Archives mensuelles : octobre 2008

Un grand merci à Nicolas Hulot

Ne finassons pas : je me suis sévèrement engueulé, courant septembre, avec Nicolas Hulot. Je vous renvoie, pour ceux que cela intéresse, à trois papiers sur la question (ici, ici et ). Je lui avais reproché une déclaration sur les biocarburants, faite à Rennes, à la suite de quoi il m’avait téléphoné. Et nous nous étions heurtés, avant de nous comprendre, je crois. Je vais essayer de ne pas être hypocrite : sincèrement, je ne sais rien du rôle éventuel que j’ai pu jouer dans l’évolution de Hulot, mais nul doute en tout cas qu’il a modifié son propos sur les biocarburants. Et c’est ce qui compte, je le jure bien. Au passage, je voudrais remercier publiquement Nicolas Hulot, comme je l’ai attaqué publiquement.

Cet homme, pour qui j’ai de l’estime depuis de longues années, montre une nouvelle fois ses qualités profondes. Je vous laisse lire la dépêche de l’AFP qui m’a mené à cette mise au point.

Biocarburants: Nicolas Hulot et les ONG dénoncent « l’entêtement » français

PARIS (AFP) — Nicolas Hulot a dénoncé vendredi « l’entêtement » français sur les biocarburants, après les manoeuvres des députés pour protéger les intérêts fiscaux dont ils bénéficient.

Comme lui, les Amis de la Terre, Oxfam et Agir ici, membres de la campagne « les Agrocarburants ça nourrit pas son monde », s’insurgent contre le « maintien aveugle » en France d’un objectif d’incorporation de 10% d’agrocarburants dans l’essence d’ici à 2015 qui aura des conséquences « dramatiques » dans les pays du sud, estiment-ils.

« Les agrocarburants ne sont en aucun cas la réponse à nos besoins énergétiques », a déclaré M. Hulot à l’AFP.

« Cet entêtement sur nos agrocarburants a d’ores et déjà en Afrique et dans d’autres pays des conséquences absolument tragiques (…) sur l’accroissement de la misère et de la famine: cette compétition d’usage des sols est inacceptable », a-t-il insisté.

Dans un communiqué, Oxfam et les Amis de la Terre « déplorent que les parlementaires français n’aient pas remis en cause la pertinence du soutien de l’Etat à la filière des agrocarburants ».

Selon elles, la défiscalisation a déjà coûté 800 M euros à l’Etat en 2008: « une somme colossale » comparée à leur bénéfice dans la lutte contre le changement climatique.

« Surtout, insistent-elles, le maintien aveugle d’un objectif français d’incorporation de 10% d’ici à 2015 – une échéance encore plus proche que celle discutée au sein de l’Union européenne, qui vise 10% en 2020 – aura inexorablement des conséquences dramatiques sur l’accès à l’alimentation des populations du Sud.

Alors que la fin des avantages fiscaux consentis aux biocarburants était inscrite pour 2012 dans le projet de budget 2009, des députés ont révisé cet objectif à la baisse, au profit des industriels français.

Fin provisoire des aventures de tata Thérèse (provisoire, si)

Déjà le quatrième volume concernant ma tata Thérèse à moi. Comme le temps passe. C’est fou. C’est fou. J’ai bien peur de devoir me répéter : c’est fou.

Tata et le moineau de Paris

Combien y avait-il de moineaux dans Paris lorsque j’étais encore plus petit que toi ? Laisse-moi réfléchir une seconde. Je dirai 521 milliards, à peu près. Il y en avait partout, bien plus qu’aujourd’hui. Sur les branches, tu t’en doutes. Sur et sous les bancs, en train de se battre, de se poursuivre ou de se rouler dans la poussière. Sur le rebord des toits, au coin des cheminées, picorant le trottoir, occupant de vastes portions du ciel, tombant sous la griffe du chat de la voisine sorti faire un tour sur le boulevard, se baignant dans le caniveau ou dans la flaque laissée par l’orage de la veille au soir, faisant de la balançoire sans se faire remarquer, en compagnie de mes amis Jacky et Bouboule, au square de la rue Jean Beausire. Bref, le moineau se plaisait en ville, je l’affirme haut et fort.
C’est bien pourquoi l’histoire de Nono est étrange. Car Nono le moineau habitait chez ma tante. Et le grand malheur, c’est que je ne peux pas te dire pourquoi. Affreux. Je ne m’en souviens pas, et je te rappelle que ce livre est un livre de souvenirs authentiques. Je n’ai pas le droit de mentir ou d’inventer. Disons qu’un jour, un très beau jour pour moi, j’ai vu Nono. C’était le moineau ordinaire, un monsieur pour être complet. Le moineau mâle a la tête grise, autant que tu le saches. Donc, Nono aussi, avec une bavette noire, des joues et une gorge blanches. S’il avait été une dame, Nono aurait eu une belle robe beige. Nous sommes d’accord ? Alors, je continue.

