Je ne veux d’autant moins me croire devin que je ne le suis pas. Je me trompe régulièrement et je fais très attention de m’en souvenir. Cela entretient l’esprit, je vous l’affirme. Je me trompe, mais je réfléchis, ceci expliquant en partie cela. Et je ne me trompe pas toujours, fort heureusement pour moi. En ce qui concerne les dites « révolutions arabes », je crois avoir moins pensé de sottises que tant d’autres, dont le métier est pourtant de commenter doctement, voire d’agir, comme font semblant de faire nos femmes et hommes politiques.
Je n’ai jamais cru dans la baliverne d’une démocratie remplaçant la dictature. Et même si cela ne touche pas directement la crise écologique, unique objet ou presque de Planète sans visa, permettez-moi quelques phrases. L’Occident niais, idéalement représenté en Libye par le couple Sarkozy-BHL, continue de juger son « modèle » irrésistible et universel, contre toute évidence. À les suivre, si l’on se débarrasse d’un tyran, c’est pour ouvrir la place au CAC40 et à ces messieurs des transnationales, sur fond d’élections à la mode parisienne. L’exemple chinois, parmi tant d’autres, aurait pourtant dû secouer les plus nigauds. Loin des fantasmes de jadis – au temps de la guerre froide -, qui associaient systématiquement liberté du commerce et liberté tout court (dans la défunte Union soviétique), la Chine montre qu’on peut vendre des colifichets par milliards et maintenir un monopole politique sur la société.
Dans les pays arabes, où la situation est fort différente, où chaque situation est en vérité unique, il est un point commun, et c’est l’islam en tant que réponse globale à la frustration et à l’impasse tragique où sont fourvoyées les sociétés humaines. La plupart imaginent qu’il suffit de fournir quelques objets usuels aux classes moyennes des villes, plus les bouquets satellite des télévisions, mais les peuples s’angoissent pourtant. Et ils ont raison, car l’avenir est assurément sombre. Prenez le cas de la Libye, que ce bouffon assassiné de Kadhafi aura tant fait souffrir. Là-bas, le despote avait décidé de créer le « Grand fleuve artificiel », qui devait devenir le second Nil de la région. Le 30 août 1991, à Benghazi la rebelle d’aujourd’hui, le colonel inaugurait la première phase de travaux pharaoniques, devant une trentaine – où êtes-vous diable, satrapes et salauds ? – de chefs d’État et de gouvernement.
Quels travaux ? Ceux visant à extraire grâce au fric venu du pétrole une eau miraculeuse et fossile, vieille de milliers d’années, cachée dans les grès du désert, entre Tchad, Libye, Soudan, Égypte. Dans cette zone que devait parcourir bien plus tard mon ami Jean-Loïc Le Quellec, admirable découvreur des civilisations disparues (lisez donc son livre, coécrit avec Pauline et Philippe de Flers, Peintures et gravures d’avant les pharaons, du Sahara au Nil, Soleb/Fayard). À rebours de la grandeur de jadis, Kadhafi aura claqué de 1985 à 2010 au moins 30 milliards de dollars pour dilapider une eau qui ne reviendrait plus, expédiée vers le nord, le littoral, Tripoli par des canalisations géantes à ciel ouvert. Comme de telles monstruosités sont-elles possibles ? C’est très simple : il faut et il suffit d’avoir des amis techniciens.
Qui osa prêter main forte à ce vol contre l’humanité et son avenir ? Entre autres notre société du BTP Vinci, qui accompagnait en visite officielle en Libye, en novembre 2004, un certain Jacques Chirac (ici). Et qui représentait Vinci ? Mais son patron, évidemment, Antoine Zacharias (lire ses aventures ici) le goulu. Et que venait donc faire Zacharias à Tripoli ? Mais signer contrat, pardi, pour réaliser la quatrième tranche des travaux du « Grand fleuve artificiel ». Ainsi se bâtissent les fortunes de notre planète malade. Je n’insiste pas sur le cas angoissant de l’Égypte, qui est incapable de nourrir une population de 85 millions d’habitants avec son seul fleuve surexploité, martyrisé, le Nil. Je n’y insiste pas, car j’ai consacré au début de l’année un article à la question, qui peut se lire encore (ici).
Est-il utile d’entrouvrir le dossier tunisien ? Ce malheureux pays ne survit, dans les conditions du Sud, qu’en vendant son âme, pour rester poli, au tourisme fou des pays du Nord. Une telle soumission ne peut conduire qu’à la dissociation psychique de masse, c’est-à-dire à la maladie mentale de toute une société. Et, bien entendu, il ne s’agit que de châteaux de sable, comme les Tunisiens le comprennent sans qu’on ait besoin de leur faire deux fois le dessin. Où veux-je en venir ? Ces pays, très ou trop peuplés, indifférents comme le nôtre à la crise écologique qui va fatalement déferler, sont néanmoins tenaillés par une peur venue des profondeurs.
Tel est en tout cas mon sentiment. Des millions de gens, souvent pauvres, ne distinguent aucune lumière au loin, mais sont bien obligés d’avancer. Et l’islam est là, qui est la seule réponse globale disponible. Je ne discute pas ici des critiques évidentes que l’on peut, que l’on doit faire à l’islamisme. Il reste que ce dernier, jusques et y compris sous ses formes « modérées », incarne une voie de civilisation, quand il est clair que la nôtre n’a aucun avenir. En ce sens, elle rassure et rassurera d’autant plus qu’elle est fantasmatique. Disons, pour rester respectueux, qu’elle est promesse, et le restera. Une grande et fabuleuse promesse d’une vie meilleure, ici ou ailleurs. Cela suffit bel et bien.
