Les yakuzas au secours de l’atome

Publié dans Charlie Hebdo le 13 mars 2013

Deux ans après Fukushima, on découvre au Japon que la pègre dirige en sous-main la décontamination des installations nucléaires bousillées. Pas grave : on envoie au charbon atomique des SDF.

En ce deuxième anniversaire de Fukushima – 11 mars 2011 -, penser à Günter Wallraff, un sérieux client. À la fin de 1985, ce journaleux allemand se fabrique l’identité d’un prolo turc, et va bosser sur les chantiers. Il se ramasse tout pleine gueule : la violence du travail, les brimades des petits chefs, le racisme. Il en fera un livre vendu à quatre millions d’exemplaires en Allemagne, Ganz unten (Tête de turc, La Découverte).

Tomohiko Suzuki a fait un peu pareil au Japon. Ce fondu se fait embaucher à l’été 2011 à Fukushima Daiichi, l’un des épicentres de la grande cata. Suzuki a un emploi subalterne, en rapport avec la décontamination de l’eau, qui s’est accumulée partout sur le site nucléaire. Et il voit des choses, plein de choses qu’on ne verra pas à la télé japonaise. Il en tirera un livre non traduit, ??????, soit sauf grave erreur : « Les Yakuza et les centrales nucléaires ».

Car les yakuzas sont partout. Avant de détailler le tableau, un point d’actualité : il y a quelques jours, un bon garçon de 40 ans, Yoshinori Arai, s’est fait embastiller par la police locale. Yoshinori est un chefaillon du syndicat du crime appelé Sumiyoshi-kai, et il envoyait travailler au démantèlement des réacteurs de Fukushima des couillons d’ouvriers triès par lui, et qui lui versaient une (grosse) dîme.

Dans son livre, Tomohiko Suzuki racontait plein d’histoires du même tonneau. Dans la région de T?hoku, au nord-est, là où se trouve Fukushima, les yakuzas dont partout où le nucléaire défunt attire des fonds publics. Démolition, reconstruction, traitement des déchets, décontamination : autant de domaines dans lesquelles gagner fortune rapidement. Dès après la catastrophe, les yakuzas ont ciblé trois catégories remarquables : les SDF, les psychotiques et assimilés, les endettés. Malin, car comment dans ces cas-là refuser un petit service à ces braves salopards ?

Un nombre indéterminé de « cas » ont été envoyés sur les chantiers les plus dangereux, qui ne risquent pas de venir se plaindre d’avoir chopé le cancer. Autre technique, qui fait honneur à ses inventeurs : les yakuzas ont obtenu, sous de faux noms, des prêts gratuits accordés aux victimes de Fukushima, ensuite utilisés pour la réfection de sex-shops et de boxons. Les flics auraient déterré des dizaines d’affaires, mais la cruelle vérité oblige à dire qu’aucune ne sort vraiment. Ni ne sortira. Car les yakuzas sont à peu près intouchables.

D’où viennent ces bandes criminelles ? De l’Histoire. Peut-être des bakuto, joueurs professionnels itinérants d’il y a 300 ans. Peut-être des samouraïs déchus de la pax Tokugawa, il y a près de 400 ans. Le sûr, c’est que c’est vieux. Il ne faut pas voir les yakuzas de 2013 comme des marlous de la banlieue française. Ils tuent et rançonnent, certes, mais dans le respect de la loi nipponne. Aussi rigolo que cela paraisse, une loi votée en 1992 oblige ces mafieux à se déclarer officiellement. Ce que près de 85 000 personnes ont fait. Les quatre bandes principales ont pignon sur rue et gèrent, à côté de leurs activités criminelles, des affaires on ne peut plus ordinaires. Précisons tout de suite que cette loi dite, sans doute par antiphrase, Antigang, n’est pas pénale. Si un yakuza ne la respecte pas, on lui tape sur les doigts, sous la forme d’un cruel rappel à l’ordre.