Un jour, j’ai rencontré Nono, qui était perché sur une armoire de ma tata. Dans la première des petites chambres, à droite, qui s’ouvraient sur la salle de séjour. Je dois te dire que Nono aimait beaucoup le haut de l’armoire. Selon moi, mais cela ne m’engage pas beaucoup, il voulait repérer ses ennemis de loin, de manière à sauver sa peau le plus longtemps possible. Car je te rappelle que l’appartement de la rue Larrey était rempli de prédateurs pour lesquels un plat de moineau est à peu près ce qu’est un goûteux morceau de camembert pour moi. Ou qui sait un gâteau au chocolat avec de la crème dessus pour toi.
Les prédateurs locaux étaient surtout représentés par deux espèces. Il y avait le chat, qui est de la famille du tigre. Ce voyou sait s’approcher d’un moineau de Paris comme s’il était une image de Saint-Pierre collée sur le mur. Je ne te conseille pas d’essayer, car c’est difficile. Le chat traque le moineau parce qu’une petite sonnerie retentit derrière son œil quand il en voit un. Ce n’est donc pas la peine de le gronder ou de tirer sur sa queue, car il n’écoute pas. J’ai déjà essayé, figure-toi.

L’autre chasseur de moineaux était le fennec, dont je t’ai déjà parlé. Ce renard, car c’en est un, parvient à ressembler aux hiéroglyphes sur les temples égyptiens. Comme je ne sais pas si tu connais, je t’explique. Il ne montre que son profil, et on a l’impression qu’il est immobile depuis une heure, alors qu’il n’est plus qu’à un centimètre de ton mollet. Je te parle de mollet, mais je pourrais parler de ta fesse, c’est juste une image.

Le fennec présente son profil, c’est-à-dire son museau, mais sans ouvrir la gueule une seule seconde. Car s’il le faisait, on verrait aussitôt que sa mâchoire est emplie d’une collection complète de poignards en forme de dents. Ou de dents en forme de poignards, comme tu préfères. Je crois que telle est la raison pour laquelle Nono préférait se réfugier sur les hauteurs de l’armoire. En cas d’attaque, il prenait un envol instantané.

Mais ces précautions n’auraient probablement pas suffi si ma tante n’avait pas décidé d’isoler Nono dans la petite chambre. Isoler, cela voulait dire refermer systématiquement la porte, de manière que les chats ou les fennecs ne viennent pas tailler une bavette dans le corps athlétique de Nono. Nous avions l’ordre de faire attention en entrant et en sortant de la pièce où le moineau faisait ses cabrioles. Mais ne va pas imaginer qu’isolement signifie solitude. Chez tata Thérèse, on ne pouvait jamais être seul, car il n’y avait pas assez de place.

Dans la petite chambre, il y avait ma cousine Laetitia, qui était la petite-fille de ma tata, et qui vivait avec elle, je ne sais plus pourquoi. Et puis il y avait aussi quelques dizaines de hamsters, dont ma tante faisait l’élevage, je te raconterai plus loin. Et bien entendu des serins, des perruches et des tourterelles. Mais tout ça ne compte que pour du beurre, car ils étaient enfermés dans leurs cages. Tandis que Nono, lui, qui était le roi, vivait en liberté, si je peux dire.

Que mangeait Nono ? Eh bien des graines, vois-tu. Du millet, de l’avoine, du riz. Dans le grand dehors de la ville, le moineau mange tout ce qui tombe dans son bec, ou presque. Quand il vole, par exemple, il avale sans se faire prier les insectes qu’il rencontre. Gloup ! Ou encore slurp ! Il enfourne. Chez tata, il faisait pareil. Des graines, des graines, des graines.

Mais ma tante tenait à sa réputation de diététicienne. Elle savait qu’un régime équilibré de moineau passe à l’occasion par des protéines animales. Les graines, fort bien, mais la viande ? Imagine que la Société protectrice des animaux ait envoyé un inspecteur chez elle, hein ? Et qu’il se soit rendu compte aussitôt que Nono n’avait pas droit à sa ration d’araignées ou de fourmis volantes ? Hein ?

Mais ma tante savait ce qu’elle faisait. Sur un meuble de la petite chambre de Nono, il y avait un bocal en verre qui permettait de voir un joli spectacle. Dedans, en effet, dans ce qui ressemblait à de la sciure, on voyait s’agiter des vers blancs joufflus, mafflus, pétant la forme. Plus d’une fois, avec mon frère Régis, nous avons assisté au repas carnivore de Nono le moineau, et je vais essayer de te décrire comment cela se passait.

Premier mouvement : tata joue avec son dentier et se met à rigoler en faisant tourner ses yeux pour nous faire rire. Deuxième mouvement : elle met son doigt en travers de ses lèvres pour nous faire taire. Là, je pense que c’est pour ne pas alerter ma mère, qui est en train de boire un café dans la cuisine en compagnie des fennecs. Trois, elle nous entraîne, Régis et moi, dans la petite chambre réservée aux loopings et aux entraînements aériens de Nono le moineau.