Nous ne pouvons concourir durablement contre une telle « offre » civilisationnelle. Nous ne jouons pas dans le même registre. Nos goûts sont vulgaires et corrompus, et ne croyez pas que j’écris ces mots pour la raison que je serais un converti à l’islam, pardieu. Mais franchement, Zacharias, Séguéla, TF1, les hypermarchés, la neige artificielle, le béton jusqu’au bord des plages ? Franchement. En regard, l’islam incarne le renouveau, la sagesse, la mesure, la beauté, l’esprit. Vous ne le voyez donc pas ?
Il n’y a qu’une seule autre réponse possible. Elle réside dans une alliance encore improbable entre la culture au sens le plus profond, et l’esprit, dans son acception la plus large. Je l’appelle faute d’un mot meilleur, encore à inventer, l’écologie. C’est-à-dire une manière totalement neuve de comprendre la place des hommes sur une terre dévastée, qui implique des relations dont nous n’avons pas encore la moindre idée avec les animaux et végétaux qui ont survécu à notre folie commune. Qui implique un respect de la vie, une sacralisation de la vie sur terre, de toutes les formes vivantes, de tous les espaces, de toutes les espèces, lequel supposerait un bouleversement de notre psyché. Est-ce concevable ? Je le crois, car je ne vois aucune autre issue. Je le crois, mais je sens avec douleur que la voie d’accès est ridiculement étroite. Et que l’on n’y parviendra pas sans d’héroïques efforts sur nous-mêmes, pauvres petits êtres que nous sommes.
En attendant que vienne cette heure, si elle vient jamais, on garde le droit de railler Sarkozy. Après avoir humilié en 2007 la France, recevant Kadhafi en grande pompe à Paris, et lui proposant une centrale nucléaire, il a engagé notre pays dans une guerre coûteuse, qui aurait pu nous enliser pour des années. Et qu’a-t-il gagné ? L’édiction de la charia, la loi islamique, dans ce territoire que nos avions viennent de libérer de notre crapule préférée. À bouffon, bouffon et demi.
Bravo pour cette reconnaissance explicite de ce que représente l’Islam pour les peuples cocnernés, alors que nous parcourons un monde de ténèbre où les lumières s’éteignent dès qu’on s’en approche. j’avoue n’avoir pas vu les choses de cette manière…
Mais athée je suis et resterai, même avec la moitié de ma vie passée en pays musulmans.
Quand à Kadhaffi, je pense qu’il faut « aussi » dépasser la diabolisation dont il était l’objet en occident…
certes, le Guide Lybiens a fait d’énormes erreurs….certes, il a cru bon d’utiliser cette eau, mal conseillé, tu l’as dit, par ses amis techniciens et par le pouvoir de l’argent du pétrole, pour nourrir un peuple trop nombreux.
mais il a aussi fait de son pays celui qui a le meilleur niveau de vie en Afrique, je parle d’accès gratuit aux soins de santé de qualité, à l’éducation de qualité, le plein emploi, le logement garanti, etc…… un cas unique au monde et en afrique…puisque sur ce continent, sans aucune exception, le pétrole signifie toujours malheur et misère….. puisque qu’ici, même au Burkina, on meurt par manque de 20 euros pour se soigner et accéder à l’hopital.
il a aidé nombre de pays à rester debout face aux injustes ajustemment structurels du FMI, il a aidé l’ANC et l’Angola, et les résistants de nombre de pays…..y compris en amérique du sud.
il a fait du statut de la femme un cas unique dans les pays arabes.
la démocratie directe était en vigueur pour les affaires locales….bien mieux qu’en France.
il a resisté au diktat des sociétés de téléphonies mondiales en lançant le premier sattelite africain, vaine pacotille certe, mais resistance, ça oui.! il voulait créer une nouvelle monnaie panafricaine et dire merde à la banque mondiale, etc………
certes, il n’a pas eu accès aux pensées qui sont les nôtres ici. ce n’était pas un écologiste. si seulement on avait pu le convertir ……….ou même pensé à le faire… Castro l’est devenu aujourd’hui à sa manière…… j’ai un de ces discours récent en stock qui m’a beaucoup surpris…
Mais vu d’Afrique, la mise a sac de ce pays, l’outrepassement incroyable de la résolution des nation unies qui ne parlait que d’exclusion aérienne, l’arrogance de l’Otan qui clame mission accomplie le jour de la mise à mort du lion, tout ceci laisse planer une terreur sourde.
c’est d’une guerre contre l’Afrique qu’il s’agit. ni plus ni moins. On ne pouvait plus tolérer un pays non endetté, qui redistribuait les richesses, qui ne vendent pas tout, absolument tout aux multinationales étrangères, Bouygues, Bolloré, Total, etc…..
est-ce que tout cela ne s’appellait pas, au début « l’aube d’une odyssée » ?
cette odyssée est celle de la fuite en avant de la croissance…. c’est l’Afrique que fera les frais du sauvetage si provisoire du monstre à deux têtes qui nous gouverne…..
Bravo pour ce texte. Je l’aprouve entièrement. Notre civilisation occidentale se meurt mais quels dégats provoquet t’elle! Et j’ai bien peur que ce ne soit pas terminé!
Ils vont pondre un système à indonésienne: « économie islamique de marché »… lire Naipaul « jusqu’au bout de la foi » et Serge Latouche qui a écrit un article sur la question…
« Nous ne pouvons concourir durablement contre une telle « offre » civilisationnelle. Nous ne jouons pas dans le même registre. Nos goûts sont vulgaires et corrompus, et ne croyez pas que j’écris ces mots pour la raison que je serais un converti à l’islam, pardieu. Mais franchement, Zacharias, Séguéla, TF1, les hypermarchés, la neige artificielle, le béton jusqu’au bord des plages ? Franchement. En regard, l’islam incarne le renouveau, la sagesse, la mesure, la beauté, l’esprit. Vous ne le voyez donc pas ? »
Comme le dit mon papa « faute de grives, on mange des merles »… un abrutit passe pour un sage à côté du mongolien, en effet.
