Sur Bové encore

Je n’ajouterai pas grand chose à ce que j’ai déjà écrit. Je maintiens, bien entendu, et m’étonne tout de même un peu du ton de certaines réactions. Il ne faudrait donc pas s’en prendre à Bové ? Autrement dit, la planète et l’humanité seraient en danger, mais il ne faudrait pas toucher à l’icône anti-OGM ? Je préfère sincèrement sourire.

Ceux qui ont réellement lu ce que j’ai écrit se souviendront que je conserve mon estime à la personne de José Bové. Mais que je conteste ses choix, qui sont d’ailleurs mis en question par une partie croissante de ses soutiens d’antan. C’est la vie. Je ne suis pas – et ne souhaite pas davantage que vous le soyez – une boîte automatique. Je ne soutiens que ce que je crois juste. Et cette grève de la faim me paraît desservir une cause qui dépasse tout de même les dimensions de chacun d’entre nous, Bové compris.

Puis, je dois dire que je suis estomaqué par la mise en scène du soi-disant recul du gouvernement. Mon Dieu, quelle blague ! C’est une nouvelle fois le redoutable piège du Grenelle qui se referme. Les interlocuteurs, de part et d’autre, ont intérêt à légitimer l’adversaire. Bové, en l’occurrence, se doit de considérer que la bataille est décisive, et que Sarkozy ne recule que contraint et forcé (Acte 1). Borloo and co ont besoin d’un Bové – ou de tout autre – offensif, qui puisse donner chair et crédibilité à la pantomime autour des engagements « écologiques » de l’équipe au pouvoir (Acte 2). Et tous ont intérêt à montrer que le combat a été dur, mais qu’il produit des résultats (Acte 3 et rideau).

Eh bien, la pièce ne me plaît pas. Si même la clause de sauvegarde était appliquée, interdisant pour un temps la culture du fameux maïs Monsanto 810, il s’agirait d’une victoire en trompe-l’oeil. Car l’affaire – qui l’ignore encore ? – est européenne et mondiale. Et ce maïs restera légal, en toute hypothèse, sur le territoire français. Il est pénible de voir tant de valeureux confondre (éventuel) succès tactique et (certaine) défaite stratégique.

La polarisation sur cette affaire mineure, voulue tant par Bové que par l’État, permet de retarder les véritables débats de fond. Qui demeurent, et que j’ai déjà évoqués dans mes deux textes précédents.

15 réflexions sur « Sur Bové encore »

  1. Une comédie médiatique de plus est jouée en ce moment par le gouvernement , oui. Au mieux, on aurait une victoire en trompe l’oeil, disons, une victoire à placer sous surveillance, et personne n’est dupe (comme tu l’avais déjà précisé François Veillerette dans un autre commentaire). José Bové et Sarkosy à placer au même niveau du burlesque, non . L’un est sincère , l’autre… Il y a en effetdes valeureux, qui se battent et pas qu’en France. Jusqu’à maintenant, ces valeureux ont tout de même permis le freinage des OGM chez nous, et un espoir aussi à d’autres aux Etats-Unis, par exemple, en prenant des risques .je souhaite une victoire, même en sursis, et qu’on ne lâche pas prise, que ce sursis soit au moins un début . La majorité ne se sent pas concernée par les problèmes environnementaux . le credo, c’est, nous verrons quand ce sera devenu nécessaire, c’est à dire, quand mon confort en sera diminué . les ogm, c’est en effet la volaille en batterie, le coton, les agrocarburants, les épandages plus massifs encore de pesticides, ce n’est pas un débat mineur . Que préconnises-tu toi-même et quelles sont d’après toi les actions à mener ?

  2. Des milliers de moutons empoisonnés par du coton OGM

    Des récentes études sur la culture du coton génétiquement modifié ont soulevé de nouvelles inquiétudes quant à son innocuité tant dans l’alimentation que dans l’habillement.
    En Inde (état d’Andhra Pradesh, district de Warangal), un rapport préliminaire publié à la fin du mois d’avril a montré que des milliers de moutons sont morts après avoir brouté des terres sur lesquelles du coton OGM avait été cultivé. Les moutons et les chèvres ont commencé à mourir après sept jours de pâture continue de feuilles tendres et de cosses de coton Bt (Bacillus thuringiensis) qui restaient dans les champs après la cueillette.

