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Une belle pipe de l’Europe au patronat

Ce papier a été publié par Charlie Hebdo le 24 décembre 2014, sous un autre titre

Pour faire plaisir à un lobby patronal – dont notre Medef national -, l’Europe de Juncker et de la fraude fiscale vient de sacrifier la lutte contre la pollution de l’air, qui tue chaque année des dizaines de milliers de personnes.

Ces gens de l’Europe se foutent ouvertement de nos gueules. Le dernier exemple vient d’en être apporté par la « nouvelle » Commission européenne présidée par le Luxembourgeois Juncker, déjà empêtré dans le tentaculaire et retentissant scandale financier Luxleaks (1).

De quoi s’agit-il ? Le 20 novembre – mais l’affaire durait depuis des semaines dans les coulisses -, le lobby BusinessEurope adresse une lettre à ses servants de la Commission. BusinessEurope regroupe 39 associations patronales de 33 pays, dont notre merveilleux Medef, et à ce titre, on peut le qualifier de grande puissance. Donc, une lettre, qui passe en revue cinq projets de directives – des lois – qui sont depuis longtemps dans les tiroirs. Et qu’il faut désormais sortir, et appliquer. Lesquels ? Pour noyer le poisson, BusinessEurope mélange fretin et gros morceaux. Dans la première catégorie, l’égalité des genres dans les conseils d’administration. Et dans l’autre, la protection de la santé et l’écologie.

Sans trop se gêner, et ainsi que le rapporte le site en ligne Euractiv.fr, les patrons font valoir que ces projets déjà en négociation « vont à l’encontre de la compétitivité des entreprises européennes » et « devraient être supprimés ». La suite, même pour des gens blindés comme les chroniqueurs de Charlie, est stupéfiante. Car Juncker et son homme-lige Frans Timmermans, vice-président de la Commission, acceptent de se coucher dans les beaux draps de soie de BusinessEurope.

Le 16 décembre, les deux compères annoncent comme s’ils venaient de prendre la décision en toute liberté qu’il faut faire des choix (2). Constatant après tant d’autres Sarkozy et Hollande que « les grandes priorités sont la croissance et l’emploi », ces braves employés de maison entendent se concentrer en 2015 sur 23 initiatives. Ce qui implique de jeter dans la cuvette des chiottes deux « paquets », ainsi que les appelle la novlangue : celui concernant la pollution de l’air et celui de « l’économie circulaire », concept en vogue qui consiste à utiliser peu de carbone et à massivement recycler.

Ce que voyant, les cocus habituels – les associations comme France Nature Environnement, Les Amis de la Terre, la fondation Hulot – pondent un communiqué épouvanté. Extrait : « Concernant la qualité de l’air, cette décision incompréhensible annule ainsi la révision de la directive « Plafonds d’émissions nationales » qui aurait pu sauver 58 000 vies par an. Pour l’économie circulaire, cette suppression retire les objectifs de recyclage de 70% pour les déchets municipaux et de 80% pour les emballages, tout comme l’interdiction de mettre en décharge tout déchet recyclable ou biodégradable. Ces objectifs auraient pu créer des centaines de milliers d’emplois ».

Un mot sur le chiffre de 58 000. Il s’agit d’une estimation d’experts, et comme telle, n’est jamais qu’une indication. D’autres estiment par exemple que les particules fines de pollution, au premier rang celles du diesel, pourraient tuer avant l’heure 42 000 personnes par an en France. Et sept millions d’humains de même, chaque année, selon les chiffres de l’Organisation mondiale de la santé (OMS).

Dans tous les cas, il s’agit d’un crime de masse prémédité, et si un brin de justice régnait sur le monde, Juncker et Timmermans iraient droit en prison sans passer par la case Banques luxembourgeoises. Mais à ce compte-là, on pourrait poser des questions à la droite française – bien sûr -, mais aussi à la gauche.

Jacques Calvet, ci-devant patron de Peugeot, a conduit pendant quinze ans, de 1983 environ jusqu’en 1997, un lobbying forcené en faveur du Diesel. Et a gagné la partie, car les deux tiers des bagnoles neuves, chez nous, sont Diesel. 1983-1997 : gauche au pouvoir, puis droite, puis gauche, puis droite, puis gauche. Calvet, devant les députés le 3 septembre 1997, alors que Jospin est à Matignon : « Le problème est d’une simplicité biblique (…) : nous sommes les meilleurs dans le monde en matière de Diesel ».