« C’est-à-dire une manière totalement neuve de comprendre la place des hommes sur une terre dévastée, qui implique des relations dont nous n’avons pas encore la moindre idée avec les animaux et végétaux qui ont survécu à notre folie commune. Qui implique un respect de la vie, une sacralisation de la vie sur terre, de toutes les formes vivantes, de tous les espaces, de toutes les espèces, lequel supposerait un bouleversement de notre psyché. Est-ce concevable ? Je le crois, car je ne vois aucune autre issue. Je le crois, mais je sens avec douleur que la voie d’accès est ridiculement étroite. »
A nôté qu’il me semble que, les premiers à avoir déclaré la guerre à l’homme lié au vivant, ce sont les monothéismes Abrahamistes (judaïsme, christianisme et islam)… l’abrahamisme semble un allié important de l’économie de marché! Les américains l’ont bien compris en finançant les eglises protestantes en Asie (la Corée du sud est dans une société à peine moins totalitaire qu’au nord, à cause justement des chrétiens…
Je crois que c’est un de tes plus beaux billets. J’en reste toute rêveuse.
Quand je vois en France, les uns qui adulent le totalitarisme asiatique,d’autres les revolutionnaires de théâtre de boulevard arabe ou africains… je me dis que la France est un pays profondément immature.
La dictature, le totalitarisme, pour beaucoup de gens, ce n’est pas une vie de merde, non non… pour beaucoup ce n’est qu’une question de: look! On aime untel ou tel tel autre, parce qu’ils fait « anti-conformiste », parce que ça fait « underground », ou « ouais, j’admire un mec seul contre tous »… admirer et défendre un dictateur, c’est un acte de « cool attitude » sans la moindre conscience ni la moindre considération pour les hommes, les femmes et les enfants (sans parler du non-humain vivant)…
L’existence est injuste: tant d’autochtones veulent quitter la dictature locale, alors que tant de petits blancs, qu’on appel par chez moi « gwers » ou « gaouri » rêvent, de vivre sous l’aile bienfaitrice du leader, du guide, du raïs ou du timonier… en tout cas, ils en rêvent, tant qu’ils habitent à Paris, St Germain des prés, Toulouse, Marseille ou je ne sais où…
Comme on dit chez moi (en traduction): » qui est intelligent comprend, l’imbécile reste ébahi »…
En fait, dans le fond, les différences entre un chirac ami de bongo, mobutu, bouteflika, ou du parti communiste chinois, et un revolutionaire germano-pratin, adepte de chavez, mao, kadhafi ou boumedienne, bah y en a pas du tout!!!!!!!!! C’est les mêmes!!!
Je parcours ce site en dilettante en trouvant souvent des billets intéressant, mais non je ne vois pas que « En regard, l’islam incarne le renouveau, la sagesse, la mesure, la beauté, l’esprit. Vous ne le voyez donc pas ? » ni d’ailleurs aucune religion. Les églises (au sens larges) ont toujours utilisés le pouvoir politique pour assoir leur manipulation mentale. Mais il est vrai que ce n’est pas (forcément?) une raison pour diaboliser la timide et chaotique transition en Tunisie.
A Hammel;
Dans le C.V de Kadhafi que vous nous brossez, vous oubliez un « point de détail »: les miliers de morts qu’il a flingué ! Son propre peuple !
Et ce, avant que son peuple se révolte, aidé certe, par les pays qui ont armé ce « Guide » sanguinaire, qui a » fait des erreurs « , comme vous dites.
Quant à l’Islam, cette religion, essayer de nous la vendre comme une chance pour ces pays, j’attends de voir refleurir les fameuses universités du passé, mais d’un passé révolu et définitivement perdu.
L’islam fait parti du monde arabe depuis plus de 1400 ans . Il y a différents islam liés à la culture de chaque pays .Il y aussi la récupération qui en a été faite , entre autre en Irack ou en Iran par des personnes qui s’apparentent davatange à des chefs de guerre .
La démocratie, le gouvernement us et les pétroliers s’en foutent.
La charia ne leur pose pas de problème du moment qu’ils peuvent se fournir facilement en pétrole, il suffit de regarder l’Arabie Saoudite, dictature plus hard que la Lybie de kadhafi. Et à mon avis, ils préfèrent la charia si elle leur fournit une main d’oeuvre à bon marché.
PS A quand bhl dans la peau d’un noir ou d’une femme dans la Lybie libérée.
Les révolution en Tunisie et en Egypte me font penser aux révolutions mexicaines au cours des quelles, le peuple faisait le bouleau, se divisait ensuite pour que des anciens du régime opportunistes reprennent le pouvoir après avoir déposer une couche de vernis.
Il y a un autre dictature qui pointe son nez : celle des milieux financiers.
Voir la conclusion d’un excellent article d’Adam Hanieh – tout à fait transposable à la Tunisie – intitulé : « Egypte : les Egyptiens se font-ils voler leur révolution? »
Lien : http://www.amisdelaterre40.fr/spip/spip.php?article68
C.
Merci pour ce texte.
Il me semble qu’il entre en résonnance avec cet extrait d’un livre de krishnamurti sur l’homme civilisé :
http://sergecar.perso.neuf.fr/textes_2/krishna_13.htm
ps: je n’ai pas lu ton livre « qui a tué l’écologie? » mais suis content de voir que tu fais une conférence à clermont bientôt, ou je pourrai rattraper mon retard 🙂
Il serait peut-être temps de relire Rudolf Steiner ?