À l’intérieur de la pièce, le silence. On n’entend plus que les 25 perruches qui jacassent, et les hamsters qui cavalent sur leurs roues. En haut de l’armoire, Nono jette un œil, pas très concerné. Tata rigole encore une fois, et à ce moment, il est évident qu’elle prépare un mauvais coup. Mais lequel ? Elle s’approche du bocal, l’ouvre, plonge la main au milieu de la masse des vers blancs, et en sort un entre deux doigts. Ensuite, elle nous fait une sorte de clin d’œil, et elle coince la bestiole entre ses lèvres, en roulant encore une fois ses yeux dans tous les sens. Je peux t’assurer que certains après-midi, rue Larrey, il ne faut pas avoir peur. On dirait un film d’horreur, fabriqué exprès pour faire grincer les dents des pauvres enfants que nous sommes, Régis et moi.
Tu y es ? Tata a donc coincé un ver de farine entre ses dents, et elle relève soudain la tête en direction de Nono, toujours installé en haut de l’armoire. Je ne suis pas tout à fait sûr, mais je me demande si le moineau n’aurait pas un peu frétillé du bout de la queue. Alors ma tante, tout en serrant autant qu’elle peut le ver au coin de sa bouche, se met à appeler Nono. Et ce n’est pas simple, crois-moi. Si elle laisse entrer assez d’air pour dire distinctement et assez fort : “ Nono ! Nono ! ”, le ver pourrait bien se libérer, et tomber sur le sol. Je suis sûr que tu as déjà lu la fable de La Fontaine appelée Le Corbeau et le Renard. Eh bien, c’est presque pareil.
Si ma tata ouvre son bec, le ver fera le grand saut, et Nono restera haut perché. La minute qui suit est donc très importante. On n’entend au départ qu’un tout petit souffle de grand-mère. Quelque chose comme “ Ohho ! Ohoh ! ”. Moi, je serais Nono, je ne reconnaîtrais pas mon nom, je te jure bien. Mais Thérèse insiste, et tout en serrant le malheureux ver avec ses lèvres, elle réussit enfin à faire entrer un courant d’air dans sa gorge. Et brusquement, on entend enfin le nom du moineau. Un vrai coup de clairon. “ Nono ! ”, “ Nono ! ”.

Cette fois, l’oiseau a compris qu’on le cherchait. Il regarde. Son bec et son cou s’énervent ensemble. En haut, en bas, à gauche, à droite. Je me demande ce qu’il voit, de là-haut. Sûrement une petite bestiole blanche qui bouge en pendouillant d’une autre bestiole beaucoup plus grosse. Et soudain, la magie commence, on se croirait à l’aéroport d’Orly. Nono s’envole, d’abord vers le plafond, et pique ensuite d’un coup sec vers le sol. Va-t-il se crasher ? Va-t-il s’écraser faute d’avoir pu ralentir à temps ? Je ne respire plus, ce qui n’est pas commode. Mais non, Nono se reprend, rase le lino, remonte d’un coup d’ailes, parvient à la hauteur des épaules de tata Thérèse, et je peux te garantir pour l’avoir vu qu’il y a un pilote dans l’avion.

Car que fait Nono, grâce à une impressionnante torsion de ses ailes ? Une manœuvre géniale, qui le place bientôt son bec à la même hauteur que celui de Thérèse. Enfin, pas son bec, tu auras rectifié, sa bouche. Il est encore à soixante centimètres, mais à cet instant précis, je sais, je sens qu’il va réussir son coup. Et j’ai raison. Un dernier coup d’ailes, et le moineau passe sans s’arrêter au ras des lèvres de ma tante adorée. Sans s’arrêter, sans ralentir on dirait, il lui vole au passage le ver blanc, le coince dans son bec et remonte déguster la friandise en haut de l’armoire.

En cette minute d’histoire, d’histoire naturelle, si quelqu’un avait eu la bonne idée de me photographier, il aurait vu un gamin au bord de l’évanouissement, avec la mâchoire dévissée et les yeux perdus dans l’espace. Malheureusement, la seule trace est dans ma tête, et dans celle de mon frère Régis. Mais personne ne la fera disparaître, que cela soit dit. Ma tante, je t’aime.

Encore ma tata Thérèse

Je m’en vais, dites-moi. Sous d’autres cieux. Et c’est simplement délicieux. Je m’en vais pour quelques jours, non sans vous laisser deux messages posthumes de ma tata Thérèse à moi. Au point où je suis rendu, pourquoi m’arrêter ? Il y aura aussi un papier, à leur suite, consacré à Nicolas Hulot. Dans la liste, donc, incluant celui que vous êtes en train de lire, le troisième. Suis-je clair ? Je n’en suis pas bien sûr, mais comme je m’en vais sans remords, je m’en vais. Rendez-vous probable lundi prochain.

