Sur le gâtisme intellectuel (de Pascal Bruckner à Jacques Julliard)

Je précise de suite que je ne vise pas l’âge des personnes que je vais attaquer. Mais leur état d’esprit, ce qui n’est déjà pas si mal. Voyons le premier. Pascal Bruckner. Je n’ai rien lu de lui, sauf ce si mauvais livre intitulé Le Sanglot de l’homme blanc (Tiers-Monde, culpabilité, haine de soi), au tout début des années 80. Je me souviens de la prose grotesque d’un homme blanc bien né, qui ne supportait plus, pauvre ange, que l’on s’interroge sur un monde où une fillette peut vendre son cul à dix ans tandis qu’un bavard du Nord peut gagner tout l’argent qu’il veut en refilant quelques lignes à un journal obèse.

Bruckner attaquait – je n’ai pas rouvert le livre – le tiers-mondisme, idéologie très prégnante dans les années soixante du siècle passé. Et elle avait ses (nombreux) ridicules, je n’en disconviens pas. Et elle devait être critiquée, et elle devait disparaître, j’en suis d’accord. Mais le fond est ailleurs. Le fond est que beaucoup de ses tenants étaient révulsés par le sort fait aux miséreux. Et voilà ce qui n’aura jamais effleuré un Bruckner. Il officie dans ce pitoyable journal qu’est devenu Le Nouvel Observateur, et vient, dans le numéro 2376 du 20 mai 2010, de rendre compte d’un livre sur le climat, écrit par le mathématicien Benoît Rittaud (Le mythe climatique, Le Seuil). Bah ! ce n’est que prétexte à dire que toute cette affaire climatique n’est que billevesée. Car, rions, rions, pour le Giec et ceux qui croient en sa « climatomancie », le « réchauffement, c’est le refroidissement ».

Il est assez incroyable tout de même que la parole soi-disant intellectuelle soit offerte à de tels sots, à de si considérables ignorants. Bien sûr, Bruckner ne sait rien. Mais comme les autres non plus, et que notre homme a son rond de serviette posé en travers des colonnes de l’hebdomadaire, on lui laisse tout écrire. Le livre de Rittaud a été lu par Sylvestre Huet, journaliste scientifique sans tache, et voici ce qu’il en dit: « Les sources de Claude Allègre sont de plus en plus fantaisistes, comme le livre de Benoit Rittaud (Le mythe climatique au Seuil) qui n’a rien d’une publication scientifique (il suffit de lire les pages 98 et 99 pour se rendre compte que ce mathématicien ne sait même pas que les cycles de Milankovitch sont considérés par les paléo climatologues comme la clef explicative des bascules climatiques depuis le début du quaternaire, et que les GES ne font qu’amplifier ces bascules mais ne les provoquent pas. C’est pure invention que de prétendre qu’ils ont dit le contraire, pourquoi Rittaud reprend-il ce mensonge de Claude Allègre ?). En outre, Benoit Rittaud invoque le « Rasoir d’Occam » pour traiter ce sujet et donc propose de « choisir » entre l’influence de la mécanique céleste (donc de l’ensoleillement) sur le climat de la Terre et celle de l’effet de serre modifié (naturellement dans le passé ou par l’homme aujourd’hui) pour expliquer un changement climatique. Qu’il ne lui vienne pas à l’esprit que la seule climatologie scientifique est celle qui prend les deux phénomènes en compte et tente de quantifier leurs parts respectives dans l’évolution du climat démontre son absence totale de crédibilité. Mais ce mathématicien ne sait peut-être pas que l’effet de serre est un phénomène physique reproductible en laboratoire et mille fois vérifié ».

Vous pensez bien qu’un Bruckner se contrefout des cycles de Milankovitch. Que ferait-il d’un tel fardeau ? Dans Libération, en janvier 2010, il signait une tribune pour dire la même chose, en plus crétin peut-être, ce qui frôle l’exploit. Citation : « Depuis quelques semaines, l’Europe, l’Amérique du Nord, la Chine subissent les assauts d’un hiver glacial. Le thermomètre est descendu à – 20° près de Paris, à – 41° en Norvège, à – 21° en Ecosse, à – 45° aux Etats-Unis, la Floride grelotte, le Royaume-Uni est paralysé par des chutes de neige comme il n’en a pas connu depuis trente ans, partout les transports sont paralysés ou retardés, de nombreuses personnes décèdent, les réseaux d’électricité peinent à fournir l’énergie. Bref, nous n’avons jamais eu aussi froid depuis qu’on nous alerte sur les effets dramatiques du réchauffement ».

