Hugo Chávez est un salaud (2)

Certains d’entre vous, qui me lisent de près, estimeront que je radote. Vrai. Et peut-être même que je devrais mieux me tenir ici, sur Planète sans visa. Peut-être. J’écris peut-être, car je pense peut-être. Mais finalement, tout bien considéré, je me sens comme obligé. Pourquoi ? Parce que nous devons inventer une manière neuve de penser, faute de quoi rien ne sera possible. Or, des centaines de milliers de personnes, en France, sont en rupture de ban avec le monde tel qu’il va. Mais ils sont entravés.

Parlons, pour simplifier, de mouvement altermondialiste. Pour aller vite. Des centaines de milliers de personnes sont donc en route, mais le chemin qu’ils parcourent est semé de mines qui s’attaquent à la partie de leur cerveau la plus utile au changement que j’attends et que j’espère. Des mines, qui explosent ou non. Mais qui, dans tous les cas, creusent des trous et laissent des traces. Je n’ai pas le temps de détailler ici tout ce que je voudrais vous dire. L’un des drames de la pensée critique, chez nous, tient à l’existence d’un puissant mouvement d’opinion parastalinien.

Ne poussez pas les hauts cris ! Oui, je remets ça une fois de plus. Mais il est certain qu’un journal comme Le Monde Diplomatique incarne parfaitement cet état d’esprit, qui absout une crapule dès lors qu’elle se réclame de la gauche et s’oppose aux États-Unis. Le président vénézuélien Hugo Chávez est l’icône de quantité de gens pourtant respectables, qui reviennent perpétuellement aux logiques qui ont prévalu lorsque l’Union soviétique s’opposait à l’Amérique. Et Chávez, je ne le dirai jamais assez, est un salaud.

Tant pis pour l’injure à chef d’État. Tant pis. Le 5 septembre, il y a exactement un mois, Chávez commençait une tournée triomphale dans le monde arabo-musulman. Il aura ainsi félicité le Libyen Khadafi, roi des droits de l’homme, avant d’aller saluer l’Algérien Bouteflika, maintenu au pouvoir par l’épouvantable camarilla des généraux de l’ombre, puis le despote qui règne sur Damas. La correspondante de la chaîne de télévision Al Jazeera, Dima Khatib, qui suivait le voyage, note dans un de ses papiers consacrés à l’Algérie : « Chávez parle d’une nouvelle autoroute que l’Algérie est en train de construire entre l’est et l’ouest du pays. Il se demande pourquoi le Venezuela ne fournit pas l’Algérie avec l’asphalte dont il a besoin pour achever l’autoroute ». J’ajoute que l’Algérie pourrait devenir un pays de passage pour le pétrole vénézuélien à destination de l’Europe. Beau cadeau, ne pensez-vous pas ?

Ce n’est rien ? En effet, rien encore. Voici la suite. Chávez a achevé son parcours à Téhéran, la ville des mollahs, des élections truquées, et de cette bombe nucléaire qui risque de tout faire exploser. Au moment du passage de Chávez, tout l’Iran était sous le choc du verdict électoral et des émeutes en faveur de la liberté. Mais pas Chávez. Non, pas le noble héros altermondialiste. Surtout pas lui. L’AFP, agence de presse française, rapporte comme suit le séjour sur place du Vénézuélien. J’avais d’abord songé à un extrait. Et puis non. Je vous livre la dépêche entière.

« TEHERAN — Le président iranien Mahmoud Ahmadinejad et son homologue vénézuélien Hugo Chavez, principal allié de Téhéran en Amérique latine, se sont engagés samedi à soutenir les « nations révolutionnaires » et les « fronts anti-impérialistes », a rapporté l’agence officielle Irna.

« Venir en aide aux nations révolutionnaires et opprimées et développer les fronts anti-impérialistes sont les deux missions principales de l’Iran et du Venezuela », a déclaré le président iranien à l’issue d’une rencontre avec M. Chavez, en Iran pour une visite de deux jours.

Téhéran et Caracas « doivent aider les nations révolutionnaires en renforçant leurs liens bilatéraux », a ajouté. M. Chavez.

Auparavant, ce dernier avait apporté son soutien au programme nucléaire civil de l’Iran. Vendredi, M. Ahmadinejad avait annoncé que son pays se moquait d’éventuelles sanctions internationales supplémentaires et poursuivrait son programme nucléaire à des fins énergétiques.

« Nous sommes sûrs que l’Iran, comme il l’a montré, ne renoncera pas à ses efforts visant à obtenir tous les équipements et structures pour utiliser l’énergie atomique à des fins civiles, ce qui est le droit souverain de chaque peuple », a dit M. Chavez cité par la télévision vénézuélienne.

« Il n’y a pas une seule preuve que l’Iran fabrique une bombe atomique », a dit M. Chavez à la télévision après son arrivée dans la capitale iranienne, dans la nuit de vendredi à samedi, en provenance de Damas.