Vol de pigeons dans la maison

Quand j’étais petit, déjà, les pigeons étaient détestés par une quantité effarante de gens bien élevés. On entendait dire à Paris qu’ils apportaient la gale, ou la lèpre, ou la broncho-pneumonie je ne sais plus, à tous ceux qu’ils approchaient à moins de cinquante mètres. Or, rue Larrey et alentour, il y avait beaucoup de pigeons qui formaient des bandes de jeunes et de moins jeunes dans les airs. Et c’était un sacré spectacle à observer, quand on n’avait pas trop peur d’attraper la poliomyélite ou de rester paralysé, ou de devenir aveugle.

Rue Larrey, si j’essaie de rassembler mes souvenirs, il y avait deux clans principaux. Le premier était constitué par les ennemis des pigeons. Il unissait les propriétaires, les balayeurs, les employés de la ville de Paris, les utilisateurs de bancs publics, les gens correctement habillés. C’est-à-dire le monde entier. Sur l’autre bord, de l’autre côté du ring, il n’y avait que ma tante Thérèse à moi, que le voisinage aurait bien envoyé à Charenton, comme on disait à cette époque. Charenton, c’était l’asile de fous.

Mais ma tante Thérèse n’avait rien à faire chez les fous. Simplement, et définitivement, elle aimait les pigeons de la grande ville, et ne supportait pas qu’on s’attaque à eux. Je l’ai vue souvent sortir avec un parapluie, même les jours où il ne pleuvait pas. Le parapluie, ce n’était pas pour les nuages, c’était pour les assassins. Car même en plein jour, les assassins et les spadassins rôdaient dans les rues de ce vieux Paris de mon enfance. Oh, ne va pas imaginer de sinistres figures de tueurs à gage, avec de longs couteaux et de lourds pistolets.

Non, ceux-là avaient la loi avec eux, et portaient souvent un uniforme. Car la ville de Paris, l’ignoble ville de Paris payait des équipes spéciales pour s’emparer du plus grand nombre possible de pigeons baladeurs. Avec des filets, je te l’assure ! Avec de grands filets comme en utilisent les gladiateurs dans les films sur Rome.

À deux ou trois, tenant leur piège dans les mains, ils s’approchaient d’un rassemblement interdit de Columba livia – le nom savant du pigeon biset -, par exemple au bord d’une fontaine, et zou, zip, tchak et ziiiipppp ! En clair, ils lançaient leur filet comme des pêcheurs au large d’Audierne. Et les pigeons étaient pris dedans, emprisonnés à tout jamais. Car tu penses bien qu’ils ne les relâchaient pas. La vérité, que je vais te murmurer dans le creux de l’oreille, car elle est loin d’être plaisante, c’est que ces malandrins zigouillaient tous les pigeons qui leur tombaient sous la main.

Heureusement pour eux, tata Thérèse arrivait souvent au bon moment pour les libérer, avec son parapluie. Tu me diras qu’on ne sauve pas des pigeons condamnés à mort avec un parapluie, et tu auras raison. Mais n’oublie jamais que tu ne t’appelles pas ma tante Thérèse. Elle, elle y arrivait.

Comment ? Eh bien, elle chargeait les tueurs, comme avec une lance sur un champ de bataille. J’espère que tu as déjà vu des combats de chevalerie dans les films de cape et d’épée. Ma tante était une sorte de chevalier sans cheval, mais avec un parapluie. Elle courait dans leur direction en hurlant et elle essayait de les embrocher avec son parapluie. Heureusement que ce n’était pas un couteau ! Ensuite, elle criait et soufflait comme une baleine, en faisant des grands gestes, de tours de moulinets dans tous les sens. Alors, les passants se rapprochaient et, bien entendu, ils ne comprenaient rien. Rien. Sauf qu’ils voyaient une dame d’un certain âge en plein orage, en pleine surchauffe, juste devant des personnages patibulaires qui ressemblaient à des gardiens de prison.

Des gardiens armés d’un filet, sous lequel gigotaient de pauvres et tristes oiseaux.Je ne suis pas tout à fait sûr, mais il me semble que là, tata avait inventé un truc. Elle apitoyait le monde, qui adore découvrir de pauvres victimes juste sous son nez. En tout cas, les gens prenaient le parti de ma tante, et souvent, les kidnappeurs de pigeons étaient obligés de repartir après avoir relâché leurs proies. Mais avant d’en arriver là, une fois sur deux, ils avaient le temps de rédiger un superbe procès-verbal d’amende, qui condamnait ma tante à verser à la ville de Paris je ne sais plus quelle somme avant la fin du mois. À mon humble avis, elle n’a jamais dû payer, car elle utilisait les papiers des amendes pour poser les tasses de café. Ou pour mettre dans la boîte à crottes de ses chats. Non, je crois bien qu’elle n’a jamais payé.