(1) 28 000 pages d’accords fiscaux secrets entre le Luxembourg et une flopée de transnationales. Révélé par une quarante de journaux, Luxleaks montre comment les banques locales organisent la fraude fiscale au détriment des politiques communautaires.

(2) http://ec.europa.eu/priorities/work-programme/index_en.htm

Ô triste, triste était mon âme (Vallini, Hollande et consorts)

On connaît peut-être ces vers splendides de Verlaine, qui commencent par « Ô triste, triste était mon âme ». Son petit poème est somptueux, qui parle du chagrin d’amour, de la perte d’une aimée. J’ai pensé à lui ce matin en écoutant notre pauvre président de la République sur France Inter. Absurdement, je dois en convenir. Car je n’ai jamais eu ni amour ni simple affection pour François Hollande. Je le tiens pour un exceptionnel médiocre, et ses mots dérisoires à la radio ne peuvent que renforcer un sentiment déjà ancien.

Qu-a-t-il dit à propos de la tragédie écologique ? Les stupidités coutumières. Une taxe sur les transactions financières « pour le climat » d’ici 2017, quand la fameuse taxe Tobin est évoquée depuis 1972. Mais il est vrai que le PS promet le droit de vote des étrangers depuis 1980. Hollande est cet homme capable de transformer le dérèglement climatique en un simple enjeu politicien dans sa course électorale de troisième zone. C’est affreux. En ce qui concerne Notre-Dame-des-Landes, où je suis passé le 1er janvier, il a annoncé, faussement martial comme à l’accoutumée, que l’aéroport se ferait une fois les recours juridiques épuisés.

Sivens à la puissance 10 ?

Que penser ? Voici mon sentiment. Il y a au moins deux lignes au sommet de ce qui nous reste d’État. Hollande, rad-soc dans l’âme perdu au milieu des tempêtes et des drames, voudrait que l’affaire se règle toute seule. Comme il a horreur de trancher, comme il a évidemment peur d’un Sivens à la puissance 10, il aimerait bien, au fond, que les recours durent au-delà de la prochaine élection présidentielle de 2017. Ainsi, il n’aurait pas à agir. Seulement, il n’est pas seul à bord, de loin.

D’abord, il y a sa base, ce parti socialiste qui sociologiquement est aux antipodes de la France réelle. Un parti de vieux, de cadres, d’enseignants, de Blancs, qui ont tant profité des Trente Glorieuses qu’ils refusent tout vrai changement. Remettre en cause la doxa de la croissance, du BTP, de la publicité, des appareils et des objets, cela reviendrait à dire la vérité sur ce qu’ils sont. Et ce qu’ils sont, qui l’ignore ? Des gens aveugles et indifférents, qui auront soutenu de toutes leurs forces arthritiques la destruction par la bagnole et les ronds-points, les villes nouvelles et les Disneyland, l’amiante et les pesticides, le bétonnage des côtes et les canons à neige, la laideur et la puanteur. J’exagère ?

Qui dépassera jamais un André Vallini ? Président du conseil général de l’Isère, ce distrayant personnage rêvait de devenir Garde des Sceaux, mais la place étant prise, il doit se contenter d’un secrétariat d’État chargé de la réforme territoriale. Entre deux bâillements, il s’enflamme, mais pour quelle cause ? Celle de l’eau, de l’air, des sols, de la forêt, des océans, du climat ? Non, celle bien plus sacrée du BTP. Dans un bref entretien au quotidien régional Le Dauphiné Libéré (ici), il apporte son soutien empressé au projet de Centers Park de Roybon, et se plaint amèrement des lois qu’il se serait fait un plaisir d’appliquer ès qualités, déplorant « des réglementations trop lourdes et des procédures trop longues qui permettent d’entraver des projets portés par des élus du suffrage universel ».

Une France des autoroutes et des barrages

C’est déjà impressionnant, mais la suite l’est davantage, car Vallini déclare même : « Pour que la France reste la France, nous devons continuer à construire des aéroports, des barrages, des autoroutes, des lignes de TGV, des équipements de tourisme ». Nous touchons cette fois au cœur de l’imaginaire de pacotille des gens qui nous gouvernent. La France, leur France doit être détruite. Gallia delenda est ! À ce stade inouï, la tristesse radicale l’emporte sur le fou rire, et c’est un bien mauvais moment à passer. Que révèlent les mots de Vallini, que reprendraient à leur compte presque tous les socialos ? Qu’aucun accord n’est possible. Qu’une frontière infranchissable sépare les défenseurs de la vie et ces imbéciles qui ne savent pas regarder un ciel sans qu’il soit sponsorisé par l’armée de l’air, EDF ou Total.

