Archives de catégorie : Pouvoir et démocratie

Le spectre de la régression (sur la Belgique)

Ce n’est pas follement drôle, aussi je ne m’étendrai pas. La Belgique vient de voter d’une manière désastreuse. Aux 29 % de voix du parti séparatiste flamand, il faut ajouter, selon moi et entre autres, les 12,5 % du Vlaams Belang, parti d’extrême-droite, flamand lui aussi. Ce ne serait qu’un jour de tristesse si ce vote ne marquait une évolution régressive on ne peut plus nette d’une grande partie de l’Europe.

En Italie, la Lega Nord, on l’oublie un peu vite, est La Lega Nord per l’indipendenza della Padania. Autrement dit, et pardon d’écrire cette stupidité : La Ligue Nord pour l’indépendance de la Padanie. La Padanie est le pur fantasme des sbires d’Umberto Bossi, et n’a jamais existé. Dans leur délire, ces leghisti entendent créer un État qui regrouperait les provinces riches du Nord, opposé à ce Sud qu’ils jugent pratiquement africain. Ce dernier mot étant pour questa brava gente  synonyme de honte, de misère, de maladie, d’escroquerie.

La Ligue, c’est tout le pouvoir aux beaufs. Tout le pouvoir aux blaireaux dont je parlais l’autre jour. Tout le pouvoir au plus mauvais de l’homme. Umberto Bossi, que l’on voit souvent avec un doigt d’honneur offert à la foule, dirige cette Ligue avec de beaux slogans comme on aimerait en entendre plus souvent. Par exemple, celui-ci, immortel : « Noi ce l’abbiamo duro ! ». Qui signifie en toute clarté, mais oui : « Nous, on bande ! ». Imaginez cela du haut d’une tribune. C’est ce qui se passe en « Padanie », dans cette Italie que j’aime tant. Et où la Ligue organise des rondes de « chemises vertes » chargées de surveiller la nuit les malandrins, surtout ceux, pour reprendre les mots sordides de Bossi, qui sont « extracommunautaires », c’est-à-dire Arabes ou Noirs.

En Belgique comme en Italie, les mêmes causes produisent les mêmes effets. Ceux qui se sentent plus « riches » ne veulent plus payer leur dîme à la société des humains. Ils veulent profiter de leurs grosses bagnoles, de leurs grosses maisons, de leurs grosses vacances et envoyer au diable ceux qui gagnent moins. Ils entendent dynamiter l’idée de coopération, de mutualisation, de péréquation. Que meurent les pauvres, et que vivent dans leur graisse confite ceux qui tiennent le manche. J’aimerais me tromper, mais je crains que la Catalogne, si chère à ma mémoire, ne soit bientôt candidate aux mêmes délires. Ne plus payer. Construire des digues, des miradors, des barrages barbelés, et monter la garde en attendant l’ennemi.

Ne nous y trompons pas. Chaque année qui passe sans l’élaboration d’un programme humain susceptible de rassembler l’espoir face à la crise écologique, chaque année qui passe est un cadeau offert à Umberto Bossi, à ses Fasci italiani di combattimento nouvelle manière et à ses clones. En attendant que nous nous réveillions, ce l’ha duro. Il bande, pas de doute.

Tous ensemble

Je ne sais combien de personnes auront défilé ce jeudi. Pas assez. Mais sans doute davantage que ce qu’espérait ce gouvernement de brigands et de margoulins. Moi, pour des raisons diverses et variées, je n’ai pu participer au défilé parisien. Mais je vous jure que je serai du prochain. Et j’espère bien que nous finirons par être des millions. Ce n’est pas si compliqué, la politique et l’économie. Qu’ils aillent se faire foutre, tous. Ceux de droite, ceux de « gauche » comme Strauss-Kahn. Qu’ils aillent se faire foutre. Ce monde qui sent la poudre des explosions, il a été bâti par des armées de prolétaires à gapette et  gamelles cachées dans des sacs en toile pendus à l’épaule. Je le sais, je l’ai vu. Mon père.

Ces merdeux, ces pommeux qui osent intervenir sur une question aussi essentielle que le droit à stopper la machine, je les vomis en bloc.  Bon Dieu ! que me soit un moment donnée la liberté de dire ce que je pense vraiment. Et qu’on me traîne ensuite en prison, car c’est là que certains mots et gestes conduisent tôt ou tard. Faites ce que vous voulez. Moi, j’y serai.