C’est en tout cas ce que m’inspire ton avant-dernier paragraphe : »sacralisation de la vie sur terre », « bouleversement de notre psyché », ce sont des termes qu’il n’aurait sans doute pas désavoués.
la plupart des pays arabes qui avaient des chefs forts (et fort criticables, mais enfin notre histoire en fourmille aussi de ce genre de personnes)ont été cassés par la coalition américaine et européenne irak etc…ces pays restent sans timonier, ainsi les coudées seront-elles plus franches! bonnes proies pour les affairistes de tout poil qui vont pouvoir opérer des razzias sur les richesses du coin sans que nul ne puisse les en empêcher ! et ne venez pas parler de « droits de l’homme » je n’y crois pas! juste un faux nez, un argument pour vendre les actions militaires aux zopinions publiques qui n’iront pas chercher bien loin derrière les discours…c’est que les courses chez Auchan n’attendent pas. Reste encore l’Iran! alors martelons martelons martelons jusqu’au jour J.
Dont acte cordialement
Dans les pays arabes, où la situation est fort différente, où chaque situation est en vérité unique, il est un point commun, et c’est l’islam en tant que réponse globale à la frustration et à l’impasse tragique où sont fourvoyées les sociétés humaines.
Tel est en tout cas mon sentiment. Des millions de gens, souvent pauvres, ne distinguent aucune lumière au loin, mais sont bien obligés d’avancer. Et l’islam est là, qui est la seule réponse globale disponible. Je ne discute pas ici des critiques évidentes que l’on peut, que l’on doit faire à l’islamisme. Il reste que ce dernier, jusques et y compris sous ses formes « modérées », incarne une voie de civilisation, quand il est clair que la nôtre n’a aucun avenir.
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L’islam est un cadre, depuis 1400 ans, comme le rappel Bénédicte (dans le monde arabe au Machrek, dans le monde arabo-berbère au Maghreb). C’est l’islamisme qui se pose en réponse globale, dans ce contexte spatial et temporel, comme le communisme s’est voulu, en un autre temps et ailleurs, une réponse globale à la marche forcenée du monde de la révolution industrielle et aux millions de gueux restés sur le bas côté. Si l’islam, pas moins que d’autres religions, peut incarner une voie de civilisation, il est difficile d’en dire autant de l’islamisme. Non pas que ceux qui y adhèrent en confondant bien souvent intégrité et intégrisme soient de mauvaises gens (pas plus que ceux qui croyaient de bonne foi les chefs communistes) ; mais enfin, l’islamisme, même affublé du terme de modéré, et même s’il fait miroiter le contraire à ceux qu’il charme, ne saurait offrir qu’un sombre avenir, non pas les ténèbres du passé, mais celles qu’il souhaite pour demain. Et par rapport à la question de la crise écologique, la constante référence à la pureté des origines ne doit pas faire tomber dans le panneau. Aucun de ces tristes sires, malgré les contradictions apparentes, n’envisage une seconde de délaisser tout l’arsenal technologique (particulièrement militaire, mais pas uniquement) qui vient de l’occident décadent. Cette appropriation doit permettre de remonter au niveau du reste du monde, puis de le dépasser, bien sûr, afin de retrouver le statut de grandeur et de rayonnement d’antan… Un peu comme une certaine contestation au sein des banlieues (ce n’est pas la seule), qui critique la société dans la radicalité en souhaitant en réalité y avoir toute sa place. Mais l’islam a toujours été le contexte d’aspirations, de courants contradictoires, opposées ou confondus.
Fabrice, merçi de ce billet si subtil et pertinent
Il faudra bien nous le mettre dans la téte notre
« modéle » occidental ne fait plus réver personne, et comme vous le dites par sa vulgarité, sa
bassesse et sa nocivité il inspire de plus en plus le dégout et le désespoir et le vote en faveur de partis islamiques indiquent peut étre le désir inconscient de lui échapper
c’est comique de voir tous ces adorateurs de la « démocratie » se lamenter lorque les peuples osent ne pas voter comme ils le voudraient
« l’islamisme », c’est juste l’islam… le reste, du point de vue islamique, juste du bricolage destiné à introduire le virus dans la société pour ensuite, une fois les esprits habitués à la présence de ce dogme, s’imposer et tout effacer.
L’occidental islamophile a une vision de l’islam perverse: pour qui, c’est « danse du ventre, femmes maures aux seins nus, thé à la menthe et baklawa »…
Pour d’autres, l’islam c’est un truc sympathique faite de photos et souvenirs en noir et blanc… l’on nous raconte que la vérité de l’islam, c’est dada ou yeema qui ne savent ni lire, ni parler l’arabe classique… et qui ne savent même pas pourquoi ils font ça, juste ils font parce que programmés depuis l’enfance à tout ça. Le plus souvent de traditions orales en langues vernaculaires. Sa vision de l’islam n’est pas perverse, elle est juste naïve… parfois malhonnête.
Et on insulte et qualifie de « faux » et d’éronnés, les gens qui ont une maîtrise de l’arabe classique et des textes, des canons absolument parfaites… pourquoi? Par arrogance, un dogme une école de pensé, ne peut pas être une chose qui n’est pas conforme à NOTRE VOLONTÉ. Quelle arrogance!
Juste un proto-totalitaire médiéval, rien de plus… en fait, l’islam en Afrique (du nord comme noir), c’est le colonialisme des bédouins par le moral et le mental!
« Mais franchement, Zacharias, Séguéla, TF1, les hypermarchés, la neige artificielle, le béton jusqu’au bord des plages ? Franchement. En regard, l’islam incarne le renouveau, la sagesse, la mesure, la beauté, l’esprit. Vous ne le voyez donc pas ? »
C’est en effet tragique que notre « civilisation » soit devenue si vulgaire, si bouffonne, si VIDE, que certains d’entre nous se croient obligés de revenir à la religion pour trouver un peu de dignité.
Dernière en date (pas la pire, hélas) une pub pour une bagnole: « Vous ne rêvez pas, c’est une L****A. Ou plutôt si, rêvez. »
C’est qui, déjà, le zozo qui parlait de « réenchanter nos rêves »?
