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À quand un grand procès du nucléaire ?

Vraiment, c’est fou à lier. Et non, ce n’est pas une formule à l’emporte-pièces. C’est mon sentiment profond. Le nucléaire made in France est un scandale à côté duquel les autres pâlissent inévitablement. Mais résumons à très grands traits.

Le 6 mars 1974, Pierre Messmer, alors Premier ministre d’un Pompidou mourant, annonce un grand plan énergétique : la construction en 1974 et 1975 de 13 centrales nucléaires. D’octobre 1973 à mars 1974, le prix du pétrole a quadruplé. Panique à bord ! Comme il n’est pas question de ralentir la machine à détruire, mais au contraire d’accélérer, on décide un énorme investissement de 13 milliards de francs. Pour commencer !

Ce qu’on ne sait pas, ce qu’on ne veut pas savoir, c’est que Messmer n’est qu’un jouet entre les mains d’un lobby surpuissant : la commission dite PEON – pour « la production d’électricité d’origine nucléaire ». Elle existe depuis 1955, dans une opacité voulue, et regroupe tous ceux qui ont INTÉRÊT à développer le nucléaire. Outre des représentants de ministères, tous ingénieurs des Mines ou des Ponts, historiquement et définitivement défenseurs des aventures industrielles, on y trouve l’industrie – Saint-Gobain-Pont-à-Mousson, Péchiney-Ugine-Kuhlman, Alsthom, Empain-Schneider, EDF bien sûr – le Commissariat à l’énergie atomique (CEA).

C’est la fête au village atomique. EDF se propose d’imposer un chauffage électrique à trois millions de logements et habitations. Outre la première volée de réacteurs, Messmer promet la construction de quatre à six autres chaque année jusqu’en 1985. C’est là que naît le crime d’État, dont tous les coupables sont morts bien entendu. Ils sont tous morts dans leur lit, rosette de la Légion d’Honneur à la boutonnière.

Je ne peux bien sûr rapporter ici cette histoire profuse et indigne, car il me faudrait évoquer trop d’échecs, par exemple le si coûteux désastre de Superphénix à Creys-Malville, et les si grossiers délires de Giscard, président de la République, promettant aux dupes volontaires que la France deviendrait l’Arabie Saoudite de l’électricité.

La vérité ramassée de près de cinquante ans de mensonges, d’imbécillités diverses, d’erreurs conceptuelles et de si grandes faiblesses techniques, c’est que le nucléaire, dont le coût total est probablement inconnaissable, aura volé des centaines de milliards d’euros à l’avenir commun. Imaginons une seconde que ces sommes aient été investies dans le solaire et l’éolien. Bravo, les ingénieurs ! Bravo, les grands esprits techniques ! Et si je dis bravo, c’est qu’une telle banqueroute le mérite. Areva, croulant sous les dettes – la caisse publique y a englouti des milliards – est devenue Orano, sans de désendetter vraiment. EDF a une dette dont on camoufle une partie, qui doit dépasser les 50 milliards d’euros. Les vieilles centrales, dont on a rallongé la durée de vie sans l’ombre d’un débat, par simple signature, crèvent de vieillesse et de corrosions diverses. Et bien sûr, leur avenir flamboyant, appelé EPR, est probablement le pire fiasco de ces Pieds-Nickelés.

L’EPR finlandais d’Olkiluoto, vitrine commerciale d’EDF, a pris 13 ans de retard, et son coût est passé de 3,3 milliards d’euros à 12 au moins. Au moins, car il devait enfin démarrer dans quelques semaines, et il est de nouveau dans l’impossibilité de le faire. L’EPR de Flamanville, en Normandie, idem : douze ans de retard, un surcoût de 10 milliards d’euros, et un énième report d’ouverture annoncé par EDF il y a quelques jours. L’ancien président d’EDF Henri Proglio, vient de déclarer devant les députés, sans déclencher aucune réaction : « L’EPR est un engin trop compliqué, quasi inconstructible ». Ce qui n’a jamais empêché le même de venir parader sur le chantier de Flamanville – en 2013 par exemple – en compagnie de ses alliés et complices. Tout sourire, avec de sympathiques patrons comme Martin Bouygues.

