Archives de catégorie : Morale

« Cela ne lui ressemble pas » (sur DSK et les femmes)

ATTENTION : les commentaires, pour je ne sais quelle raison technique,  ne me parviennent plus sur ma boîte aux lettres électronique. Je suis obligé d’aller les pêcher sur le serveur, ce qui retarde et complique tout. Avant que cela soit réglé, patience s’il vous plaît.

Je ne sais à qui distribuer la palme d’or, car tous se battent pour l’obtenir. Madame Royal, monsieur Hollande, qui disent penser, « avant tout » à DSK ? À Manuel Valls, qui vient de déclarer avoir eu les larmes au yeux en voyant à la télé son héros menotté ? À Jean-Marie Le Guen et Jean-Christophe Cambadelis, clamant sur les ondes que cette affaire de viol présumé ne ressemble en rien à ce cher homme ? Je précise que ces deux derniers personnages ont été salariés par la Mutuelle des étudiants MNEF à l’époque où les copains et coquins liés au mouvement trostkiste-lambertiste y faisaient la loi, et les comptes. Relisez donc avec moi, car cela reste instructif  (ici). DSK, cet ami des étudiants pauvres, avait empoché 600 000 francs de l’époque (valeur 1999).

Oh oui, ces braves gens font plaisir à entendre et à voir. Ils n’ont jamais eu un mot contre la politique criminelle du FMI. Ils n’ont jamais protesté quand DSK, après avoir créé le Cercle de l’Industrie dès 1993 avec ses copains patrons, est devenu un lobbyiste du nucléaire appointé par EDF. Il est on ne peut plus logique qu’ils n’aient aujourd’hui pas une pensée pour une bonniche qui – peut-être, oui, en effet, peut-être – est la victime d’une tentative de viol.

Vous savez quoi ? Ces gens finiront par me faire douter de leur moralité profonde. Et en attendant, je vous refile ci-dessous – merci à Emmanuel de m’avoir rappelé ce texte ! – un billet écrit sur Planète sans visa il y a près de deux ans. On devrait me lire plus souvent.

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Cet étrange DSK et ces curieux journalistes (du cul au FMI)

Je vais être direct : je déteste DSK. L’un des premiers papiers de Planète sans visa lui était consacré (ici). Il est inouï que nul n’ose attaquer celui qui a osé – oui, je le répète : osé – devenir le directeur du Fonds monétaire international (FMI). Cet organisme a joué un rôle crucial dans la dévastation des terres et des cœurs, dans les mortelles atteintes à la beauté et à la diversité du monde et de ses habitants.

DSK démontre là, mais toute sa carrière le clame, qu’il est l’homme de la destruction, des claques dans le dos aux grands patrons, du mépris définitif pour les gueux, mes frères. Je le déteste. Même en face d’un Sarkozy, je ne voterai jamais pour lui. Et je suis encore assez vivant pour rêver d’épisodes historiques où l’on pourrait enfin demander des comptes politiques et moraux à des hommes comme lui.

Sur tout autre plan, il y a la question de sa vie privée.Un livre récent affirme que Frédéric Lefebvre, l’aboyeur de l’UMP et le toutou de Sarkozy, détient des photos de cul de DSK, qui pourraient lui être fatales (ici). J’écris de cul, car c’est de cela qu’il s’agit. Et qu’en penser ? Et faut-il en penser quelque chose ? Je crois que oui. Quand Berlusconi drague des jeunesses de 18 ans et baise des putes – ou l’inverse, je ne sais plus -, la presse de gauche française, Nouvel Obs en tête, s’indigne, pousse les hauts cris, et note cette évidence que le président du Conseil italien a perdu les pédales.

Mais sur DSK, chut ! Or, je vais vous révéler ce qui est un secret de Polichinelle : le microcosme sait parfaitement à quoi s’en tenir. Moi-même, qui ne vais ni aux conférences de presse, ni dans les soirées, je sais depuis des années. Un mien ami, journaliste dans un titre de gauche fort connu, m’a rapporté une scène à laquelle il avait assisté chez des noceurs et partouzards. Il y a bien six ou sept ans. Je n’insiste pas. Sauf qu’ayant fait une allusion aux faits dans son article – car il était là en reportage -, ledit titre l’a secoué, à la suite d’un coup de fil de protestation.

Chacun fait semblant de croire qu’un tel comportement est possible chez un éventuel président de la République. Moi pas. Pour deux ordres de raisons. D’abord, parce qu’il signale une vision des relations entre l’homme et la femme qui sont à l’opposé des valeurs auxquelles je crois. Ensuite, parce qu’un homme qui se met constamment en danger dans des situations limites, met en danger les institutions dont il a la charge.