Est-ce tout ? Pas encore. Le parti socialiste, sous les fesses de Hollande, veut la poursuite du programme si bien entamé, c’est l’évidence. Mais notre président préfèrerait, lui, que les choses s’accumulent discrètement sous le tapis. Et qu’on parle d’autres sujets plus anodins. Reste Manuel Valls. Il n’y a pas de doute que le Premier ministre souhaite l’affrontement autour de Notre-Dame-des-Landes. Il sait, tout comme moi, qu’un passage en force conduirait probablement à des morts, car les zadistes et ceux qui les soutiennent – j’en suis – n’entendent pas reculer. Ne pas croire que Valls s’en moque, tout au contraire. Il veut un choc majeur autour du chantier, suivi d’une évacuation générale. Car cela lui permettrait d’asseoir dans l’opinion l’image après laquelle il court depuis des années : celle de Clemenceau.

L’empereur des mouchards

En deux mots, Clemenceau, venu de la gauche, gagnera dans les premières années du siècle passé les surnoms de Césarion, Bête rouge, Sinistre de l’intérieur, Monstre, Empereur des mouchards. Ministre de l’Intérieur dès 1906, « premier flic de France », il envoie la troupe contre les mineurs en grève, fait arrêter des responsables syndicaux, installe pour finir 60 000 soldats – 60 000 ! – dans Paris, jusque sur les quais du métro naissant, pour mater les prolos révoltés. Il gagne, et sera plus tard président du Conseil en 1917 et décrété « Père la Victoire », installé sur les millions de cadavres de la guerre de 14-18.

Ce que veut Valls aujourd’hui, c’est le même destin. Venu de la gauche – d’une certaine gauche en tout cas -, il veut montrer à la droite qu’il ne cèdera pas à la populace, encore moins quand celle-ci a le visage plein de piercings et vit dans des cabanes au fond des bois. Il veut imposer l’ordre, avec ce si vague fumet social qui l’entoure encore. En somme, il entend incarner l’idée d’une unité nationale, comme Clemenceau l’a fait entre 1917 et 1920. Je gage qu’il parie sur une aggravation de la situation telle qu’il pourrait jouer sa carte en 2022, ou peut-être avant. Son calendrier n’est pas celui de Hollande, car un peu plus jeune, il sait devoir sauter la case 2017. En attendant, il lui faut, pour avancer sur le chemin de son grand remake, du sang et des larmes.

En aura-t-il ? Je ne suis pas devin, et Hollande n’a pas envie d’entrer dans le souvenir national sous le nom de « Boucher de l’aéroport ». Le jeu reste ouvert, et au moment où j’écris, je pense que le pouvoir préférera tergiverser et gagner du temps plutôt que de chasser les zadistes par la violence. Mais si cela devait se produire, regardez de près le comportement de Valls. Lui, il sait ce qu’il veut. Et ce qu’il veut, c’est que ça cogne.

Pourquoi on ne peut pas s’entendre avec eux

La rupture ne saurait être plus totale. En ce qui me concerne, jamais je ne pourrais plus faire un pas dans la direction de ces gens-là. Eux, les socialistes. Je sais que bien des événements peuvent surgir, qui modifieront peut-être cette fière sentence. Peut-être. Ou pas. Ce qui est sûr en tout cas, c’est que leur imaginaire de pacotille, leurs lamentables positions morales et politiques les placent dans un territoire mental où je n’ai jamais posé le moindre orteil.

Dans le papier de l’AFP que je vous mets ci-dessous, on voit donc Valls lancer un chantier Pierre et Vacances, sur le modèle, à très peu de choses près, des Center Parks. Oui, comme celui de Roybon, en Isère, dont le chantier est occupé par une poignée de zadistes que je salue évidemment. Dans ce texte, tout est perverti, à commencer par cet affichage « éco-touristique » que reprend sans rien y comprendre la journaliste. Nous en sommes bel et bien là : les mots ne veulent plus rien dire. Le Pen est écologiste. Valls est écologiste. Mélenchon, qui veut industrialiser la mer, est écologiste. Le parti communiste, qui a toujours soutenu le programme électro-nucléaire français, notamment via son emprise sur EDF, est écologiste. Les Verts, obsédés par le moindre poste, la moindre place, sont écologistes.