Un dernier point et je vous quitte. EDF n’est pas même foutue de garantir à un pays auquel elle avait promis une corne d’abondance, qu’il n’y aura pas de coupures d’électricité cet hiver. Trop de ses vieilleries sont à l’arrêt, pour une maintenance qui s’éternise. S’il existait encore un souffle démocratique en France, ça se saurait. Ça se verrait, et l’on lancerait pour commencer un tribunal des peuples, qui au moins raconterait cette histoire et désignerait les coupables. Car coupables il y a. Et bien qu’à un niveau subalterne, il faudrait aussi y faire une place à l’inertie inqualifiable de l’opinion française. Est-ce trop tard ? Je ne le crois pas.

Mais où s’est donc planqué le mouvement antinucléaire ?

Je sais être, à ma manière, un vieux con. Pas la peine de se bercer d’illusions. J’étais présent – non physiquement, mais en esprit – à la première manif antinucléaire de l’histoire, en juillet 1971. Je n’avais pas 16 ans. Charlie, Charlie-Hebdo, qui devait longtemps après être décimé, soutenait – et organisait – de toutes ses forces le rassemblement. Grâce à Fournier, qui y travaillait, et qui fut l’un des tout premiers. La reproduction ci-dessous, pour une raison que j’ignore, est en noir et blanc. Le vert a disparu.

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J’ai ensuite été, je crois, de tous les combats importants. À Malville – 1977 -, à Plogoff – 1980 -. J’ai toujours su pourquoi je refusais cette sinistre aventure. Pour des raisons complexes, dont l’action discrète mais certaine de services policiers et militaires d’État, le mouvement antinucléaire s’est étiolé. Pas de malentendu : ses faiblesses intrinsèques l’auraient empêché, de toute façon, de l’emporter.

D’ailleurs, le mal était fait, après la funeste décision, en 1974, de lancer le programme électronucléaire. Lisons ensemble cette bluette de propagande : « Le 6 mars 1974, à vingt heures, Jean-Marie Cavada, journaliste et, par la suite, homme politique français, s’entretient avec Pierre Messmer. Le Premier ministre présente son plan énergétique qui vise à limiter la dépendance au pétrole à travers la construction d’un parc nucléaire d’une part, et une série de mesures de sobriété énergétique d’autre part, une véritable politique écologique avant l’heure ».

Il n’empêche que je m’interroge sur la tragique incapacité du mouvement actuel à tirer, devant la société française, le bilan de cinquante années de mensonges et de faillites en chaîne. N’oubliez jamais que tant de crétins, parfaits polytechniciens pourtant, ou supposées Grandes Intelligences – par exemple l’ancien président Giscard d’Estaing – juraient que l’électricité nucléaire finirait par être gratuite, ou presque. Surtout avec l’apparition du monstre Superphénix, projet abandonné en 1997.

Le chiffrage total, soigneusement dissimulé, est impossible à faire. Mais il suffira ici de quelques indications. En janvier 2012, la cour des comptes estime que le nucléaire a coûté 228 milliards d’euros depuis les années 50, auxquels il faut ajouter 55 milliards d’euros de recherches. Pas mal. Mais on n’inclut pas le prix du démantèlement des vieilles centrales, qui se chiffrera lui aussi en dizaines de milliards d’euros (voir l’article en annexe, publié l’an passé). La faillite est si somptueuse que l’État français, ultralibéral pourtant, renationalise aujourd’hui EDF, dilapidant ainsi 10 milliards d’euros de plus. EDF est une ruine infernale, qui a perdu 5,3 milliards d’euros au premier semestre 2022. Et sa dette approcherait les 50 milliards d’euros, alors que les essais d’EPR – les réacteurs de nouvelle génération – sont un puits sans fond, tant à Flamanville (Normandie) qu’en Finlande. Ne parlons pas du coût de l’enfouissement, des huit milliards – au moins – de subventions accordées à Areva-Orano, des 100 milliards de travaux de sécurité sur les vieux réacteurs.

L’argent n’existe pas pour toutes ces factures-là. Mais que s’en fout le Macron ? Il veut lancer, dans une sinistre fuite en avant, la construction de six EPR en France, pour un coût compris au départ – selon lui – entre 52 et 56 milliards d’euros. Voilà en quelques mots l’état des lieux. Et voici venue l’heure de me faire des amis supplémentaires. Que fait donc le réseau Sortir du Nucléaire, qui annonce regrouper 893 associations et 62661 personnes signataires de sa Charte ? Que fait Stéphane Lhomme, dont je connais la vaillance ? N’y a-t-il pas lieu de réunir tout ce qui peut l’être pour acculer enfin ceux qui nous ont plongés dans cette folie ? Et ces vieux briscards, comme Pierre Péguin, des Cévennes ? N’en-ont ils pas un peu marre de radoter sans jamais marquer des points ? Je ne suis pas en train de juger, malgré les apparences. Ce que je souhaite de toutes mes forces, c’est le rassemblement et le renouveau. Il y a là un alignement de planètes. Il y a là, avec la crise énergétique, une occasion historique de mettre en cause sur le fond les décisions prises contre nous et contre l’avenir commun. Alors oublions ce qui doit l’être, ¡ y adelante !