Vous n’êtes pas d’accord ? C’est bien votre droit. Mais je ne confierai ni ma petite sœur ni le feu nucléaire à quelqu’un qui ne sait pas respecter les femmes ni retenir ses pulsions. C’est moral ? C’est aussi moral.

Ce qui se cache derrière le panda du WWF (échos allemands)

La vérité, en tout cas cette part de vérité que personne ou presque ne veut considérer, se fait jour. Pour les bureaucrates, c’est déjà trop tard. J’ai écrit pour cela Qui a tué l’écologie ?, et voici qu’un documentaire allemand s’en prend, lui aussi, à cette baudruche appelée WWF, sans doute par antiphrase. Ce n’est pas drôle ? Non, ce n’est pas drôle. Vous trouverez ci-dessous- merci Christian – la présentation en allemand, puis en français, de ce film prévu sur la chaîne ARD le 22 juin prochain. Franchement, comment interpréter le silence assourdissant du WWF, de Greenpeace, de la fondation Hulot et de France Nature Environnement à la sortie de mon livre. Franchement ?

Film Ankündigung WWF LÜGNER

Annonce du film : « WWF, MENTEUR »

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Das Erste – 22 Juni 2011 – 23:30 bis 00:15 Uhr

A voir sur la première (ARD) le 22 juin 2011, de 23h30 à 00h15.

Der Pakt mit dem Panda – was verschweigt der WWF ?
Ein Film von Wilfried Huismann

Le pacte avec le Panda – que cache le WWF ?

Un film de Wilfrid Huismann

Der WWF gilt als größte Umweltschutzorganisation der Welt. Fast grenzenlos ist das Vertrauen in seine grünen Projekte. Mit aufrüttelnden Kampagnen zielt der WWF direkt auf´s gute Gewissen der Spender – alle sollen sich beteiligen wenn aussterbende Arten geschützt und das Klima oder der Regenwald gerettet werden.

Le WWF est considéré comme la plus grande organisation de protection de l’environnement au monde. C’est avec une confiance presque aveugle que sont accueillis ses projets verts. Le WWF fait appel à la conscience des donateurs par des campagnes qui secouent : tout le monde doit participer lorsqu’il s’agit de sauver des espèces animales menacées, les climats ou les forêts humides.

Vor 50 Jahren wurde der WWF gegründet – am 11. September 1961. Heute ist der WWF  die einflussreichste Lobbyorganisation für die Umwelt – weltweit. Dank bester Kontakte zur Politik und zur Industrie. Eine ständige Gratwanderung zwischen Engagement und Käuflichkeit. Ein ganzes Jahr arbeitete der Dokumentarfilmer Wilfried Huismann an einem Film, der das grüne Bild des WWF entzaubert. Hinter der Öko-Fassade entdeckte der Autor während seiner Dreharbeiten weltweit Geschichten voller Sprengkraft. Sie handeln von vertriebenen Völkern, abgeholzten Regenwäldern und dem großen Geschäft mit dem grünen Umweltsiegel.

Il y a 50 ans – le 11 septembre 1961 – le WWF fut fondé. Aujourd’hui, le WWF est le lobby en faveur de l’environnement le plus influent au monde. Grâce à ses excellents contacts avec les politiques et les industriels. C’est un exercice de funambule entre engagement et vénalité. L’auteur de documentaires, Wilfried Huismann a travaillé toute une année à un film qui démythifie l’image du WWF. Derrière la façade écolo, l’auteur a découvert durant le tournage autour du monde, des histoires explosives. On y parle de peuples déportés, de forêts humides rasées et de très bonnes affaires, grâce label vert en faveur de l’environnement.

Wilfried Huismann verfolgt auf seiner Reise die Spur der Spenden. Zum Beispiel in Indonesien.  Der WWF sammelt für den bedrohten Orang-Utan auf Borneo. Vor Ort  findet das ARD-Team kein einziges Orang-Utan Schutzprojekt des WWF. Im Gegenteil: Der WWF kooperiert mit einem Konzern, der die letzten Wälder im Herzen  Borneos rodet, um Palmölplantagen anzulegen. Dabei sterben die Organ-Utans. Der WWF nimmt Geld von dem Unternehmen und verschafft ihm das Gütesiegel für „nachhaltige Produktion“. Kritiker sehen darin einen modernen Ablasshandel.

