À vos portefeuilles ! (aider Terre de liens, tout de suite)

Vous me direz si le contre-emploi me va bien au teint. Car, retenez votre souffle, je vais vous parler d’une information heureuse autant que positive. Je sais bien que cela ne saurait annuler à vos yeux les milliers de mauvaises nouvelles dont je vous abreuve depuis bientôt deux ans, mais on fait ce qu’on peut. Appelons cela un début. Qui ne risque rien n’a rien, et pierre qui roule n’amasse pas mousse, même si tout ce qui brille n’est pas or.

Terre de liens (ici) est une association géniale, qui a créé en 2006, avec la Nef, société coopérative de finances solidaires (ici), un outil. Ni tranchant comme une faucille, ni contondant comme un marteau. Un outil de rêve, qui serait une treille, une maille, un pont de lianes aussi solide que celui, en acier, de Tancarville. Mais qui tiendrait dans la main, et qui tendrait d’ailleurs la main à qui le veut bien. Je m’égare ? Je m’égare.

Cet outil, c’est une épargne collective qui permet d’acheter des terres agricoles partout en France, puis de les mettre à disposition de paysans bio sous la forme d’un bail particulier. Voilà des gens qui en ont marre de seulement radoter. Ils agissent, constatant que 200 fermes continuent de disparaître chaque semaine en France, et que 160 hectares de terres agricoles sont sacrifiées chaque jour au dieu Béton de notre monde de pacotille. Ils agissent, alors que ce gouvernement ne sait pas quoi faire pour honorer sa minuscule promesse de faire passer l’agriculture bio de 2 % de la surface agricole à 6 % en 2012. Ils agissent, au moment où 50 % des produits bio consommés en France sont importés, pour la raison centrale que la FNSEA et tous les pouvoirs depuis 1945 ont étouffé de concert toute chance de vrai renouveau de l’agriculture humaine, écologique et prospère.

J’arrête là ma péroraison. Les gens de Terre de liens ne se contentent pas d’acheter et d’offrir des baux très avantageux. Là où leurs forces le permettent, ils tentent de faire de la politique, dans le sens simple et vrai de ce mot. Ils mettent en mouvement, interrogent les acteurs locaux, remuent les inerties et les courbatures, créent de nouveaux espaces vivants de combat. Alors, je vais vous dire : ils peuvent compter sur mon argent. Et j’espère bien, si vous en avez un peu, sur le vôtre. Car en l’occurrence, nulle lamentation en vue : de l’action, du concret, et même au passage la grande joie de participer à une œuvre utile à tous et à soi.

Courant juillet, mon ami Patrick m’a montré au passage de son auto un lieu superbe, en bordure de rivière, où Terre de liens était en train d’installer des paysans. Je ne sais si cela marchera, on s’en doute. Mais enfin, j’en trépignais intérieurement. La propriété se compose d’1,5 hectare de terre cultivable et arrosable, de 2 hectares de pâtures, de 15 hectares de bois. Une misère, dans l’univers productiviste des saigneurs en place. Pourtant, un homme a décidé de relever le gant, et de se lancer dans le maraîchage biologique, à l’aide de la traction animale. La remarquable association Prommata (ici) donnera la main, car elle pense, cette rétrograde, que l’animal est moderne, et pour tout dire, éternel.

Eh bien voilà, je vous ai dit ce que je souhaitais vous dire. En espérant que le choc de tant d’optimisme ne vous aura pas fait perdre de vue que je suis toujours le même.

PS : Je dois ajouter que le réseau de boutiques BIOCOOP (ici) joue un rôle de premier plan dans toute cette histoire. Ces magasins sont une bénédiction.

16 réflexions sur « À vos portefeuilles ! (aider Terre de liens, tout de suite) »

  1. A l’attention de Fabrice,

    Après lecture de la bonne nouvelle contenue dans le billet « A vos portefeuilles », je me suis rendu sur le site de « Terre de liens ».
    J’y ai appris que l’association ne peut plus provisoirement recevoir de souscription, car elle a atteint , ce qui est très bon signe, son plafond de collecte autorisé. Ce n’est donc que partie remise.

    Cordialement.

    René.

  2. René,

    Je n’y crois pas ! Pour une fois que… Franchement, voilà bien une nouvelle affreuse, dont je ne suis pas responsable, par chance. Moi, je crois qu’il faut les tanner, et les OBLIGER à recevoir notre argent. Ouvrez vos comptes en banque, voleurs que vous êtes ! Nous voulons DÉPOSER nos sous chez vous ! Enfin, merci de toute façon, René.