J’ai connu par le plus grand hasard le lieu où Fabius, alors Premier ministre, a imposé cette grande misère humaine appelée Disneyland. Ces plaines briardes étaient certes aux mains de l’agriculture industrielle, mais elles représentaient en tout cas une prodigieuse promesse d’avenir. Des milliers d’hectares d’une des terres les plus riches au monde ont été sacrifiés sur l’autel du néant. Je me souviens encore de Fabius, il y a trente ans, vanter le projet, parler des emplois, justifier les colossales aides publiques de l’époque, dont la création d’une station de RER dédiée. Voilà que cela continue, et que 60 millions d’euros d’argent public iront rejoindre les fouilles sans fond de Gérard Brémond, patron de Pierre et Vacances, 77 ans aux prunes. Ce pauvre garçon entend détruire jusqu’à la dernière minute de sa vie.

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Valls lance le grand chantier « éco-touristique » des Villages Nature

Villeneuve-le-Comte (France) (AFP) – 12.12.2014 17:59 – Par Audrey KAUFFMANN

Le Premier ministre Manuel Valls le 11 décembre 2014 à Bailly-Romainvilliers pour la pose de la première pierre du chantier des « Villages Nature »

voir le zoom : Le Premier ministre Manuel Valls le 11 décembre 2014 à Bailly-Romainvilliers pour la pose de la première pierre du chantier des Villages Nature

Le Premier ministre Manuel Valls le 11 décembre 2014 à Bailly-Romainvilliers pour la pose de la première pierre du chantier des « Villages Nature » (afp.com – Miguel Medina)

voir le zoom : Un appartement témoin des Villages Natures à Bailly-Romainvilliers, près de Disneyland Paris, le 11 décembre 2014

Un appartement témoin des Villages Natures à Bailly-Romainvilliers, près de Disneyland Paris, le 11 décembre 2014
(afp.com – Miguel Medina)

voir le zoom : Le Premier ministre Manuel Valls le 11 décembre 2014 à Bailly-Romainvilliers pour la pose de la première pierre du chantier des Villages Nature

Le Premier ministre Manuel Valls le 11 décembre 2014 à Bailly-Romainvilliers pour la pose de la première pierre du chantier des « Villages Nature » (afp.com – Miguel Medina)

Manuel Valls a posé jeudi la première pierre du chantier des « Villages Nature », apportant son soutien à ce gigantesque concept de destination « éco-touristique » qui doit ouvrir en juillet 2016 à côté de Disneyland Paris, au sud-est de la capitale française.

Le chantier, installé entre deux forêts domaniales de Seine-et-Marne, est censé créer un lieu de loisirs conçu en forme de « cité végétale » et centré sur la nature, avec hébergements en cottages et appartements, parc aquatique, lagon extérieur, jardins suspendus, immeubles à l’architecture végétale, ferme bio, forêt « sportive », commerces…

La première phase de ce programme commun des groupes Pierre et Vacances et Euro Disney, qui brandit la thématique du développement durable, concerne 175 hectares et un investissement d’environ 500 millions d’euros. Si la phase ultime se concrétise, d’ici une décennie, le site pourrait couvrir au final jusqu’à 500 hectares et représenter deux milliards d’euros d’investissements.

C’est le plus grand projet de « resort » touristique en Europe. Il cible d’ailleurs largement la clientèle européenne, et espère un demi-million de visiteurs dès sa première année d’exploitation.

Pour M. Valls, qui s’exprimait sur le chantier du site à Villeneuve-le-Comte en Seine-et-Marne, ce projet classé Opération d’intérêt national (OIN) est « un exemple de ce qui doit être fait pour concilier l’économie et l’écologie, le développement de nouvelles activités et la protection de la nature ».

Dominique Cocquet, directeur général de Villages Nature, explique qu’il s’agit là d' »écrire une nouvelle page en matière de tourisme, qui prenne en compte les grands défis environnementaux du XXIe ».

« On est dans la modernité. Ce n’est pas la campagne ou un bout de safari », dit-il.

Aux yeux du Premier ministre, « cette offre de loisirs plus en retrait, plus proche de la nature, correspond bien aux aspirations de notre époque ». M. Valls a salué le fait qu’il y ait eu un « premier grand débat national pour un projet touristique », estimant que, « de ce point de vue là, ce projet est également exemplaire ».

Dix ans de gestation, sept enquêtes publiques et « aucun recours » malgré certains bémols écologistes: les élus locaux et régionaux et les promoteurs présents jeudi se congratulaient.

Au moment où plusieurs autres grands projets en France sont contestés, parfois violemment — aéroport de Notre-Dame-des-Landes, barrage de Sivens, Center Parcs en Isère… — Manuel Valls en a profité pour dénoncer la « prise en otage » pratiquée selon lui par des opposants à certains de ces chantiers en France, qualifiés par Europe Ecologie-les Verts (EELV) de « grands projets inutiles ».