Wilfried Huismann suit tout au long de son voyage, la trace des dons. Exemple en Indonésie : le WWF fait des collectes pour l’orang-outan de Bornéo, espèce menacée. Sur place, l’équipe de télé de la première chaîne allemande (ARD) ne trouve aucun projet de protection du WWF, en faveur des orang-outans. Au contraire, le WWF coopère avec une grosse entreprise qui détruit les dernières forêts de Bornéo pour mettre en place des plantations de palmiers à huile, ce qui est fatal aux orang-outans. Le WWF prend l’argent de l’entreprise et lui accorde le label « Production durable ». Les esprits critiques y voient une forme moderne de la pratique moyenâgeuse des indulgences.

Weltweit schließt der WWF Partnerschaften mit großen Firmen aus dem Energie-und Agrobusiness.  Sogar gentechnischmanipuliertes Soja des Chemieriesen Monsanto hat den Segen des Panda bekommen. Hilft der Deal des WWF mit der Industrie, die  letzten noch intakten Ökosysteme der Welt zu retten,  oder beschleunigt er ihre Vernichtung?

Partout dans le monde, le WWF passe des partenariats avec de grosses entreprises de l’énergie et de l’agrobusiness. Même le soja manipulé génétiquement du géant de la chimie Monsanto a reçu la bénédiction du Panda. Est-ce que l’accord entre le WWF et l’industrie aide à sauver les quelques écosystèmes de la planète encore intacts ou est-ce qu’il accélère leur anéantissement ?

Die Dokumentation will die Geheimnisse des WWF ergründen. Sie wird zur einer Reise ins Herz des grünen Empire und sie erschüttert den Glauben an den Panda.

Ce film documentaire veut élucider les mystères du WWF. Il nous plonge au coeur de l’Empire vert et ébranle notre croyance dans le Panda.

Eine CoProduktion von WDR und SWR

Une coproduction de la West Deutsche Rundfunk et  de la Südwest Rundfunk

Redaktion: Tibet Sinha & Martin Schneider

(Presque) rien : Mélenchon défend DSK

Ci-dessous, un article de 20 minutes, journal gratuit. Mélenchon dans ses œuvres, qui défend DSK, avec qui il a passé plus de trente ans dans le même parti, face à la colère qui gronde. Il fait semblant, en bon bouffon de la République, de ne pas comprendre de quoi il s’agit. On s’en fout, évidemment, qu’un pote de DSK lui ait prêté une Porsche de 100 000 euros. Le problème, social, politique, éthique, écologique in fine, c’est que DSK accomplit la besogne sans voir une seconde – la vérité brutale, c’est qu’il s’en tape -, qu’il crache ainsi à la gueule du monde. Et, moi, je vous le dis : j’ai reçu mon compte de crachats. Qu’il aille se faire foutre.  ¡ Y que se vayan todos !, pour reprendre un mot cher à ce pauvre Mélenchon. Qu’ils se tirent. Tous. Et Mélenchon le premier.

Train de vie: Jean-Luc Mélenchon défend DSK

Mis à jour le 13.05.11 à 12h10

Ennemi politique  déclaré de Dominique Strauss-Kahn, Jean-Luc Mélenchon l’a toutefois défendu ce vendredi matin sur BFM TV dans la polémique sur son train de vie. Pour lui, parler de « la voiture » ou de « la marque des chaussures»« c’est la décadence de la politique ». « Ce n’est pas ça qui fait que je considère que DSK n’est pas du tout un bon candidat pour la gauche », a-t-il assuré. Du moins « si on veut qu’elle soit rassemblée » et « si on veut rassembler » «les gens» et « pas les états-majors », a-t-il ajouté.  « Vous ne pouvez pas rassembler les gens si vous amenez sur le terrain un candidat qui est le représentant de ce que tous les autres ne peuvent pas supporter, c’est-à-dire une mondialisation libérale extravagante, une brutalité sociale comme celle qui s’abat sur la Grèce », a-t-il expliqué. Il a aussi fait valoir: « Il y a des ouvriers de droite et des riches de gauche, il y a des ouvriers de gauche, il y a des riches de droite ».

Doubler la production alimentaire en dix ans !

Voyez comme les choses sont bien faites. On parle des trente ans de l’arrivée de ce cher Mitterrand au pouvoir. On parle de la grossesse supposée de cette grande Carla Bruni-Sarkozy. On parle de tout et bien entendu de rien. Mais cette fois, comme avec une violence plus insupportable que d’habitude. Les lecteurs anciens et réguliers – pardon aux autres – de Planète sans visa savent que je pense davantage aux miséreux du Malawi et du Pérou qu’aux innombrables petits marquis, qui de droite, qui de gauche. Leur sort m’importe. Ce qui explique, entre autres, pourquoi je ne voterai jamais – JAMAIS – pour Dominique Strauss-Kahn, l’homme des Porsche et du Fonds monétaire international (FMI).