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Ci-dessous, en annexe, un mien article publié l’an passé


La grandiose histoire du démantèlement (nucléaire)

Paru le 4 août 2021

Brennilis ! En 1962, les amis si chers du Commissariat à l’énergie atomique (CEA) bâtissent en pionniers une centrale nucléaire 100 % française, au cœur des monts d’Arrée, en Bretagne. En 1985, on en commence le démantèlement. Coût prévu : 19,4 millions d’euros. Hi, hi ! Dans un rapport de 2005, la Cour des comptes relève le montant final à 480 millions d’euros, soit 25 fois plus.

Mais ce n’était rien. Le 15 juillet 2021, le département du Finistère crache une nouvelle estimation : ce sera 850 millions d’euros. Pourquoi pas le milliard ? Allons, ce sera pour la Noël. Et la fin des travaux est annoncée pour 2040, soit cinquante-cinq ans après leur début. On se moque, certes, mais le moyen de faire autrement ? À l’autre bout de la France, l’ancien réacteur Superphénix, qui promettait la lune, le soleil et cinq tonnes de caviar par habitant. Arrêté en 1997 sur ordre de Jospin, dans le cadre d’un accord Verts-PS, il est lui aussi en plein démantèlement.

Au moment de l’euphorie – 1976 –, nos grands experts parlaient d’un coût de 4 milliards de francs de l’époque. À l’arrivée, on s’approchait à petits pas de 30 milliards. À l’arrivée ? En 1998, le Sénat écrivait dans un rapport injustement oublié : « Le coût de construction et de fonctionnement de Superphénix a dépassé les estimations initiales. Dans son rapport de janvier 1997, la Cour des comptes l’a évalué à 60 milliards de francs. » Sans la déconstruction, cela va de soi.

14 tonnes de plutonium et 38 000 blocs de béton au sodium

Ah vacherie ! On parle au début, pour cette dernière, de 2,5 milliards d’euros (16,5 milliards de francs) et d’une fin de chantier en 2023. Mais en 2007, ce sera 2027. Faut les comprendre, les hommes de l’art : il reste alors dans l’engin 14 tonnes de plutonium et 38 000 blocs de béton au sodium.

Des centaines de prolos et de techniciens démontent, dévissent, déconnectent, déchargent du combustible irradié dans une saine ambiance : des inspections officielles montrent que le personnel, sur place, n’est pas formé aux situations d’urgence, et que l’organisation du chantier ne permet pas une intervention efficace des secours. EDF sifflote et promet.

En 2019, et c’est formidable, on s’intéresse à la cuve, qu’il s’agit de découper. Le couteau à beurre n’étant pas disponible, on envoie au front des robots, dont un certain Rodin. Damien Bilbault, directeur du site : « La cuve de Superphénix est la plus grande du monde. Les 20 cuves des réacteurs de 1 300 MW du parc français pourraient y entrer en volume. »

Et il ne faut quand même pas oublier, concernant la grande cuve, qu’il y avait deux bouchons à faire sauter. Croix de bois, croix de fer, tout sera achevé en 2030, mais pour plus de sûreté, on fait valoir qu’il existe une autorisation d’exploiter un site nucléaire qui court jusqu’en 2035. En juin 2021 – hourra la France ! –, on a réussi à retirer l’un des deux bouchons. Encore une poignée d’années, et la cuve sera entièrement débouchée. ­Champagne.

Combien faudra-t-il provisionner encore pour démanteler à peu près le site de Superphénix ? Secret d’État, mais Charlie révèle ici que cela coûtera bonbon. Or, et bien que la presse docile ne le dise presque jamais, le nucléaire est en faillite parce qu’il est une faillite. EDF a une dette estimée à 42 milliards d’euros – plus ? – et s’est trouvée obligée de réclamer une durée de vie de quarante ans pour ses vieilles centrales, au lieu de trente. Puis cinquante.

