Oh ! comme j’ai pu contester, étriller, malmener l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES). Cette structure publique est censée nous protéger, mais elle ne le fait pas. En 2018, j’ai lancé le mouvement des Coquelicots – 2 300 000 signatures pour l’interdiction des pesticides de synthèse -, réclamé la démission de son directeur d’alors, Roger Genet, manifesté devant les portes de l’Agence, et publié en 2019 un livre sur une nouvelle classe de pesticides, les SDHI. L’un des directeurs de l’ANSES, Gérard Lasfargues, avait peu après sa publication, parlé d’élucubrations. J’en arriverai presque à plaindre ce pauvre bureaucrate qui, ne sachant quoi répondre à des mises en cause très précises, préféra faire semblant. De comprendre. De répondre. D’être utile à la société.
Pourquoi ce retour vers l’ANSES ? Parce que, comme dirait l’autre. L’émission Envoyé Spécial vient de reparler des métabolites, auxquels j’avais consacré une enquête privée, mais très fouillée il y a…cinq ans. Regardez pour commencer ce message posté sur X, que je ne fréquente ni de près, ni de loin. Lisez comme moi qu’on y découvre ces jours-ci, l’invraisemblable scandale des métabolites dans l’eau, embouteillée en l’occurrence. Celle du robinet, croyez-moi ou pas, c’est bien pire.
Un monsieur Yves Levi déclare sans s’étrangler : « Un phénomène aussi global, c’est la première fois que j’en entends parler. »
Ce M. Lévi est un expert, j’espère qu’il a la Légion d’honneur. Il travaille à l’occasion pour l’ANSES, et il est membre des académies de médecine, pharmacie et technologies. Que des médailles à son plastron. Le même Yves Lévi estimait en mars 2024 que boire de l’eau du robinet, c’était formidable. Comme on n’a pas le droit d’insulter publiquement, je ne le fais pas.
Je me contenterai de dire que moi, Fabrice Nicolino, spécialiste ès élucubrations, j’ai écrit et documenté la présence de métabolites partout, ainsi que les manœuvres, dont celles de l’ANSES, pour faire l’oublier l’affaire en classant les milliers de métabolites existants en « pertinents » et non-pertinents ». L’ANSES est d’une nullité crasse. À moins que ce ne soit pire, bien pire encore. Je me suis souvent posé la question dans mes livres.
Ces constats désastreux sont tellement typiques de ce que le calamiteux Latour nommait « la ruine des institutions que nous commençons à léguer à nos descendants », ruine par pourrissement de l’intérieur, pourrissement qu’il a tant travaillé à justifier en passant sa vie à tenter de démontrer que la vérité n »est que ce que les institutions définissent comme telle, et que notre « survie » découle de notre obéissance à ces institutions ? L’exemple de l’amiante qu’il donne est tellement révélateur dans sa bizarrerie; comme s’il regrettait, profondément, que la société ait finalement reconnu que l’amiante est cancérigène. Comme un enfant qui refuse de grandir et veut continuer à croire que l’autorité est intrinsèquement bonne et a essentiellement raison, non pas par accident, mais par sa qualité même d’autorité.
Il faut retrouver le chemin créateur d’institutions, ce travail constamment renouvelé auquel chacun d’entre nous doit participer, et seul cet effort constant peut empêcher la ruine morale et technique des institutions, car elles doivent rester vivantes et être renouvelées en permanence.
Joël Sternheimer, que j’ai découvert grâce à Fabrice Nicolino sur Planète sans Visa, décrit tellement brillament le cœur du travail de renouvellement/création des institutions scientifiques :
https://www.researchgate.net/publication/12697927_How_ethical_principles_can_aid_research
Est-ce un hasard si Bruno Latour, théoricien habile de l’obéissance profonde, était professeur à l’école des mines, et Sternheimer, l’un des plus grands scientifiques du 20ème siècle, a été obligé de financer ses recherches par ses propres moyens, en faisant de (très bonnes) chansons, en donnant des cours ici et là de par le monde, en trouvant des applications pratiques à ses découvertes et en tentant de les commercialiser ? Évidemment non.
Ce n’est malheureusement pas unique à la France et Debal Deb en Inde a une carrière extraordinairement similaire à celle de Joël Sternheimer. Un exemple parmi beaucoup !
L’état ne peut travailler qu’avec des médiocres, car seuls les médiocres sont contrôlables. Notre devoir est de résister à ce glissement vers la médiocrité, qui glisse sans qu’on s’en rende compte vers la corruption, d’abord intellectuelle, puis professionnelle, et finalement, dernière étape, financière. Sans une révolte des citoyens, suivie d’une surveillance constante et intense par les citoyens des institutions de l’état, nous nous enfoncerons plus profondément dans la médiocrité satisfaite d’elle-même et dans la corruption pure et simple.
Bonjour,
Ne trouvant pas de moyen d’entrer en contact, j’utilise cet article.
Jamais de crise climatique comme celle à venir en 2 millions d’année?
Toba il y a environ 70000 ans.
Bien à vous
Il y a 70 000 ans, il n’y avait pas de centrales nucléaires pour subir des changements climatiques, ni de barrages, ni de villes judicieusement placés en zones inondables, ni de sols mortellement mis à nus par l’agriculture. Il y a 70 000 ans, on peut approximer qu’il suffisait de cueillir ou tremper un asticot dans une rivière pour gagner son repas sans la sueur au front, etc. Bref, depuis qu’il y a la civilisation capitaliste, industrialisée, la seule promesse d’avenir est le chaos. Qu’on choisisse de voir les choses avec le sourire, la joie, la bonne humeur n’enlèvera rien du goût de pourri du monde que l’on réserve à nos gosses déjà nés.