Je vous glisse ci-dessous un document unique en son genre. Olivier de Schutter, rapporteur spécial des Nations unies sur le droit à l’alimentation, vient de rendre un rapport extraordinaire. La production alimentaire mondiale, dit-il, pourrait doubler en dix ans grâce à l’agroécologie. Grâce à des techniques agricoles qui se passent de chimie et de pesticides. Qui rendent autonomes les gueux. Qui remplissent le ventre des affamés chroniques. Lesquels sont, selon une sinistre statistique officielle, 1 milliard et 200 millions d’êtres. Autrement exprimé, le monde pourrait en l’espace de dix ans connaître une révolution écologique et morale. Ne me dites pas, ne me dites surtout plus que nous manquons d’espoir. Et de raisons de se battre. Nom de Dieu ! Debout !

COMMUNIQUÉ DE PRESSE

Rapport ONU :
L’agroécologie peut doubler la production alimentaire en 10 ans

GENÈVE – En à peine 10 ans, les petits agriculteurs peuvent doubler la production alimentaire des
régions vulnérables en recourant à des méthodes de production écologiques, affirme un nouveau
rapport de l’ONU.* Fondé sur un examen approfondi des plus récentes recherches scientifiques, le
rapport appelle à un virage fondamental en faveur de l’agroécologie comme moyen d’accroître la
production alimentaire et de réduire la pauvreté rurale.

« Si nous voulons nourrir 9 milliards de personnes en 2050, il est urgent d’adopter les techniques
agricoles les plus efficaces », explique Olivier De Schutter, Rapporteur spécial de l’ONU sur le droit
à l’alimentation et auteur du rapport. « Et les preuves scientifiques actuelles démontrent que les
méthodes agroécologiques sont plus efficaces que le recours aux engrais chimiques pour stimuler
la production alimentaire dans les régions difficiles où se concentre la faim. »

L’agroécologie applique la science écologique à la conception de systèmes agricoles qui répondent
aux défis climatiques, alimentaires et de pauvreté rurale. Cette approche améliore la productivité
des sols et protège les cultures en s’appuyant sur l’environnement naturel comme certains arbres,
plantes, animaux et insectes.

« À ce jour, les projets agroécologiques menés dans 57 pays en développement ont entraîné une
augmentation de rendement moyenne de 80% pour les récoltes, avec un gain moyen de 116%
pour tous les projets menés en Afrique », explique le Rapporteur de l’ONU. « De récents projets
menés dans 20 pays africains ont même démontré un doublement des rendements des cultures
sur une période de 3 à 10 ans. »

« L’agriculture conventionnelle accélère le changement climatique, repose sur des intrants coûteux
et n’est pas résiliente aux chocs climatiques. Elle n’est tout simplement plus le meilleur choix pour
l’avenir », affirme l’expert de l’ONU.

« L’agroécologie est au contraire reconnue par un nombre croissant d’experts pour son impact
positif en termes de production alimentaire, de réduction de la pauvreté et d’atténuation du
changement climatique. Même le Malawi, un pays qui a lancé il y a quelques années un important
programme de subvention des engrais chimiques, met désormais en œuvre des programmes
agroécologiques. Ceux-ci bénéficient à plus de 1,3 million de personnes qui ont vu les rendements
de maïs passer de 1 tonne/ha à 2-3 tonnes/ha. »

Le rapport souligne aussi que les projets agroécologiques menés en Indonésie, au Vietnam et au
Bangladesh ont réduit de 92% l’utilisation d’insecticides pour le riz, permettant aux agriculteurs
pauvres de faire d’importantes économies financières. « Remplacer les pesticides et les engrais
par la connaissance de la nature fut un pari gagnant, et des résultats comparables abondent dans
d’autres pays asiatiques, africains, et latino-américains », note Olivier De Schutter.

« L’approche gagne aussi du terrain dans les pays développés comme les États-Unis, l’Allemagne
ou la France », poursuit l’expert. « Toutefois, en dépit de son incroyable potentiel dans la
réalisation du droit à l’alimentation, l’agroécologie est encore insuffisamment soutenue par des
politiques publiques ambitieuses, et peine donc encore à dépasser le stade expérimental. »
Le rapport identifie une douzaine de mesures que les États devraient mettre en œuvre pour
développer les pratiques agroécologiques.