Il n’est qu’un avenir possible : les nouveaux réacteurs EPR. Mais les prototypes sont des gouffres sans fond, de la Finlande jusqu’à la Normandie, et ceux installés dans le paradis totalitaire chinois ont de sérieux soucis, bien planqués par la police d’État. Il va de soi que si le nucléaire était privé, il aurait déposé son bilan depuis de longues années. Mais comme le nucléaire est, depuis les origines, une entreprise publique, financée par la société, il va falloir songer à se cotiser. Roubles d’avant 1917, s’abstenir. ●

Le nucléaire, l’Ukraine et les sales cons

Vous le savez sans doute, sauf si vous avez coupé tous les fils : ça craint. Les Russes de Poutine accusent les Ukrainiens de Zelensky – et réciproquement – de tirer à l’arme lourde sur la centrale nucléaire de Zaporijjia, la plus grande de toute l’Europe. On commence à se demander si tout cela ne va pas se transformer en un nouveau Tchernobyl, en pire peut-être. Pas seulement les opposants de toujours et de chaque minute, comme moi, mais également les nucléocrates, y compris Français, qui ont lancé ce minable défi à l’aventure humaine il y a quelques décennies.

Les cons. Désolé, je ne vois d’autre mot pour désigner ces truffes. Les grands ingénieurs des Mines ? Des cons. Les anciens patrons d’EDF depuis les années soixante ? Des cons. Pierre Messmer, qui lança en 1974 – il était Premier ministre – le “grand” programme électronucléaire français ? Un con. Giscard d’Estaing, alors président de la République, promettant en 1980 que grâce à Superphénix, la France deviendrait l’Arabie saoudite de l’électricité nucléaire ? Un con.

Ils ont tous contribué à créer une industrie qui nie sans détour l’homme et ses petitesses, l’histoire, les sociétés. La centrale nucléaire de Zaporijjia – six réacteurs – a été bâtie entre 1985 et 1995, et se retrouve déjà sous le feu d’une guerre sans merci. En France, l’usine de retraitement de La Hague a été mise en service en 1966, après une opération-mensonge qui fit croire aux habitants qu’on construisait non pas un monstre, mais une usine de casseroles. La Hague produit surtout des déchets, promis à une durée de vie qui nous rapproche de l’idée d’immortalité.

La France, en seulement 25O ans. La révolution française et ses guerres, Napoléon premier et ses guerres, Napoléon III et ses guerres, la boucherie de 14-18, le désastre absolu de juin 1940. Et ils ont construit dans notre dos des cibles derrière lesquelles nous sommes. Ah ! les cons.

Ce nucléaire qui nous tant menés en bateau

Le nucléaire ruine la France après lui avoir constamment menti. On cherche en ce moment un remplaçant au P-DG d’EDF, Jean-Bernard Lévy, et on ne le trouve pas, car la place ressemble désormais à une bombinette. Oh, Dieu du ciel, quelle arnaque. En mars 1974, ce grand corniaud de Pierre Messmer, Premier ministre d’un président mourant – Pompidou -, responsable de tueries de masse jamais dénoncées au Cameroun à la fin des années Cinquante, annonce un vaste plan. Il s’agit d’investir 100 milliards de francs de l’époque en dix ans, de manière à construire un parc unique au monde de plus de 50 nouveaux – il en existe alors 6 – réacteurs nucléaires.

Qui a décidé dans notre dos à tous ? La (presque) secrète commission PEON, farcie d’ingénieurs des Mines, qui savaient construire du pouvoir concentré, qui leur appartiendrait pour une relative éternité. Ces gens-là promettaient la Lune, une énergie surabondante, pratiquement gratuite à terme, qui ferait de la France, comme l’annonça Giscard d’Estaing dans ces termes, une Arabie saoudite de l’électricité.

Le temps a passé et la totalité de ces salauds a échappé à tout jugement, tout procès, aidés par une presse servile, achetée par des centaines de pages de publicité payées par Cogema, puis Areva, puis Orano, sans oublier bien sûr EDF. L’échec est si vaste, si irrémédiable que l’État français, ultralibéral pourtant, vient de renationaliser EDF, perdant cette fois 10 milliards d’euros de notre bas de laine, après l’annonce d’une perte colossale de 5,3 milliards d’euros au premier semestre 2022. Si EDF était privée, les amis, cela fait beau temps que la clé aurait été placée sous le paillasson. On parle d’une dette qui approcherait pas à pas de 50 milliards d’euros que l’entreprise n’a aucune chance de rembourser avant la saint-glinglin. D’autant que les essais d’EPR – les réacteurs de nouvelle génération – sont un puits sans fond, tant à Flamanville (Normandie) qu’en Finlande. Ce qui n’empêche le lobbyiste Macron de lancer, dans une fuite en avant totale, la construction de six nouveaux réacteurs EPR en France. L’aventure, c’est l’aventure. L’aventure, c’est fun, quand c’est la société qui paie contre sa volonté.