Forger l’acier rouge avec mes mains d’or (sur la retraite)

Au printemps 2003, alors que commençait la mobilisation contre le plan gouvernemental sur les retraites, je me suis tellement engueulé avec l’équipe du journal Politis, où j’assurais une page Écologie hebdomadaire depuis 1994, que j’en suis parti. Une engueulade terrible, je vous l’assure. Je n’étais pas d’accord avec le soutien, mécanique à mes yeux, désastreux à bien des égards, que ce journal apportait à un mouvement que je déplorais dans ses formes. Je le jugeais corporatiste, égoïste eu égard à la crise générale de la vie sur terre. Je dois dire que je n’ai pas changé d’avis. Mais tel n’est pas le sujet.

Aujourd’hui, il y aura des manifestations partout en France, notamment contre le recul de l’âge légal du départ en retraite. On parle de 62 ou 63 ans. Je ne peux ni ne veux entrer dans le détail, mais cette fois, je soutiens de toute mon âme le refus de cette réforme. Ce projet marque évidemment un moment de guerre sociale d’une intensité rarement atteinte depuis l’après-guerre. Les ouvriers, qui vivent déjà tant d’années de moins que ces bouffons de Xavier Bertrand ou Éric Woerth, paieront la note, leur note. La lamentable équipe qui a conduit la France où elle est, tente désormais de tout détruire pour complaire aux si fameuses Agences de notation. Car tout est là : Sarkozy est mort de peur à l’idée que la note de la France pourrait passer du triple A – la garantie maximale sur les emprunts de l’État – à AA+ par exemple.

Comme ces gens qui n’ont jamais travaillé n’imaginent pas une seconde s’attaquer à leurs seuls mandants véritables – les riches -, ils s’en prennent évidemment aux pauvres, plus nombreux, et méprisables en outre. D’où ce projet qui vise à obliger les prolos à cotiser, pour certains d’entre eux, 46 ou 47 ans avant que de toucher leurs picaillons. Sachant qu’ils vivent nettement moins vieux que les cadres supérieurs – la moyenne officielle de sept ans d’espérance de vie en moins pour les ouvriers n’est-elle pas folle ? -, cela signifie une chose et une seule. Globalement, ils travailleront pour payer la retraite de ceux qui les ont dirigés tout au long de leur vie. Et ils n’auront droit qu’à des miettes d’une retraite au rabais radical.

Mon père était un prolo de la banlieue parisienne, et il est mort à 49 ans, laissant cinq gosses derrière lui. Moi-même, j’ai commencé à travailler à 17 ans, comme apprenti-chaudronnier. J’écris cela non pour me plaindre – ce temps était superbe -, mais pour dire que je vois de quoi il s’agit. Ces gens qui nous gouvernent sont des salauds.

Ces oliviers qui signifient la guerre (Incursion en Palestine)

Je ne découvre pas la Lune, non pas. Je sais dans les grandes lignes ce qui s’est passé en Palestine, au moins depuis les années 20 du siècle écoulé. L’aspiration de certains Juifs à fonder sur cette terre un État. L’émergence d’une superbe génération de pionniers, sionistes, socialistes, souvent universalistes malgré certaines apparences. ??? ??-??????, c’est-à-dire David Ben Gourion, alias de David Grün, en fut le plus noble symbole. Mais cet homme, bien que né en Pologne, avait émigré en Palestine dès 1906, à l’âge de 20 ans. Il n’avait donc pas connu directement la destruction de tant des siens.

Je ne sais pas si Israël, créé en 1948, aurait vu le jour sans cette impensable Shoah dont l’ombre continue de me hanter. Sans ce génocide à l’impossible prescription, ce crime sans pardon perpétré par les nazis contre les Juifs d’Europe. Dans l’immédiat après-guerre, des milliers de Juifs askhénazes, parlant yiddisch – quelle langue somptueuse ! -, rescapés des camps de la mort, réchappés des ghettos de Russie, de Pologne, de Hongrie, de toute l’Europe centrale défunte, gagnèrent cette Palestine qui leur semblait l’unique chance de salut. Beaucoup appartenaient à ce que l’on nommait encore le mouvement ouvrier. Ce sont eux qui fondèrent l’État juif et les kibboutzim, croyant encore au mieux de l’homme, malgré le pire.