« L’agroécologie est une approche exigeante au niveau des connaissances », explique Olivier De
Schutter. « Elle requiert donc des politiques publiques qui soutiennent la recherche participative et
la vulgarisation agricole. Les États et les donateurs ont ici un rôle clé à jouer. Les entreprises
privées n’investiront ni leur temps ni leur argent dans des pratiques qui ne peuvent être
récompensées par des brevets et qui n’ouvrent pas de marchés pour des produits chimiques ou
des semences améliorées. »

Le Rapporteur spécial exhorte notamment les États à soutenir les organisations paysannes, qui
sont un maillon essentiel dans l’identification et la diffusion des meilleures pratiques
agroécologiques. « On sait aujourd’hui que soutenir l’organisation sociale a autant d’impact que la
distribution d’engrais. Lorsqu’ils travaillent ensemble, les paysans et les scientifiques sont une
source importante de pratiques innovantes », poursuit l’expert de l’ONU.

« Nous ne réglerons pas les problèmes de la faim et du changement climatique en développant
l’agriculture industrielle sur de grandes plantations », affirme Olivier De Schutter. « Il faut au
contraire miser sur la connaissance des petits agriculteurs et sur l’expérimentation, et améliorer les
revenus des paysans afin de contribuer au développement rural. Un soutien énergique aux
mesures identifiées dans le rapport permettrait de doubler la production alimentaire dans les 5 à 10
ans dans des régions où la faim sévit. La réussite de la transition à mener dépendra de notre
capacité à apprendre plus vite des innovations récentes. Nous devons aller vite si nous voulons
éviter une répétition continue des crises alimentaires et climatiques au cours du 21ème  siècle. »

Olivier De Schutter a été nommé Rapporteur Spécial sur le droit à l’alimentation en mai 2008 par
le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies. Il est indépendant de tout gouvernement et de
toute organisation.

Pour plus d’informations sur le travail du Rapporteur spécial : ici ou .

François Mitterrand, grand homme de droite (et de poche)

Mise en garde : le texte qui suit est long. Fait aggravant, il parle de François Mitterrand, trente ans après un orage parisien qui ne laissa que quelques gouttes sur le pavé

Appelons cela un interlude, entre deux cris contre l’état de notre planète. Mais au fait, les amis, si l’état de notre humanité n’était pas ce qu’il est, en serait-on à ce point de déréliction écologique ? Je m’autorise trois mots sur notre grand homme de poche, François Mitterrand. Il y a trente ans, donc, il remportait l’élection présidentielle au nom du parti socialiste, et promettait de rompre avec le capitalisme. Mais vite, hein ? Il ne fallait pas traîner. Aux oublieux, à ceux qui étaient trop jeunes, je dédie ce court passage tiré d’un document officiel du parti socialiste. Il est consacré à une sorte de congrès tenu à Alfortville (Val-de-Marne) quelques mois avant mai 1981.

Cet extrait fait partie d’un texte écrit en 2006, en une époque bien plus calme pour nos Excellences de gauche, et son ton en est singulièrement adouci. Voici : « Divisé en trois parties – comprendre, vouloir, agir – le projet socialiste doit orienter l’action des socialistes pour les années 80. Rupture avec le capitalisme et stratégie d’union de la gauche, volonté de s’affranchir de la logique du marché et des contraintes extérieures, affirmation de la souveraineté nationale face au processus d’intégration européenne et à la puissance américaine, le texte soumis aux militants est marqué par le volontarisme politique et économique ; il réunit 96 % des suffrages ». En 1980, les mots réellement prononcés étaient de feu. Il s’agissait de faire rendre gorge aux capitalistes, rien de moins.

Longtemps après le roi du Tibet

Or donc, il s’agissait bel et bien de changer le monde. Ce qui n’a pas été fait, à moins qu’on l’ait caché à tous. Je sais que de nombreux lecteurs de Planète sans visa conservent pour Mitterrand les yeux de Chimène. Et moi ? Euh, non. Lorsque la discussion roule sur ces années-là en présence de femmes et d’hommes de gauche, la première et souvent la seule chose qu’ils trouvent à dire, c’est : « Oui, mais quand même, l’abolition de la peine de mort ». Et, bien que je sois poli, et que je tâche alors de détourner la conversation, je dois dire qu’intérieurement, je rigole. Ou bien je bous, selon. L’abolition de la peine de mort eût pu être décidée longtemps avant, et l’aura été sous toutes sortes de régimes. Elle avait été décidée il y a plus de 13 siècles au Tibet, sous le règne de l’excellent roi Songtsen Gampo. Le Venezuela l’avait inscrit dans sa Constitution en … 1864. Alors bon, Mitterrand n’aura fait que suivre un mouvement historique. Et c’est tout. Nous, les Français, avons bel et bien cette fâcheuse tendance à croire que nous inspirons la terre entière. Même lorsque nous arrivons parmi les derniers.