    Une étude a été menée par une équipe de recherche composée de cinq membres (deux d’Anthra, une O.N.G. travaillant aux questions de bétail — un scientifique vétérinaire, Dr. Ramesh et un chercheur de champ, M. Apparao—, M. Jamalaiah, secrétaire de l’Union des bergers d’Andhra Pradesh, et deux scientifiques du Centre pour l’Agriculture Soutenable travaillant sur les questions du coton Bt, M.S. Ramprasad, et M.G. Rajashekar).

    Les principaux symptômes rapportés par les bergers sont :

    les moutons deviennent tristes/déprimés après 2-3 jours
    toux avec décharge nasale
    lésions rougeâtres dans la bouche
    gonflement
    diarrhée noirâtre
    parfois urines rougeâtres
    la mort dans les 5-7 jours de pâturage sur les champs de coton de Bt
    Dans le village Ippagudem, mandal de Ghanapur, sur 2601 moutons qui ont appartenu aux 42 bergers, 651 moutons sont morts, qui implique un taux de mortalité brut de 25%.

    La même proportion est observée dans le village Valeru, mandal de Dharmasagaram ; un peu moindre (22%) dans le village Unkkucherla, mandal de Dharmasagaram … etc.

    Contacté par Inf’OGM, un des auteurs de l’étude a expliqué que la dernière utilisation de pesticides sur ces champs datait d’un mois avant la récolte et que les agriculteurs n’avaient pas pour habitude d’utiliser des insecticides contenant du Bt les années précédentes. Or, la seule nouveauté était l’introduction du coton Bt.

    En décembre 2005, une étude avait montré que les cueilleurs de coton OGM présentaient de graves réactions dermatologiques avec des démengeaisons et des cloques laissant une décoloration de la peau qui perdurait après cinq mois. L’Association médicale britannique avait déjà signalé que les OGM pouvaient présenter certains risques parmi lesquels la résistance aux traitements contre les maladies sexuellement transmissibles dûe à l’utilisation de protections périodiques en coton OGM.

    Les OGM peuvent aussi faire mourir de désespoir… : les cultures de coton OGM ont été suspendues en Inde à la suite de nombreux suicides de personnes endettées pour payer ce coton très coûteux. Cette réalité à poussé le Comité indien d’approbation de génie génétique (GEAC) à admettre, après trois ans de pratique, que la culture des cotons Mech-184 Bt, Mech-162 Bt et Mech-12 Bt de Mahyco-Monsanto était un échec.

    Sources :
    GE Free NZ, 9 mai 2006
    GMWatch, avril 2006

    voir aussi video http://www.dailymotion.com/video/xqq3_le-coton-ogm-tue

  3. Moi non plus je n’aime pas tellement cette pièce politico-médiatique mais, franchement, avec Sarkozy aux manettes et, comme le dit avec raison Bénédicte, une majorité de Français plutôt inerte (obsédée, du moins veut-on nous le faire croire, par son pouvoir de consommation), peut-il y avoir autre chose que des succès tactiques et, de surcroît, fragiles ?

  4. Je ne supporte pas l’idée qu’on nous accule à nous empoisonner à notre insu pour nous vendre des soins, remèdes et autre artillerie lourde très cher, afin que ce monde industriel continue sa folie. Non, ça m’est insoutenable. Tout comme on nous oblige à respecter des normes ceci ou cela, à user de solutions toutes faites pour tous les moments de la vie (toutes fabriquées avec vous savez quelles intentions). Le piège s’amplifie d’heure en heure sur la planète, personne n’a aucun choix véritable à opposer à cette tuerie effrénée, elle revient toujours par la fenêtre. Après avoir fait ingéré pendant des décennies de bons et beaux fruits et légumes empoisonnés, maintenant on nous vante les avancées de la recherche contre le cancer… L’homme est con, il casse tout et se croit malin à inventer des solutions pour des problèmes qui n’existaient pas. Alors, les OGM exit, et surtout, comme une image chasse l’autre, que ce ne soit pas un pretexte à oublier tout le reste. Hélas, c’est cumulatif tout ça bien sûr. L’homme est vraiment con : il pense qu’en faisant diversion, il efface l’ardoise.