« Bientôt, ils vont nous accuser nous de fabriquer une bombe atomique! », a-t-il lancé en allusion aux Occidentaux, en tête desquels les Etats-Unis.

Ces derniers soupçonnent l’Iran de chercher à se doter de l’arme nucléaire sous couvert de son programme civil, ce que Téhéran dément.

Le Venezuela travaille à un projet préliminaire pour la construction d’un « village nucléaire » avec l’aide de l’Iran, « afin que le peuple vénézuélien puisse compter à l’avenir avec cette extraordinaire ressource utilisée à des fins pacifiques », a poursuivi M. Chavez, l’un des premiers à féliciter M. Ahmadinejad pour sa réélection contestée en juin.

Selon l’agence iranienne Mehr, il s’agit de sa septième visite en Iran. Il s’était rendu auparavant en Libye et en Algérie et doit encore visiter le Belarus, la Russie, le Turkménistan et l’Espagne.

Lors de son dernier voyage en Iran en avril, M. Chavez avait signé un accord pour la création d’une banque binationale destinée à financer des projets irano-vénézuéliens. Les deux pays ont des projets de coopération dans plusieurs secteurs (défense, industrie, technologie) ».

Mon commentaire ? Tant que la maladie contagieuse appelée stalinisme – que j’appelle stalinisme – n’aura pas été réellement vaincue dans les esprits, nous errerons. L’opposé de ce stalinisme mental, c’est la liberté. Et l’écologie est synonyme de liberté. De libre recherche des meilleures solutions humaines pour que continue la vie. Et voici pourquoi je ressens le besoin d’attaquer une fois de plus Chávez la ganache.

Lula, grand couillon devant l’Éternel (sur les JO)

Vous avez entendu les nouvelles comme moi : les Jeux olympiques de 2016 auront lieu au Brésil, et non pas dans le Chicago d’Obama, et non pas dans le Japon des yakusas, et non pas dans le Madrid du vieux franquiste Juan Antonio Samaranch. Avant cette date, le Brésil accueillera dès 2014 la Coupe du monde de foot, et si après tout cela, le Parti des Travailleurs (PT) du président Luiz Inácio Lula ne reste pas au pouvoir un siècle au moins, ce sera à désespérer de la télé, des paillettes et des plumes dans le cul.

Le grand journal brésilien de Rio, O Globo titre sur toute la largeur de sa une : Lula, Obama ligou duas vezes do Air Force 1 para dar os parabéns. Ce qui veut dire que le président américain Obama a appelé deux fois Lula depuis son avion Air Force 1 pour féliciter l’ancien métallo de São Paulo. La messe est dite. L’ancien pauvre que fut Lula aura pleuré dans son mouchoir en direct live, à la télé, et le pire de tout, à n’en pas douter, est qu’il était sincère. Il n’y a rien de pire qu’un pauvre qui passe sa vie à être reconnu par les riches. J’ai quelques lumières sur le sujet.

Les JO vont coûter entre 12 et 20 milliards d’euros, mais le bonheur national n’a pas de prix. Je vous ai parlé plus d’une fois (notamment ici) du délire qui s’est emparé de ce grand corniaud de Lula. Son rêve si banal, son rêve si banalement cauchemardesque est de placer le Brésil dans le groupe des huit puissances majeures du monde. Il est en train d’y parvenir. Avec l’éthanol tiré de la canne à sucre – et de la sueur des crève-misère -, qui fait rouler les bagnoles. Avec le pétrole off-shore, dont les nouveaux gisements paraissent très prometteurs. Avec les 60 centrales nucléaires – 60 ! – programmées au cours des prochaines décennies. Avec les armes qu’il achète en priorité à la France par milliards d’euros. Avec le soja transgénique planté sur des millions d’hectares, qui remplit les poches des amis de la présidence et la panse de notre si cher bétail. Avec des barrages de plus en plus grands sur les principaux affluents de l’Amazone, fleuve des fleuves. Avec des routes transamazoniennes de plus en plus belles, de plus en plus larges, pour permettre de sortir le bois de nos placards et d’entrer les défricheurs.

Les paysans sans terre restent et resteront sans terre. La grande forêt ne pèse et ne pèsera de rien en face des lamentables plans de l’équipe au pouvoir. De rien, inutile de rêver. Le Brésil suit à la lettre la trace que notre Occident malade laissera dans l’histoire : celle du gaspillage effréné de ce qui reste. Celle du clinquant, de la fête sur le pont du Titanic. Rappelons à tout hasard que Lula est de gauche, et que tous les états-majors socialistes français lui ont déjà déplié le tapis rouge un nombre incalculable de fois. Rappelons la vérité, cela changera.

La grenouille à croc du Mékong (et monsieur Henri Proglio)

Je vous signalais en juillet une campagne mondiale contre six projets de barrages – criminels, forcément criminels – sur le Mékong, fleuve qui abreuve directement des dizaines de millions d’hommes et un nombre incalculable d’animaux et de plantes (ici). Le Mékong et ses environs sont l’une des dernières vraies grandes merveilles du monde. Il existe encore, entre Cambodge, Laos et Vietnam, des forêts tropicales intactes, qui cachent bien des mystères.