Mitterrand avait en tout cas d’affreuses raisons personnelles pour abolir. Car comme le rappelle le livre – que j’ai lu – signé par François Malye et Benjamin Stora (François Mitterrand et la guerre d’Algérie, Calmann-Lévy, 2010), il avait du sang sur les mains. Devenu ministre de la Justice et garde des Sceaux en février 1956, il le restera jusqu’au 21 mais 1957. Et pendant ce temps, sous sa responsabilité écrasante, 45 militants de la cause algérienne ont été guillotinés, dont le communiste Fernand Iveton. Je vous le dis, je n’aurais pas aimé être Missak Manouchian en 1944, avec un Mitterrand au pouvoir. Tiens, au fait, n’a-t-il pas été ami jusqu’à son assassinat – en 1993 – avec ce cher René Bousquet, l’un des plus hauts responsables de la police fasciste du régime de Pétain ? Si.

Sur cette photo prise à Marseille en 1943, Bousquet a vraiment l’air très malheureux de la présence nazie en France. Où en étais-je ? L’Algérie. Un jour, Michel Rocard accusa Mitterrand, en public, d’être un assassin. Et il avait bien entendu raison. Ce qui ne l’empêcha nullement de devenir son Premier ministre, car la carrière, mon Dieu, c’est la carrière. Question d’une rare absurdité, d’autant qu’elle plonge au plus profond de cette aventure : Mitterrand était-il de gauche ? Je vous vois frétiller, car il y a de quoi. Mitterrand a été toute sa vie un homme de droite, et l’aura à peine caché. Les sots, les pauvres sots sont ceux qui ont cru autre chose, et ne veulent à aucun prix qu’on ose s’attaquer à leur idole de pacotille.

Un militant d’extrême-droite

Reprenons en quelques phases. Avant guerre – Mitterrand est né en 1916 -, il est un militant d’extrême droite. Sans doute pas un activiste, quoique, mais en tout cas, ce qu’on pourrait appeler sans excès un fasciste. Le 1er février 1935, il participe à une manifestation de petites crapules pour protester contre l’installation de médecins étrangers en France. Aux cris de « La France aux Français » et « Non à l’invasion métèque ». Ce n’est pas un gosse, il va avoir vingt ans. Autour de l’internat des Pères maristes – 104, rue de Vaugirard, à Paris -, où Mitterrand habite alors, la canaille fasciste est omniprésente. Mitterrand noue des liens de franche amitié avec des responsables de la Cagoule, parmi lesquels Eugène Deloncle, Gabriel Jeantet ou Simon Arbellot. Or la Cagoule est une société secrète antisémite, très proche des militaires, qui entend bien abattre par la force et le complot la « Gueuse », comme ils appellent la République. Un coup d’État sera déjoué de justesse en 1937, et l’on retrouvera beaucoup de ces chers anges aux côtés des nazis, quelques années plus tard. Un détail : l’un des hommes de main de la Cagoule, Jean Filliol, assassinera en 1937 les frères Rosselli, opposants à Benito Mussolini. Sur commande du dictateur romain.

Dans ces conditions, Mitterrand pouvait-il devenir le grand résistant antifasciste qu’une vulgaire propagande ne cesse de nous vendre ? Voyez à quoi je suis rendu : j’en doute. J’en doute d’autant plus fort que Mitterrand a été avant tout un maréchaliste convaincu. Un homme de Vichy. Je ne peux tout raconter, vous seriez lassé. Mitterrand sera décoré de l’ordre de la Francisque par Pétain lui-même, en mars ou avril 1943. Un Pétain qu’il admire alors de toutes ses belles forces, comme l’attestent des lettres d’époque, signées de sa main. Il va jusqu’à se féliciter de la création du Service d’ordre légionnaire (SOL) de Darnand, ancien de la Cagoule, qui deviendra la Milice, chère au cœur de tous les démocrates. Extrait du serment des volontaires du SOL : « Je jure de lutter contre la démocratie, la lèpre juive et la dissidence gaulliste ».

Ensuite, Mitterrand serait devenu résistant. Quand ? En toute certitude, après les premières lourdes défaites de l’armée nazie. Probablement dans la deuxième moitié de 1943. Je ne vais pas jouer au devin, mais je crois profondément que son choix fut alors opportuniste. Au reste, il ne faut pas exagérer ce que les mitterrandistes de toujours ont présenté comme autant d’actions de gloire. Mitterrand n’est pas Jean Moulin. Mitterrand ne figurait pas sur l’Affiche rouge, car sur cette affiche de 23 héros assassinés par les nazis, il n’y avait que des métèques, engeance que notre Mitterrand national n’aimait guère. Des Espingouins. Des Ritals. Des Polaks. Des Arméniens. Et parmi eux – pouah ! -, des juifs.