Il faut vraiment que la société soit en catalepsie pour accepter de tels désastres annoncés. Cela durera-t-il ? Mystère. En 2011, j’ai eu le bonheur d’écrire 40 articles sur le nucléaire dans Charlie. Pour un hors-série que je vous joins ci-dessous. Je n’ai pas tout relu, et il est probable qu’il y a des scories et des erreurs. Mais tel qu’il est, ce document disait la vérité pendant que tant d’autres, savants comme tout, répétaient boniments, approximations et mensonges. Vous, je ne sais, mais moi, ça me fait réfléchir un peu.

PS du 1 août 2022 :

Dans ma précipitation à finir ce texte avant d’aller me coucher – tout arrive -, j’ai oublié bien des choses. Car je n’ai pas parlé de la situation actuelle des réacteurs nucléaires de France. La moitié d’entre eux – sur un total de 56 – sont à l’arrêt. Pour cause de maintenance ou…de sécheresse, qui abaisse le débit des fleuves et empêche le refroidissement des centrales.

Ce n’est pas tout. Le parc actuel est une ruine. On avait promis une durée de vie des réacteurs de trente ans, mais évidemment, on a changé d’avis en route. Plusieurs fois. D’abord trente et même vingt-cinq ans. Ensuite un peu plus. Puis quarante ans. Puis cinquante. Et l’on parle désormais de soixante. Or ces si vieilles choses se fissurent et posent problème. L’hiver prochain sera rude, à cause du gaz jusqu’ici importé de Russie, mais aussi, bien qu’on ne le dise pas, de l’incurie crasse des responsables du nucléaire.

Dans l’état de panique qui est le leur – le gouvernement ne TROUVE pas de successeur au patron d’EDF Jean-Bernard Lévy, touché par la limite d’âge -, il faut avant toute chose camoufler l’état des lieux. Opportunément, l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) vient d’accorder à EDF un surprenant blanc-seing pour « gérer » les graves phénomènes de corrosion constatés dans les centrales les plus vieilles.

Et ce n’est pas tout. Le démantèlement des centrales débranchées est une farce macabre, de Brennilis – réacteur « d’essai » dans les monts d’Arrée (Bretagne) – à Superphénix, dans l’Isère. C’est une bombe à retardement technique, économique, écologique, politique. Qui pèse son poids de dizaines, voire de centaines de milliards d’euros. Les nucléocrates au pouvoir s’en tapent, ils ne seront plus là pour assumer les conséquences de leurs actes.

Et ce n’est pas tout : la question des déchets n’est nullement réglée. Ces pauvres ingénieurs, si minablement ingénieux, entendent imposer leur loi à des menaces qui brilleront de leurs mille feux pendant des centaines de milliers d’années.

Bon, cette fois, stop.

N’oubliez pas le cadeau ci-dessous.

Vite, un cadeau

Il y a dix ans, en 2011, j’ai écrit tout seul un vaste ensemble d’une quarantaine d’articles sur le nucléaire. Avec plein de dessins – qui ne sont pas de moi – et une couverture avec un dos cartonné. Je l’ai rouvert, mais je ne l’ai pas relu. Je sais juste que j’en reste encore fier. Attention ! Je ne crois pas être du genre de coq qui se place en haut du tas de fumier pour dominer son petit monde. La fierté, ce n’est pas le rejet de l’autre, c’est le sentiment du devoir accompli. Il y a dans ces textes, car je m’en souviens un peu, quantité d’infos qui ne circulent pas. Y compris sur la faillite financière du monstre. Il y a dix ans. Ou sur les conditions effarantes de la constitution d’un empire français de l’atome.

Comme je dispose d’un PDF de ce machin-truc-chouette, je me suis dit que cela pourrait plaire à quelques-uns d’entre vous d’y jeter un oeil. ¡ A galopar ! Hasta enterrarlos en el mar.