Tous les superlatifs ayant été utilisés auparavant par d’autres commentateurs il ne me reste pour exprimer mon assentiment que : clap, clap et re-clap !
Il est plus que jamais temps que nous prenions conscience de la monstruosité qu’est le capitalisme et le qualifier de vaste crime contre l’humanité. La capitalisme consiste simplement au droit de tuer par millions des êtres humains pour permettre aux plus riches de faire du fric.
Il nous faut abolir le capitalisme et construire enfin une société juste et sociale, on appelle ça le socialisme.
Je revendique personnellement la sortie du capitalisme, avec pourquoi pas tribunal genre Nüremberg contre les crimes du capitalisme, et la fondation d’un socialisme ou communisme (les mots sont synonymes) moderne, écologiste et démocratique. Mais réellement démocratique, c’est à dire, la démocratie directe et continue. On peut aussi appeler ça anarchisme, communisme libertaire.
Voir aussi du côté de l’expérience de la commune de Paris, des communautés paysannes autogérées en Espagne (1936-37), la Makhnovtchina en Ukraine (1917). Les échecs du passé cachent un trésor, la force qui les portait est toujours d’actualité.
Ou alors les salauds assassineront l’espèce humaine ? La loi morbide du fric par dessus tout commettra le crime suprême, le spécide (assassinat de l’espèce humaine entière) ? Je me refuse d’y croire.
Si la perspective d’une sortie du capitalisme par le haut, c’est à dire par le partage, la justice sociale, la vraie démocratie, le respect des écosystèmes et des autres animaux que nous-mêmes, se mets en place, alors les gens se détourneront de l’impasse religieuse.
Une petite histoire de Nasredine Hodja si vous ne connaissez pas :
Un jour, Nasredine Hodja eut besoin de traverser la Mer de Marmara. Il prit donc le bateau, mais juste au milieu de la traversée, une grande tempête se leva et le bateau commença à couler. Tous les passagers et les membres d’équipage se mirent à écoper pour essayer de maintenir le bateau à flots. Cependant, parmi la foule, il se trouva un homme qui, à la consternation générale, prenait l’eau dans la mer pour la jeter dans le bateau : l’inévitable Nasredine Hodja. Le capitaine se précipita vers lui en l’injuriant, en l’accusant de vouloir tous les tuer, mais Nasredine ne se départit pas de son calme. Il expliqua au capitaine qu’il se contentait de suivre le conseil que sa mère lui répétait tout le temps : toujours se mettre du côté du plus fort…
Bonjour à tous
Fabrice fait d’excellents billets que nous commentons avec plus ou moins d’accords ou de désaccords. Tout un chacun ici est pleinement conscient que la civilisation militaro-industriel (Voir Jacques Grinevald) qui s’est propagée à l’ensemble des pays du Globe est au fond de l’impasse de son modèle économique(Voir Nicholas Georgescu-Roegen). L’analyse, elle remonte aux années soixantes ; les remèdes, il y en a de partout (Voir Tim Jackson, Benoît Thévard… )
Attention au mot religion et à ses avatars. N’oublions pas que le patron des écologistes est un certain saint François d’Assise, un décroissant à coup sûr, toujours dans la sobriété.
Citer Krisnamurti ici nous ramène aux années soixantes, à ces hippies Californiens qui tentèrent de recréer une nouvelle vie autour de penseurs comme Alan W. Watts. Mais tout cela fut balayé par une société capitaliste qui récupère tout mouvement pour en exploiter le filon économique. Même la décadence est bonne, si on peut la vendre. Le veau d’or est toujours bien en place.
@KillTheCapital
Pour reprendre la tournure de bakounine plus haut (concernant Kadhafi)
Dans le C.V du capital que vous nous brossez, ne semble-t-il pas que vous oubliez un “point de détail”: le travail ET la marchandise ?
Je ne suis pas sûre d’avoir compris ton billet, Fabrice, mais peut-être ne suis-je pas assez fute-fute… Crois-tu que le peuple lybien choisisse l’islam par « pureté » et rejet de notre modèle, si nul ? Ou est-ce du second degré ? Là j’avoue être circonspecte…
Intéressant, tout ce qui se dit ici. Je devrais venir plus souvent.
Je souscris entièrement au paragraphe « Il n’y a qu’une seule autre réponse possible. Elle réside dans une alliance encore improbable entre la culture au sens le plus profond, et l’esprit, dans son acception la plus large. Je l’appelle faute d’un mot meilleur, encore à inventer, l’écologie. C’est-à-dire une manière totalement neuve de comprendre la place des hommes sur une terre dévastée, qui implique des relations dont nous n’avons pas encore la moindre idée avec les animaux et végétaux qui ont survécu à notre folie commune. Qui implique un respect de la vie, une sacralisation de la vie sur terre, de toutes les formes vivantes, de tous les espaces, de toutes les espèces, lequel supposerait un bouleversement de notre psyché. »
On a du boulot mais c’est un beau projet et à mon sens il n’y en a pas d’autre.
Hélène,
Je suis désolé, désolé vraiment d’avoir provoqué cet embarras chez toi. Je croyais m’être expliqué clairement, mais je vois bien que j’ai tort. Excuse-moi, donc.
Le mot peut-être le plus important de mon papier est « fantasmatique ». Les Libyens qui applaudissent la charia – une loi globalement très régressive, d’après ce que j’en sais – sont dans le fantasme de la pureté, comme quantité de peuples avant eux. Ils se trompent – à mes yeux – tout autant que les fanatiques de Staline et Mao jadis, ou les soutiers et soutiens de l’antique Inquisition.