Je pense avoir été clair : ma tante aimait les pigeons. Mais je voudrais te dire autre chose. En vérité, elle les adorait. J’en ai gardé une preuve dans un coin de ma tête. Certains jours de beau temps, ma tante ouvrait la porte-fenêtre de sa salle de séjour, qui donnait sur un petit balcon. Il était toujours couvert d’une épaisseur de fientes d’oiseaux incroyable. Comme une boue dans laquelle tu aurais pu t’enfoncer jusqu’au mollet. Sauf que c’était du caca. Bon, je te parle franchement.

La première fois que j’ai vu ça, je n’ai pas compris d’où venaient ces milliards de millions de petites crottes, car il n’y avait aucun oiseau en vue sur le balcon. Mais la deuxième fois, j’ai eu l’explication. La voilà. Tata était aller chercher de gros sacs dans son fourbi de la cuisine, et en avait ramenés deux coincés sur chacune de ses épaules. Moi, je regardais, en me demandant ce qu’elle avait inventé, car au cas où cela t’aurait échappé, elle inventait à chaque fois quelque chose, que je n’oubliais jamais. Et elle a posé un sac et ouvert délicatement l’autre avant de se mettre au bord du balcon, face à la Grande Mosquée.

À ce moment précis, et je t’assure que j’en ai encore le frisson, le ciel a commencé à bouger, comme dans un dessin animé. Il y avait des ailes partout, qui battaient en cadence, et qui se rapprochaient comme des bolides depuis tous les coins de l’horizon. J’ai eu peur, et ne mens pas, s’il te plaît, toi aussi tu aurais eu peur.C’était les pigeons. Oui, les pigeons de Paris arrivaient tous du diable Vauvert pour venir casser la croûte chez tata Thérèse. Elle leur donnait rendez-vous, quoi. Toujours à la même heure. Et ces oiseaux, qui ne sont pas des cruches, ni des ânes, avaient pris leurs petites habitudes.

La suite est affreusement dingue, et si je n’avais pas été là, je ne le croirais pas. Mais j’étais là. Ma tante a posé le sac sur son épaule droite, qui était rempli de graines de qualité supérieure, et elle a commencé à déverser le repas directement sur le balcon. Et des dizaines de pigeons ont commencé à se poser et à boulotter autant qu’ils pouvaient. Les autres, car il y en avait d’autres, se posaient sur la balustrade, ou faisaient du surplace, et au moins une quinzaine sont entrés dans la salle de séjour de tata, des fois qu’elle aurait préparé un gratin au four pour eux, qu’elle aurait posé sur la table. Bref, je crois que tu peux imaginer la scène, cela sentait le grand bazar, et la maison de cinglés. Mais ce n’était pas Charenton, c’était la rue Larrey, chez tata Thérèse. C’était bien mieux.

Ma tante Thérèse (une suite)

À la demande générale (de deux ou trois d’entre vous), je poursuis ce dimanche les aventures de ma tante Thérèse à moi. Comme précisé hier, n’y touchez pas ! Elle est à moi. Je rappelle que ces phrases étaient et demeurent destinées aux enfants. À nous, donc. Et ma flemme, évoquée hier, elle aussi, grandit à vue d’oeil. Je vous avertis par anticipation que je vais me sauver dans la brousse quelques jours. Dès mardi, plus rien. J’ai dans l’idée que tout le monde survivra.

Thérèse et le perroquet

Ma tante Thérèse pensait à chaque seconde aux animaux. Ceux qu’elle avait, ceux qu’elle aurait, ceux qui étaient vivants, ceux qu’elle guérirait, ceux qui étaient morts, ceux qu’elle ressusciterait, ceux qu’elle arracherait pour finir aux griffes des affreux et des méchants. Comme tu le sais peut-être, ces deux dernières catégories sont assez nombreuses.

Un jour, en se mettant à la fenêtre d’une des deux minuscules chambres, qui donnait sur la cour des immeubles de la rue Larrey, Thérèse a vu un perroquet qui volait, en liberté. Elle savait bien qu’il allait mourir, tôt ou tard. De froid ou de faim. Car un perroquet du Gabon ne mange pas des croûtes de pain de Paris, ou alors seulement en apéritif.

Alors Thérèse s’est mise à la fenêtre et elle a commencé à parler à l’oiseau. Au début avec sa voix à elle, comme un roucoulement grave de biquette qui se terminait neuf fois sur dix par une explosion de rire. Le perroquet paraissait se moquer d’elle, tu ne peux même pas imaginer. Il volait, disparaissait vers la Grande Mosquée, revenait, et repartait. Je crois qu’il avait décidé de la faire mariner. Mariner comme les sardines au fond de leur boîte pleine d’huile.

