Personne n’y coupe. Bien malins ceux qui se gaussent de Sarkozy, bien malins, et bienheureux. En effet, cet homme est une fois de plus ridicule. Cet homme qui avait comparé la taxe carbone à l’abolition de l’esclavage et à celle de la peine de mort se couche au premier tournant. Les produits dopants – glace à reflets dorés, chocolat à gogo, Carla Bruni, etc. – dont il se sert couramment n’auront donc pas suffi. Il est à terre, pleurnichant comme ne le ferait pas un gosse de trois ans.
Je voudrais dire deux choses. La première sur lui, la seconde sur tous les autres. Commençons : j’ai écrit ici, le 30 janvier 2009, un papier sur l’art du go, dont j’extrais ceci : « Et alors ? Pourquoi mêler Sarkozy à ces grands souvenirs personnels ? Parce qu’il me fait penser à un désastreux joueur de go. C’est un tacticien habile, mais un lamentable stratège. Il est l’homme de l’instant, il est celui qui croit avoir niqué – un mot fétiche chez lui – le monde parce qu’il a placé quelques pions dans les coins qui retiennent son attention. Mais il est totalement incapable de concevoir, d’entrevoir, de situer les enjeux ailleurs qu’autour de sa personne. Il va donc perdre la partie, mais comme c’est la nôtre, c’est fâcheux. Notez que ceux qu’on dit d’en face sont aussi mauvais. Tous. Un bon joueur de go aurait déjà, par un magari audacieux suivi d’un wariuchi, réduit à néant les moyos que Sarkozy croit en sa possession. Après avoir occupé deux ou trois o-ba, il aurait lancé un retentissant atari. Atari, qui veut dire échec ».
Nulle peine d’insister, je pense. Quant à l’autre chose, elle s’adresse à la totalité de la gauche, NPA et Verts compris, bien entendu. À ces soi-disant adversaires décidés de la politique menée par la droite au pouvoir. Je les plains. Je nous plains du fond de l’âme. Car de deux choses l’une. Deux, et pas trois. Ou la pulvérisation de la taxe carbone est un signe épouvantable, et en ce cas, il faut se lever en masse. Tout de suite. Pas demain. Pas après-demain, après les magouilles d’après-élection entre Aubry, Royal, Frêche et consorts. Pas après-demain, quand les Placé, Duflot, Jadot, Cohn-Bendit et tous autres auront enfin réparti les seconds rôles. Pas après-demain, quand Mélenchon saura s’il a réussi à imposer sa candidature aux présidentielles aux débris de l’ancienne armada stalinienne. Pas après-après-demain, quand Besancenot aura réussi à obtenir 1500 euros de SMIC pour tous. Non. Aujourd’hui.
Ou bien tous ces pseudos, tous ces joueurs de mirlitons et amateurs de fredaines n’ont rien à foutre de la crise écologique. C’est d’autant plus probable qu’ils ne savent d’ailleurs pas ce que c’est. Ce qui se passe sous nos yeux fatigués, somnolents, indifférents le plus souvent est la preuve expérimentale que la crise écologique ne fait pas partie du programme. De leur programme. Or elle est désormais tout le cadre. Celui dans lequel les autres fragments du réel s’inscrivent. Pour une fois, et à ma grande surprise, je dois confesser mon accord avec quelques paroles prononcées ce 24 mars 2010 par Michel Rocard, que j’ai secoué comme un vieux prunier une bonne dizaine de fois. Il a déclaré, et je cite de mémoire, que dans dix ans, ceux qui n’agissent pas pour limiter les effets du dérèglement climatique seront tenus pour des criminels contre l’humanité.
Mais je me reprends déjà. C’est aujourd’hui qu’ils sont criminels, et tous. Et tous ceux pour qui ont voté ceux qui ont voté. Criminels assurément, mais pas seulement contre l’humanité. Criminels contre la vie, contre ce qui bouge et vit encore sur terre. Assassins tranquilles des animaux et des plantes de la Terre. Tous. Qu’ils aillent se faire foutre.
PS : Je préviens ceux qui auraient envie d’écrire en commentaire quoi que ce soit en faveur des “climatosceptiques” que je ne laisserai pas passer. Leurs textes iront à la poubelle. Droit à la poubelle, que cela plaise ou non. Pour moi, une frontière est en train de naître, qui sépare et séparera toujours plus ceux qui considèrent le drame absolu qui se noue, et tous les autres. J’ai d’ores et déjà choisi ma place.
D’une façon bien plus générale, j’ose un rapprochement qui irritera plus d’un. Juste un rapprochement, car je sais bien que la situation en cours ne se peut comparer : elle est sans précédent. Un rapprochement, J’INSISTE LOURDEMENT. Je pense, j’espère de toutes mes petites forces réunies que j’aurais eu une attitude digne dans d’autres temps historiques. Je n’en suis hélas pas sûr, et ne le serai jamais, mais j’espère néanmoins, ce qui reste permis. J’espère donc que, face au danger fasciste, dans les années trente du siècle passé, je n’aurais pas hésité à empoigner un fusil et à tirer sur ces ordures. J’espère de même que, face à la flicaille stalinienne, j’aurais eu le bon réflexe de ceux qui, dans les rues de Barcelone, en mai 1937, défendirent la liberté au risque de leur peau. Ils périrent presque tous, il est vrai, mais au moins dans l’honneur et la conscience d’avoir été des hommes.
C’est beau, hein?