Une seule et même obsession

J’insulte ? En effet, j’insulte. Ceux de l’Affiche rouge sont de mon sang. À la sortie de la guerre, un Mitterrand tout ripoliné devient dès 1944 une sorte de ministre des Anciens combattants. Il est aussi copain avec un autre grand résistant, un certain Jacques Foccart, qui sera le suprême Manitou de la Françafrique. Formidable. Peu après, il donnera un témoignage décisif qui sauve Eugène Schueller, financier de la Cagoule avant guerre, et fondateur de l’Oréal, la belle entreprise de madame Bettencourt, je n’y peux rien. Il a 28 ans et va bientôt obtenir ce qu’on appelle aujourd’hui un « emploi fictif » dans le vaste empire L’Oréal. Ô beauté des cieux. Parallèlement, Mitterrand sera 12 fois ministre jusqu’en 1957. Un record fabuleux. Pendant ces années, la France s’honore de vastes massacres à Madagascar, en Indochine, en Algérie. Ailleurs. Mitterrand n’a qu’une obsession, la même qui court tout au long de sa vie : le pouvoir. Pour lui. Il tente à de nombreuses reprises de devenir Président du Conseil, le poste le plus haut sous la Quatrième République. Mais il échoue et, pis que tout, un revenant lui barre la route de la victoire : De Gaulle, qui revient au sommet en 1958 et sera bientôt président, élu pour comble au suffrage universel.

Pendant toutes ces années, son arme politique s’appelle l’Union démocratique et socialiste de la Résistance (UDSR), formée en 1945, et dont il sera le chef après 1950. Ne pas se laisser impressionner par l’étiquette. L’UDSR aura été un parti de notables. De notables de droite. Mitterrand y prend le pouvoir après des manœuvres qui rappellent fort sa prise de pouvoir sur le parti socialiste en 1971. Cette courte citation d’un excellent article de l’universitaire Éric Duhamel (Pleven et Mitterrand) : contrairement à Pleven « François Mitterrand, en revanche, s’appuie sur une poignée d’hommes qu’il a connus avant la guerre et une cohorte rencontrée sous l’Occupation. Par l’intermédiaire des associations de PG [ prisonniers de guerre], tous ces hommes sont capables dans chaque département de recruter ceux de leurs camarades qui sont prêts à faire un bout de chemin avec “François” ». C’est de cette époque que date l’amitié indéfectible qui réunit Roland Dumas – député UDSR en 1956 -, notre grand moraliste à bottines, et Mitterrand. C’est à peu près de ce temps-là que datent les liens plus qu’étranges noués avec François de Grossouvre, retrouvé mort d’une balle dans la tête à l’Élysée en 1994. À peu près, car au fond, qui le sait ? Le sûr, c’est que De Grossouvre a été membre du Service d’ordre légionnaire (SOL) de Vichy déjà nommé. Le sûr, c’est qu’il a joué un rôle important dans la création en France de réseaux politico-militaires imaginés après-guerre par les Américains. Ce qu’on a appelé en Italie Gladio, et dont le rôle dans la stratégie de la tension et les attentats des années 70 du siècle passé est certain. Le sûr, c’est qu’il aura été, une fois Mitterrand élu président en 1981, le gardien de tous les secrets. Dont beaucoup, selon moi, demeurent inconnus.

Prise de pouvoir au parti socialiste

Je vous sens perdus, et j’en suis désolé. Il me faut aller plus vite, car je rédige ce texte le 9 mai 2011 au soir, et je tiens à ce qu’il soit en ligne le 10, notre grand anniversaire national. De Gaulle. Un De Gaulle terrible, qui bouche les allées du pouvoir pendant des années. Mitterrand en sera l’opposant en chef. De gauche ? Voyons donc ! En 1965, entre les deux tours de la présidentielle, il recevra l’étrange appui de l’avocat fasciste Tixier-Vignancour,  qui avait obtenu 1 253 958 voix au premier tour. Au nom de quoi ? Tixier-Vignancour avait en tout cas, bien entendu, été vichyste pendant la guerre. Le reste ? Après avoir tenté l’impossible pour revenir dans le jeu, notamment en mai 1968, où il se brûla les ailes, Mitterrand a compris l’essentiel. S’il veut gagner – c’est la seule chose qui compte -, il doit représenter la gauche. Toute la gauche, y compris ces communistes qu’il vomit depuis sa jeunesse, et dont il ne cessera, avec un magnifique succès, d’attaquer les positions de pouvoir, jusqu’à les réduire au rang de supplétifs.