Alors ma tante a décidé d’utiliser les grands moyens. Elle a commencé à siffler comme un pinson, puis à parler du nez, un peu je dois dire comme un perroquet enrhumé. Rien à faire. L’oiseau échappé continuait à voler. Et cela a duré un jour, une nuit, un jour. Libre à toi de ne pas me croire. Je ne dis pas que Thérèse ne dormait pas, je jure qu’elle ne dormait presque plus. Elle veillait l’animal. Et le troisième jour, elle a choisi d’appeler le perroquet, tout simplement. En utilisant le prénom de son fils, Coco, ce qui tombait bien, non ? “ Coco ! Coco ! rentre à la maison ! ”. Comme ça. Cent fois. Deux cents fois. “ Allez, mon Coco ! viens voir maman ! tu vas attraper froid ! ”. Deux cents fois, trois cents fois. Si je peux me permettre, les voisins en avaient assez, tu peux en être sûr et même certain.

Dans l’après-midi du troisième jour, Thérèse piquait du nez contre le rebord de sa fenêtre, et elle ne savait plus où elle habitait. Elle continuait de temps en temps à lancer ses appels dans le vide, avec de moins en moins de conviction. C’est sans doute parce qu’il avait bon cœur que vers les cinq heures, sans s’annoncer, le perroquet a fait son entrée triomphale chez ma tante Thérèse. En une seconde fatale, il était entré dans la chambre, passant au-dessus de sa tête. Pour un peu, il serait reparti aussi vite. Mais ma tata savait être rapide comme l’éclair. À croire qu’elle faisait semblant de sommeiller, pour mieux l’amadouer : d’un coup, elle s’est relevée, et a fermé la fenêtre. Toc ! Coco venait d’entrer dans la grande famille de la rue Larrey.

Coco et le bruit de la banane

Le perroquet Coco s’était enfui de chez son ancien propriétaire, qui était un grand patriote. Ma tata Thérèse l’a compris le jour où il a commencé à siffler la Marseillaise, hélas en faisant des fautes terribles au passage. Le début était splendide, tonitruant, et j’accompagnais avec un vif plaisir l’animal. À pleins poumons, je hurlais sans aucune hésitation : “ Le jour de gloi-oi-r’ est arrivé ! ”. Mais cela se gâtait aux environs de : “ Entendez-vous, dans nos campagnes, mugir ces féroces soldats ? ”. Coco sautait carrément deux notes, et toute la chanson dérapait.

La Marseillaise devenait la Paimpolaise, ou pire encore, on ne reconnaissait plus rien. Autour de cette grave question, il y avait deux interprétations. Certains jours, Thérèse défendait bec et ongles le Coco. Pour elle, le perroquet avait appris la chanson sur un disque, qui était rayé, car à l’époque, mais oui, les disques pouvaient être rayés et radoter comme des petits vieux. Mais quand elle était furieuse contre sa ménagerie personnelle, ou pire encore contre Coco, l’infâme, l’insupportable Coco, elle disait que l’oiseau perdait la tête. La boule. Qu’il n’avait aucune mémoire.

Et là, je suis bien obligé de faire un commentaire, car c’est faux. Coco avait une mémoire d’éléphant, ce qui n’est pas si fréquent chez les volatiles. Un jour, j’étais assis à la table de la salle de séjour de tata Thérèse, et j’ai entendu dans mon dos un petit bruit que je n’ai pas reconnu tout de suite. Avant même que je me retourne, ma tante m’avait dit : “ Tiens, je t’ai épluché une banane ”.

Là, j’étais plutôt content, car j’aime bien les bananes, et j’avais justement reconnu le bruit étrange et délicat d’une peau qu’on casse avec le pouce avant de tirer sur les fines lanières pour manger le fruit. Avant de continuer à lire, pense à ce bruit dans ta tête, juste une seconde : tu casses la banane à la tête, et tu tires sur les rubans de sa peau. Tu y es ? Bon, on continue : je me suis donc retourné, et je n’ai pas vu de banane. Car il n’y en avait pas. En revanche, la tante Thérèse était là, elle, avec un rire de hyène tachetée qui barrait son visage. Il faut dire qu’elle imitait très bien ce carnassier, dans ses grands jours.

Thérèse a ricané, au moins trois ou quatre fois, vraiment très fort, et elle a dit : “ Et alors, elle est où, la banane ? ”. Moi, qui avais sept ou huit ans, pas plus, je ne savais absolument pas quoi lui répondre. Il n’y avait rien sur la table. Rien. Thérèse s’est tournée vers la cage de Coco – oui, elle lui avait trouvé une cage – et elle a annoncé, comme si elle présentait un artiste sur la scène : “ La banane, c’est lui ”.