De leur côté, les grands États sortis vainqueurs de la guerre totale au fascisme – la France, l’Angleterre, les États-Unis, mais aussi l’Union Soviétique – tombèrent d’accord sur la création d’un pays sioniste, susceptible d’accueillir toute la misère juive de l’univers. Bien malin qui pourrait aujourd’hui distinguer entre la culpabilité de n’avoir rien tenté contre Auschwitz et le souhait lâche que ne soit plus posée – pour eux, chez eux – la supposée « question juive ». Le fait est que des Juifs de partout ont installé de force, au milieu de nulle part, mais sur une terre saturée d’histoire religieuse, un gouvernement, une police, une armée. Les Palestiniens, de nombreux Palestiniens furent chassés de leurs terres ancestrales. Je vous prie d’excuser ce long préambule. Dès que l’on parle des Juifs, il convient d’être clair. Je le suis. J’exècre, je maudis, j’envoie aux flammes de l’enfer les antisémites, qui ne sont pas, à mes yeux, des humains. Je me reprends : humains ils sont. Les plus affreux d’entre nous, car obscurcissant le mal absolu, ils le rendent de nouveau possible.

Mais il y a les Palestiniens. Rien ne m’empêchera d’écrire qu’ils sont traités avec barbarie par le pouvoir israélien. Un pouvoir qui n’a que lointain rapport avec le rêve des fondateurs. On pourrait, on pourra gloser à l’infini sur cette dégénérescence morale, cet affaissement, cet avilissement d’êtres dont certains, et non des moindres, étaient pourtant des survivants. Cela ne me rend pas triste, cela me désespère. J’ajoute, non pour minorer, mais pour être juste, que beaucoup, parmi ceux qui défendent les Palestiniens et attaquent Israël, n’ont jamais levé le moindre petit doigt contre d’autres pratiques ignobles qui se déroulaient au même moment dans les pays arabes.

Je ne vais pas dresser une liste, elle serait bien trop longue. Rappelons quelques exemples. En 1982, le clan alaouite du président syrien Hafez el-Assad assiège et détruit la ville de Hama, place-forte des Frères musulmans. Après 27 jours de siège, entre 10 000 et 25 000 civils sont tués. En avez-vous seulement entendu parler ? En septembre 1970, les Bédouins du roi Hussein de Jordanie tournent leurs canons contre les camps de réfugiés palestiniens. Ces Palestiniens qui sont pourtant l’immense majorité de la population de ce pays. L’affaire est certes complexe, mais les morts meurent. Entre 3500 et 10 000 Palestiniens sont tués. Bien plus se réfugient au Liban, où nombre croupissent encore, parfois depuis 1948, dans des baraquements provisoires. Provisoires depuis 62 ans. Depuis qu’Israël les a chassés de chez eux, oui. Je laisse de côté le sort fait aux Kurdes. J’oublie donc les 5 000 morts gazés d’Halabja, grâce notamment à des avions Mirage du bon monsieur Dassault, au temps où Saddam était l’ami de Chirac et de Chevènement. Oui, bien obligé, je laisse de côté des flots de sang arabe versés par des Arabes, et qui n’ont jamais ému personne en France.

Il n’en va pas de même avec Israël. Et d’une certaine manière, même si un fonds antisémite se cache souvent dans les replis du drapeau palestinien, cela me semble juste. Israël est un pays à part, qui devrait, à mes yeux, se fixer des devoirs plus impérieux que d’autres, ne fût-ce qu’en hommage aux disparus de l’effroyable. Tel n’est pas le cas. Hacène, très attentif lecteur de Planète sans visa, me signale la manière dont des colons d’Israël s’attaquent aux oliviers souvent centenaires des Palestiniens de Palestine. Certes, j’en avais entendu parler. Certes, je l’avais oublié. Le drame est là-bas si complet qu’il est bien difficile d’en distinguer les si nombreuses victimes.

Mais oui, l’arrachage des oliviers est un crime singulier. Car cet arbre est provende pour les pauvres, et il incarne non seulement la beauté, mais la permanence, l’histoire, le passage du temps et des générations, le travail des hommes, le miracle de la nature mille fois renouvelé. Et la paix ? Bien sûr, la paix. On ne sait pas combien d’arbres ont été arrachés au bulldozer pour être replantés en Israël. Combien ont été tronçonnés. Combien ont été brûlés. On ne sait pas ce que la construction du mur entre Israël et le reste de la Palestine a coûté en amandiers, citronniers, dattiers ou oliviers. Peut-être 500 000 de ces derniers ont-ils disparu de la terre où des mains les avaient si longtemps soignés. Peut-être un million. Peut-être bien plus.