Autant passer de suite à la vérité du dossier. Depuis des lustres, et surtout après la défaite militaire de 1945, les yakuzas ont été un pilier du maintien de l’ordre social, capables quand il le fallait de briser une grève ou de semer la zone dans un meeting communiste. Il paraît que la flicaille ne respecte plus tout à fait comme avant cette splendide mafia, mais cela reste à prouver. L’exemple de Yoshio Kodama est là pour montrer le rôle politique décisif des yakuzas dans le Japon d’après-guerre. Kodama, mort dans son lit en 1984 aura été à la fois l’un des fondateurs du grand parti de droite PLD, milliardaire, yakuza et agent de la CIA.

Mais revenons à nos atomes crochus et comparons pour le fun les criminels qui tiennent l’industrie nucléaire japonaise et les yakuzas qui font passer le balai aux SDF.

14 réflexions sur « Les yakuzas au secours de l’atome »

  1. Contre TOUS les grands projets inutiles,

    destructeurs, sans avenir et leur monde !

    Du 25 au 31 mars 2013 sur la ZAD

    Des collectifs contre les Gaz et Pétrole de Schiste associés à des Comités

    de soutien contre l’aéroport de Notre Dame des Landes organisent :

    UNE SEMAINE POUR CONVERGER ET ÉTENDRE LA LUTTE

    Chaque soir du 25 au 31 mars, venez nous rejoindre à la Chateigne* sur la

    ZAD de NDDL pour vous informer, échanger et débattre.

    Nous traiterons évidemment des gaz et pétrole de schiste, mais aussi d’extractivisme

    et de mines (des projets dans votre région), de convergence des luttes (outils et

    exemples) et de la mainmise des grandes entreprises transnationales ICI ET AILLEURS !

    *Attention, le 26 mars, pas d’animation sur la ZAD, mais une projection débat à Nantes.

    Les soirées débutent à 19h30, mais vous pouvez bien évidemment nous rejoindre bien

    avant pour échanger paroles et nourriture, ou prendre le train en cours de route en

    arrivant plus tard !

    -> Lundi 25.03.2013 – 19h30

    À la Chat Teigne (ZAD de Notre Dame des Landes) :

    Soirée Projection – Débat

    GAZ de SCHISTE au début il y avait…

    Projection du film documentaire choc

    américain qui a tout déclenché !

    Projection d’un film-documentaire

    (Durée 1h42 en anglais sous titrée

    en français).

    -> Mardi 26.03.2012 – 20h00

    Au cinéma « Le Katorza** » à Nantes :

    Soirée Projection – Débat

    Projection en Avant Première de :

    « Promised Land »* de, et avec Matt Damon

    Débat avec la salle

    *Ce film de Gus Van Sant et Matt Damon décrit le combat

    d’une communauté rurale face au chamboulement de

    l’exploitation des gaz de schiste aux États Unis. Ils ont le choix

    entre leur mode de vie actuel et l’argent facile que leur font

    miroiter les entreprises, que choisirons t’ils ?

    **Le Katorza : 3 rue Corneille à Nantes, tarif 6,20€ (tarifs

    réduits habituels).

    -> Mercredi 27.03.2013 à 19h30

    À la Chat Teigne (ZAD de Notre Dame des Landes) :

    Soirée présentation – Débat – Projection

    Le gaz de schiste c’est quoi ?

    Il est où le problème ?

    Présentation des Gaz de schiste, des problèmes

    environnementaux, sanitaires, sociaux, financiers, liés à son

    exploitation – échange avec la salle.

    Projection du documentaire :

    « La malédiction des Gaz de schiste »

    (Durée 1h22 en français).

    -> Jeudi 28.03.2013 à 19h30

    À la Chat Teigne (ZAD de Notre Dame des Landes) :

    Soirée présentation – Débat – Projection

    VINCI est partout, VINCI dégage !