Pour développer le projet Villages Nature, environ 60 millions d’euros d’argent public doivent être injectés, dans la voirie et les infrastructures en priorité.

Un engagement conséquent, justifié selon les élus par l’argument économique de l’emploi et de « l’attractivité » de la destination, qui va attirer des devises.

La première phase de Villages Nature, à elle seule, doit permettre la création de 2.000 emplois dans le bâtiment et 1.600 emplois directs pour l’exploitation touristique, a souligné Gérard Brémond, le président de Pierre et Vacances/Center Parcs.

Pour Jean-Paul Huchon, président du Conseil régional d’Ile-de-France, « ce projet est un peu du trois en un: bon pour l’emploi, bon pour l’environnement et bon pour l’égalité des territoires », a-t-il dit.

Le député de Seine-et-Marne Christian Jacob a pour sa part interpellé le Premier ministre sur le fait que certains aménagements promis pour améliorer des infrastructures à proximité du site se font attendre.

Dans un premier temps, un millier de cottages seront implantés autour d’un « Aqualagon » qui devrait devenir l’un des parcs aquatiques couverts les plus grands d’Europe avec ses 11.500 m2.

A l’extérieur, un lagon extérieur de 3.500 m2 sera chauffé en certains endroits par géothermie à plus de 30 degrés. Un projet qui suscite certaines critiques. « Faire de la géothermie pour chauffer un lac, c’est stupide », juge le président des élus écologistes d’EELV d’Ile-de-France, Mounir Satouri.

La géothermie alimentera aussi le chauffage et l’eau des logements, « sans émission de CO2 », selon les promoteurs. Villages Nature sera « une destination absolument unique », a promis Tom Wolber, le patron d’Euro Disney.

© 2014 AFP

Mais comment changer d’air (en Chine) ?

Cet article a été publié le 19 novembre 2014 par Charlie Hebdo

Entrez, entrez découvrir les 365 photos de l’artiste Zou Yi ! À Pékin, l’air est devenu si dégueulasse que le lycée français met des filtres à l’entrée des bâtiments. Les vrais chiffres de la pollution ? Secret d’État (totalitaire).

On connaît la chanson : quand ça devient trop dur, on ferme les écoutilles. Cela s’appelle le déni, parade psychologique qui permet à certaines femmes enceintes d’oublier qu’elles le sont. Et qui rend la plupart des gens – éduqués, sensés, « intelligents » – aveugles en face de la très grande nouvelle de ce temps : le dérèglement climatique. Dans ce domaine, les nouvelles sont riantes : l’Agence internationale de l’énergie (AIE), ramassis mondial de productivistes, prévoit une hausse de 37 % de la consommation mondiale d’énergie d’ici 2040, dans moins d’un quart de siècle. Et dans ces conditions, un seul mot s’impose : l’Apocalypse. Demain. Demain matin. Pour tous.

En Chine, on en est encore aux galéjades, à la pollution si classique de l’air et aux doigts dans le cul pour voir si ça fait mal. Le 23 janvier 2013, un habitant de Pékin, Zou Yi, décide de photographier chaque jour (1) l’immeuble qui lui fait face. Fenêtres sur cour, façon délire postmoderne. Zou Yi entend documenter l’extraordinaire dégradation de la qualité de l’air dans la capitale chinoise. Ce qui donne un cliché par jour, pendant un an. Le plus souvent, les fenêtres disparaissent dans un gris sombre, ou dans le noir. Pékin, la ville où l’on marche à tâtons.

Pour mesurer les dimensions bibliques de cette affaire, trois historiettes. Un, le lycée français de Pékin n’a plus la moindre confiance dans l’air qu’on respire localement. Il défend sa croûte, pas ? Des expatriés, des étrangers venus bosser en Chine six mois ou six ans ne veulent plus venir en compagnie de leurs gosses. Le lycée, plein d’imagination, proposera sous peu un établissement à air filtré. Fabius, ministre des Affaires étrangères, est passé sur place le 19 octobre pour poser la première pierre d’un nouveau bâtiment. On respire.