Ce que j’ai voulu exprimer, c’est que l’islam – et ses versions islamistes, quoi que j’en pense moi-même – incarnent un ensemble de réponses qui prend en compte l’être, fût-il en la circonstance mystifié. Il existe une civilisation de l’islam, qui parle aux peuples de l’arc arabo-musulman d’une manière crédible. Même si elle leur promet la lune. Sa parole est en effet globale, rassérénante, et redonne à chacun une place et ce qui l’accompagne, la dignité. La déception, inévitable à mon avis, viendra plus tard.
En regard, nous n’avons plus à offrir qu’un simulacre de vie ensemble, rythmé par les courses au supermarché et l’effondrement devant la télé. Il ne peut y avoir photo sur le sujet. Pour les peuples arabo-musulmans, si tu me passes ce jeu de mots, la messe est dite. Cela n’interdit heureusement pas la critique radicale de ce revival politico-religieux. Et cela nous oblige, plus que jamais, à nous battre pour la beauté. Et la civilisation. Une civilisation qui n’est plus à détruire chez nous, car elle y est morte. Mais qu’il faut de toute urgence commencer à imaginer.
Voilà, chère Hélène, et encore désolé. Bon week-end.
Fabrice Nicolino
Merci Fabrice pour ainsi recentrer le débat, de manière si claire, sur ce qui est notre responsabilité première : Sauver/ressourcer notre propre civilisation. Sans cela, dénoncer la guerre a autrui comme méthode ignoble de thérapie que notre système malade s’administre a lui-même, n’aura aucun effet. Et nous devrons aussi ré-apprendre le respect, une valeur oubliée. Sinon pour de plus en plus de peuples de la terre, les mots « démocratie ! démocratie ! » seront inséparables des bombes et/ou de la famine, et en croyant ainsi en faire notre propriété (la démocratie) nous la corrompons en profondeur.
Winston, la démocratie ce n’est pas simplement voter. Une forme démocratique ne peut être véridique que si elle est ajustée a la manière dont la société s’est construite au fil des siècles. Et pas l’inverse. C’est subtil, délicat, je ne prétends pas avoir la vérité. Il y a des lieux ou la population vote en masse comme un seul homme. Ce ne sont pas des 51%-49%, mais des 70%-30%, voire 90%-10%. Et ça ne s’explique pas toujours par des contraintes physiques. Puisque parfois c’est l’opposition qui gagne a 70 ou 90%. Malgré les attaques physiques, les meurtres avec l’assentiment de la police, les humiliations administratives. Ces scores étonnants d’un point de vue Occidental ne s’expliquent donc pas d’une manière générale par la violence, ou en tout cas par par l’idée convenue de violence, c’est beaucoup plus subtil. Visiblement les jeux sont faits ailleurs, et lorsque les élections sont un jeu imposé de l’extérieur elles ne sont souvent qu’une fable convenue, un jeu propice a toutes les manipulations et corruptions. Une certaine arrogance « démocratique » est assez efficace pour détruire les forces sur lesquelles une société peut construire sa propre démocratie. Et c’est dommage car nous pourrions aussi apprendre a approfondir la notre.
@luline
Citer Krishnamurti nous ramène peut-être aux années 60 mais je crois que le message n’est pas mort avec le messager. Le connais-toi toi même remonte à plus loin et il me semble que c’est un fil conducteur à beaucoup d’enseignements philosophiques et religieux et qui finalement n’a rien voir avec le « que faire? ». C’est pour cela qu’il me semble que ça résonne avec les propos de Fabrice quand il parle d’héroïques efforts sur nous-mêmes (même si chacun peut interpréter ça à sa sauce).
@ Fabrice,
Encore un petit effort et tu vas finir par avoir envie de comprendre ce que je veux dire par légaliser le légitime, ou codifier des processus permettant de mettre en opposition 2 à 2 les 4 formes de dérèglement de l’autocontrôle pulsionnel implicite, tout en laissant chacun libre. Bref, t’es tout près d’adhérer à cette recherche difficile qui permettrait de mettre en évidence les fanatismes, religieux ou pas dont l’économiscisme.
http://www.nytimes.com/2011/10/29/world/africa/western-companies-see-libya-as-ripe-at-last-for-business.html
Pour ce qui est de la démocratie à l’occidentale, il faut rappeler que les occidentaux n’ont pas toujours montrer le bon exemple comme avec Allende au Chili ou Mossadegh en Iran.
Un autre peuple peut douter du modèle occidental en partie du fait de la société de consommation et du travail mais aussi des rapports entre gouvernements : si un gouvernement démocratiquement élu va contre les intérêts des puissances occidentales il se retrouve avec 2 issues sortir les pieds devants ou rechercher des soutiens auprès de la dictature de Moscou et de ses alliés.
Pour ce qui est de l’Islam, il est vrai que pour beaucoup d’habitants endoctrinés du monde arabe et d’Afrique du nord (peut être pas la majorité), il apparait comme une alternative à essayer, même si leur jugement est faussé par le contexte social et une espérance d’un retour à la grandeur passée.
Pour les récalcitrants au sabre et au goupillon (à la charia) l’avenir ne va pas être gai tout les jours dans ces pays.
PS bouleau : lapsus intéressant une partie au boulot dans la rue, une partie immobile comme les bouleaux, et des collabos.
@Lionel,
Je rajouterai le travail et le pouvoir, pouvoir des dirigeants, et envie de pouvoir des petits nuisibles délateurs et colporteurs de mensonges divers qui se compromettent ainsi pour se donner une importance.
Salut à tous,
Heureusement il y a certaines initiatives comme les villes en transition: http://villesentransition.net/ .
On sait que les dirigeants sont pourris, on sait que le système est moribond, maintenant on a besoin d’agir, de créer un élan positif, en évitant de s’intoxiquer le moral par du négatif. Mais en même temps, il faut voir les choses telles qu’elles se passent, et conscientiser ceux qui ne le sont pas encore…Ou pas. On est responsable de nous même avant tout, et si les autres ne veulent pas, si ce n’est pas le moment pour eux, ils ne changeront pas, même si ça devient urgent (le mot est bien faible).
