faveur de Jean-Claude Bertoldi, représentant en l’occurrence la Sogea, une entreprise de BTP filiale de Vinci. Ces interventions auraient pu favoriser l’obtention de marchés publics, mais bien entendu, la présomption d’innocence, etc.

Les questions restent heureusement légales, et je me demande donc, avec vous je l’espère, combien de décisions de routes, de barrages, de centrales diverses, de remembrements et de drainages, de lotissements bien sûr, ont pu être influencées par nos admirables amis les lobbyistes.

Vous, je ne sais pas, mais moi je bous quand j’entends l’expression “lobby écologiste“. Je bous, car s’il est une chose dont je suis convaincu, c’est que les écologistes ne sont ni ne seront jamais un lobby. Un lobby, c’est la poursuite d’un but mercantile, au service d’intérêts particuliers. Et le point de vue écologiste, du moins celui auquel je pense en écrivant ce mot, représente l’intérêt de tous et de chacun, y compris des espèces non humaines, pour aujourd’hui mais aussi demain.

À la vérité, je suis bien incapable de distinguer, parmi les insulteurs, ceux qui, sont honnêtes de ceux qui ne le sont pas. Dieu reconnaîtra (peut-être) les siens. Mais je ne vous lâcherai pas sans vous inviter à cliquer sur ce lien : http://www.worstlobby.eu. Cette information, grâce à laquelle vous aurez un aperçu de ce qui se passe en Europe, me vient d’Édith Wenger, que je remercie chaudement. Bruxelles ne vaut pas mieux que Paris, hélas. L’affaire, notre grande affaire de la protection de la vie est européenne. Et même mondiale, mais je ne vous ferai pas l’injure de croire que vous l’ignorez. Salut !

Fièvre du soja au journal Le Monde

C’est ennuyeux, car ce n’est pas la première fois que je vous entretiens du journal Le Monde. Et de la même manière très critique. S’agirait-il d’une fixation ? Je ne le crois pas. Et d’un, je suis un lecteur de fort longue date, ce qui donne tout de même quelques droits. Et de deux, ce quotidien est dit de référence, ce qui signifie sauf erreur qu’on se réfère constamment à ses articles, supposés dire le vrai dans un monde d’incertitude et de pacotille. Et de trois, je suis journaliste, ce qui n’est pas un cadeau, mais n’est pas davantage une tare, a priori du moins. Je veux dire que cela aide à voir un journal tel qu’il est fabriqué, par une petite équipe aux choix discutables, sinon discutés. Bref. Je suis furieux. La lecture du Monde daté du 30 octobre 2007 m’a fait bondir, et j’espère que vous me comprendrez. Mais comme il s’agit d’une histoire à épisodes, le mieux est de raconter cela dans l’ordre, du moins dans celui que je vous propose.

Premier acte le 19 septembre 2007. Le Monde publie ce jour-là une enquête inouïe sur le soja au Brésil, L’Amazonie asphyxiée par le soja, signée de deux noms : Hubert Prolongeau et Béatrice Marie (http://www.infosdelaplanete.org). J’ai croisé Prolongeau il y a vingt ans, puis l’ai perdu de vue, mais je sais qu’il pige pour le Nouvel Obs, Elle, et donc Le Monde. Il n’appartient pas à la rédaction du quotidien, par conséquent. Quant à Béatrice Marie, j’ignore qui elle est. L’article est renversant, car il donne à voir – c’est une première dans la presse française – les liens évidents entre déforestation de l’Amazonie et culture industrielle du soja transgénique. C’est en outre un excellent reportage, dont je sais par expérience à quel point il est difficile à faire. J’applaudis intérieurement. Trop tôt.

Deuxième acte quinze jours plus tard. Une connaissance qui travaille au Monde me parle de tensions autour de l’article. L’ambassade du Brésil à Paris, très attentive comme il se doit à l’image du pays, s’est plainte auprès de la hiérarchie du journal. On commencerait à regarder le reportage d’un tout autre oeil. Bon, cela reste sans importance.