Deuxième illustration, qui date de ces tout derniers jours. Pékin accueille un sommet de chefs d’État de la zone Asie-Pacifique, ou APEC, mais consciente de ses devoirs d’hôte, se demande comment offrir à ses invités un air moins pourrave que d’ordinaire. Comme les bureaucrates ont tous les pouvoirs, ils ferment à moitié ou aux trois quarts 2 000 usines de l’agglomération, et traquent les peigne-culs qui osent allumer leurs fours, cuisinières ou chaudières à charbon. C’est-à-dire la totalité du peuple. Malgré ces beaux efforts, les chefs d’État doivent avaler le même air dégueulasse que les ploucs de la région.

Troisième grandiose exemple : la destruction, pour plus de sûreté, du thermomètre. Si on ne mesure plus, où est le problème ? La Chine vient d’interdire la publication – jusqu’ici disponibles sur le Net – de données américaines. L’ambassade US à Pékin, qui effectue ses propres contrôles, mettait à la disposition du public des mesures précises de la qualité de l’air dans la capitale. Comme on se doute, fort loin des chiffres officiels. Que sait-on ? L’Organisation mondiale de la santé (OMS) recommande une limite maximale de 25 microgrammes au mètre cube d’air de particules fines PM 2,5. Ce sont de loin les plus dangereuses, car elles ne dépassent pas 0, 0025 millimètre de diamètre, et grâce à leur petitesse, elles se fixent aisément dans les alvéoles des poumons, où elles finissent par provoquer les pires saloperies. À Pékin, les PM 2,5 atteignent et dépassent régulièrement 550 microgrammes, soit 20 fois ce qu’il ne faudrait jamais avaler.

Ce que ne raconte pas l’histoire, c’est notre contribution nette au grand massacre en cours des Chinois. Hollande et Sarkozy avant lui sont prêts à tout pour relancer leur croissance  adorée, qui passe fatalement par la Chine. En échange de nos turbines, de nos trains, de nos centrales nucléaires, la Chine nous envoie des montagnes de jouets, de colifichets à deux balles, de vêtements et d’ordinateurs. Qui ne poussent pas dans les arbres. La croissance et notre connerie – deux synonymes – tuent le monde. Charlie espère n’offenser personne.

(1) http://online.thatsmags.com/post/photos-this-is-what-one-years-worth-of-beijing-pollution-looks-like

Sur la fin sans fin d’Obama

Vous connaissez sûrement le résultat désastreux – pour Obama – des élections de mi-mandat présidentiel aux États-Unis. L’ensemble du Congrès est désormais dominé par les Républicains, ces excellentes personnes qui ont créé le chaos en Irak, lequel s’est depuis propagé. Vous m’excuserez ou pas, mais je vous mets ci-dessous quelques textes de Planète sans visa publiés en 2008, au moment où tous s’extasiaient de la victoire d’Obama. Moi, je ne souhaite qu’une chose : qu’on se batte en temps réel. Jadis contre les fascismes et le stalinisme-maoïsme. Et aujourd’hui contre toutes ces illusions qui nous font perdre un temps de plus en plus précieux.

Bien sûr, aujourd’hui, plus personne ne se souvient des espoirs fous conçus au sujet de gens comme Staline et Castro, sur un autre plan Mitterrand ou Obama. Mais dites-moi, à quoi sert de se réveiller après la bataille ?

 

Obama et cette si vieille histoire d’un si vieux continent

Je vous glisse ces trois mots avant un long article sur l’Italie. Obama. Cette étrange unanimité à laquelle je participe malgré que j’en aie. Un Noir, au pouvoir dans le pays de l’esclavage. Chez nous, tous sont évidemment d’accord, de Sarkozy à Hollande, en passant par Bayrou et tant d’autres. Il paraît que l’élection ravit jusqu’au Front national, mais je n’ai pas le cœur à vérifier.

Tout le monde sur un petit nuage, donc. Pourquoi faut-il que je pense, moi, à l’atterrissage de Neville Chamberlain  sur l’aéroport de Londres, en septembre 1938 ? Il vient alors de signer les accords de Munich, qui ont donné l’indépendance de la Tchécoslovaquie à Hitler. Une foule entoure le petit avion du Premier ministre britannique, qui redoute d’être lynché. Il est acclamé, tout au contraire, par une foule en délire. La Paix ! La Paix est sauvée ! Le 21 novembre suivant, un certain Winston Churchill déclare dans l’indifférence générale : « Le partage de la Tchécoslovaquie, sous la pression de l’Angleterre et de la France, équivaut à une capitulation totale des démocraties occidentales devant la menace des nazis (…) Un tel écroulement n’apportera ni la paix ni la sécurité (…) Au contraire, il place ces deux nations dans une situation encore plus faible et plus dangereuse. Le simple fait que la Tchécoslovaquie soit neutralisée entraîne la libération de 25 divisions allemandes qui pèseront sur le front occidental (…). Croire qu’on peut obtenir la sécurité en jetant un petit État en pâture aux loups est une illusion fatale ».