Amitiés,
Oliv
ouais Laurent Fournier… mais, à quel sujet me réponds-tu en fait?
Winston, j’essaye de clarifier ici ce que je voulais exprimer :
Le monde ne se divise pas entre dictatures d’un coté et démocraties de l’autre. Il y a une multitude de possibilités entre les deux. Et ce n’est pas une mauvaise chose ! (horreur ?) Par exemple, les débats et les luttes contemporaines en Inde, au Pakistan, au Bangladesh posent des questions uniques et profondes sur la nature humaine, et dont la réponse demande du travail, un immense travail. Qui s’y attelle ? Qui peut travailler à l’élaboration d’une réponse ? Tout le monde ne peut pas vraiment le faire, en tout cas pas au même niveau. Il faut vivre la vie d’un « dalit » (d’un intouchable), d’un tribal dont la famille a été détruite, dont la terre a été donnée aux multinationales, et qui doit se cacher pour ne pas être enrôlé de force dans les milices maoïstes ou para-militaires, ou d’un ingénieur menacé de mort pour avoir refusé la corruption, ou d’un flic emprisonné pour avoir dénoncé les pogroms d’Etat, ou d’un juge, d’un peintre, d’une femme écrivain, en exil forcé pour avoir rendu justice a des Chrétiens, pour être trop talentueux, pour offrir une victime trop facile … pour comprendre la réalité désignée par les mots caste, quota, développement, droits de l’Homme… Même l’écologie a un sens, ou en tout cas une coloration différente : Elle ne peut se concevoir en Asie du Sud, elle ne peut exister, autrement que pénétrée d’Humanité.
Seul un œil dogmatique ou superficiel pourrait classer tout cela sous l’étiquette « folklore, confusion, anecdotes». Mais plus l’on se donne la peine de comprendre les enjeux de ce combat pour l’être humain, plus l’on admire sa grandeur, les valeurs qu’il porte et qu’il construit.
Une dichotomie en blanc et noir ne s’applique pas. Mayawati le Chef de l’Etat de l’Uttar Pradesh ne ressemble ni a un modèle de probité ni de démocratie. Mais elle a propulsé son parti d’une manière telle qu’elle a changé la donne pour la cause des Dalits et le débat sur les castes de manière inédite depuis 50 ans. Anna Hazare n’a rien d’un démocrate, mais il a mis la question de la corruption sur la place publique et forcé le gouvernement et tout un chacun à remettre en cause ses petits arrangements et ses compromissions avec le droit et avec la vérité au quotidien. Les Maoïstes se comportent comme des fascistes, mais pour la première fois depuis 50 ans les multinationales sont freinées dans leur pillage des ressources naturelles… Une réflexion superficielle, une position de principe abstraite ne sont ici d’aucun secours.
Le débat démocratique en Asie du Sud est d’une richesse et d’une densité extraordinaires. Il pose des questions et s’attelle a y répondre, d’une manière extraordinaire, que nous ne faisons pas, que nous ne saurons peut-être jamais faire en Occident. N’en ayons pas honte ; Chacun sa croix ! Tout le monde ne peut pas être un gouverneur assassiné pour avoir soutenu une chrétienne accusée de blasphème, un journaliste disparu pour avoir écrit sur l’armée, ni une tribale torturée pour avoir refusé de designer des innocents, ni faire des années de prison pour défendre le droit a ne pas mourir de faim… Et tout le monde ne peut pas être Jean Moulin, Primo Levi, un travailleur immigré le 17 octobre 1961… ou être De Gaulle et cependant tolérer le massacre planifié de centaines de ses propres citoyens (en octobre 1961, les Algériens étaient encore Français).
Mais la guerre a besoin d’un monde simple. Les guerres néocoloniales sont toujours justifiées par le caractère moralement pervers des « tyrans étrangers » (pour reprendre une expression d’un article du Guardian, « ousting foreign tyrans »). Les peuples étrangers sont toujours bons, seuls leurs tyrans sont mauvais ! Regardons nos propres leaders, ceux qui ont imprimé leur marque sur notre pays, ceux d’après lesquels on nomme les bibliothèques, les écoles, les rues et les hôpitaux, et demandons nous ce que nous savons réellement de leur moralité personnelle et de leur vie privée. Pas grand-chose en fait, et lorsque des ombres apparaissent, nous les classons dans la rubrique des anecdotes, du non-essentiel, du non-historique. C’est bien sur encore plus vrai en ce qui concerne les décisions de faire ou non une guerre, décision grave qui n’est bien sur jamais, jamais basée sur un jugement de la moralité personnelle d’un individu particulier. Ni dans une dictature ni dans une soi-disant « théocratie » ni dans une démocratie. Mais pour rendre la guerre possible dans nos démocraties si fières, il faut d’abord peindre dans les medias le leader du pays agressé comme un représentant du mal et du vice incarnés. Voila l’indice le plus sur de la proximité d’une guerre. Et voila le critère, voila le niveau de pensée qui permet d’identifier à coup sur nos « grandes démocraties occidentales ». Pas de quoi être fier du niveau auquel nous somme tombés, qui nous fait tellement ressembler à ce que nous prétendons combattre ! Et lorsque quelqu’un essaye de sortir de cette vision en blanc et noir, de ce « kitsch moral » c’est un relativiste, un bobo en mal d’exotisme, un amoureux de la dictature ?