    1. La situation en France sur les pétroles et

    gaz de schiste – C’est VINCI aussi !

    En France, les forages sont menés par une filiale de VINCI…

    2. Énergie, hydrocarbures, aéroports et GPII…

    Qui dirige vraiment, qui nous gouverne ?

    Projection du documentaire :

    « The Brussels business : Qui contrôle vraiment l’Union Européenne ? »

    (Durée 58mn – Français)

    -> Vendredi 29.03.2013 à 19h30

    À la Chat Teigne (ZAD de Notre Dame des Landes) :

    Soirée présentation – Projection – Débat

    Extractivisme ici et ailleurs

    Une ZAD, des ZAD

    Oui à la vie, non aux zones de sacrifices :

    1. Même en Bretagne vous êtes concernés !

    Présentation des projets de mines dans les régions Pays de Loire et Bretagne

    (4 demandes de permis soutenues par A.Montebourg) et du permis de recherche

    d’hydrocarbures en Mer d’Iroise.

  2. 85 éléphants massacrés au tchad! en 2 jours: mères enceintes..tigres empoisonnés aux pesticides en Thailande!
    elle est belle l’humanité le droit a élaboré la notion de crime contre elle…mais rien sur crime contre les espèces! p..d’humanité!

  3. Bonsoir,

    Merci Fabrice.

    C’est dégueulasse! Tout n’est que marchandise!

    J’en ai marreuuu!
    Finalement je ne vous remercie pas.
    Raz le bol de me prendre des claques tout les jours.
    Je n’en sais qu’un dixième par rapport a votre savoir, vous ne devez pas être beau a voir.
    Visage couleur arc en ciel …

    Bien a vous,

  4. pour le billet précédent,il y a tout de même des personnes lucides comme terasson et génot,et une abime entre eux et l’oligarchie,et ses hiérarchies de destructions.le probleme viens de l’argent,qui vient du délire du pouvoir(même s’ils ne voient rien),une révolution philosophique doit avoir lieu.

  5. Jappon, nucléaire et yakusas : en somme, c’est « d’une maffia à l’autre » quoi ?
    Et même mieux : c’est la MEME maffia…

  6. Bonjour,

    Pour compléter cet article par quelques éléments sur la situation en France, un tableau chronologique peu rassurant de l’AGE DES REACTEURS nucléaires encore en service dans l’Hexagone est désormais disponible dans la rubrique « Documents et liens » du site des FAIREA (http://www.fairea.fr).

    En espérant qu’il pourra être utile pour clarifier les idées…

  7. Le grand mystère des réservoirs d’eau radioactive percés de Fukushima

    TOKYO – Comment et pour quelle raison un des réservoirs d’eau hautement radioactive de la centrale de Fukushima a-t-il laissé filer 300 tonnes d’eau ? Nul n’en sait rien, pas même la compagnie gérante du complexe atomique qui rechigne à s’étendre sur ces cuves déployées par centaines.

    Lundi 19 août, Tepco annonçait avoir découvert des flaques d’eau radioactive près de réservoirs, avant de préciser plus tard que la quantité échappée était de 300 tonnes.

    Le réservoir défectueux a été identifié, mais pas encore le point précis de la fuite qui durait assurément depuis des semaines, sans avoir été détectée.

    Des vérifications visuelles ont lieu deux fois par jour, les techniciens regardent si de l’eau s’est artificiellement accumulée au sol et si tel est le cas ils en mesurent la radioactivité, a pourtant assuré Tepco. Reconnaissant que le processus a cette fois failli, la compagnie a dit étudier d’autres modalités de contrôle.

    Plus d’un millier de réservoirs de divers types émanant de plusieurs fabricants sont assemblés dans des zones déblayées autour de la centrale, dont 350 du même modèle que celui qui a fui. Ces derniers sont fournis par la petite entreprise Tokyo Kizai Kogyo, a fini par confirmer à l’AFP un porte-parole de Tepco. Interrogée auparavant par l’agence, Tokyo Kizai Kogyo, dont le nom n’est officiellement pas cité, avait pour sa part refusé de répondre, invoquant des clauses de confidentialité avec Tepco et les sociétés parties-prenantes.