La preuve immédiate par le Programme du Grand Mékong, une aventure scientifique lancée par le WWF. Au cours de l’an passé, pas moins de 163 espèces nouvelles ont été découvertes par les équipes de Stuart Chapman, le directeur du programme (ici). Je dois dire que c’est à peine croyable. Parmi les 100 plantes, 28 poissons, 18 reptiles, 14 amphibiens, deux mammifères et une espèce d’oiseau trouvés dans cette wilderness tropicale, une mention pour une grenouille à croc, qui attend ses proies dans la boue. Ce que mange Limnonectes megastomias ? Éventuellement des oiseaux, et beaucoup d’insectes.

Parmi les autres splendeurs, les chercheurs ont pu nommer un gecko doté d’une peau de léopard qui semble tout droit venu d’une autre planète que la nôtre. L’oiseau, quant à lui, s’appelle Nonggang babbler (Stachyris nonggangensis) et il marche le plus souvent, ne s’envolant que lorsqu’il est réellement effrayé. Tout cela s’appelle, aux dernières nouvelles, la vie. Les chercheurs du Greater Mekong Program s’inquiètent déjà des effets du dérèglement climatique sur toutes ces nouvelles espèces. Ils ont sans doute raison, mais si on commençait par donner un coup de pied au cul à tous ceux qui défendent ici, dans les bureaux d’études et d’ingénierie, les désastreux programmes de destruction du Mékong ? Vous voulez un nom ? EDF, qui adore faire – et ne jamais défaire – des barrages. Oui, je sais, Sarkozy vient de donner les clés de ce géant à Henri Proglio, qui dirigeait auparavant cet autre géant – de l’eau – qu’est Veolia, nouveau nom charmant de la Générale des Eaux, beaucoup, mais beaucoup moins présentable.

La morale ? Y en a pas. La morale, c’est d’en trouver une, tournée vers l’action immédiate. Car les espèces qui disparaissent dans le trou noir creusé par les ingénieurs ne reviendront pas. Jamais.

Ma pomme sur Rue89

Je sais et je ne recommencerai pas. Ce n’est pas bien de parasiter Planète sans visa avec des nouvelles de mon livre, mais je vous laisse l’adresse d’un article du site Internet Rue89, où je suis – mon livre, pas moi – tout à mon avantage. Ce n’est pas tous les jours dimanche : http://www.rue89.com/2009/10/01/bidoche-les-ravages-de-lindustrialisation-de-la-viande

Par ailleurs, et tant que j’y suis, n’oubliez tout de même pas l’adresse du site dédié à mon bouquin Bidoche : http://bidoche.wordpress.com/ . Voilà.

Ces eucalyptus qui ressemblent aux pins du Morvan (apologue)

L’industrie contre la vie. L’industrie contre la nature. L’industrie contre les hommes. Voici un exemple de plus, d’une limpidité telle qu’elle n’échappera – je l’espère – à personne. Au Kenya, comme dans tant d’autres pays malmenés par la destruction à travers l’économie, le gouvernement a lancé il y a des dizaines d’années une politique imbécile de plantation massive d’eucalyptus. Je n’ai rien, a priori, contre ces arbres. En Australie et en Tasmanie, où ils sont nés, où ils se sont développés sans nous pendant des centaines de milliers d’années, ils peuvent être magnifiques, inoubliables.

Mais l’esprit de conquête, d’aventure et de lucre les a transportés en seulement deux siècles d’un bout à l’autre de la terre. Quel est le pays du monde qui n’a pas sa plantation d’eucalyptus ? Les plus modernes sont transgéniques, et servent de matière première aux biocarburants, je veux dire aux nécrocarburants. Revenons au Kenya, où les sécheresses se multiplient. Depuis une dizaine d’années, la catastrophe se rapproche (ici). Mais qui se souciait de l’eau en 1970 ?

Des subventions ont donc été accordées – et du fric très probablement détourné – pour que les rives des fleuves et rivières soient couvertes de grands eucalyptus. Comme certains pins chez nous, ces arbres poussent vite et donnent du bois en quantité. Mais, comme nos peupliers, ils pompent de manière démentielle dans les rivières et les nappes. Sur fond de sécheresse biblique, le gouvernement kenyan vient donc d’ordonner de couper les eucalyptus du centre Kenya qui se trouvent près de sources d’eau (ici). Wangari Maathai, prix Nobel de la paix, est entrée dans le débat, estimant que ces arbres qui menacent la biodiversité ont été plantés au Kenya « pour des raisons commerciales ». Dis-moi, ma chère Lulu d’Autun, cela ne te rappelle rien ? Morvan-Kenya, n’est-ce pas le même combat ?

Allez, je me sauve, on m’attend pour France-Culture.