  5. moi aussi j’en ai plus qu’assez des hautes autorités sur les ogm, des reports, retraits, de lois, on dirait un vinyl rayé des sketches de Coluche ! Le mouvement de masse n’arrivera que lorsque tout ira très très très très mal, entendez, quand les gens n’auront plus assez de sous pour s’acheter une nintendo Ds ou une paire de nike, entre autre . Et plus le temps passe , plus je pense qu’il n’y aura rien à attendre de ce mouvement de masse , car il sera le fruit de la bêtise bien plus que de la réflexion ou d’un quelconque esprit de générosité . Déjà, Noël, j’ai eu du mal, mais là, je l’avoue, c’est saturation . les distentions, les concertations, les remises en question , les réunions , les émotions, et bientôt les élections pendant que l’on meurt en masse…que l’on n’est pas les mêmes croyances, les mêmes idées, les mêmes façons d’agir sur ces questions, est-ce bien là l’essentiel ? c’est simple, nous ne voulons pas davantage de morts, nous ne voulons pas d’une terre appauvrie à son maximum pour l’enrichissement de quelques uns, nous voulons un monde beau, riche , équitable pour tous, la-dessus, je pense que personne ne me contredira . et bien ça ne se fera pas sans actions, sans concret !

  6. La solution est d’utiliser les armes de l’adversaire.
    Plans com, campagne de pub, lobbying et propagande comme si l’on vendait un produit quelconque pour promouvoir l’écologie et le social.
    Appropriation par des associations de terres naturelles et agricoles pour y sanctuariser la nature sauvage, pour y pratiquer l’agriculture biologique et paysanne, y interdire la chasse.
    Tout est possible
    Qu’en pensez vous

  7. Un exemple de résistance admirable et douloureux au Chili. http://risal.collectifs.net/spip.php?article2380
    (un peu long mais ça fait écho à la suggestion de Bébert)
    Instructif sur les vraies tendances destructrices de la démocratie. Il y a des peuples qui ont la résistance dans le sang, et qui passent à l’acte, rendant tous les beaux discours vains. Peut-être que nous, visages pâles, avons été trop perfusés au culte du progrés, à l’industrialisation magique et de la dévotion consumérisme… pour que notre capacité à réagir soit à la hauteur de l’enjeu actuel… Oui, j’admire ces peuples vivants qui inventent des réponses magistrales avec les moyens du bord, les moyens de la vraie vie.

  8. @ Bébert, bonjour . Ce que tu proposes existe déjà (voir campagnes WWF, greeepeace, alliance pour la planète, stopgavage et même les fausses pubs des collectifs anti-pub !) . L’appropriation est plus difficile, mais elle se fait par petits bouts, en fonction des moyens, c’est pourquoi on doit participer de sa personne et/ou financièrement, déjà pour éviter le phénomène d’expropriations massif des paysans auquel on assiste .

  9. Etonnante idée en tout cas de taper sur Bové le médiatique(?)gréviste de la faim qui se bat, faut-il le rappeler, avec les agriculteurs de la Confédération Paysanne contre les puissants marchands d’OGM et de pesticides, en mettant à chaque fois sa liberté (voire sa santé) en danger. A propos, en parlant de médias et de barouf, qu’est donc devenu le fameux hélicologiste Nicolas Hulot, le si peu médiatique inspirateur si inspiré du « Grenelle »? le conseiller des princes, le preux chevalier de Télé-Natureland qu’on a vu si souvent servir la soupe à kosciusko Morizet ( NKM pour les potes) et à l’avocat d’affaires Jean Louis Borloo-et son service ce com’? Celui qui, tout en aidant la droite à laminer le parti des Verts, a contribué à sa manière à faire élire Sarkozy? Cet humble et désormais fort discret serviteur d’un pouvoir politico-affairiste liés aux lobbies de tout poil semble ici échapper aux foudres, tandis que Bové le perfide se serait commis avec le diable? Curieux. C’est Nicolas qui boit et c’est José qui trinque, en somme.