Et le plus incroyable, c’est que c’était vrai. Le bruit de la banane qu’on épluche, c’est Coco qui le faisait. À la perfection. Ce bruit phénoménal, je l’ai entendu des dizaines ou des centaines de fois. Et à chaque fois, j’ai aussitôt vu une banane dans mon imagination. Coco, lui aussi, était un magicien. D’ailleurs, je n’étais pas le seul à être trompé par lui. Quand l’envie lui prenait, il imitait la voix de ma tante Thérèse, sans trembler. Ce perroquet n’avait pas froid aux yeux, pour un perroquet. Et celui qui tombait dans le panneau, c’était un minuscule chien appelé Riri qui traînait toujours dans les pattes de ma tante, surtout dans la cuisine.

Voilà comme les choses se déroulaient. Ma tante préparait à manger dans la cuisine réservée aux fennecs et aux chats. Le chien Riri se frottait là-bas à ses jambes, car il adorait Tata. Pendant ce temps, j’étais assis à la table de la salle de séjour en train de lire les aventures de Blek le Roc, le grand héros de mon enfance. Entre les deux pièces, je te le rappelle, il n’y avait qu’un couloir. Eh bien, sans prévenir, avec exactement la voix de ma tante, Coco faisait : “ Riri, viens voir le susucre ”. Et aussitôt le chien arrivait en frétillant de la queue et tournicotait pendant trois minutes en attendant que tata lui donne une friandise.
Allez, je recommence pour ceux qui n’ont pas bien suivi. Le chien était dans la cuisine avec ma tante. Et donc, si la voix de Thérèse l’appelait dans la salle de séjour, c’est qu’elle avait trouvé le moyen de se couper en deux morceaux, l’un pour la cuisine, et l’autre pour la salle de séjour. Ou bien que le chien Riri n’avait qu’un tout petit pois dans la tête. Qu’il était bête comme un pou. Réellement couillon sur les bords. Mais ça, jamais je ne le penserai, car il ne faut pas dire du mal des morts, et Riri, qui m’aura tant fait rire, n’est plus de ce monde. Qu’il repose en paix !

Ma tante Thérèse (prière de se recueillir)

J’ai la flemme, une flemme sévère. Et je m’apprêtais simplement à ne rien faire, ce qui semble sage en ces circonstances. Et puis je me suis souvenu d’une série de textes consacrés à ma tante Thérèse. Je les destinais à des enfants, et je les rassemblerai peut-être un jour ou l’autre. Ou jamais. C’est alors que je me suis dit : s’ils valent (peut-être) pour des enfants, alors ils valent (à coup sûr) pour des adultes. Et j’ai décidé de mettre en ligne le début. Si cela vous plaît, tant mieux. Mais sinon, pas un mot ! Ne touchez pas à ma tante Thérèse à moi, joyau de mon enfance, diamant brut, soleil resplendissant de ma mémoire. N’y touchez pas, elle est à moi !

Tante Thérèse et moi

Quand j’étais petit, quand j’étais vraiment petit, j’avais une tante qui s’appelait la tante Thérèse. Elle était déjà ridée et elle avait un dentier qui me faisait peur et qui me faisait rire. Comme un magicien, elle arrivait à l’enlever de sa bouche et à le faire disparaître. Zou ! elle nous montrait sa bouche grande ouverte, où il n’y avait plus une dent. Zou ! elle ouvrait sa bouche une deuxième fois, et toutes ses fausses dents étaient en place.

Tu as peut-être remarqué que j’ai écrit “ nous ”. Nous, car j’allais toujours voir ma tante avec mon frère Régis et la sœur de Thérèse, c’est-à-dire ma mère. Tout ce que je vais te raconter est vrai, je le jure sur la tête de ma tante Thérèse à moi. Je sais qu’à certains moments, tu ne vas pas me croire, mais fais-moi confiance, tu ne le regretteras pas. C’est un véritable morceau de mon enfance.

Thérèse et les chats

Ma Thérèse habitait rue Larrey, à Paris, et ses fenêtres donnaient sur les jardins de la Grande Mosquée, près de la place Monge et de la rue Mouffetard. Le Jardin des Plantes et sa ménagerie étaient à deux pas. Mais il y avait une deuxième ménagerie dans le quartier : l’appartement de la tante Thérèse.

Elle vivait dans une cité en briques rouges habitée par des pauvres, une cité HLM, la plus vieille de Paris d’après ce qu’on racontait. Elle avait été construite après la Première guerre, vers 1920, juste après Mathusalem et le déluge. Ma tante habitait au cinquième, évidemment sans ascenseur. Son appartement avait la taille d’une (grosse) crotte de mouche. À droite des toilettes microscopiques, à côté une petite cuisine avec un bac à douche dans le coin, et à gauche un couloir lugubre.

Où conduisait le couloir ? À une salle de séjour, comme on disait, dans laquelle il valait mieux ne pas être plus de quatre, enfants compris. Chez elle, tout était riquiqui, sauf son cœur, qui comme tu verras, était grand comme la terre entière. J’ai oublié : deux chambres à peine plus grandes que des placards s’ouvraient sur la salle de séjour.