Troisième acte : le gouverneur brésilien du Mato Grosso, Blairo Borges Maggi, débarque à Paris à la mi-octobre, pour une opération de communication de grande ampleur. L’Iddri, un institut dirigé par Laurence Tubiana, ancienne conseillère de Lionel Jospin à Matignon, l’invite le 19 pour une conférence. Son titre, au son inimitable : Production agricole, commerce et environnement, le cas de l’État du Mato Grosso. Il faut préciser quelques points. Le premier, de loin, c’est que Maggi a été sévèrement étrillé par Prolongeau et Marie. Pour cause, d’ailleurs, car le gouverneur est aussi l’un des industriels du soja les plus puissants au monde. Voici un extrait d’un texte publié par Survival International au printemps 2006, qui vous donnera une idée du monsieur réel : « Le territoire des Enawene Nawe dans l’Etat du Mato Grosso est massivement défriché pour faire place aux plantations de soja et aux activités d’élevage. Le gouverneur de l’Etat et le ‘baron’ du soja, Blairo Maggi, l’un des plus importants producteurs du soja au monde, envisagent de construire des barrages hydroélectriques sur le territoire des Indiens afin de fournir en énergie l’industrie du soja. Maggi fait pression sur le gouvernement fédéral pour que les territoires indiens ne soient pas reconnus dans son Etat ».

Maggi est vraiment un homme important, et je vous invite à lire un article très détaillé qui remet tout en perspective à l’adresse suivante : (http://risal.collectifs.net). Le Monde, à juste titre du coup, suit avec attention la tournée de Maggi en France. On ne peut, je ne peux que supposer des contacts entre le journal, l’ambassade brésilienne à Paris, et l’entourage de Maggi. Comme je ne suis pas l’homme invisible, je n’y ai pas assisté, et j’en suis bien contrit.

Quatrième acte, qui me fait tendre l’oreille et le nez : le 24 octobre, il y a quelques jours à peine, Le Monde publie une lettre de la transnationale Cargill, vivement mise en cause, il est vrai, dans le reportage de septembre. Le service de com de la Cargill conteste toutes les accusations portées contre elle. C’est de bonne guerre, assurément, mais à la lecture de ce courrier, une question se faufile et s’installe en moi : pourquoi diable Le Monde ne répond-il pas à ce courrier, comme il le devrait ? N’y aurait-il rien à rétorquer ? Prolongeau et Marie seraient-ils à ce point incompétents qu’ils aient pu tout inventer ? Cargill s’exprime comme pour rétablir une vérité tronquée. Je dois vous dire que j’en sursaute.

Cinquième acte enfin, dans l’édition datée du 30 octobre, mais vendue dès hier à Paris, le 29. Je découvre avec stupéfaction un article en page 20, signé par la correspondante du Monde en Argentine. C’est un court reportage, probablement, mais ce n’est pas précisé, dans la foulée d’un voyage de presse. Cela se lit au travers des lignes sans difficulté. Et si même je me trompe, ce qu’à Dieu ne plaise, il s’agit d’un spot unique consacré à une entreprise agricole unique, entièrement dédiée au soja. Un « établissement modèle », comme l’indique sans manière la journaliste. Autrement dit, et si vous m’y autorisez, l’équivalent des villages Potemkine de la tsarine Catherine II.

Je ne mets pas en cause la journaliste en question, mais il faut tout de même dire un mot des correspondants installés dans une ville comme Buenos Aires. À l’égal de ceux, Américains ou Suédois, vivant à Paris, ils ne connaissent pas grand-chose au-delà des zones officielles et institutionnelles du pays. C’est ainsi, c’est comme ça. Donc, un bref reportage sur une entreprise « modèle » où l’on cultive intensivement du soja transgénique. Disons que le papier, quelconque, mérite un coin de page. Au mieux.

Mais tel n’est pas le choix de la hiérarchie du Monde. Bien au contraire, la décision est prise de gonfler cet article maigrelet jusqu’à le transformer en baudruche, sur une page entière de notre grand journal ! Avec un titre inouï, garanti 100 % idéologique : Argentine, le salut par le soja. On ajoute en outre de grands tableaux infographiques, une interview qui n’a rien à voir, un encadré lui aussi hors-sujet. Quel est le but d’un tel article ? Celui d’affirmer que le déferlement du soja est une chance véritable pour l’Argentine, qui lui permet de relancer spectaculairement son agriculture. Franchement, cela ne tient pas debout.

Où veux-je en venir ? Sûrement pas à la dénonciation d’un ténébreux complot. Ni même aux insupportables accointances entre ambassade et journalistes peu scrupuleux, qui existent il est vrai. Non, je ne veux pas croire au pire. Mais je suis sûr en revanche que les points évoqués méritent d’être reliés entre eux. Et dans tous les cas, je demeure interdit. L’information, ce serait donc cela ?

