La situation aux États-Unis annonce exactement ce qui se passe et se passera en France.
Rappelons aux oublieux, nombreux ce me semble, que la crise écologique planétaire est notre destin. Nul n’y échappera. Elle devrait conduire nos politiques, en Europe comme ailleurs, depuis des lustres, mais elle en est absente. Totalement. Sans être décisive, la responsabilité des écologistes officiels, estampillés et même régulièrement décorés, est engagée. Je parle là du WWF, de Greenpeace, de la fondation Hulot et de France Nature Environnement (FNE). Quant à Europe Écologie, dont bien des lecteurs de ce blog sont des électeurs, je ne vois aucune raison de ne pas lui appliquer le même traitement.
La crise écologique, c’est maintenant. Pas quand on aura accumulé tant de forces, dans 5600 ans, que l’on pourra enfin mener les affaires autrement. Maintenant. Ou nous sauvons une partie des équilibres écosystémiques, ou ils disparaîtront. Et nos sociétés d’opulence ne survivraient pas à la perte d’incommensurables services rendus gratuitement. N’insistons pas, en ce début d’année 2011, sur les conséquences hautement probables qui s’ensuivraient. Je veux en tout cas vous parler du cas Obama. J’ai écrit ici, en novembre 2008, plusieurs articles pour dire que je ne misais pas un cent sur le mandat du nouveau président Obama. Ce qui m’a valu – je ne m’en plains aucunement – de nombreux courriers de protestation. Vous pouvez relire ce que j’écrivais alors, car je n’en retire pas un mot. Le premier papier, celui du 5 novembre, résume bien mon propos (ici).
Nous sommes le 5 janvier 2011, plus de deux ans après, et Obama n’a rien fait de réellement important. Le peu qu’il a tenté – une réforme de la santé que nous jugerions ici insultante – risque d’être détricoté par la nouvelle majorité républicaine du Congrès. En deux mots, elle entend opérer des coupes drastiques dans tous les budgets publics, notamment dans ceux de la santé et de l’écologie. Normal ? Oui, normal. Mais poursuivons. L’excellent journaliste du Monde Sylvain Cipel, installé à New York, a publié hier un papier intitulé Plus c’est gros…, dans lequel il revient sur la commission Financial Crisis Inquiry Commission (FCIC), instituée par Obama pour tenter de dénouer les fils et intrigues de la crise financière commencée en 2008 (ici). Comprenant à la fois des démocrates et des républicains, dont deux anciens conseillers de W.Bush, elle devait éclairer le peuple ébloui sur la responsabilité évidente, écrasante, de la dérégulation de l’économie et la puissance hypertrophiée des transnationales. J’ajoute qu’il y a un précédent célèbre : la Commission Pecora, créée en 1932, au milieu de la Grande Dépression, et dont les travaux débouchèrent sur de vraies décisions. Par exemple, la séparation entre les activités bancaires de dépôt et celles touchant directement au business.
Tel n’a pas été le cas avec la FCIC. Incapable de se mettre d’accord, cette commission ne rendra pas de rapport unique. C’est que les Républicains refusent tout net l’emploi de (gros) mots comme fonds spéculatifs, Wall Street, corruption, risque systémique, etc. Le seul responsable à leurs yeux de cette énième catastrophe du capitalisme, c’est l’État. Il serait trop ou pas assez intervenu, il aurait incité les Américains à s’endetter, il aurait tenté même de réguler ce qui ne doit en aucune circonstance l’être – l’avidité -, bref, il serait le monstre venu des profondeurs. Il s’agit certes d’idéologie, et concentrée. Mais est-ce bien là le problème ?
La situation américaine montre de manière limpide l’impasse historique qui est la nôtre. On vote, ou pas. Mais de toute façon sur des sujets totalement secondaires, qui embuent le regard, et font perdre un temps qui ne reviendra jamais. Les énergies – pensez à la jeunesse américaine pro-Obama, enflammée tout au long de l’année 2008 ! – se dispersent et se changent en aigreur. Pendant ce temps, la destruction avance, sans masque. Il faut sortir du cadre, sachant qu’on n’y retournera jamais ! Voyez ce qui se passe en cette année 2011 chez nous. Les quelques forces pour l’heure disponibles sont polarisées par la ridicule élection présidentielle du printemps 2012 qui ne changera rien à la seule question politique qui vaille. Qui est, comme chacun devrait le savoir, la création d’une coalition mondiale des refusants, des dissidents, des solidaires, des combatifs, des courageux. Tous ceux qui ne renoncent pas à l’idée de l’homme. Tous ceux qui ne renoncent pas à l’idée de l’animal. Tous ceux qui ne renoncent pas à l’idée de la plante. Tous ceux qui ne renoncent pas à l’idée d’une vie digne d’être vécue. Potentiellement, cela fait du monde. Il faut et il suffit de rassembler. Les élections, oui, oui et encore oui : un piège à cons.