    Fabrice Nicolino

  3. Bonjour Fabrice et merci pour l’info.

    Vous connaissez sans doute la société civile « Terres Fertiles en Ile de France » (http://www.terresfertiles-idf.org) qui agit dans le même sens en rachetant des terres en Ile de France destinées autrement à la construction, terres ensuite confiées aux AMAP.

    Nicolas

  4. bonjour à vous tous,
    je suis installé en maraîchage bio sur le cap Sizun (en Bretagne tout au bout), en traction animal (un âne), donc sans tracteur sur une terre de 6000 m2. Pas facile, mais c’est un choix.
    Je souhaiterai m’agrandir, pas pour rejoindre nos ami(e)s productivismes de la fnsea mais pour avoir un coin pour mon âne et avoir un peu plus de culture et de la terre en repos.
    Donc si Terre de lien ne prend plus d’argent, je suis intéresser de créer un GFA (groupement foncier agricole) sur des terres peut-être (il faut que je me renseigne) disponible.

    Thierry

  5. Bonjour Fabrice,

    Nous nous « croisons » : D’habitude je vois plutôt le verre à moitié plein et vous à moitié vide. Pour ce billet, vous positivez et moi j’ai envie d’être plus prudent.

    Je ne remets pas en cause les bonnes intentions des fondateurs de « Terre de liens » et le problème foncier dans le cadre du développement de l’agriculture biologique. Néanmoins je note des effets pervers potentiels de l’initiative « Terres de lien », je m’explique : D’une part il me semble (je peux me tromper) que le facteur limitant est au mois autant le manque de personnes volontaires et formées pour se lancer dans l’agriculture biologique que le manque de terre. D’autre part certains agriculteurs conventionnels seraient prêts à céder une partie de leur terre pour que des maraîchers biologiques s’installent. « Terre de liens » peut confiner ces agriculteurs conventionnels dans un rôle de « méchants » qui ne veulent pas vendre une partie de leur terre aux « gentils volontaires biologiques ».

    J’ai eu l’occasion de participer à une conférence sur la consommation alimentaire et l’agriculture locale (Cf. compte-rendu à http://cvxccc.free.fr/spip.php?article289 ). Un tel agriculture conventionnel de bonne volonté était présent dans l’assistance. Je me suis rendu compte que cet homme pouvait certainement être à sa manière un acteur du changement que vous prônez pour peu qu’on le respecte et qu’on ne le « réduise » pas à ces pratiques actuelles. J’ai d’autres exemples en tête.

    Merci pour ce blog et pour votre engagement.

    Hugues.

  6. Bonjour Fabrice, Bonjour à tous

    Tout d’abord Fabrice, merci pour ce site très actif et très intéressant. J’ai hate chaque jour de consulter dans mon (google) reader le nouveau billet.

    Concernant « Terre de Liens » j’ai modestement contribué au premier appel de fonds. Lors de celui-ci « Terre de liens » a réussi à collecter la somme maximun permise (4 M€) en 8 mois au lieu des 15 initialement prévus. La moyenne des investissements était de 1500€ (chiffres de mémoire).
    Un deuxième appel de fonds est prévu prochainement. Vous pourrez contribuer lors de celui-ci.

    Le fonctionnement « financier » consiste à récolter des fonds et à les investir dans du foncier agricole pour le louer.
    Il est toutefois possible de « sortir » de son investissement à tout moment (même si ce n’est pas souhaité, ni logique avec la démarche de terres de liens).
    Dans ce cas « Terres de Liens » rembourse(ra) la somme investie. Pour pouvoir rembourser ces sommes, sans avoir à revendre des terrains, ils ont décidés de conserver un fonds de roulement de 1M€ sur les 4M€ récoltés.

    J’ai une interrogation sur comment « Terres de Liens » se protègerait d’un indélicat qui serait tenté par le magot que représente ce fonds de roulement. Si cela arrivait « Terres de Liens » aurait du mal à continuer à exister.

    Peut-être connaissez vous bien « Terres de Liens » et pouvez m’apporter des éléments de réponse.

    Merci d’avance

    Guillaume

  7. Je crois savoir qu’il font les demandes nécessaires pour augmenter à nouveau leur capital (souvenir plus très clair d’une lettre qu’ils m’ont envoyée avant l’été). Patience !