Post-scriptum (presque) sans rapport : dans la même édition du Monde, en date du 30 octobre 2007, mais page 7, une brève. Une infime brève invisible pour qui ne ratisse pas l’édition. Une reprise de quelques lignes de l’AFP. À New York, Jean Ziegler, rapporteur de l’ONU pour les questions alimentaires, vient de tonner comme il sait faire. Évoquant le boom sur les agrocarburants, il a fort justement réclamé un moratoire mondial de cinq ans pour arrêter un temps cette nouvelle trouvaille de l’agriculture industrielle. L’affaire est considérable, et met directement en cause le Brésil, et tout près derrière Blairo Maggi, roi du soja. Car le soja est une excellente matière première pour la fabrication d’agrocarburants. Ziegler parle directement de « crime contre l’humanité ». Quoi qu’on pense du personnage Ziegler, cette information mérite à soi seul un sujet. Mais Le Monde choisit un entrefilet. À New York, devant l’Assemblée générale des Nations Unies, Ziegler a reçu un accueil glacial de deux pays, les États-Unis et le Brésil. Mais Le Monde décide que tout cela ne mérite pas d’être porté à la connaissance de son excellent public français. Ainsi. Asi.

Mais qui est donc Claude Allègre ?

Non, amis lecteurs, Allègre n’est pas ma tête de Turc. Il en est bien d’autres. Mais comment vous dire ? Il est un symbole, et c’est celui de l’irresponsabilité de la presse, fût-elle de qualité, comme on dit outre-Manche. Vous avez suivi comme tout le monde la remise récente de prix Nobel. Celui de la paix a été donné à Al Gore, qui fut vice-président des États-Unis pendant huit ans, à l’époque Clinton.

Je ne l’aime guère. J’avais lu à sa sortie en Amérique son livre Earth in the balance, paru en 1992. Et le plus drôle, c’est que j’en avais fait une critique enthousiaste. Mais oui ! C’était la première fois, dans ma vie, que je lisais une analyse sérieuse de la crise écologique sous la plume d’un grand politique. Une citation du livre vous situera le tout. Gore écrivait : « We must make the rescue of the environment the central organizing principle for civilization ». Autrement dit, il fallait faire de la sauvegarde de l’environnement le principe d’organisation central de la civilisation.

J’avais applaudi, et j’avais tort. Car cinq ans plus tard, au grand raout sur le climat de Kyoto, Gore représentait l’Amérique. Et il se coucha comme de juste devant les intérêts du business. Reste, car je suis un pragmatique, que je suis heureux qu’il ait reçu le Nobel de la paix. Le message planétaire est puissant, et je pressens, malgré tout, que Gore est dans un véritable engagement. Au fond, que demander de plus à des gens venus de si loin ?

Et voilà Claude Allègre. Je vous ai embêté il n’y a pas si longtemps avec un très long texte sur lui et Tazieff : vous pouvez éventuellement vous y reporter (https://fabrice-nicolino.com). L’attribution du Nobel à Gore lui a permis une nouvelle salve d’éructations. Ce ne serait que risible, car c’est aussi risible, si ses propos n’avaient été recueillis comme sérieux. Je ne citerai que l’éditorial du journal Le Monde (14-15 octobre 2007), en page 2. Les adversaires de Gore, écrit l’auguste quotidien, « peuvent compter sur le renfort de quelques scientifiques, tel l’ancien ministre socialiste Claude Allègre, qui ne perd pas une occasion d’exprimer son scepticisme quant au changement climatique et à son origine humaine. Au-delà des querelles entre experts, les observateurs qui suivent les conflits en Afrique constatent que le réchauffement du climat et ses effets sur les équilibres écologiques sont à l’origine de conflits entre des nomades et des sédentaires ».

Un peu long ? Peut-être, mais j’avais besoin de ces deux phrases. Dans la première, on parle de « quelques scientifiques », comme si Allègre était un scientifique en général. Or, il ne sait strictement rien du climat. Je n’exclus pas qu’il soit plus ignorant que moi. Et dans la deuxième, l’expression qui tue est : « au-delà des querelles entre experts ». Là, nous touchons du doigt le spectre de la désinformation. Car il n’y a aucun débat d’experts. Et Allègre, au reste, n’en est pas un. Il existe d’une part un consensus mondial – rarissime dans l’histoire des sciences -, tel qu’exprimé par le GIEC, qui a lui aussi reçu le Nobel. Et puis de l’autre, quelques clampins dans le genre d’Allègre. Telle est la vérité.

Je n’insiste pas sur la responsabilité d’autres journaux, qui relaient la vilaine hargne de Claude Allègre. En revanche, je vous signale que Jean-Marc Jancovici, véritable connaisseur du dossier, vient de mettre en ligne (www.manicore.com) un article désopilant, mais infiniment sérieux, sur Allègre. Si vous en avez le moyen, faites circuler, car on se marre, car on se tient les côtes faute de trouver une autre réaction possible.