    La commande a été passée par une coentreprise créée par Tepco et la firme de travaux publics Taisei Construction, s’est contenté d’expliquer un vice-PDG de Tepco, Zengo Aizawa, ajoutant que chaque réservoir coûte plusieurs dizaines de millions de yens (d’une centaine à plusieurs centaines de milliers d’euros).

    Ces énormes pièces, de 11 mètres de haut sur 12 mètres de large, peuvent chacune stocker 1.000 tonnes d’eau (le tiers d’une piscine olympique). Constitués de plaques d’acier, ces réservoirs sont assemblés et scellés sur place, avec des joints de caoutchouc expansé.

    Ces modèles ont été choisis parce qu’ils pouvaient être livrés et montés rapidement, a avoué Tepco.

    La cause de la fuite existe probablement sur d’autres réservoirs, a reconnu M. Aizawa lors d’un entretien télévisé, ce avant que Tepco n’annonce samedi que le réservoir qui a fui avait d’abord été installé à un autre emplacement.

    Il avait été déplacé à cause d’un affaissement de dalle de béton, à l’instar de deux autres qui, du coup, devaient rapidement être vidés par précaution, sans pour autant que soit établi avec certitude le lien de cause à effet entre le démontage/remontage du réservoir et la fuite.

    Dans le passé, quatre autres fuites avaient déjà été constatées. Elles étaient de moindre ampleur mais vraisemblablement liées à des soucis aux jointures.

    Interrogé sur la résistance des matériaux aux éléments radioactifs contenus dans l’eau, un porte-parole de Tepco s’est borné à indiquer: ces réservoirs ne sont pas seulement prévus pour stocker de l’eau propre, mais aussi de l’eau souillée.

    L’eau contaminée est en partie issue d’eau de mer et contient donc du sel. Or l’acier utilisé rouille facilement et il existe des risques de trous de corrosion, a pour sa part prévenu le professeur Akio Hata, spécialiste des questions de pollution.

    L’autorité de régulation nucléaire a qualifié de grave l’incident et l’a situé au niveau 3 sur l’échelle internationale des événements nucléaires (Ines).

    Cette décision a été prise avant que Tepco n’annonce que l’eau en question avait peut-être emprunté un petit ruisseau qui court jusqu’à l’océan Pacifique voisin, déjà pollué par les énormes quantités d’eau radioactive venant des sous-sol de la centrale et les retombées de pluie contaminée les jours suivant l’accident survenu en mars 2011 après un tsunami et séisme au large du nord-est.

    Mais ce pourrait être pire encore: si un autre raz-de-marée ou tremblement de terre se produisait, ces réservoirs fuiraient de façon massive, a déjà averti à maintes reprises le professeur Hiroshi Miyano, expert de la conception de centrales.

  8. EDF annonce plus de 50 milliards d’euros pour « le grand carénage » des ses 58 réacteurs poussifs dont il est impossible de changer la cuve, organe essentiel. En effet, au fil du temps, celle-ci encaisse un maximum de radioactivité de pression et variations de température. Après plusieurs décennies, le métal (20 cm d’épaisseur tout de même) perd en élasticité et devient cassant. Imaginons le pire du pire des scénari : une cuve se fend. Le circuit primaire (150 bars, 300°) vide la cuve, impossible de refroidir à cause de la fuite, surpression dans le bâtiment puis destruction de l’enceinte de confinement et fusion du combustible qui ne peut être refroidit.
    Celui-ci perce le radier sous la cuve, atteint l’eau (en bord de mer elle n’est pas loin)et entraine une explosion à son contact.
    Je déconne.

    Pas si sûr…

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