Comment faire ? D’abord, comme avec l’UDSR de 1950, s’emparer d’une structure. Ce sera le parti socialiste, en voie de pure et simple disparition en 1970, après de calamiteux résultats en 1969. Au congrès d’Épinay, en 1971, par la ruse, toutes les ruses, Mitterrand s’empare d’un parti dont il n’est même pas membre ! Grâce, entre autres, au concours empressé d’un certain Jean-Pierre Chevènement, dont vous aurez du mal, même en cherchant, à retrouver qu’il fut officier d’active pendant la guerre d’Algérie, et partisan assumé de l’Algérie française. La suite vous est connue dans les grandes lignes. La saison, qui dure dix ans, est aux grands discours. Mitterrand, homme de droite, devient un expert de l’emphase « gauchiste », bien meilleur à ce jeu que le pauvre Guy Mollet de jadis, qui nous a pourtant légué l’expression « mollettiste », désignant ceux qui parlent d’une manière et agissent d’une autre.

Dans les conditions décrites plus haut, il était fatal que Mitterrand ne fasse rien de ce qu’il avait promis. La gauche au pouvoir ne décréta pas la mobilisation générale pour les banlieues, mais la mobilisation générale de Julien Dray et Harlem Désir. Elle ne combattit pas le capitalisme, mais tout au contraire, réhabilita l’exploitation et donc les exploiteurs, Tapie en tête. Vous vous souvenez, n’est-ce pas ? Il faut dire qu’avec un Attali dans le bureau d’en face, ce ne dut pas être si difficile. Elle déplia le tapis rouge pour Berlusconi, à qui l’on refila une chaîne de télé, la défunte 5. Elle statufia Jacques Séguéla, fondateur de l’agence de pub Euro RSCG, qui conseille aujourd’hui aussi bien DSK que les industriels des gaz de schistes, sans oublier, jusqu’à certain changement, Laurent Gbagbo. Elle coucha avec le fric et la corruption.

« Dites-moi, où est le pouvoir ? » (air connu)

Trente ans plus tard, c’est oublié. L’ombre bienfaisante de Mitterrand câline candidats et futurs électeurs. Hélas, je n’ai plus le temps – et vous, je l’espère, plus la patience – de vous dire en détail pourquoi une génération entière s’est elle-même fourvoyée de la sorte. Et pourquoi la suivante est prête à recommencer. Cela a à voir, selon moi, avec l’une des faces les mieux cachées de la réalité. Cette soumission à l’autorité si bien analysée par Stanley Milgram. Il faut du chef. Il faut de l’admiration. Et donc de l’aveuglement. Et donc de la connerie à tous les étages. Rien ne changera jamais vraiment tant que ce phénomène sera à ce point dominant. Oh, je ne pense pas qu’on puisse balayer une telle invariance psychique en soufflant dessus, certainement pas. Mais je suis bien convaincu que nous serons perpétuellement défaits si nous ne sommes pas capables d’analyser et de critiquer sans relâche la notion même de pouvoir. Et ce lien maudit qui pousse des millions d’êtres à croire n’importe quelle promesse, sourire aux lèvres et yeux embués.

Allez, une conclusion. Mitterrand et la crise écologique. Il s’en cognait d’autant plus qu’il n’avait strictement rien remarqué. Et ne venez pas me dire que c’est une question d’âge ! Le vieux Dumont était né, lui, en 1904, douze ans avant Mitterrand. Et il avait 70 ans en 1974, quand au même moment Mitterrand promettait la Lune aux crédules pour pouvoir s’y installer un jour en leur marchant dessus. Jacques Ellul était né quatre ans avant Mitterrand. Cornelius Castoriadis était né six ans après Mitterrand. André Gorz était né sept ans après Mitterrand. Ivan Illich était né dix ans après Mitterrand. Alors non, ne me parlez pas d’âge ou de génération. Mitterrand est l’archétype de l’homme ignorant, et qui lisait pourtant des livres. Philistins, petits marquis d’ici ou d’ailleurs, idiots savants de toute nature ne cesseront jamais de vanter sa culture. Mais quelle était-elle, dites-moi ? Un homme qui entendait mener la France aura passé son existence sans dire un mot sur la crise de la vie sur terre. Contemporain de l’événement le plus foudroyant de l’histoire des hommes, il n’en aura rien su. Comment appelle-t-on cela, par chez vous ?

Ce que j’ai voté en 1981 ? Mitterrand. Mais je jure qu’il s’agissait d’un vote contre Giscard. J’avais la naïveté de croire qu’une victoire de la gauche ouvrirait un espace neuf à la liberté de tous. Si c’était à refaire, j’irais plutôt regarder le soleil se lever. Puis le soleil se coucher. Et entre-temps, je sais que je ne mettrais pas le pied dans un bureau de vote.