  8. Hugues,

    Merci pour cet autre éclairage. Je ne doute pas de ce que vous rapportez. Mais enfin, l’enthousiasme reste nécessaire. Bien à vous,

    Fabrice Nicolino

  9. Bonjour à tous !

    Je m’occupe de l’antenne Ile-de-France de Terre de liens et je vous remercie tous pour cet enthousiasme envers notre travail.

    Ce petit mot pour vous apporter des informations supplémentaires : nous sommes effectivement en attente d’une autorisation pour pouvoir recommencer une collecte d’épargne solidaire pour notre « outil », la Foncière Terre de liens. Elle devrait arriver très prochainement…

    Hugues, vous avez en partie raison, un des problèmes (au moins en Ile-de-France) est le manque de personnes formées pour travailler dans l’agriculture biologique (des volontaires, il y en a). Agir sur l’aspect foncier est important mais ne résout pas toujours tous les problèmes. C’est pourquoi dans les régions concernées, notre association travaille avec différents partenaires (en Ile-de-France : réseau des AMAP et groupement des agriculteurs bio) sur ces questions de manque de candidats compétents. Pour les relations avec les agriculteurs conventionnels, nous ne les considérons pas comme des « méchants ». Ils ont juste choisi (ou été amenés à choisir) un système de culture qui ne nous paraît pas pertinent. Toutes les personnes de bonne volonté, agriculteur ou non, conventionnel ou non, sont bienvenues si elles souhaitent travailler avec nous ou dans le même sens (écologiquement responsable et socialement solidaire). En Ile-de-France, région où les céréaliers conventionnels sont très majoritaires, nous essayons justement de réfléchir à cette mise à disposition d’une partie des terres pour des maraîchers bio.

    Guillaume, merci pour votre participation à notre premier appel public à l’épargne. En ce qui concerne les « indélicats » qui voudraient s’emparer du « magot », pas d’inquiétude : la structure juridique choisie (SCA), la manière dont sont rédigés les statuts et l’encadrement strict par l’autorité des marchés financiers nous met à l’abri de telles dérives.

    Je voulais également vous signaler que si vous souhaitez en savoir plus et, pourquoi pas, vous investir dans nos actions, j’organise régulièrement à Paris des réunions d’information sur le foncier agricole en Ile-de-France (enjeux, acteurs, moyens d’action) et sur le travail de notre association et des « outils » qu’elle a mis en place (Foncière et fonds de dotation).

    Si ces réunions vous intéressent, n’hésitez pas à me le faire savoir par courriel (valerie@terredeliens.org) ; je vous mettrai sur ma liste de diffusion.

    Petit résumé : Terre de liens est un mouvement avec différentes structures (association, Foncière, fonds de dotation) et les moyens de soutenir ses actions sont :
    – l’adhésion et l’implication dans les activités de l’association
    – l’épargne solidaire via la Foncière (à (re)venir prochainement)
    – le don via le Fonds de dotation (à venir prochainement aussi).

    N’hésitez pas à aller voir notre site pour en savoir plus !

    Cordialement,

    Valérie

  10. Aïe,Aïe,Aïe ! Je vais faire le rabat-joie … car si je trouve que le principe de Terre de Lien et tout le travail qu’ils font pour le développement d’une agriculture … simplement de l’agriculture, car le reste ce n’est que de l’exploitation. Bref, je trouve qu’il y a quand même une lacune : la question des retraites de ces agriculteurs qui ne seront jamais propriétaires des terres qu’ils utilisent. Je ne suis pas particulièrement attaché à la propriété privée, mais c’est un fait que le foncier est souvent le capital qui permet aux agriculteurs prenant leur retraite et qui n’ont pas d’enfants reprenant l’activité, de pouvoir continuer à vivre pas trop mal. C’est un constat regrettable, et j’aimerais que la question des retraites (décentes) soit résolue pour tous les secteurs. J’espère que Terre de Lien trouvera une solution pour aider les agriculteurs qui auront participé à cette aventure à ne pas sombrer dans la misère.

  11. Merci Valérie pour les précisions apportées sur Terres de lien. Je suis heureux que Terres de lien prenne en compte les écueils que j’ai mentionnés.