Ce n’est pas même le café du Commerce, où il se dit des choses plus intéressantes. C’est madame Michu, son cabas sous le bras, et qui peste contre le retour du froid en hiver. Mon Dieu ! si bas. Un autre qui vaut bien Bruckner – peut-être se seront-ils causé ? -, c’est Jacques Julliard, l’un des directeurs du Nouvel Obs. Il est considéré, je vous le jure bien, comme une autorité morale et politique. Et dans le monde tel qu’il est, tombant en miettes explosives sous nos yeux, c’est un fait qu’on juge clairvoyant celui qui n’est que pauvre borgne au royaume des aveugles. Que voit un borgne ? C’est la bonne question. Il est certain que Julliard n’a jamais pris le temps de lire un seul ouvrage sérieux sur la crise écologique. Cela se saurait, il en aurait fatalement parlé. Julliard nie par le silence, l’ignorance et finalement l’incompétence l’événement le plus important de l’histoire humaine.

Lui aussi a ses côtés madame Michu. Dans le même numéro 2376 du Nouvel Observateur, il reprend l’antienne de Bruckner, qui doit bien être un « cher ami ». Voici : « Duflot, la gaucho-centriste environnementale, qui ne parle plus actuellement de réchauffement climatique, parce qu’en ce printemps pourri elle risquerait de se faire lyncher ». On aura remarqué comme moi que c’est écrit sans y toucher. Il ne dit pas que.  Il laisse le lecteur faire le travail. Il ne prétend rien, il constate. Moi, j’affirme qu’il lance un clin d’œil à ses lecteurs les plus béotiens. Si le printemps est pourri, hein, qu’est-ce que c’est que cette histoire de réchauffement, hein ?

Mon Dieu ! j’aimerais les plaindre. Mais enfin, et pour être franc, je les exècre. Ces intellectuels que l’on nous présente comme des universalistes ne sont que de pauvres « provincialistes » de la pensée, qui n’auront jamais franchi le périphérique entourant leur lot de connaissances. La science, l’écologie et les écosystèmes, la biodiversité, les océans, les animaux ? Pouah ! Parlons plutôt de l’individu-roi – avec Bruckner – ou de la préparation des élections de 2012, 2017, 2045, 2125 et 2748, avec Julliard. Ces grands personnages, donc, regardant de leur fenêtre le temps qu’il fait, pensent à quel point nous avons froid. Et donc à quel point on nous raconte des salades. On n’ira pas beaucoup plus bas dans la sottise accomplie. Car nous ne sommes plus depuis longtemps dans la pensée. Un homme « cultivé », ayant accès aux livres, qui ne sait pas faire la différence entre le temps qu’il fait à Paris, ou en France, ou même en Europe, et la température moyenne du globe telle qu’exprimée par des mesures objectives prises depuis 130 ans, mérite-t-il la moindre considération intellectuelle ? Moi, je crois sincèrement que non.

Selon les données du National Climatic Data Center (NCDC), le mois d’avril 2010 a été le plus chaud sur terre depuis 1880, année des premiers relevés. Je précise que nul ne conteste ces chiffres, pour la raison qu’il s’agit de relevés automatiques, ne dépendant d’aucune volonté humaine. Ce qu’on appelle des faits. Mais de quel poids comptent des faits en face des fulgurances d’un Pascal Bruckner ? 2010, année des intellectuels.

25 réflexions sur « Sur le gâtisme intellectuel (de Pascal Bruckner à Jacques Julliard) »

  1. Le nouvel observateur qui a les yeux de ses grand-parents !
    Et Alzamémère …

    J’espère au moins que ceux qui lisent ces torche-culs ont la décence de les voler .

  2. Bruckner a publié en 1975 un livre sur Charles Fourier, pas sur Joseph. 😉 (et Stan de dire que ça l’aurait peut-être « transformées » !)

    Pour contester les chiffres du NCDC de la NOAA, c’est simple, il suffit d’aller sur NEO, Nasa Earth Observations et de comparer les cartes. Pas vraiment la même chose. Quant à comparer les mesures du réseau de stations actuel, déjà fort critiquable (nombre et répartition des stations variables dans l’espace et le temps ; « cherry picking » ; état et positionnement du matériel de mesure ; corrections des données la plupart du temps tenues secrètes…) avec celui de 1880, c’est de la science un peu fantaisiste. Cela étant dit, depuis cette dernière date, il est clair que la Terre s’est globalement réchauffée. Dans des proportions qu’on ne peut connaître précisément, mille fois hélas.

  3. nous sommes dans la merde avec des gens comme ça.
    c’est pas possible d’être aussi cons sinon qui se fassent payer pour désinformer les populations afin que celles ci continuent d’aller dans le mur car quelque part cela arrange la population de croire que tout va bien cela leurs permet de continuer à polluter et à consommer, car je ne peux pas croire que l’on puisse encore nier le rechauffement lorsque l’on est honnête et sain d’esprit.