Oui, pourquoi faut-il que je pense à cela, quand tout le monde applaudit le triomphe du héros ?

Sur Obama (en réponse aux adorateurs)

Je savais ce que je faisais en écrivant deux articles à rebrousse-poil sur l’élection triomphale de Barack Obama à la tête des États-Unis. Je n’aurai pas l’hypocrisie d’écrire autre chose. Et comme de juste, des lecteurs réguliers de ce blog m’ont fait part, directement ou non, de leur désaccord. Mieux ou pire, de leur énervement à mon encontre.

Ma foi, ils ont bien le droit. Ce territoire virtuel se veut de liberté, même s’il a comme tout autre ses limites. Mais enfin, je ne recule pas d’un millimètre. Car nous voilà plongés dans le malentendu, une fois encore. C’est une question de fond, une fois encore. Je vais tâcher d’être simple. Nous vivons dans un paradigme – au sens de cadre général de la pensée, admis par tous sans vraie discussion – issu de l’histoire politique que nous avons faite ensemble.

Pour aller au plus vite : le 18ème siècle, les Lumières, la Raison alliée à la Science, le Progrès, la Gauche et la Droite. Bon, il n’y a pas de quoi rougir ou s’évanouir de bonheur. C’est ainsi. Ce paradigme du progrès a structuré la pensée et les attentes pendant deux siècles, et donné les résultats – contrastés – que l’on sait. L’univers atroce du stalinisme à main gauche. Le monde fou de la marchandise à main droite.

Bien. L’écologie commande une révolution morale et intellectuelle complète. Radicale et complète. Parce qu’elle nous montre pour la première fois en deux millions d’années d’existence de l’homme les limites certaines de son action. Elle est un butoir que nous ne franchirons pas, ni vous ni moi. Tout ce processus est d’arrachement. De douleur vraie, car il faut renoncer. Car il faut bannir. Car il faut bâtir. Et c’est difficile.

Obama est sans nul doute un brave garçon. Et un Noir comme lui, après huit ans d’infâme crétinerie, c’est bien entendu un bain de Jouvence. Mais merde, MERDE et MERDE ! ressaisissez-vous ! Obama ressortit corps et âme au paradigme du progrès. Et il mènera dans ce cadre, fatalement, bagarre pour le rétablissement des intérêts américains dans le monde. Lesquels passent par la défense de l’industrie et de la consommation de masse.

Libre à vous de fantasmer. Quand les yeux se seront ouverts, quand ils seront dessillés, il va de soi que ceux qui exultent ce jour diront, pour la plupart, qu’ils n’ont jamais cru dans cet homme. Croyez-le ou pas, cela ne me rend pas amer une seconde. Je sais assez bien, ce me semble, comment marche le monde réel. Mais je suis un homme, moi aussi. Et je dis à ceux qui me reprochent de gâcher leur fête électorale : lâchez-moi. Oui, laissez-moi en paix. Admettez le dissensus. Admettez le refus. Admettez la solitude (relative). Voilà. Admettez.

Un mot de plus sur Obama

Je me permets de me copier moi-même, et glisse ci-dessous quelques phrases publiées en ajout au commentaire de Mathieu Hangue sur l’article précédent.

Pour Mathieu Hangue,

Je trouve le rapprochement avec Mitterrand très éclairant. Une génération a donné les clés du pouvoir – et de l’espoir – à un homme qui a réhabilité la Bourse et la spéculation dans cette partie de l’opinion qui était pourtant rétive aux charmes du capitalisme. Et une génération, c’est long. Le temps presse, à moins qu’on ne m’ait dit que des menteries, mais j’en serais un peu surpris.

Sans rire, Obama n’a même pas à renoncer à la moindre idée, comme le fit si cavalièrement Mitterrand. Il accepte, il défend, il promeut un système sur quoi tout l’édifice planétaire repose. Je crois qu’il n’y a pas grand chose à ajouter. À part qu’il est sympathique. Mais Mitterrand était de gauche.

Les biocarburants sont au pouvoir (le sacre d’Obama)

 Vite, vite, je suis désolé de devoir foncer. Le MAG Cultures est un magazine envoyé chaque mois à 110 000 grandes exploitations céréalières françaises (144 ha en moyenne). Une ode perpétuelle à l’agriculture intensive. On ne saurait mieux faire dans ce domaine. Or je viens de lire un article fort intéressant que je propose en priorité aux adorateurs de Barack Obama (ici).Certains d’entre vous savent déjà comment je vois l’élection d’Obama à la présidence des États-Unis d’Amérique (ici). Mais ils ignorent probablement ce que révèle l’article de MAG Cultures, dont j’isole cet extrait lumineux :

« Pour le Farm Bill, pas d’illusions à se faire : il a été adopté sous pression démocrate, malgré le veto de Bush, et le sénateur Obama a voté pour. “Le nouveau président a une approche pragmatique plutôt que dogmatique de la libéralisation. Ce n’est pas forcément une bonne nouvelle pour nous. Sur l’agriculture, j’ai le sentiment qu’il veillera aux intérêts de ses farmers, comme il l’a fait en affirmant son soutien aux biocarburants qui sont un levier puissant pour assurer un revenu aux agriculteurs ”, explique Christian Liegeard. C’était l’un de ses principaux points de désaccord avec le candidat républicain. Obama s’engage à prendre la suite du plan Bush pour l’éthanol. Il ne changera rien, et ça change tout pour le marché mondial du maïs ».

Je n’ai pas même envie de faire le moindre commentaire. Le plan éthanol. Le maïs changé en carburant. La faim qui déferle et détruit des vies par centaines de millions. Pas de commentaire. Ainsi.

Aimez-vous (encore) Obama ?

Que ferait-on sans les amis ? David Rosane m’envoie un lien américain que j’invite les connaisseurs de l’anglais à visiter (ici). Ce n’est pas triste, et c’est encore moins gai que ce que j’imaginais (ici-même). Le nouveau président Barack Obama devrait incessamment nommer secrétaire à l’Agriculture – un poste ministériel d’une rare puissance – l’ancien gouverneur de l’Iowa Tom Vilsack. Si cela devait se confirmer dans les prochaines heures, ce serait une nouvelle exécrable pour le monde entier, et surtout pour ses innombrables gueux.

Vilsack, qui copine avec Monsanto, est tout ce que j’exècre. Il milite – mais réellement ! – pour la viande clonée, l’agriculture industrielle et ses élevages concentrationnaires du MidWest, les OGM, les biotechnologies en général, les biocarburants bien entendu. En septembre 2001, il a même reçu le prix honteux de la Biotechnology Industry Organization (BIO) pour sa vaillance à défendre les intérêts industriels dans ce qu’ils ont de plus extrémiste (ici).

Je vous le dis, et j’en suis désolé pour nous tous : mauvais présage, immense nuage.

PS : Ci-dessous, l’argumentaire du groupe Organic Consumers Association, c’est-à-dire l’Association des consommateurs bio. Même quelqu’un qui ne lit pas l’anglais peut comprendre au moins dans les grandes lignes, et c’est pourquoi je le mets en ligne sans traduire.

Il ne FAUT PAS choisir ce mec, pour au moins les six raisons que voici :

* Former Iowa Governor Tom Vilsack’s support of genetically engineered pharmaceutical crops, especially pharmaceutical corn : http://www.gene.ch/genet/2002/Oct/msg00057.html


http://www.organicconsumers.org/gefood/drugsincorn102302.cfm

* The biggest biotechnology industry group, the Biotechnology Industry Organization, named Vilsack Governor of the Year. He was also the founder and former chair of the Governor’s Biotechnology Partnership.

http://www.bio.org/news/pressreleases/newsitem.asp?id=200…



* When Vilsack created the Iowa Values Fund, his first poster child of economic development potential was Trans Ova and their pursuit of cloning dairy cows.

* Vilsack was the origin of the seed pre-emption bill in 2005, which many people here in Iowa fought because it took away local government’s possibility of ever having a regulation on seeds- where GE would be grown, having GE-free buffers, banning pharma corn locally, etc. Representative Sandy Greiner, the Republican sponsor of the bill, bragged on the House Floor that Vilsack put her up to it right after his state of the state address.

* Vilsack has a glowing reputation as being a schill for agribusiness biotech giants like Monsanto. Sustainable ag advocated across the country were spreading the word of Vilsack’s history as he was attempting to appeal to voters in his presidential bid. An activist from the west coast even made this youtube animation about Vilsack

http://www.youtube.com/watch?v=Hmoc4Qgcm4s

The airplane in this animation is a referral to the controversy that Vilsack often traveled in Monsanto’s jet.

*Vilsack is an ardent support of corn and soy based biofuels, which use as much or more fossil energy to produce them as they generate, while driving up world food prices and literally starving the poor.