! Qué me duele la cabeza ¡ Oui, que la tête me fait mal. Alors que le monde s’enfonce dans un chaos climatique sans issue apparente, ceux qui devraient être au premier rang avec moi préfèrent Der Rattenfänger von Hameln. C’est-à-dire, selon le célèbre conte des frères Grimm, le joueur de flûte qui conduisit à la rivière, où ils se noyèrent, les milliers de rats qui infestaient la vie quotidienne de la ville de Hameln.
On le sait, plus sûrement on l’a oublié, mais les habitants de Hameln refusèrent de payer la somme promise au musicien, et les conséquences en furent terribles. Je vois que les gens de la NUPES, ce rassemblement de gauche – PS, PCF, Verts – autour de LFI de M.Mélenchon, ne croient pas à la sagesse des histoires anciennes.
Deux mots suffiront ce soir. Un, la France est profondément de droite, et toutes les arguties mélenchonniennes n’y changeront rien. Rappel tout proche de nos mémoires : au premier tour de la présidentielle de 2022, Mélenchon a obtenu 7 712 520 voix sur 48 747 876 inscrits. J’y ajoute volontiers deux millions de Français en âge de voter qui ne votent pas, ou plus. Soit au total près de 51 millions de potentiels électeurs. Résultat : Mélenchon obtient un peu plus de 14% de la totalité, ce qui signifie tout de même que 86% des Français en âge de voter, malgré une campagne électorale vive et bien relayée par les télés, ne l’ont pas choisi. Et le calcul est à peu près le même pour la NUPES des élections législatives. Mélenchon nie ce qui est pourtant une évidence, car autrement, il serait contraint au retour dans le bac à sable, et il n’a plus le temps de jouer. C’est maintenant, ou jamais. Il lui faut contester le réel.
Deux, on ne peut être davantage à côté de la plaque. Le fol dérèglement climatique oblige, obligerait en tout cas à tout revoir. Et à mettre en cause la prolifération d’objets matériels et cette profonde aliénation par eux qui fait tenir le tout. Le problème est plus compliqué que dans les périodes précédentes, car le front de cette guerre décisive passe à l’intérieur de nous-mêmes, smicards compris. Or, et parce qu’il est l’homme d’un désespérant passé, Mélenchon et ses amis préparent une marche « contre la vie chère », au cours de laquelle on réclamera comme de juste plus de pouvoir d’achat, de manière à aggraver encore le dérèglement climatique. Si nous avions du temps devant nous, je me contenterais sûrement de commisération. Mais en ces temps si graves pour tous, je dois confesser que je les maudis. Que je maudis leur contribution nette – et elle est élevée – au désastre en cours.
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Un article mien publié en mai 2022
Comment parler aux smicards ?
Puisque c’est comme cela, parlons des législatives. Je me dois de préciser un point pour éviter des lettres pénibles de lecteurs. Je suis pour la distribution radicale des richesses, et il m’arrive de rêver encore d’un monde sans Dieu, ni César, ni tribun. Je me souviens très bien de ma mère, gagnant seule, pour elle et ses cinq enfants, quelque chose comme 800 francs par mois au début de 1968. Si donc quelqu’un a envie de me (mal)traiter, qu’il tienne compte de ces mots.
Et maintenant, voyons ensemble cette revendication de la gauche désormais unie : 1400 euros nets pour le smic mensuel. Qui pourrait être assez salaud pour écrire que c’est trop ? Hélas, le problème n’est pas celui-là. Du tout. D’abord, la question de la justice est universelle. Elle concerne aussi bien le sous-prolétariat français que les milliards de gueux de la planète, dont cette gauche ne parle jamais. Jamais. D’un point de vue planisphérique, les pauvres de chez nous sont les riches du monde. Ça embête, mais c’est un fait qui n’est pas près de disparaître. Que quantité d’immondes aient beaucoup, beaucoup plus, n’y change rien.
Donc, dès le premier pas, considérer le monde réel, et pas notre France picrocholine. Ensuite, réfléchir à cette notion largement utilisée dans les années 70, et malheureusement disparue : l’aliénation. Par les objets. Par la possession frénétique d’objets matériels qui déstructure l’esprit, rompt les liens de coopération, enchaîne dans une recherche jamais comblée de choses. Lorsque je tente de voir les êtres et leurs biens avec mes yeux d’enfant, je me dis fatalement que « nos » pauvres disposent de béquilles dont nous n’aurions jamais osé rêver : des bagnoles, des ordinateurs, des téléphones portables. Moins que d’autres ? Certes. Mais cette route n’en finira jamais.
À quoi sert de distribuer de l’argent dans une société comme la nôtre ? Même si cela heurte de le voir écrit, une bonne part de ce fric irait à des objets ou consommations détestables, qui renforcent le camp de la destruction et du commerce mondial. Qui aggravent si peu que ce soit le dérèglement climatique. Je crois qu’on devrait proposer tout autre chose. Un gouvernement écologiste, pour l’heure chimérique, s’engagerait bien sûr auprès des smicards.
Il s’engagerait aussitôt, mais en lançant un vaste plan vertueux. On créerait un fonds abondé sur le coût pour tous des émissions de gaz à effet de serre. L’industrie paierait, mais aussi le reste de la société, à hauteur des moyens financiers, bien sûr. Ce fonds garantirait à tous les smicards – et donc à leurs enfants – l’accès permanent à une alimentation de qualité, bio, locale autant que c’est possible. À un prix décent, c’est-à-dire bas.
Ce serait un merveilleux changement. La santé publique en serait sans l’ombre d’un doute améliorée. L’obésité, cette épidémie si grave, régresserait fatalement, ainsi que le diabète et tant d’allergies. Quant à l’industrie agroalimentaire, elle prendrait enfin un coup sérieux. Au passage, une telle volonté finirait par créer des filières économiques solides et durables. Car à l’autre bout se trouveraient des paysans. De vrais paysans enfin fiers de leur si beau métier. À eux aussi, on garantirait un avenir.
Parmi les questions les plus graves de l’heure, s’impose celle de la production alimentaire. Tout indique que les sols épuisés de la terre ne suffiront pas longtemps à (mal) nourrir le monde. La France, qui fut un très grand pays agricole, se doit d’installer de nouveaux paysans dans nos campagnes dévastées par la chimie de synthèse et les gros engins. Combien ? Disons 1 million. Ou plus. Le temps d’un quinquennat. C’est ainsi, et pas autrement qu’on aidera à faire face à ce qui vient et qui est déjà là. Le dérèglement climatique est une révolution totale.
Pour en revenir aux smicards, qui souffrent je le sais bien, sortons ensemble des vieux schémas. Inventons ! Faisons-les rentrer en fanfare dans cette société qu’ils n’auraient jamais dû quitter. Mais pas au son de la frustration et des sonneries de portables.