Deux faits pour conclure. Terribles tous deux. Le premier tient dans une courte dépêche de l’agence Reuters en date du 21 juillet 2009 : « Une dizaine de colons juifs à cheval munis de torches se sont livrés lundi à une équipée sauvage près de Naplouse. Ils ont notamment incendié 1500 à 2000 oliviers appartenant à des Palestiniens. Les agresseurs entendaient venger la destruction quelques heures plus tôt par l’armée d’une caravane dans une colonie sauvage installée sans autorisation, rapportent les médias israéliens. L’armée et la police israéliennes n’ont fait aucun commentaire sur cette “descente” des colons. Ces derniers ont aussi tiré des pierres sur des voitures palestiniennes, endommagé cinq véhicules et blessé deux de leurs occupants ».

La deuxième histoire tient dans un rapport (ici) de la noble association de défense des droits de l’homme israélienne Yesh Din, dont le nom hébreu veut dire : « C’est la loi ». Entre 2005 et 2009, Yesh Din a enquêté sur 69 cas distincts de vandalisme contre les arbres, principalement des oliviers, allant jusqu’au brûlage ou à l’arrachage. Tous se sont déroulés en Cisjordanie, c’est-à-dire en territoire occupé militairement par l’armée d’Israël. 27 des cas recensés, soit près de 40 % du total, ont eu lieu au cours des 10 premiers mois de 2009. Aucune mise en examen n’a été prononcée. Une honte ? Elle est totale.

Espagne, castagnettes et dominos

Après la Grèce, l’Espagne ? Je n’ai pas le temps, hélas, de rechercher quelques perles égrenées par nos économistes-en-chef, nos politiques princiers, de droite et de gauche bien sûr. Il y a une poignée d’années, l’Espagne était LE modèle que nos élites proposaient à une France jugée malade, en tout cas assoupie. Son taux de croissance faisait chavirer le cœur de tous les abrutis qui croient penser, quand ils ne font que braire. Le problème est que tout reposait sur un château de cartes, un lointain château en Espagne que personne ne possèderait un jour.

La politique criminelle des élites espagnoles tient en peu de mots : corruption de masse, destruction de la nature, délire immobilier. On a détruit là-bas ce qui restait de rivage après la stupéfiante flambée franquiste des années soixante du siècle passé. Et construit, souvent au bord de l’eau, mais aussi dans d’improbables banlieues, des milliers de programmes immobiliers qui jamais ne trouveront acquéreurs. Jamais. Certains sont achevés, mais sans aucune adduction. D’autres sont commencés, et se trouvent à divers stades. Mais le cochon de client s’est évaporé. Il s’agissait d’une chaîne de Ponzi, la même pyramide que celle qui a conduit l’escroc Madoff en taule. Tant que les gogos achètent et que d’autres gogos se lancent à leur suite, tout marche à la perfection. Mais dès que le doute s’installe, c’est l’effondrement.

Cela fait longtemps que j’ennuie mon entourage en répétant que l’Espagne est d’une fragilité de verre. On conspue aujourd’hui les gouvernements grecs dans les rues d’Athènes. Il n’est pas exclu que l’on fasse pire demain avec ceux du Parti populaire (PP) espagnol et du Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE). Car ils ont mené la même politique et créé les conditions du chaos. Je vous, je nous le demande : qui paiera pour ces appartements morts-nés ? Qui paiera le prix de la corruption et de la dévastation écologique ? N’oubliez pas que des banques ont massivement prêté aux margoulins pour faire leurs galipettes monétaires. Je vous l’annonce, pour le cas où vous ne le sauriez pas : celles de France sont plombées par le désastre immobilier espagnol. Pas toutes, non, et pas à la même échelle. Mais si mes informations sont bonnes, on peut s’attendre à des surprises. Et elles seront mauvaises.

Tiens, je vous remets pour le même prix un article de Planète sans visa, qui n’a, après tout, qu’un an. Il renvoie à un article qui en a deux.

Zapatero, Zapatera, socialauds d’Espagne et d’ailleurs

Je souhaite ardemment que personne ne vienne prendre leur défense, ici tout au moins. Car ailleurs, je sais combien ils sont choyés, aimés, cajolés. Madame Ségolène Royal – dite la Zapatera – ne s’est-elle pas excusée il y a quelques jours, au nom de nous tous, auprès de son si cher ami José Luis Rodríguez Zapatero, Premier ministre espagnol en titre ? Ne lui a-t-elle pas demandé de pardonner des propos prêtés à notre Sarkozy national ? Si.