Tata Thérèse aimait les chats. Elle les aimait tellement qu’elle en faisait la collection. Elle en avait souvent sept ou dix. Surtout des siamois. Surtout Leuloeil, une chatte qu’elle adorait. Moi, j’entendais à chaque fois l’œil l’œil, et je crois que j’avais bien raison, car Leuloeil avait des yeux qui brillaient dès que le jour tombait. Quand je passais devant elle, j’avais une frousse terrible : deux fois sur trois, elle essayait de me griffer, la vache.

Un jour incroyable, elle est morte de vieillesse. C’était le début du grand week-end du 15 août, et tout était fermé. Ma tante aurait préféré mourir que d’abandonner Leuloeil. Alors, elle a ouvert son vieux frigo, et elle a mis la chatte dedans jusqu’au mardi suivant. Tu imagines bien qu’il n’y avait pas de congélateur, à l’époque dont je te parle. En plus, le frigo marchait très mal.

Comment ? Tu veux savoir pourquoi elle avait mis l’animal au frigo ? Mais parce qu’elle voulait le faire empailler, bien sûr. Pour garder Leuloeil avec elle jusqu’à la fin des temps, évidemment ! Sauf que tata n’avait pas un sou devant elle. Mais pas un. Même pas un seul. Un demi, peut-être.

Aujourd’hui encore, je ne sais pas encore comment elle a fait. En tout cas, le mardi, premier jour d’ouverture des magasins après le 15 août, elle a enveloppé la chatte dans un linge, et hop ! elle est allée voir un taxidermiste, autrement dit le gars qui empaille les bêtes.

La semaine suivante, quand je suis allé la voir, j’ai été bien surpris de ne pas voir Leuloeil sur le canapé. Thérèse nous a annoncé qu’elle était partie à tout jamais, et sa voix était si triste que j’ai parfaitement compris. J’ai un peu honte, mais j’étais content de ne plus voir le monstre. J’ai vraiment honte, mais je l’imaginais très bien au fond de la poubelle, et la poubelle renversée dans la benne à ordures, très loin de moi.

C’est à ce moment-là, avec un petit rire sardonique, que la tante Thérèse nous a demandé de la suivre, mon frère Régis et moi. Où ? Dans la chambre minuscule qu’elle partageait avec quelques autres pensionnaires dont je parlerai plus loin. Et là, toujours le sourire aux lèvres, elle s’est approchée de son armoire. À cet instant, je dois te dire que j’ai eu la chair de poule. On appelle ça un pressentiment. On sait qu’il va se passer quelque chose de terrible, mais on ne peut déjà plus bouger. Je n’ai plus bougé.

La tante Thérèse a ouvert les deux portes de l’armoire d’un seul coup, avec ses deux mains, en criant : “ Bonjour, Leuloeil ! ”. Si j’avais pu, je me serais évanoui. Mais comme je ne pouvais pas, j’ai regardé, caché derrière son dos. Tu sais quoi ? Leuloeil était là ! Je te jure ! Ses yeux brillaient dans le noir, elle était allongée paresseusement sur les draps de ma tante, vautrée à tout jamais. Empaillée, triomphante. Tu voulais connaître ma tante ? Eh bien voilà un premier échantillon.

Thérèse et les fennecs

Ma tante aimait aussi les fennecs. Si tu ne sais pas ce que c’est, apprends qu’un fennec est un renard du désert. Grosso modo. Quand il n’échoue pas dans l’appartement de Thérèse, il habite normalement dans le nord de l’Afrique. Il pèse comme un sac de plumes, pas plus. Avec d’immenses oreilles par lesquelles il évacue la chaleur et une très longue queue touffue.

Par ailleurs, je dois te préciser que le fennec hurle à la mort quand le jour se couche, et qu’il a des dents terriblement pointues. Pour croquer des rongeurs et des lézards, c’est très bien. Pour mordre les mollets des enfants aussi. Ma tante a eu au moins trois fennecs chez elle. Pour les deux premiers, il n’y a aucun mystère. Son fils Coco – je n’y peux rien, il s’appelait Coco – les avait ramenés d’un séjour en Algérie. Ils vivaient dans la cuisine, au milieu des chats. Sans problème ? Sans problème.

Quant au troisième fennec, je n’ai jamais su d’où il venait vraiment. Thérèse a toujours dit qu’elle l’avait trouvé dans la rue. À l’époque, je l’ai cru, car je te rappelle qu’elle était une magicienne. Et aujourd’hui, je la crois encore, car je sais qu’elle était une vraie magicienne. Et puis, n’oublions pas que le jardin de Plantes était tout près de chez elle. Je crois qu’un jour, elle a dû tomber sur un évadé. À moins qu’elle n’ait attaqué la cage du fennec au nom du Front de libération des renards des sables. C’est parfaitement possible.