  10. Effectivement assez désespérant que de lire vos commentaires sur Bové. Comment évoquer et prêcher la révolution verte, le changement de cap, la nouvelle approche et ne pas réussir à identifier les causes communes et se rendre compte que c’est par une mutalisation des moyens, des acteurs et des actions que quelque chose bougera ? Je me permet de vous signaler, cher Monsieur NICOLINO, que les semis que nous avons réussi a bloquer en Lorraine en 2007 l’ont été par des actions de terrain, des rencontres, des débats, des tensions, des courriers, des epluchages de dossiers, etc… et certainement pas par la « reflexion profonde » qui vous semble n’être que la seule action importante et fondamentale. Me concernant, je juge effectivement important d’avoir une reflexion profonde et de bien identifier les mécanismes financiers et de lobbying qui déroulent le tapis rouge aux OGM, mais je trouve fondamentale que des actions de terrains, médiatiques, de débats, et de pressions soient aussi mises en oeuvre, en ce sens je suis au regret de vous annoncer que si les OGM et leurs risques sont devenus si médiatiques (et c’est tant mieux), c’est bien par les actions dures et médiatiques de Bové…. et certainement pas parce qu’on parle de reflexion profonde sur un blog et qu’on débat entre quelques « initiés »… Il y a certes des dérives, des interprétations hasardeuses et des appropriations politico-stratégiques dans le combat et les actions de Bové, mais de la à l’écorcher de la façon dont vous le faites, j’en reste pantois. J’ai bien peur qu’avant la révolution verte, ce soit d’une révolution culturelle et humaine dont nous ayons besoin, une révolution ou pour une fois, le temps et l’énergie ne seront pas gaspiller en pinaillements et débats de bordure et de forme plutot que de fond, et ou l’on sera capable de bien identifier la cause commune et la finalité du combat et d’y aller tous ensemble, et concrétement….
    Moi j’arrive à trouver et voir la complémentarité entre les acteurs et les types d’actions, quand bien même je n’en partage pas l’intégralité du fond ou de la forme systèmatiquement, mais je me garde bien de le faire savoir aux militants ou structures que je rencontre sur le terrain, dans les manifs ou sur les blogs, parce que je trouve déplacer, de nos jours, de critiquer des gens qui osent s’engager, sur leurs temps et porter haut et fort leurs convictions. Compte tenu des enjeux actuels et du rapport de force, chaque force, chaque individu, chaque combat, dés le moment ou il rejoint ce bel objectif d’un système économique plus juste et d’une écologie réelle et concréte entre dans la cause commune, et c’est un trésor…. et je trouve regrettable que quand on veut changer le monde, on ne fasse pas à minima l’effort sur soi même de comprendre la complémentarité des mouvements et des personnes sur les combats qui présentent tous cette « cause commune ». Ce n’est résolument pas dans cet état d’exprit que nous avancerons. Je le crains.
    Bien cordialement,

  11. @ Mat, comprendre la complémentarité des mouvements n’implique pas adhérer à toutes les actions . J’avoue que le premier article de Fabrice Nicolino sur la grève de la faim de José Bové m’a fait l’effet d’une douche froide . J ‘ai défendu cette action d’ailleurs dans mes commentaires . Mais, l’annonce du gouvernement d’allouer 45 millions d’euros aux biotechnologies en est une autre bien plus grande . je ne critique pas l’action, mais peut-on raisonablement parler de victoire ? Vous avez pas mal d’infos sur les OGM sur terresacréé.org . Par ailleurs, c’est vrai, j’ai regrétté la politisation du mouvement de José Bové, qui m’a sembler diviser fortement donc reduire l’énergie commune, j’ai peur d’une mauvaise répétition de l’histoire des verts . Etre remis en question ne condamne pas . J’ai toujours une très grande estime pour José Bové et ce qu’il a fait et je réittère , bien que je sois archi-démocrate je suis prête à aller faucher dans les champs .

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *