Archives mensuelles : octobre 2012

Pour bien terminer l’année, quelques vieilles idées

Je vous parlerai de Chávez dans quelques jours. Au moment où je vous écris, je ne sais rien du résultat de l’élection présidentielle du Venezuela. On verra. On verra qu’il y a à dire, du point de vue de l’écologie, sur la ganache au pouvoir à Caracas. Et un peu, au passage, sur ces tristes comiques – Mélenchon and co – qui vont passer quelques jours sur place et reviennent éblouis comme l’étaient les habitués du voyage à Moscou, il y a 80 ans.

Il y a plus important. Je retrouve un texte écrit pour le jour de l’An 2008. Cela fera bientôt cinq ans. Je le remets en ligne, car je crois dans son importance. Attention ! lecteurs pressés, je ne me pousse pas du col pour autant. J’ai le sentiment, et cela je l’assume, qu’il contient ample matière à réflexion. L’action, ma foi, ne viendrait que par surcroît. Sait-on jamais.

Pour bien commencer l’année (une idée folle)

Ce que je vais vous dire ce 1er janvier n’a rien de fignolé. Je commence en effet à près de 17 heures, et je n’ai guère de temps, en réalité. Mais je suis poussé malgré moi. Rien de grave. Rien de léger non plus. Voici mon point de départ : s’il devait y avoir une priorité, une priorité véritable, quelle serait-elle ? Eh bien, ma réponse est celle-ci : il n’y a rien de plus urgent que de restaurer ce qui peut l’être dans le fonctionnement des écosystèmes naturels.

Je reconnais que, présenté de la sorte, cela ne vaut pas le champagne du Nouvel An. Mais il est certain que tout sera désormais plus difficile, à mesure que les prairies et les cultures, les rivières, les océans, les forêts, les zones humides, les savanes se dégraderont davantage. Il est temps, il est même bien tard pour rappeler que toute société humaine, tout projet de quelque nature que ce soit repose in fine sur la bonne santé écosystémique de la planète.

Le deuxième point est aussi évident. Il existe dans nos circuits financiers délirants des masses jamais encore assemblées de puissance matérielle. Cette dernière accroît en proportion la gravité de la crise écologique et se dissout dans des achats aussi intéressants que le Big Mac, le Rafale, la Kalachnikov, la voiture, l’autoroute urbaine, le téléphone portable, la télé à écran plat, la guerre en Irak, le salaire des bûcherons d’Amazonie, le salaire des planteurs de palmiers à huile, le check-up confirmant l’obésité universelle, la corruption, sans compter le pur et simple gaspillage sous l’une de ses dix milliards de formes. En bref, il y a de l’argent. Il n’y en a jamais eu autant, il n’y en aura peut-être jamais autant.

Troisième point : le travail utile socialement disparaît massivement. Qu’elle s’appelle chômage au Nord, économie informelle ou désoeuvrement ailleurs, l’inactivité « occupe » une quantité invraisemblable d’humains. Combien ? Aucune statistique ne permettra jamais de savoir quelle est la quantité de travail disponible sur terre. Je postule qu’elle est, pour la question qui m’intéresse, sans limites discernables. Si l’on y tient, je gagerai qu’au moins un milliard d’entre nous, peut-être deux, et qui sait davantage, pourraient travailler plus utilement, rapidement qui plus est.

Et alors ? C’est là, bien entendu, que tout se complique abominablement. Ce que j’entrevois n’a rien de secret. Il faut trouver un moyen de relier ces données indiscutables. Il faut trouver un biais qui permette d’utiliser une fraction importante de la richesse produite, de la distribuer dans de bonnes conditions, jusqu’à la plus petite communauté perdue, en échange d’un travail concret, au service de tous, au service de l’ensemble, au service de l’avenir commun.

Ce n’est pas la peine de protester encore. Laissez-moi préciser un peu. D’abord, il ne s’agit pas d’imposer. Ce travail servirait en priorité ceux qui s’y adonneraient. Si vous limitez la sécheresse ou l’inondation en tel point précis du globe par des travaux de génie écologique, qui en profitera d’abord ? Eux ou d’autres ? Non, il s’agit de proposer un salaire, peut-être un revenu familial garanti à qui accepterait de rétablir des équilibres rompus. Ici, ce serait par le développement de l’agro-écologie, au détriment des cultures industrielles et chimiques. Là, par le retour de la rivière aux règles hydrologiques éternelles. Donc, contre les grands barrages et l’irrigation au service de l’exportation. Ailleurs, par la reconstitution minutieuse de communautés végétales stables, par exemple sous forme de vraies forêts.

Un tel projet mondial est essentiellement utopique, j’en conviens. Il suppose des pouvoirs qui n’existent pas. Il impose une révolution planétaire qui donnerait, au passage, le pouvoir sur la terre aux paysans. Ruinant à jamais les restes si puissants de la féodalité, l’un des rapports sociaux les plus résistants qui soient. Mais d’un autre côté, avons-nous bien le choix ? Est-il simplement concevable de laisser la vie disparaître à une telle vitesse ?

Je reprends donc. D’abord, créer une idée, qui serve de drapeau à tous, au nord comme au sud. Une phrase suffirait, qui dirait : « Restaurons la vie sur terre ». Dans un premier temps, nous ne serions qu’une poignée derrière une telle proclamation. Mais ensuite, mais demain, mais dans dix ans ? Je crois profondément que nous devons recréer l’espoir. Soit un but magnifique qui rassemble enfin la jeunesse fervente du monde, et les vieux. Les petits-bourgeois effarés que nous sommes et les paysans du riz, au Sri Lanka ou aux Philippines. Les derniers peigne-culs du Tyrol et les gosses des rues de Bogota ou Rio. Les métallos de Detroit et les va-nu-pieds de Kinshasa. Les cadres tokyoïtes et les éleveurs de yacks du Tibet. Les Iakoutes. Les banlieusards. Les Yanomani. Les alcoolos de Moscou et Kiev. Les Bushmen. Les éleveurs de la brousse australienne.

Je crois pour ma part que l’humanité – au moins la partie la plus noble de l’humanité – attend sans le savoir une parole de reconstruction. Je suis même sûr qu’un message unique, répercuté d’un bout à l’autre de la terre, changerait radicalement la donne. À condition d’être ferme. À condition d’être patient. En se souvenant de tout ce qui a été tenté dans le passé, et parfois réussi.

Recommençons. Un, les écosystèmes. Tout n’est pas possible, car certaines destructions sont irréversibles. Mais la marge est géante. Il existe une plasticité de la vie, telle que nous pouvons espérer renverser le courant. Pas partout, non. Pas toujours, hélas. Il reste, néanmoins, que la puissance de feu des hommes, si affolante dans ses effets négatifs, peut être tournée en son contraire. Je pense profondément qu’on pourrait retrouver une partie de la fertilité d’antan. Assez, en tout cas, pour échapper au pire.

Deux, la richesse. La taxe Tobin était une sorte de plaisanterie. Il faut désormais acculer l’oligarchie qui tient les rênes de la si mal nommée économie. Ne plus rater la moindre occasion d’accuser ceux qui préfèrent l’argent à l’existence. Tout en clamant qu’il nous faut récupérer au moins 10 % de la totalité de la richesse produite chaque année. Je n’ai pas le chiffre exact en tête, mais le total se chiffre en milliers de milliards de dollars. Fou ? Raisonnable au contraire. Que représentent ces 10 % au regard de l’enjeu ? Vous, personnellement, ne renonceriez-vous pas immédiatement à 10 % – et bien davantage – de vos revenus en faveur de qui sauverait votre vie et celle de vos proches ?

Non, 10 % est raisonnable, au point dément où nous sommes rendus. Bien entendu, tout resterait à faire. Car nul pouvoir existant ne serait en mesure de gérer et de distribuer comme il convient une telle manne. Mais croyez-moi sur parole : les solutions apparaissent dans le cours d’une action. Pas quand on reste inutilement autour d’une table, la tête entre les bras.

Trois, le travail. C’est peut-être le plus difficile. Mais à coup certain le plus passionnant des trois points que j’évoque. Il s’agirait d’une sorte d’affranchissement de tous, au bénéfice de tous. Cela ne semble pas sérieux. Ça l’est. Je m’autorise un rapprochement, absurde tant tout est différent, mais qui rendra mon propos plus clair. Ceux qui ont osé penser la fin de la royauté et la République en 1750 étaient-ils seulement des fous ?

Je plaide pour un changement d’échelle, de valeurs, de combat. Je pressens comme certain qu’une mise en mouvement, par-delà les différences d’âge et de conditions, toucherait cette part généreuse de l’homme, celle qui peut et doit tout changer. Nous savons, pour notre malheur, que le monde sollicite sans relâche l’individualisme, l’envie, la laideur, la petitesse. Je suggère de nous tourner vers le reste, caché dans les replis de notre âme commune.

Bien entendu, une belle année 2008 à tous.

James Hansen, héros improbable pour temps impossibles

Je me répète : je ne suis pas là. Je suis ailleurs, quelque part, ailleurs. Mais ce qui suit était prévu avant mon départ, et je ne peux laisser passer de temps. Le rédacteur-en-chef de la revue suisse La Revue durable – Jacques Mirenowicz – me fait, vous fait la faveur de publier ici l’entretien que Susana Jourdan et lui-même ont mené avec James Hansen, et qui a paru dans le dernier numéro.

Un mot de la revue. Elle est si excellente – je précise que je suis fort loin d’être d’accord avec tout, à commencer par le titre, si discutable – que je ne peux que vous inviter, en confiance, à vous abonner. Si vous avez assez de sous, cela va de soi. Je laisse pour tous l’adresse sur le net de la revue (ici), ainsi que le PDF d’une lettre adressée aux grands-parents de la Terre, sur laquelle Jacques Mirenowicz a insisté (ici). À mon tour de me montrer décidé : l’abonnement à La Revue durable est un cadeau que vous vous faites à vous-même.

Et je passe à cet entretien avec James Hansen. Hansen est un être que je respecte sans détour, et que j’admire. Je n’admire pas souvent, mais alors sincèrement. Ce grand climatologue est né en 1941 et il dirige l’institut Goddard d’études spatiales de la NASA américaine depuis 1981. Le 9 novembre 1987, voici donc un quart de siècle, il lance au beau milieu d’un Sénat des États-Unis incrédule une bombe absolue : selon lui, les émissions de gaz à effet de serre émises par les activités humaines menacent toutes nos civilisations.

Les sénateurs s’en tapent, comme aussi bien l’on se doute. Il remet cela le 23 juin 1988 et, cette fois, ses propos font le tour du monde. Depuis, beaucoup de gaz ont coulé sous les ponts, et Hansen n’en finit plus d’alerter, conscient qu’aucun politique américain – ou d’ailleurs – ne prend le sujet au sérieux. En 2005, il annonce l’imminence d’un point de basculement au-delà duquel commence un autre monde, irréversiblement. L’administration Bush, au service des intérêts pétroliers, tente de le faire taire. Il continue. En 2009, ce papy si sage est brièvement emprisonné pour avoir protesté contre un projet de mine de charbon. Mais il ne peut plus arrêter. Pour cause. Sa cause est sacrée.

Je sais bien que l’emploi de ce mot ne peut que choquer les braves esprits cartésiens de notre vieille France. Je l’utilise à dessein. Bien entendu, rien n’indique avec une certitude à 100 % que James Hansen a raison. Peut-être se trompe-t-il en partie, cela ne me gêne pas de l’écrire, même si je sais la valeur de son jugement, appuyé sur des faits. Considérons le fond : des milliers de scientifiques ont forgé un consensus solide autour d’un constat sidérant : la stabilité du climat est menacée alors qu’elle a toujours été la garante, depuis des milliers d’années, de l’essor des civilisations humaines.

Face à cette perspective apocalyptique, il est au moins deux attitudes possibles. Le déni sous toutes ses formes, dont Claude Allègre illustre un excès pratiquement indépassable. Ou bien la mobilisation consciente pour réduire massivement, dès aujourd’hui, dès hier même, nos émissions. Car l’enjeu, voyez-vous, est sans commune mesure avec ce que l’humanité a eu à endurer dans son passé si tourmenté, guerres mondiales comprises. Si même, et je ne le crois pas une seconde, les sceptiques avaient raison, il serait bon, nécessaire, prodigieusement utile de reprendre en main les activités industrielles humaines, qui ont d’évidence échappé au contrôle.

C’est pourquoi je vous invite à lire, toutes affaires cessantes, l’entretien avec Hansen. Je vous précise que je mets le début de ce texte dans le corps même de cet article, mais que l’intégralité est cachée dans le document suivant, sur lequel il vous faut cliquer :james-hansen-larevuedurable-46.pdf.

Voici donc le début. Et souvenez-vous de la revue suisse.

Directeur de l’Institut Goddard d’études spatiales de la Nasa, le grand spécialiste du climat James Hansen le déplore : un gouffre sépare ce que les spécialistes du climat savent de ce que les décideurs et les populations des pays industrialisés comprennent de la situation. Inébranlable conscience morale, ce chercheur de très haut vol alerte depuis vingt-cinq ans ses congénères sur le péril que l’absence de prise en charge adéquate de la dérive climatique fait courir à l’humanité entière.
En vain pour l’heure, alors que chaque jour qui passe diminue les chances de l’espèce humaine de s’en sortir à bon compte. Lorsqu’en juin 2008, James Hansen s’adresse, en tant que « simple » citoyen, à une commission du Congrès des Etats-Unis, il espère in?uencer le successeur du sinistre George W. Bush. Son message : une hausse de température moyenne sur Terre de 2°C par rapport au niveau préindustriel est « la recette pour un désastre global ».
Or, ce but de contenir la hausse de la température à 2°C, qui est au cœur de l’Accord de Copenhague de décembre 2009… est en passe de devenir inatteignable. Tout n’est pas tout à fait perdu, insiste James Hansen, mais il faut prendre la mesure du danger et se déterminer à agir. Une voie de sortie – étroite – existe encore. Grand-père déterminé à ne pas laisser ses petits-enfants sans défense, il n’hésite pas à sortir de son statut de scienti?que « pur » pour expliquer et soutenir à nouveau ici, en son nom propre de citoyen concerné par l’avenir alors qu’il atteint le soir de sa vie, cette voie de sortie.

JAMES HANSEN/Il est encore temps de stopper la course à l’abîme

LaRevueDurable : Au vu de la politique internationale, l’objectif de limiter la hausse de température moyenne à +2°C apparaît désormais presque illusoire. Or, vous jugez qu’une telle élévation conduirait l’humanité au désastre.

Pourquoi ?

James Hansen : Les données sans doute les plus fondamentales qui illustrent que 2°C de hausse de la température par rapport à l’époque préindustrielle est un scénario pour un désastre, c’est l’histoire de la Terre qui les fournit. La dernière fois qu’elle était plus chaude de 2°C, au début du pliocène [il y a environ 5 millions d’années, ndlr], la planète avait une tout autre allure : le niveau de la mer était plus haut d’au moins 15 mètres. Un tel changement surviendrait bien sûr sur la durée avec une ligne de côte changeant sans cesse. Mais cela signi?e que toutes les villes côtières seraient sinon inhabitables, du moins soumises à d’énormes dommages économiques.
De nombreuses autres implications accompagneraient un réchauffement global de 2°C. Pour preuve, le signal des effets de la hausse de température actuelle commence déjà à se détacher du bruit de fond. Ce qui était un été caniculaire exceptionnel il y a cinquante ans, n’arrivant que 0,2 ou 0,3 % du temps, ou ne couvrant que 2 ou 3 % d’une région, a maintenant lieu environ 10 % du temps sur de vastes territoires.
En 2003, l’Europe de l’Ouest, surtout la France, a souffert d’une canicule correspondant à une anomalie de trois écarts types, voire plus, par rapport à la courbe moyenne normale des températures. L’été 2010, Moscou et une énorme région d’Europe de l’Est, d’Asie de l’Ouest et du Moyen-Orient ont vécu une anomalie de trois écarts types. L’été 2011, l’Oklahoma, le Texas et le nord du Mexique ont connu une anomalie de trois écarts types.

LRD : Et bien sûr, cette tendance va se poursuivre.

JH : Oui, parce que la planète est en situation de déséquilibre radiatif. C’est-à-dire que la surface de la Terre retient plus d’énergie (issue du soleil) qu’elle n’en renvoie dans l’espace. Les gaz à effet de serre provoquent ce déséquilibre parce que, dans l’atmosphère, ils agissent comme une couverture qui piège une partie des radiations de chaleur. Résultat : la planète se réchauffe. Chaque année n’est pas toujours plus chaude que l’année précédente, mais la moyenne des températures sur chaque décennie montre un réchauffement à l’œuvre, qui entraîne une hausse des épisodes caniculaires. Depuis trente ans, la distribution des anomalies glisse vers des températures plus hautes d’une quantité qui augmente à chaque décennie.
Cette tendance va se poursuivre : les anomalies de trois écarts types vont, au cours du siècle, couvrir des régions de plus en plus vastes. Et la hausse moyenne des températures aura des effets globaux majeurs : fonte des calottes de glace, poursuite de la migration des zones subtropicales chaudes et arides vers les pôles, extinction de très nombreuses espèces…

LRD : Ce qui est terri?ant, ce sont les points de bascule. Une hausse de 2°C signifiet-elle qu’on atteindra des points de rupture au-delà desquels il sera impossible de revenir en arrière, avec des conséquences tragiques sur les conditions de vie humaines ?

JH : C’est notre propos fondamental : +2°C conduira à coup sûr à dépasser le point de bascule de la stabilité des calottes de glace. Voilà pourquoi le niveau de la mer va monter. Le Groenland et l’Antarctique perdent d’ores et déjà de la masse au rythme de quelques centaines de kilomètres cubes de glace par an. A l’échelle globale, cela reste modeste : le niveau moyen des mers monte aujourd’hui de plus de 3 centimètres par décennie. Mais cela est très rapide au regard de l’évolution récente.

Les Verts, le WWF et le greenwashing (sur le cas Loiselet)

Je me tais quelques jours, confiant dans la capacité des Terriens à se passer de moi. Je vous laisse avec une petite nouvelle qui rassure sur l’état des associations écologistes officielles. Jeudi 27 et vendredi 28 septembre a eu lieu à Paris un colloque du WWF, intitulé « Quelle relance écologique de l’économie européenne » (ici). On dira ce qu’on voudra, ces gens connaissent la langue française et pratiquent avec délice la figure rhétorique connue sous le nom d’oxymore. Qui est l’affirmation, sous la forme de deux termes, d’une chose pratiquement impossible. L’exemple le plus souvent cité est celui de Corneille, dans Le Cid : « Cette obscure clarté qui tombe des étoiles ». Le WWF entend donc prôner une relance économique qui serait aussi écologique. Avec Total, Monsanto, et leurs magnifiques doublures ? Possible.

On me dit – je n’ai pas vérifié personnellement – qu’était présent le sieur Éric Loiselet, responsable du Comité d’orientation politique (COP) chez Europe-Écologie Les Verts (EELV). Ce machin est censé définir les orientations générales du parti dit écologiste. Il joue ainsi un rôle éminent dans le positionnement du mouvement sur des questions comme la Conférence environnementale ou le traité européen. Or Le Canard Enchaîné nous apprend que ce Loiselet est aussi le grand dirigeant adulé de la région Champagne-Ardenne. Ayant regardé de plus près, je puis vous dire que Loiselet est conseiller régional (ici) et qu’il a, bien entendu, été candidat aux élections législatives.

Un détail : Loiselet est un gracieux cumulard, mais lui est à la fois payé par l’impôt public, et par le privé. Il est également directeur conseil associé d’une grosse boîte américaine de lobbying, Burston-Marteller (ici), dont je retiens, parmi les très nombreux clients industriels, ces quelques noms : Philip Morris, Monsanto, Total, ainsi que la junte militaire argentine. Oui, Burston-Marteller a défendu les intérêts des fascistes qui s’étaient emparé du pouvoir après 1976, torturant et assassinant chemin faisant des milliers d’opposants. Pas grave. Il est vrai que le WWF-Argentine a longtemps été dirigé par un homme de la junte, le fasciste Martinez de Hoz. Il est vrai que le WWF a créé une crapuleuse table-ronde sur le soja soutenable (ici) – encore un bel oxymoron – qui profite à Monsanto, membre de la supercherie, et à tous les salopards du Paraguay, de l’Argentine et du Brésil qui ont planté du soja transgénique sur des dizaines de millions d’hectares, en lieu et place de la forêt ou du cerrado, une sublime savane de là-bas.

Dans ces conditions, je n’ai pas même le goût de vérifier la présence au colloque du WWF de ce Loiselet. Il y avait sa place, toute sa place.