Or que font donc les socialistes espagnols ? Ils détruisent avec frénésie ce qui reste de ce pays de légende. En janvier 2008, avant donc l’annonce de la crise économique que vous savez, j’ai écrit (ici) sur quoi reposait le soi-disant miracle espagnol, avec ces taux de croissance admirés d’un bout à l’autre de notre Europe si malade. Tenez, je me cite : « Du temps de Franco, vieille et sinistre baderne aux ordres du pire, le choix majeur a été de vendre le pays au tourisme de masse. Une aubaine pour les vacanciers français découvrant, dans les années 60, la défunte Costa Brava, puis le reste. Les héritiers du Caudillo, de droite d’abord, puis de gauche, ont poursuivi dans la même direction, toujours plus vite, toujours plus loin. Le Premier ministre en place, José Luis Rodríguez Zapatero, ne cesse de vanter l’état de l’économie espagnole, qui lui devrait tant. Par parenthèses, faut-il rappeler l’enthousiasme de madame Royal chaque fois que quelqu’un l’appelle la Zapatera ?

Tout est malheureusement connu, et le Parlement européen lui-même a condamné sans appel des « projets d’urbanisation massive (…) sans rapport avec les véritables besoins des villes et villages concernés », contraires « à la durabilité environnementale » et qui ont des effets « désastreux sur l’identité historique et culturelle » des lieux (www.batiweb.com). Voilà pourquoi, bien qu’aimant l’Espagne et sa langue, je mets rigoureusement dans le même sac le PSOE – parti socialiste au pouvoir – et le PP, ou Parti populaire, de droite. Plutôt, parce que j’aime profondément l’Espagne. Mais vous aurez rectifié de vous-même.

Pourquoi ce rappel ? Mais parce que les socialistes au pouvoir à Madrid s’attaquent aujourd’hui au grand joyau ornithologique de la péninsule, l’Estrémadure. Je connais ce lieu, qui est rude au regard et au corps. Froide l’hiver, brûlante l’été, la région abrite une sorte de savane arborée méditerranéenne, la dehesa. Comme un compromis entre la nature et l’homme, immémorial, sur fond de chênes verts, d’oliviers sauvages, de genêts, d’arbousiers et de troupeaux. C’est aussi le pays des oiseaux. Des grandes outardes. Des vautours fauves, moines, percnoptères. Des grues. Des oies. Des canards. L’Éstrémadure est si pauvre que les bureaucrates madrilènes l’ont laissée en paix, tout occupés qu’ils étaient à ronger les côtes sublimes du pays.

Fini. Le gouvernement vient de décider une série de mesures scélérates au dernier degré. La plus extravagante est peut-être le cadeau fait à une transnationale étasunienne, Florida Power and Light (ici), qui pourra construire deux usines solaires cette année à Casas de Hito, en Estrémadure. 600 millions d’euros d’investissement – on ne sait rien d’autres arrangements éventuels, qui peuvent se produire néanmoins – et 100 emplois à la clé. 100 emplois en échange d’un paradis des oiseaux. En 2007, on a dénombré à Casas de Hito 11 325 grues. Et sept espèces d’oies, et 140 000 canards hivernant à trois kilomètres, sur le lac de barrage de Sierra Brava. Je dois vous avouer que je n’ai pas regardé de près les dangers que feront peser sur les oiseaux sauvages ces installations. Et vous renvoie à une pétition des naturalistes espagnols de SEO (ici). Ils sont déprimés. Moi aussi.

D’autres projets simplement criminels menacent l’Estrémadure. Une raffinerie de pétrole à Tierra de Barros, des centrales électriques, des parcs éoliens lancés dans des conditions douteuses de légalité, et qui sont apparemment dangereux pour des oiseaux comme les vautours. Lesquels sont magnifiques, à la différence de ceux qui traînent dans les bureaux des promoteurs d’Ibérie comme de France.

Je vois bien que naît sous nos yeux encore ébahis un capitalisme vert censé nous clouer le bec. Si vous avez le moindre doute, jetez un œil ici, je crois que nous nous comprendrons. Eh bien ? Au risque flagrant de me répéter, il n’est pas question de considérer ces gens-là, qui incluent évidemment nos socialistes comme de vagues cousins un (long) temps égarés. Ce sont des adversaires. Ce sont des ennemis. Et je vous jure que je les exècre. Zapatero, Zapatera, toutes ces camarillas, tous ces sbires, tous ces fifres et sous-fifres, tous ces petits marquis, ces Dray, Mélenchon, Royal, Hollande, Fabius, Weber, Bartolone, Aubry, Rebsamen, Le Guen, Hamon, Delanoé, Désir, Bloche, ad nauseam. J’ai pris le parti des oiseaux et du vol libre au-dessus des cimes, celui des migrations, celui de Nils Holgersson, celui de la beauté. J’ai pris le parti du soleil, de la lune, de la pluie et des arbres. Et ce n’est pas le leur.


site canada goose pas cher fiable site canada goose pas cher fiable