Exactement !
Il faut arriver à une science Gandhienne ; Comme dit l’architecte Sandeep Virmani, « lorsque le processus est juste, les fruits sont doux ». On ne sera jamais sûr si on a bien tout compris, ou pas; et cela ne dépend pas que de nous; mais le processus de connaissance et d’action dépend entièrement de nous. Etre Gandhien, donc, c’est avoir confiance à la foi en soi-même, en la nature, et en les autres.
…tout le contraire de ce qu’on a essayé de nous forcer à faire durant la farce horrible du covid: Avoir peur de soi-même, de la nature, et des autres.
L’Anses, c’est un peu comme le cardinal du Vatican qui fait mine de ne pas être au courant que l’abbé Pierrot est un salaud.
Nos institutions, ou les Russes, ou d’autres… Mêmes symptômes
Merci pour ce travail colossal. Je note que certains liens ont disparu du web… Je n’aime pas cette tendance à aseptiser toute vérité ou opinion qui déplaît aux puissances…
Relisant des articles au hasard, dans cet extraordinaire œuvre de témoignage et de confrontation avec les événements et les pensées de notre époque que constitue Planète sans visa, je réalise que l’angle que Fabrice Nicolino donne à l’écologie est une des manières dont la culture occidentale peut se renouveler et sauver ce qui d’elle-même peut encore l’être, à l’heure où la culture d’Europe de l’Ouest et ses métastases, des États-Unis à la Nouvelle Zélande, révèle aux yeux du monde son extraordinaire, abjecte, consensuelle et nue, unité pour poursuivre de toutes ses forces les deux derniers génocides de son histoire, en Palestine et en Ukraine. Et tout le monde comprend que ce seront probablement les derniers génocides Européens, car après, la culture Européenne, en tant que force politiquement organisée au niveau mondial, n’aura plus la puissance économique d’en faire d’autres.
En tant qu’Européens, notre devoir est de ressourcer notre culture, de la transformer de l’intérieur, et Fabrice Nicolino est une de ces voix qui nous montrent comment sauver un lynx, un arbre, un ruisseau… conduit inévitablement à nous sauver nous-mêmes, que nous soyons ouvrier de l’amiante ou empoisonné par l’avalanche de poisons magico-miraculeux de plus en plus violents que nous inventons et honorons par notre prix Nobel, et en fin de compte, à retrouver le chemin vers ce qui est humain en nous.
Cher Fabrice,
« Je sais que parler – écrire – ne sert à rien, ou à si peu. Faut-il arrêter de radoter ? J’avoue que j’y pense. Oh oui ! Mais il est vrai que je ne sais rien faire d’autre. » (Planète sans visa, 21/9/2024). Voici que tu commets le péché de fausse modestie. Non! tu es le digne héritier de Rutebeuf (1245-1285) qui « ne dit pas autre chose: je rime au lieu de travailler, parce que je ne sais faire aucun autre travail; je vous dis ce que j’ai sur le coeur, parce que je ne sais rien faire d’autre (La complainte de Constantinople 4-5) ». *
Rutebeuf écrit exactement:
« Vos wel descovrir mon corage, / Que ne sai autre laborage: /Dou plus parfont do cuer me vient/Je sai bien et bien m’en souvient./Que tout a avenir covient/Quanc’ont dit li prophete sage. »
Traduction par Michel Zink: « je veux vous livrer ce que je ressens,/ car je ne sais rien faire d’autre:/cela me monte du plus profond du coeur./Je sais bien je ne l’oublie pas,/qu’il faut que tout s’accomplisse/de ce qu’on dit les sages prophètes. »
* Rutebeuf, Oeuvres complètes, Tome 1, (Classiques Garnier, 1989)
Continue cher Fabrice, cher « prophète sage » tu tiens la barre, avec quelle hargne.
Amicalement, et comme disait Pierre (de Toulouse) le 24/9/24: « Merci pour vos chroniques sincères et lucides. » Ecrites aussi avec art et la délicatesse du Pauvre Lélian : « Que vous dire qui soit à la hauteur de mon tourment ? » (Planète sans visa 27 septembre 2024)
Jacques Faule
Cher Jacques,
Merci, comme à chaque fois, merci. Si j’en avais le temps et, avouons-le, le désir, je m’expliquerai davantage sur ce que tu appelles ma « fausse modestie ». Peut-être as-tu raison – qui sait vraiment ? -, mais je ne vois pas les choses ainsi. Dans une autre vie, je parlerai de Gros-Manu – dit Bilboque -, compagnon attitré de ma mère, et voleur de 15 tonnes de café Legal; d’Ahmed B. et des menaces de mort très concrètes que nous – ma famille – avons dû endurer pendant des années; de la police, du vol et des prisons, du Nicaragua sandiniste de 1979. Mais ce n’est vraiment le moment.
Amitiés,
Fabrice Nicolino
bonjour Fabrice
https://www.anses.fr/en/system/files/BIOT2023AUTO0189.pdf
l’autosaisine de l’ANSES concernant la règlementation des nouveaux OGM NGT et le rapport fourni au ministère ( de l’agriculture? et ou de la transition écologique ?) qui est resté secret pendant une période conséquente, apparemment du fait des ministères, montre peut-être que tout n’est pas à jeter dans cette institution?
Qu’en pensez-vous?
Merci pour votre blog et vos travaux