Comme certains le savent, j’ai écrit hier le premier épisode d’une série. Elle concerne France Nature Environnement (FNE), confédération d’environ 3 000 associations de protection de la nature en France. Un mastodonte, si vous voulez. Non, je me reprends, car le mastodonte, bien plus impressionnant encore que notre sublime éléphant, a disparu il y a des millions d’années. Je ne voudrais pas porter la poisse à FNE. Appelons cela un puissant regroupement. Et disons que mon article d’hier était une flèche tirée de mon carquois, puis décochée sur une poignée de bureaucrates.
Je dois avouer que je n’aime pas la bureaucratie. Et ajouter que je n’en ai pas fini. Le papier d’hier sera suivi dès lundi d’un deuxième. Et puis d’un troisième. Y aura-t-il un quatrième ? C’est bien possible. Mais si je ne continue pas ce vendredi, c’est simplement parce que je dois rassembler encore quelques informations, m’assurer qu’elles sont exactes, et puis écrire. J’aime écrire, certes, mais nul ne me paie pour cela. Je ne m’en plains pas, loin s’en faut, mais il faut de temps en temps s’en rappeler. Bref, j’ai besoin d’un court délai. Mais vous ne serez pas déçu du voyage.
En attendant, et cela n’a rien à voir, je me permets de vous signaler quelques livres qui traînent chez moi en ce moment. Je ne les ai pas tous lus, non, mais assez parcourus en tout cas pour vous les signaler, et même vous les recommander. Le premier est une livraison de la revue Ethnies, publiée par Survival International (45 rue du Faubourg du Temple, 75010, Paris). Ce numéro double – 33-34 – est consacré au lien rare créé entre Claude Lévi-Strauss et ceux qu’on finirait par appeler les Nambikwara, un peuple indien de l’Amazonie. C’est un ensemble d’articles et d’entretiens souvent passionnants, agrémenté d’un DVD documentaire de 46 minutes, À propos de Tristes Tropiques. J’ai déjà parlé de Lévi-Strauss ici, et n’y insiste donc pas. Cet homme est une respiration.
Autre livre, surprenant celui-là : Le Salon des berces (Nil, 18 euros), écrit par le grand paysagiste Gilles Clément. Inutile de le cacher, j’ai grande sympathie pour l’homme, que je connais. Mais j’ignorais qu’il écrivît aussi bien. Ce livre est un récit à la première personne, qui raconte l’installation de Clément dans un coin de vallée creusoise, à la fin des années 70. La maison familiale, dans la Creuse elle aussi, lui est désormais interdite à la suite de quelque épouvantable litige. Et donc, Clément cherche. Et avant tout un lieu susceptible de se transformer en jardin. La maison viendra après, sans permis de construire pendant des années. Il ne s’agit pas seulement d’un chant d’amour aux lieux qu’on choisit, mais aussi d’une chronique très concrète, parfois désopilante, de l’humanité rencontrée sur place. En bref, une bien bonne surprise pour moi.
Rapidos, je vous signale aussi la sortie d’un livre de Dédé Pochon, paysan des Côtes d’Armor, infatigable défenseur d’une agriculture durable. Le titre – Le scandale de l’agriculture folle – est un peu racoleur, mais on retrouve le personnage que l’on aime. Et son introduction donne à penser sur la totale révolution de l’agriculture accomplie en 60 ans en France. Dédé en a été un acteur enthousiaste, avant d’en devenir un critique féroce. Il ferait penser, sur un plan plus concret, à la mue opérée chez René Dumont à l’entrée des années 70 du siècle passé (éditions du Rocher, 15 euros).
Gilles-Éric Séralini, un scientifique qui étudie de près les OGM, publie de son côté un livre très intéressant, mais qui me semble, j’en suis désolé, mal édité. Je n’entre pas dans les détails techniques, qui sont d’ailleurs secondaires. Séralini pense que la médecine doit se renouveler de fond en comble et que sa priorité doit être, désormais, de « détoxifier » nos organismes, surchargés de poisons de tous ordres. Cette perspective est non seulement originale, mais aussi, visiblement, réaliste. (Nous pouvons nous dépolluer, éditions J.Lyon, 19 euros).
Enfin, je déguste à la petite cuiller un livre intitulé Grassland. Je suis navré, mais il est en anglais. Il décrit d’une manière admirable l’histoire écologique, et donc le massacre de la Grande Prairie américaine. Je le confesse, si j’avais eu à choisir un lieu pour vivre, j’aurais peut-être choisi celui-là, aux alentours de l’an 1500 par exemple. Mais on ne m’a pas demandé mon avis (Grassland, par Richard Manning, Penguin Book).
Sur ce, je me sauve pour mieux revenir.