  4. « Ces intellectuels que l’on nous présente comme des universalistes »
    Non.
    Ce sont des ânes que l’on nous présente comme des intellectuels.
    Hélas.

  5. On les écoute parce qu’ils déculpabilisent tous ceux qui n’attendent que ça. Mais dans quelques années, on ne parlera plus d’eux. Ils n’en valent pas la peine.

  6. Je ne vois pas pourquoi se préoccuper du Point, du nouvelle observateur de l’express. Ces parutions ressassent toujours les mêmes rengaines et sortent des tiroirs leurs leaders d’opinion comateux.
    Autant lire Spirou…pour la fraîcheur.

  7. oui mais le mal sera fait et nous serons tous dans le même bateau ou presque ?……
    Il est a peu près sur que les riche aurons toujours un peu plus de temps que les pauvres.

  8. Bruckner ? Julliard ? Rittaud ? lorsque le dérisoire rejoint le déni qui lui même rejoint le médiocre.
    Par contre contrairement à celui de Rittaud voici un livre à lire il est de Franz Broswimmer, « Une Brève histoire de l’extinction en masse des espèces », traduction revue par Jean-Pierre Berlan, éditions Agone, 2010
    Il m’étonnerait fort que l’on en parle dans les médias aux ordres. C’est à dire la quasi totalité.

  9. @Bernhard. Bah euh… de rien ! De quoi, en fait ?

    @Henri. Merci de signaler le livre de Broswimmer. Savez-vous s’il s’agit d’une simple réédition d' »Écocide » ou bien si elle a été augmentée, modifiée ou qqch de cet ordre ? Merci.
    « contrairement à celui de Rittaud » : vous l’avez donc lu !

  10. Hacène,

    C’est une réédition d’Écocide. Je dois avouer que, disposant des deux livres, le texte publié par Agone me laisse perplexe. Sa nouveauté tient dans une préface de Jean-Pierre Berlan, homme on ne peut plus estimable, certes. Et il a relu et revu la traduction française. N’ayant lu qu’Écocide, je ne juger de l’apport. Deux choses sont sûres. Un, Agone n’a pu joindre le traducteur d’Écocide en français, Thierry Vanès. Deux, le premier objet-livre était bien plus beau. Mais il devait, c’est vrai, être épuisé, ce qui privait les lecteurs d’un excellent ouvrage.

    Fabrice Nicolino

  11. Merci Fabrice. Probablement une réédition à la faveur de l’année de la biodiversité, à même de favoriser des ventes. Parce que sinon, pour les rares qui auraient acheté ce livre de 2003 plutôt qu’un autre éventuellement plus récent, il en reste des exemplaires disponibles, par exemple sur Amazon…

  12. « ecocide » est encore disponible en librairie; n’est ce pas mieux de faire vivre les librairies et le commerce de proximité que de commander ses livres par internet?

  13. @Véro. Évidemment. C’était juste pour dire que l’ancienne édition est encore disponible. Je n’ai pas d’autre moyen de le savoir que de jeter un oeil sur le commerce en ligne. En tout cas, je ne sais comment voir depuis mon bureau qu’un livre est commandable en librairie, sans appeler telle ou telle. S’il y a un moyen, merci de le faire savoir.
    Librairie n’est pas toujours synonyme de commerce de proximité cependant. Loin s’en faut. Pauvre Province parfois…

  14. Comme tous les humains, leur esprit est plein de mythes et il nous font croire qu’ils sont cartésiens ! Ils le croient eux-mêmes qui se prennent pour des « intellectuels ». Au moins, Mme Michu ne se prend que pour qui elle est !
    Leurs mythes sont périmés et nocifs, merci Fabrice de nous le prouver très clairement.

  15. Leurs esprits aussi est périmé,mort,et c’est bien pour cela qui ne croit pas a la thèse d’un bouleversement d’origine » non controlé » humaine.peut vont t’ils apprendrent que la terre est ronde,et que la tumeur qui est en eux,leurs font perdrent toute réflexion.un vrais tout noir,il y a matière a ce que ça m’échappe.une nouvelle ,qui ne rend pas l’homme très nouveaux.mais ils ne sont pas les seuls a etres septiques,et a différents degrés ,beaucoup en achetant une nouvelle voiture,ou en prenant l’avion,affichent aussi un m’enfoutisme total pour les autres et les générations futurs

  16. Il est à noter que Finkielkraut, très énervant sur bien des points, est sans doute mieux informé, puisqu’il a lu Jancovici…
    Le problème des intellectuels dotés d’une pure formation philosophique, même quand ils ont flirté avec le marxisme, est qu’ils vivent dans un monde d’idées conçues pour bonne partie avant le milieu du XIXème siècle, c’est-à-dire avant la révolution de l’énergie et de la machine, et que leur approche est totalement déconnectée des contingences matérielles du monde, au profit d’un homme-Dieu pour lequel il est interdit d’oser concevoir des limites

  17. http://www.rue89.com/2010/05/24/nature-capitale-la-caution-verte-de-sponsors-pas-tres-ecolos-152299

    Extraits : …Cependant, deux choses me gênent.