  12. Bonjour à tous,
    Je suis le gérant de la Foncière Terre de liens.
    Merci à Fabrice Nicolino pour cet article, et pour vos réactions pertinentes.
    Trois réactions :
    1) le prochain appel à épargne commencera en septembre. Nous aurons probablement le visa de l’Autorité des Marchés Financiers ce soir, pour une augmentation du capital de 6 millions d’€, c’est un scoop.
    2)J’abonde dans le sens de Hugues (et de la réponse de Valérie) : les agriculteurs conventionnels ne sont pas des ennemis, c’est le système politico-technique conventionnel que nous combattons. Il faut de la formation, de l’accompagnement et une attitude bienveillante quoique lucide envers nos agriculteurs.
    3)La remarque de david est juste. Terre de liens, en proposant que la propriété de la terre soit collective, supprime l’effet spéculatif de la fin de carrière du paysan (la terre n’est plus à vendre), mais ne résoud que partiellement le problème de la retraite. Certe, le fermier de la Foncière n’aura pas été à la banque pour s’endeter à vie pour acheter cette terre. Mais nous devons imaginer des formes de compensation de l’absence de la vente de son patrimoine. C’est en cours de réflexion dans Terre de liens.

  13. Bonjour,

    Je viens de lire – tardivement – la page initiale et les réponses et questions successives.
    Mes collègues Valérie et Philippe ont répondu à certaines questions/objections, je complète de quelques pistes de réflexions (autant de chantier pour nous… tous! Et pas que pour Terre de Liens…)
    – J’espère bien que nous réussirons un jour à travailler avec un conventionnel qui, grâce à une installation « type Terre de Liens », fera avec nous le chemin de la conversion vers la bio, soutenu par une nuée d’investisseurs locaux solidaires ET des territoires bienveillants qui verraient à nouveau l’agriculture comme une source de développement humain local, comme une source de solutions aux multiples problèmes sociaux et environnementaux qu’a généré le développement agricole post second guerre mondiale (développement dont nous sommes largement « solidaires » avec les modes de vie bien peu soutenables qui sont aussi les nôtres!…).
    – Sur les retraites des agriculteurs et éleveurs que nous installons, la piste ouverte par Terre de Liens invite un cercle bien plus large d’acteurs à entrer dans la problématique pour construire, inventer, les solutions qui n’existent pas encore, barrées qu’elles sont par nos imaginaires souvent restreints : et pour cause, les défenseurs de l’insoutenable économie actuelle nous disent tous les jours qu’il n’y aurait pas d’autres alternatives que de se faire sa retraite seul, en vendant son patrimoine (possibilité qui ne concerne qu’une minorité d’agriculteurs qui travaillent en faire valoir direct!).

    Pistes de travail donc :
    1) premier niveau d’action collective : imaginer des fermes (Terre de Liens ou autres!) où le paysan et la paysanne aillant travaillé pendant trente ans – et s’étant probablement attaché à proportion – à des terres dont il aura pris soin, puisse se loger sur site (c’est pas toujours possible, mais on y songe…)
    2) Second niveau d’action collective : imaginer des réseaux de sites (TDL ou autres!…) où les fermiers TDL seraient accueillis pour vivre ailleurs une retraite active dans des maisons et autres espaces agri-urbains où il ne faudrait pas à nouveau se saigner pour pouvoir se loger et continuer à vivre dignement…
    3) Troisième niveau d’action collective : imaginer des communes qui penseraient à leurs ainés agriculteurs et agricultrices en développant une politique de logement pour les garder sur leur commune et leur éviter ainsi un double déracinement : je quitte non seulement ma terre, mais aussi ma commune parce qu’il n’y pas de place pour moi! Sniff…
    4) Quatrième niveau d’action collective : imaginer que la mort de la retraite par répartition ne soit plus programmée, et que son redéploiement soit voulu, désiré, pour que tous les membres d’une même société – monde? – puisse avoir de quoi vivre dignement, à tous âges, sans être obligé de vendre, de spéculer, de marchandiser tout et n’importe quoi en toute circonstance pour continuer de sur-vivre…

    Comme le dit si bien Albert Jacquard : « Mieux vaut une réussite solidaire qu’un succès solitaire ». Nous avons donc du pain sur la planche, et TDL souhaite que d’autres acteurs se lIENT à elle pour qu’un réseau de cellules souches continue à faire avancer les multiples chantiers qui rendront notre utopie-concrète de plus en plus d’actualité et partagée par le plus grand nombre!…

    Bienvenu-e-s dans la danse donc!

    Gaël
    (Ancien administrateur Terre de Liens. Maintenant animateur de l’asso régionale TDL en Normandie).

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