Rions ensemble une seconde, car c’est lundi, n’oublions pas. Voici le début, consacré au dernier livre d’Allègre, où il aborde la question du climat : « Il est difficile de dire si la consternation, l’admiration ou l’ébahissement est le terme plus approprié pour caractériser ce qui vient à l’esprit une fois refermé ce livre. Ce dernier comporte une telle densité d’âneries au centimètre carré de page imprimée qu’il en devient une énigme. A-t-il seulement été écrit par un adulte, ou bien par un petit-neveu d’Allègre dont ce dernier n’aurait pas relu les propos ? (…)

Cette avalanche d’inepties pose du reste un problème spécifique à qui veut s’essayer à une critique : par où commencer quand, sur des chapitres entiers, chaque page (je dis bien chaque page) contient une démonstration qui n’en est pas une, un procès d’intention, une citation rapportée de manière inexacte (ce qui évidemment rend ensuite la critique plus facile !), ou encore une absence de précision – délibérée ? – qui rend impossible l’identification même de l’individu ou de l’entité visés (le pronom « on », qui dispense opportunément de préciser qui a dit quoi exactement, est employé à jet continu, et quand « on » ne sait pas qui est visé exactement, il est difficile de savoir quoi répondre…). »

Pas mal, non ?

L’affaire du doigt (à propos de Belpomme)

Vous connaissez comme moi cette phrase mille fois répétée : « Quand le sage montre la lune, l’idiot regarde le doigt ». Il y a des variantes qui ne changent rien au fond, comme par exemple : « Quand le sage pointe la lune, le fou regarde le doigt ». Antique sagesse, n’est-ce pas ?

Sauf grave erreur de ma part, elle nous vient du Bouddha lui-même (Petite info qui n’a rien à voir, je ne suis pas bouddhiste). J’ai retrouvé trace d’une pensée qui lui est attribuée, et que je vous offre : « L’être puéril saisit l’extrémité du doigt et non la lune [que le doigt signale] ». Tout viendrait donc de là.

Quel rapport avec Dominique Belpomme, cancérologue reputé, et depuis quelques années écologiste distingué ? Voyons cela, si vous me permettez. Dans les Antilles françaises, singulièrement dans les bananeraies, l’État a laissé faire une pure et simple horreur pendant des décennies. Je sais un peu de quoi je parle, car j’ai consacré – avec mon co-auteur François Veillerette – un chapitre du livre Pesticides, révélations sur un scandale français, au cas de la Guadeloupe.

C’est étrangement simple : malgré des rapports dissimulés pendant trente ans dans les tiroirs de l’administration, un pesticide terrible, le chlordécone, a été massivement utilisé. Même quand il était officiellement illégal. Les sols concernés sont pollués pour des siècles, car ce produit est d’une stabilité chimique étonnante. Des siècles, oui. Les conséquences sanitaires sont à la mesure de cette folie, même si aucun lien épidémiologque ne peut, pour le moment être établi entre exposition et flambée de certaines affections graves.

Bon, et la suite ? Le professeur Belpomme a rendu il y a quelques semaines un rapport sur cette pollution chimique en Martinique. Et je suis allé à une conférence de presse où il rendait compte de son travail. Des élus des Antilles, de Guyane, et de France métropolitaine assistaient à la réunion, dont Christiane Taubira. J’y ai dénoncé en direct – non repris à la télé, hélas – certains responsables du désastre.

Depuis, une infernale rumeur circule dans les petits milieux parisiens, notamment chez les journalistes. Je ne fréquente pas, mais ce bruit est arrivé chez moi, par de multiples entrées. Que dit-il ? Que Belpomme – qu’il me pardonne – est un charlatan. Qu’il ne pense qu’à faire parler de lui. Je lui épargne le reste. Hier mardi, j’ai reçu de l’Artac, association du professeur Belpomme, une lettre ouverte censée défendre sa réputation. J’ose espérer qu’il n’a pas besoin de moi, mais évidemment, évidemment je le soutiens de tout coeur.

Personne – journalistes, fonctionnaires, politiques – n’a jamais su élever la voix quand il fallait pour protéger les paysans antillais. Et personne n’ose encore s’attaquer au professeur Tubiana, président honoraire de l’Académie de médecine, qui couvre de sa haute autorité des rapports autrement incertains que celui du professeur Belpomme, sur qui la meute croit pouvoir s’abattre. Moi, je vous le dis en conscience : Belpomme est avec nous. Et je suis avec lui.