Je ne connais personnellement de la Libye que ce qu’en écrivent les journaux. Mais j’ai aussi un copain qui a enseigné l’architecture en Libye. Rentré 6 mois avant la guerre, pour raisons personnelles. Kadhafi payait donc des architectes étrangers pour enseigner l’architecture aux étudiants Libyens. Preuve supplémentaire de son horrible perversité ?
oulala, je viens de lire ce message et… je sais maintenant pourquoi, il ne faut plus discuter avec un français moyens qui feint l’intérêt pour les autres… si tu savais ce qu’on dit des gens comme toi dans tout ces pays…
enfin tu n’en sais rien, mis à part étaler ta sciences, en on collecteur de donnés… bref…
Heureusement qu’un despote éclairé était là pour faire venir des profs d’architectures occidentaux pour apprendre à ces sauvages qui vivaient dans des grottes ou des troues dans le sable à faire des maisons! Heureusement que tes ancêtres sont venus civiliser les miens! Après tout, leroy beaulieu avait peut-être raison: on a pas le droit de laisser la moitié du monde à des ignorants…
tu vois, cette relation fasciné que vous autres avez avec les dictatures, leur politique de « progressisme à marche forcé », j’appel ça « le colonialisme sous-traité »… après tout, pourquoi pas.
Voilà pourquoi, le français xenophile est méprisable: un vulgaire crypto-xenophobe de base. Je préfère avoir à faire aux affirmés…
Discuter avec toi ne m’intéresse pas. Contentes toi de discuter de giulia ou de l’élection présidentielle… pour le monde, j’ai des interlocuteurs bien plus intéressants.
Winston, si nous projetions notre réalité personnelle sur tout ce qui nous entoure nous aurions toujours raison !
Mon copain n’est pas un « prof d’architecture Occidental », il est Indien. Il n’est pas venu de Calcutta en Libye pour « enseigner les sauvages » mais il aime enseigner, il aime voyager et il n’avait jamais vu l’Afrique. Il a bien aimé, et ses étudiants aussi. D’ailleurs c’est très banal, il y avait tellement d’Indiens expatriés en Libye, de prof d’université a ouvrier de base, que l’Inde a envoyé plusieurs avions et bateaux pour rapatrier ceux qui n’avaient pas réussi (ou ne s’étaient pas décidés) a rentrer avant la guerre. Ne t’en fais pas, beaucoup vont retourner, après que l’Otan soit repartit, des que l’Inde aura retire son « travel advisory », la Charia ne leur faisant guère plus peur que Kadhafi. Je connais un autre prof d’archi Indien qui lui a longtemps enseigné en Irak. Et mon ancien boss me parlait avec émotion de ses profs d’archi Sud-Américains, qui enseignaient à Calcutta dans les années 1960. Il ne se demandait pas s’ils venaient de dictatures, s’ils étaient venus par gout du voyage, par mission civilisatrice ou seulement pour l’argent. Ils étaient la, et enseignaient, c’était l’essentiel. La vie est souvent ironique tu sais, on pense avoir voulu quelque chose, et puis on fait autre chose. Peu importe, si on le fait bien.
Au passage, puisque Winston me tend une perche : Je ne « collecte » pas « les données », je lis le journal.
Tous les évènements que j’ai mentionnés ont fait les gros titres des journaux en Inde durant les 2 derniers mois. (Sauf pour l’écrivain expulsée, ça c’était l’année dernière). Je n’étale même pas ma science, puisque je ne lis qu’un seul quotidien en pratique, aucun magazine, et même certains jours je ne le lis pas. Et comme la plupart des gens je commente l’actualité avec mes collègues et amis. Ce que j’ai énuméré c’est ce qui m’est venu a l’esprit comme ça, ce ne sont pas des évènements isolés, anecdotiques, ce sont les questions du débat démocratique / de société en Asie du Sud en ce moment. Bref pour qui vit en Inde ce n’est pas de « collecter » ces faits qui serait difficile, ça serait de les ignorer !
Ce que je voulais souligner c’est la qualité et la spécificité des questions qui sont posées, et l’immensité du travail nécessaire pour les résoudre. Tout le monde ne peut pas le faire, car tout le monde ne peut pas TOUT faire. C’est pourquoi il n’est pas juste de considérer la démocratie comme un modèle unique vers lequel il faudrait tous converger; La diversité est non seulement une réalité mais aussi une nécessité de fait. (sans aucune arrière-pensée condescendante -pour éviter, si possible, que Winston, ou peut-être d’autres, ne sautent au plafond)
Par contraste, la polarisation est une fable convenue, à usage interne, crée pour augmenter l’efficacité de la guerre.
« Qui implique un respect de la vie, une sacralisation de la vie sur terre, de toutes les formes vivantes, de tous les espaces, de toutes les espèces, lequel supposerait un bouleversement de notre psyché. »
http://www.amazon.fr/Cabaret-mystique-spirituelles-Alexandro-Jodorowsky/dp/222618290X
Amicalement
Fabrice a écrit :
« En regard, nous n’avons plus à offrir qu’un simulacre de vie ensemble, rythmé par les courses au supermarché et l’effondrement devant la télé ».
À ce sujet le philosophe Anselm Jappe a écrit un article dans Le Monde du 31 novembre 2011.
Je suis content que la pensée de la wertkritik (critique de la valeur) ait pu s’exprimer dans ce journal à grand tirage plutôt orienté économie de marché. 😀
Anselm Jappe invite à se préparer – vu la crise de la valeur ou la décomposition du capitalisme qui n’en est qu’à son début- à trouver une autre forme de cohésion sociale que le travail/l’argent/la valeur(en tant que lien social structurant réifié dans les marchandises).
C’est ici :
L’argent est-il devenu obsolète>/a>
A Lionel,
Meci pour le lien de l’article d’Anselm Jappe. J’attire votre attention sur le fait que le mois de novembre compte trente jours seulement et que nous ne sommes que le 2 de ce mois pour cette année.
Cordialement.
René.
Je voulais dire 31 octobre. Au temps pour moi.
Cordialement,
Lionel.