    En tant que contribuable, je me dis qu’avec les 4 millions et quelques d’euros qu’a coûtés l’opération, on aurait pu offrir des tickets de RER à des centaines de milliers de personnes pour voir la nature en vrai. De nombreux parcs naturels sont accessibles à quelques dizaines de minutes de RER de Paris.

    Mais surtout, lorsque je lis la liste des sponsors de cette événement, je ne peux que faire le constat que Nature Capitale est une véritable foire au greenwashing ! Le site Internet dédié se fait le porte-voix d’acteurs qui défendent une vision de la société qui n’a rien d’écologique.
    4 millions d’euros! mazette! les sdf peuvent dire merci pour ce gaspillage COMM comm com!

  18. Quand on m’a passé « le sanglot de l’homme blanc » en me disant :  » Lis ça, c’est formidable » , je me suis dit que j’avais dû sauté quelque chose, une ligne, un paragraphe …puis je me suis pas mal inquiétée pour les fans .

  19. @ Marie,
    On peut en installer des paysans bio avec 4 millions d’euros !
    (voir le site de la foncière Terre de Liens)
    http://www.terredeliens.org/spip.php?page=accueil

    Je trouve ces opérations de pub scandaleuses !
    Ah ! ils doivent se sentir mal dans leurs pompes nos agriculteurs conventionnels, pour tenter de nous séduire…..j’ai juste l’impression que c’est pour nous faire oublier leur usage des pesticides.

  20. Benedicte g pas lu, et çà fait un bail que je ne lis plus ces gens, petits marquis trop connus de l’édition qui ne prennent jamais partie pour RIEN (à part toutes les choses admises et légitimes) pour le reste : silence. je m’en fiche! marieline : je me demande s’il y a aura un reportage télé sur cette chose et dans le fond je me fous de savoir qui a encaissé les pépettes, mais il doit y en avoir, à se demander si çà n’a pas été monté dès le départ comme un « coup! ». les potes à qui vous savez.

  21. 4.000.000 d’euros, en effet, c’est beaucoup…
    …et beaucoup moins que le prix de revient d’un seul char Leclerc, que la France vend par centaines aux Emirats Arabes, et qui coûte la modeste somme de seize millions d’euros l’exemplaire. Actuellement circulent en France pour plus de quatre milliards d’euros de ces engins… Alors avec cette somme, combien d’installations de paysans bio, de créations de bibliothèques, de subventions à des associations culturelles, à des universités populaires, à des éditeurs indépendants ? Apparemment, « Qui-vous-savez » et ses potes ont d’autres urgences. Et en guise d’opération de rédemption, le prix de la grande ferme parisienne doit leur paraître très abordable.

  22. Ne nous moquons pas de nos brillantes élites actuelles, même si elles confondent le temps du jour avec le long terme, le local et le planétaire, si elles avaient passé l’hiver au Québec ou au sud ouest du Groënland, elles n’auraient pas pensé une seconde à l’hiver en Europe de l’ouest ou en Floride.
    Plus sérieusement quelqu’un aurait t-il des informations récentes sur des problèmes de courants marins e Atlantique nord.

    PS Je suis tombé sur une vidéo illustrant quelques compétences de nos brillants ministres. http://www.dailymotion.com/video/xda60c_a-nos-grands-ministres-talentueux-p_news

  23. Bonjour Fabrice,

    inconditionnel de votre style, j’adore vous lire.
    inconditionnel de votre courage d’opinion… pas de quartiers…!
    écolo de la première heure et irréductible comme vous (ancien moutonnier, cohabitationiste avec lynx….en suisse, pas aux pyrénées, ne me descend pas tout de suite…;). donc à fond la caisse avec toi.
    OK pour descendre en flamme les gugus allègres, brukner et ritaud, mais un peu gêné par l’intégrisme climatologique. je ne tremet pas en cause, allons-y fonçons, de toute façons ça soutien notre vieux débat…. :mais quand même, il y a des espaces de doutes, et tu le sais bien, sur la question de l’impact réel du carbone sur le réchauffement global…. et qu’on nous sert des exemples faux eux aussi, du style Lac Tchad et glaciers des alpes…. (on en parle ?) ce qui discrédite l’ensemble. ne faut-il pas laisser quand même la porte ouverte à l’analyse ? si yann et nicolas nous prennent pour des gogos avec des exemples bidons comme ceux que je viens de citer, il faut donc reprendre à zéro et reconstruire une base d’argument sérieuse….

    qu’en penses-tu ????

    Roland Hammel
    rhammel@snvworld.org

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